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Penser l’autre au-delà du miroir : pour une éthique du pardon entre Individuation et Altérité

Le pardon est souvent perçu comme un chemin intérieur, une guérison de soi par soi. Mais je m’interroge :
Qu’en est-il de l’autre dans ce processus ?
Peut-on vraiment pardonner sans le reconnaître dans sa pleine altérité, au-delà du miroir qu’il nous tend ?
N’aurions-nous pas oublié quelque chose d’essentiel dans cette démonstration : le risque de rester en soi, pour soi, enfermés dans un repli égotique ?

Dans ce texte, je questionne une dérive des discours spirituels actuels – celle qui réduit l’autre à un simple reflet. Je plaide pour un pardon relationnel, éthique, incarné. Un pardon qui ne sauve pas seulement le soi, mais ouvre un espace de rencontre avec l’autre, dans sa complexité, sa faute, son mystère.

Pardon, altérité et individuation

Psychanalyse et Franc-maçonnerie

Il m’a été dit récemment qu’on n’éprouve plus le besoin de pardonner l’autre lorsqu’on s’est pardonné à soi-même. Dans cette perspective, le pardon se voit alors réduit à une affaire intérieure, intime où la dynamique relationnelle disparaît au profit d’un recentrage total sur le Moi. Le pardon devient une mécanique, un geste fermé sur soi, coupé du monde.

N’est-ce pas là une dérive vers une forme de narcissisme spirituel ?

Cette perspective, aussi séduisante et pragmatique puisse-t-elle paraître, pose problème : elle tend à réduire l’autre à un simple miroir de Soi, niant ainsi son altérité propre.

L’essence de l’autre est dissoute, diluée dans une vision autocentrée où il n’est plus qu’un reflet de notre propre essence. Ce raccourci évacue une vérité essentielle : l’autre n’est pas un simple reflet de nous-même, mais une présence irréductible, un sujet à part entière.

On franchit ici une ligne de crête fragile, entre individuation et reconnaissance de l’altérité, où le Moi devient toute-puissance et la quête du Soi semble s’être arrêtée aux portes de l’altérité.

Où est passé l’autre, en tant qu’autre ?

Individuation et altérité : une ligne de crête fragile

Carl Gustave Jung

En confondant individuation (ce processus d’autonomisation et d’affirmation de soi) et développement spirituel par le miroir de l’autre, nous glissons subtilement vers un solipsisme masqué.  L’erreur de perspective survient lorsqu’on ne voit l’autre que comme une surface projective – un outil, un tremplin, un écho – au lieu de le rencontrer dans sa radicale différence.

Dès lors, le monde relationnel devient alors pauvre : privé de sa richesse transactionnelle, de ses frottements, de ses silences, de ses confrontations fécondes.

Peut-on vraiment pardonner sans l’autre, sans cette reconnaissance de ce qui en lui nous échappe ?

Pardonner ne peut se réduire à une opération intérieure. Il engage le dehors, le dialogue, la reconnaissance.

Aussi, ne pourrions-nous pas penser que cette démonstration est une forme de repli sur soi ?

Un repli qui confond la découverte de son individualité dans le reflet de l’autre et une individuation véritable, qui, elle, reconnaît le monde comme lieu d’échange, de réciprocité, de transcendance possible ?

Pardonner à soi-même : une nécessité, mais non une finalité

Se pardonner, oui.

Mais se pardonner de manière inconditionnelle, sans ancrage éthique, n’est-ce pas courir le risque de justifier tout acte, jusqu’aux plus graves ?

Un tel pardon pourrait devenir un outil de déresponsabilisation, de dédouanement de Soi et par extension  de la société.

Se pardonner, certes, mais jusqu’à quel point ?
Car la quête de soi ne saurait faire l’économie d’un cadre moral et éthique.

De plus, se pardonner à soi de manière inconditionnelle, n’est-ce pas aussi la porte ouverte à la fin de toute exigence envers soi-même ? La fin d’une quête de perfectionnement de notre être, quête qui, par essence, est infinie ?

Et ce pardon n’est-il pas parfois confondu avec l’acceptation pure et simple, un renoncement à toute forme de dépassement de soi ?

Où se situe la juste limite entre soi et l’autre ?

L’autre : miroir ou mystère ?

invitaion à entrer, miroir, passage, chemins

La proposition relayée que nous ne voyons chez l’autre que ce qui fait écho en nous est séduisante, mais elle reste enfermante lorsqu’elle est poussée à l’extrême.  L’autre n’est pas seulement le révélateur de nos ombres et de nos lumières ; il est un monde en soi. À trop vouloir faire de l’autre un miroir, on oublie sa radicale altérité. On nie sa singularité, on le ramène à soi.

L’autre n’est-il pas bien plus qu’un miroir ? N’est-il pas un mystère, une énigme, un monde entier qui nous échappe — même dans la proximité la plus grande ?

Un pardon relationnel : condition de l’éthique et de la transformation

Or, le véritable pardon surgit peut-être lorsque nous accueillons l’autre non pour ce qu’il nous renvoie, mais pour ce qu’il est, dans sa différence irréductible. C’est à ce point précis que s’ancre une individuation véritable – non pas dans le repli égotique, mais dans la rencontre. Non pas dans la fusion, mais dans la reconnaissance de la séparation.

Pardonner l’autre, ce n’est pas se sauver soi-même.
C’est ouvrir un espace.
C’est choisir, en conscience, de ne pas enfermer l’autre dans l’acte qu’il a commis.
C’est peut-être cela, le pardon : un acte de reconnaissance radicale de l’humanité de l’autre, au-delà de la faute.

Car le pardon, alors, devient une reconnaissance pleine : celle d’un autre qui a existé en dehors de nous, qui nous a peut-être blessés, et que nous choisissons, en toute conscience, de ne pas enfermer dans cette blessure.

Alors peut-on vraiment pardonner l’autre sans tomber dans une vision autocentrée du pardon ?

Oui – à condition de sortir du paradigme du miroir pour entrer dans celui de la rencontre éthique.Pardonner, ce n’est pas fermer une blessure pour retrouver la paix intérieure.

C’est oser rester en présence de cette blessure, sans effacer celui qui l’a causée.

Pardonner ne veut pas dire se sauver soi-même. Cela peut aussi être un acte de reconnaissance radicale de l’autre, dans sa vérité, sa complexité, ses fautes — et peut-être sa propre quête de pardon.

Si pardonner l’autre ne peut être confondu avec se pardonner à soi, nous sommes alors devant une exigence nouvelle : celle d’un vrai pardon. Un processus lent, conscient, qui exige du temps, du silence, de l’écoute. Et une capacité à accueillir véritablement l’autre, dans toute son humanité – blessante et blessée.

C’est ce pardon qui convoque l’Âme. Non celui de Soi, qui ne fait que l’effleurer.

Elodie Herbert

Le Dessin de Jissey : « Le prix des capitation est-il trop élevé ? »

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Ah, mes chers Frères et Sœurs, si Jacques Carletto, alias Jissey, maître es-blagues et roi de l’ironie pince-sans-rire, posait son regard malicieux sur les capitations maçonniques, il nous sortirait un truc du genre : « Alors, vous avez payé votre cotisation ? Parce que là, on dirait que le Grand Architecte a sous-traité la trésorerie à un percepteur romain ! Entre le maillet et l’équerre, on devrait ajouter une calculette, histoire de jongler avec les zéros sur la facture ! »

Franchement, ces cotisations, c’est un peu comme une planche mal taillée : on s’attend à polir notre pierre brute, et on se retrouve à polir le compte en banque de l’obédience ! Jissey nous dirait : « À ce prix-là, je m’attends à ce que le Vénérable Maître me serve du caviar à la chaîne d’union, ou au moins un tablier en or massif ! » Entre les frais d’entrée, les cotisations annuelles et les extras pour les dîners rituels, on finit par se demander si la lumière qu’on cherche, c’est pas celle du néon de l’huissier !

Alors, mes amis, avant de signer un nouveau chèque, demandez-vous : est-ce que Hiram aurait payé ça rubis sur l’ongle ? Jissey, lui, conclurait avec un clin d’œil : « Moi, je propose une loge low-cost : cotisation en nature, genre un bon mot et une poignée de main bien placée ! » Allez, passons l’escarcelle… mais sans se ruiner, hein !

Le Suprême Conseil de France remet son Prix de Thèse : « De la lumière des archives à celle du Temple »

Il est des moments où la rigueur de la recherche universitaire rejoint la ferveur silencieuse des ateliers. Des instants rares, presque solsticiaux, où les savoirs profanes dialoguent avec les mystères du Temple. Le 11 juin 2025, en l’Hôtel de la Grande Loge de France (GLDF), au 8 rue Louis Puteaux, à Paris dans le 17e arrondissement, le Suprême Conseil de France (SCDF) et plusieurs organisations écossaises amies ont remis leur Prix de Thèse annuel, célébrant la lumière née de la réflexion, de l’étude et de la fidélité aux valeurs du Rite Écossais Ancien et Accepté.

Un prix pour relier les mondes

Thierry Zaveroni Grand Maître de la Grande Loge de France

Depuis 2017, cette cérémonie réunit les puissances maçonniques les plus engagées dans la transmission de la tradition écossaise : Grande Loge de France, Suprême Conseil Féminin de France, Institut Maçonnique de France, Suprême Conseil des Cultures et de la Spiritualité, Suprême Conseil de Belgique, Suprême Conseil du Bénin, mais aussi le Grand Collège des Rites du Grand Orient de France ou encore le Suprême Conseil de la Fédération française du Droit Humain.

Le Prix de Thèse n’a rien d’une simple récompense académique. Il est une reconnaissance initiatique, une manière d’honorer celles et ceux qui, par leurs recherches, réveillent les symboles endormis, ravivent les formes anciennes de la pensée, et questionnent la transmission des valeurs humanistes et spirituelles.

Dans un monde désuni par la perte de sens, ce prix est un fil d’or tendu entre la connaissance et l’engagement, entre la mémoire des rituels et les défis contemporains de la pensée.

Le lauréat 2025 : une rose entre les siècles

Piero Latino (Crédit Baglis TV)

Le Prix de Thèse 2025 a été attribué à Piero Latino, pour son étude magistrale en littérature comparée intitulée « La Rose initiatique. Des Fidèles d’Amour à la littérature européenne des XIXe et XXe siècles »(Sorbonne Université – University of Westminster, 2023).

La thèse de Piero Latino explore les liens subtils entre littérature européenne et courants ésotériques, à travers une étude approfondie du symbole de la rose, figure centrale de l’amour mystique et de la transformation initiatique. Son travail, d’une grande richesse interdisciplinaire, retrace la survivance d’un héritage poétique initiatique depuis le Moyen Âge jusqu’aux modernités littéraires.

Marcel Laurent Souverain Grand Commandeur de la GLCS

S’inspirant de Il Mistero dell’Amor Platonico nel Medioevo de Gabriele Rossetti, père du poète préraphaélite Dante Gabriele Rossetti, l’auteur révèle comment les Fidèles d’Amour – ces poètes médiévaux dont Dante fut le phare – véhiculaient une doctrine secrète de l’amour comme voie spirituelle. Cette tradition, portée par les troubadours, trouvères, scaldes et poètes mystiques, se prolonge jusqu’à Nerval, Balzac, Péladan, Yeats ou Ezra Pound.

La rose devient ainsi clef de voûte d’un imaginaire initiatique, à la croisée du mysticisme et des Ordres ésotériques. Ce symbole fragile et souverain ouvre un horizon dans lequel l’amour, loin d’être un simple thème littéraire, devient chemin d’éveil et miroir de l’âme.

Autour de ce lauréat central, neuf accessits ont été remis à des chercheurs dont les thèses, toutes remarquables, interrogent la spiritualité, les savoirs anciens, le rapport à l’écoute sacrée, à l’image, à l’adoubement, ou encore à la théologie d’Origène et à l’iconographie de la statuaire religieuse.

Un panorama érudit, tissé de langues mortes et de signes vivants, où l’architecture écologique dialogue avec la voie soufie iranienne, où les statuts médiévaux croisent le contemptus mundi, et où chaque travail semble appeler à une seule chose : la réconciliation de l’âme et de la science.

Les Accessits 2025 : un héritage vivant

Autour de Piero Latino, lauréat du Prix de Thèse 2025, neuf accessits ont été remis à des doctorants dont les travaux dessinent une véritable cartographie savante des voies initiatiques, spirituelles, esthétiques et sociales du monde occidental… et au-delà. Chaque thèse récompensée explore, avec précision et profondeur, une facette de la transmission humaine, entre verticalité du sens et ancrage dans la matière.

Voici les lauréats et leurs œuvres :

Marie Groult (Université de Rouen-Normandie, 2022)
« Et vous avons esleu d’estre au nombre de ladite Compagnie ». Les ordres de chevalerie au sein des cours françaises au XIVe siècle et l’édition de leurs statuts
➤ Une œuvre de transmission et de mémoire, distinguée par la Grande Loge de France, qui met en lumière l’éthique et les fondements structurels des ordres chevaleresques médiévaux, en résonance avec les loges d’aujourd’hui.

Marie Achet-Haushalter (Sorbonne Université, 2024)
DULCEDO MEA SANCTA. Penser, expérimenter, communiquer la douceur dans le christianisme antique
➤ Une étude sensible et philosophique de la douceur comme modalité spirituelle, entre langage, expérience intérieure et geste pastoral dans l’Antiquité chrétienne.

Marta Battisti (Université Grenoble-Alpes, 2022)
Peindre l’écoute. Figures et significations de l’audition sacrée en Italie du XIVe au XVIIe siècle
➤ Une enquête passionnante sur l’iconographie de l’audition dans l’art italien, à la croisée de la théologie, de l’histoire des sensibilités et de la mystique sonore.

Vincent Cousquer (Université de Strasbourg, 2023)
Philippe Grass (1801–1876), statuaire spiritualiste du XIXe siècle. Sa vie, son œuvre, ses restaurations des statues de la cathédrale de Strasbourg et la fusion des principes opposés
➤ Une plongée dans l’univers d’un artiste mystique, où l’art devient médiation entre formes et forces, matière et spiritualité.

Sylvie Le Pelletier-Beaufond (Université Paris Sciences et Lettres / EPHE, 2023)
La Fotovvat, la Voie des « compagnons-chevaliers ». Mystique et solidarité dans le monde iranien. Avec la traduction et l’annotation de quarante-trois « Traités de Javanmardi » (Fotovvat Name) et autres textes
➤ Une œuvre magistrale d’anthropologie spirituelle et de traduction savante, dévoilant les arcanes d’une chevalerie mystique persane méconnue.

Georges El Hage (Sorbonne Université et Facultés jésuites de Paris, 2022)
De la Terre promise au règne de Dieu. La pensée politique d’Origène
➤ Une relecture essentielle du théologien Origène à travers le prisme de la promesse et du pouvoir, entre eschatologie, théologie politique et utopie chrétienne.

Clémentine Laborderie (Université de Toulouse-2 et ENSAT, 2023)
Faire une place aux savoir-faire artisanaux dans l’enseignement de l’architecture pour aller vers des pratiques constructives plus écologiques, enjeux techniques et mésologiques
➤ Un plaidoyer éclairé pour une architecture éthique, enracinée dans la matière, la main et le territoire, en dialogue avec les traditions constructives vernaculaires.

Alain-Cyril Barioz (Sorbonne Université, 2024)
Un arbre en ce monde. Théodore de Bèze, moraliste du contemptus mundi
➤ Une étude sur le renoncement comme acte moral, à travers la figure du réformateur Théodore de Bèze, et sur la tension entre l’ancrage terrestre et l’appel spirituel.

Arnaud Montreuil (Université d’Ottawa et Paris-1 Panthéon-Sorbonne, 2022)
Écrire, décrire, saisir l’adoubement chevaleresque : une histoire de l’hippotogenèse dans l’Europe du Nord-Ouest, le Midi de la France et l’Italie centro-septentrionale (v.1175 – v.1300)
➤ Une exploration fine et symbolique des rites de passage chevaleresques, où le corps du chevalier, l’animal et l’écrit s’entrelacent dans un geste de reconnaissance sociale et initiatique.

L’Accessit 2025 de la Grande Loge de France : Marie Groult, passeuse d’idéal

Thierry Zaveroni Grand Maître de la Grande Loge de France et la lauréate

Dans ce paysage savant, la Grande Loge de France a choisi d’honorer Madame Marie Groult, docteure en histoire médiévale, pour sa thèse : « Et vous avons esleu d’estre au nombre de ladite Compagnie ». Les ordres de chevalerie au sein des cours françaises au XIVe siècle et l’édition de leurs statuts (Université de Rouen-Normandie, 2022).

Devant l’assemblée réunie à l’Hôtel de la Grande Loge de France, le Très Respectable Frère Thierry Zaveroni, Grand Maître, a prononcé un discours d’une haute tenue symbolique, saluant avec ferveur l’érudition et la portée initiatique de ce travail.

« En éditant les statuts de ces ordres de chevalerie, vous révélez ce que nous pourrions appeler leurs constitutions spirituelles. Vous faites œuvre de passeuse entre le silence des archives et la lumière du savoir. »

Par cette parole forte, le Grand Maître a souligné la fonction presque sacerdotale de la chercheuse : non seulement restituer une époque, mais en traduire l’esprit. Son étude éclaire les analogies profondes entre les compagnies chevaleresques du XIVe siècle et les ordres initiatiques contemporains. Serment, reconnaissance, règles, transmission – autant de thèmes qui résonnent puissamment en loge comme dans les manuscrits médiévaux.

Le discours du Grand Maître, d’une beauté sobre, a insisté sur la noblesse intérieure que portaient ces compagnies : un idéal d’engagement avant le privilège, de fidélité avant l’ostentation.

« À la Grande Loge de France, nous cultivons la mémoire des chevaleries de l’esprit. Non pas pour rêver à des gloires passées, mais pour mieux comprendre ce que veut dire s’engager dans un ordre de pensée et de dépassement de soi. »

Madame Groult, par cette thèse, offre ainsi un miroir tendu à la démarche maçonnique : comprendre l’histoire des ordres, c’est aussi mieux saisir ce qui, en nous, aspire encore à une éthique du service, à une souveraineté de l’âme.

Un prix entre ombre et lumière

Dans le silence des bibliothèques, les doctorants fouillent les textes oubliés. Mais lorsqu’un Prix comme celui-ci les met à l’honneur, ce n’est pas seulement la reconnaissance académique qui parle, c’est une forme de lumière partagée, une fidélité au travail intérieur, à la transformation de soi par la connaissance.

Le Prix de Thèse du Suprême Conseil de France rappelle que la recherche, quand elle est nourrie par une quête de sens, participe pleinement à l’œuvre maçonnique : réunir ce qui est épars, éclairer ce qui est voilé, honorer ce qui est noble.

Que ce prix dure longtemps. Et qu’il continue d’éveiller, en chacun, l’appel à la recherche du vrai, du juste, et du spirituellement fécond.

Les secrets de la substitution en Franc-maçonnerie : une odyssée initiatique au premier degré

Dans l’univers riche et symbolique de la Franc-maçonnerie, le travail initiatique du premier degré offre un terrain fertile pour explorer des concepts profonds et transformateurs. Parmi eux, la notion de substitution se révèle comme un fil conducteur subtil mais puissant, invitant chaque maçon à dépasser les apparences pour toucher l’essence cachée de son cheminement.

À travers une allégorie captivante et une réflexion introspective, ce texte nous guide dans une méditation sur l’évolution personnelle, la gestion des conflits intérieurs et le sens caché des symboles. Tout ce qui magnifie cette exploration, en approfondissant ses thèmes et en les illuminant d’une lumière nouvelle, pour inspirer les Frères et Sœurs dans leur quête de sagesse.

Une allégorie en trois tableaux : le parcours de la transformation

Commençons par une histoire évocatrice en trois actes, qui sert de miroir à l’évolution maçonnique. Un jeune homme, est victime d’une agression dans une ruelle sombre. Il choisit d’apprendre les arts martiaux pour se défendre afin que cela n’arrive plus jamais. Vingt ans plus tard il repasse inconsciemment dans la même rue… mais armé de ses nouvelles compétences, il triomphe alors de son agresseur en le terrassant et récupère son portefeuille volé 20 ans plus tôt. Après soixante années de vie, une journée ensoleillée, il repasse devant cette ruelle sans s’y aventurer, guidé par une intuition paisible qui le ramène chez lui en harmonie et sans conflit. Cette trilogie illustre avec finesse les étapes du travail maçonnique.

Le premier tableau reflète l’état initial du profane, où la vie semble injuste face aux coups du destin. Le deuxième montre une évolution apparente, où la vengeance et la confrontation offrent un sentiment de supériorité, mais reste ancrée dans le cycle de la violence. Enfin, le troisième tableau incarne la véritable sagesse : une paix intérieure qui transcende le besoin de conflit. Comme le souligne une pensée amérindienne

« la paix n’est pas l’absence de conflit. Il s’agit plutôt de notre capacité à faire face à ce conflit avec harmonie et justesse ».

Cette idée remet en question l’illusion d’une perfection lumineuse, souvent idéalisée en maçonnerie, pour valoriser une harmonie ancrée dans le sens donné aux expériences vécues.

Les liens fraternels : un miroir de l’âme

Fraternité

Dès l’entrée en loge, les interactions avec les Frères et Sœurs deviennent un terrain d’apprentissage. Ces rencontres, parfois harmonieuses, parfois marquées par des frictions, reflètent les dynamiques de l’allégorie. L’agacement mutuel ou les tensions peuvent pousser à un travail extérieur, cherchant à modeler l’autre selon nos attentes. Mais une voie plus profonde s’ouvre avec l’introspection : se réconcilier avec sa propre violence intérieure pour éviter les « ruelles dangereuses » qui nous attirent inconsciemment. Observons cette vérité troublante :

Dans tout conflit, qu’elles soient agresseuses ou agressées, les deux parties vibrent sur la même fréquence de violence.

Cette prise de conscience invite à une question essentielle : combien d’entre nous, se croyant victimes, sont prêts à se remettre en question pour transformer leur avenir ?

Eléphante avec son enfant en Afrique
Eléphante avec son enfant en Afrique

Cette interrogation résonne particulièrement dans le contexte maçonnique. Avec environ 150 000 maçons en France, combien s’engagent réellement dans un travail personnel sur leur « pierre brute » ? Si tous savent critiquer les défauts d’autrui, rares sont ceux qui plongent dans l’introspection. Comparont cette tendance à l’éléphant enchaîné : jeune, il tire vainement sur sa corde avant d’abandonner ; adulte, il pourrait se libérer mais reste prisonnier de ses schémas. De même, en loge, les belles théories s’effacent face aux passions humaines – frustrations pour un grade, un office ou un tablier, querelles pour un maillet ou même des divisions au sommet d’une obédience. L’athanor maçonnique, censé transmuter les métaux des âmes, devient parfois le creuset de rivalités, renvoyant les bonnes volontés à leur point de départ.

La substitution : une clé de l’évolution intérieure

C’est dans ce contexte que le thème central de la substitution émerge comme une réponse. Mais qu’est-ce que la substitution ? Défini comme

« mettre une personne ou une chose à la place d’une autre », ce principe devient un outil puissant pour l’évolution maçonnique.

En loge, les symboles – équerres, compas, tabliers, maillets – n’ont aucune utilité opérative. Leur valeur réside dans leur sens invisible, dans l’essence qu’ils portent. Cette absence apparente cache une présence profonde, une invitation à décoder ce qui ne se voit pas.

Puisons dans le mythe osiriaque, central dans les rites égyptiens, pour illustrer ce concept. Osiris, tué par Seth, renaît sous la forme d’Horus, son fils, grâce aux efforts d’Isis.

Cette renaissance, distincte d’une résurrection, est une transmutation : l’essence d’Osiris se substitue dans Horus pour affronter le mal et régénérer la vie. De même, en loge, les symboles et les mythes ne sont pas des objets ou des récits figés, mais des substituts d’une vérité plus grande. Cette idée, troublante à première vue, suggère que rien de ce que nous percevons n’est pleinement réel – une invitation à chercher la vérité ailleurs, comme le célèbre Mulder de X-Files le proclamait.

Les symboles comme vecteurs de substitution

Tombeau de Napoléon Bonaparte aux Invalides
Tombe de Napoléon Bonaparte aux Invalides

Pour éclaircir cette notion prenons un exemple concret : La pierre tombale. Elle est un substitut de l’être aimé, cristallise l’amour et aide au deuil, bien que ni la pierre ni le corps ne soient la personne. De même, les sautoirs des Surveillants – le fil à plomb du Second pour la verticalité féminine de Vénus, le niveau du Premier pour l’horizontalité masculine de Mars – se croisent pour former une équerre, puis une croix à 360°, symbolisant une harmonie complète. Ces symboles ne guident pas seulement ; ils produisent un effet par la substitution de leur essence invisible à leur forme matérielle.

Temps infini
montre spirale

Prenons maintenant l’équerre, omniprésente dans les rituels – mise à l’ordre, signe pénal, pas d’Apprenti, prise de parole. Essayons une méditation temporelle : imaginez une ligne de secondes, où l’équerre, en verticalité, incarne le présent, le « ici et maintenant ». La seconde passée, déjà morte, et la seconde future, incertaine, se transmutent dans cette seconde présente, chargée de mémoire et de potentiel. Ce moment, culminant à midi dans le rituel – l’heure de la verticalité absolue – devient le seul réel, un espace mouvant où l’équerre substitue le temps linéaire à une éternité vécue.

Une invitation à la réflexion

Les substitutions qui nous entourent – symboles, mythes, interactions – sont des invitations à ressentir et à extrapoler. Une bonne planche, soulève plus de questions que de réponses. La substitution, loin d’être une simple technique, devient une clé pour transmuter les ombres en lumière, les conflits en harmonie, et les illusions en vérité.

Célèbrons la profondeur du premier degré maçonnique et interrogeons-nous : dans quelle ruelle choisissons-nous de marcher, et quelle substitution pouvons-nous opérer pour retrouver la paix intérieure ?

La Franc-Maçonnerie, avec ses symboles et ses leçons, reste un voyage vers l’essentiel, où la véritable lumière jaillit de l’absence même. Il s’agit donc d’une alternance entre le vide et le plein.

21/06/25 – Académie maçonnique Paris : « Pourquoi sommes-nous des Loges de Saint-Jean ? »

Ce samedi 21 juin à 10h30, jour du solstice d’été, précédant la fête de la Saint-Jean, le 24 du même mois, l’Académie maçonnique Paris recevra, lors de son webinaire mensuel, pour une conférence intitulée :

« Pourquoi sommes-nous des Loges de Saint-Jean ? »

Jean‐Jacques ZAMBROWSKI, membre de la Grande Loge des Cultures et de la Spiritualité, ancien Grand Chancelier de la Grande Loge de France, ancien président de l’Académie maçonnique, médecin et professeur d’université.

Ce webinaire est gracieusement accessible aux Sœurs et aux Frères de toutes Obédiences, titulaires du grade de Maître, sur inscription préalable  : https://us06web.zoom.us/webinar/register/WN_PG9Xyq2-QEqiiWvYdOVByw

La Franc-maçonnerie, bien qu’explicitement non religieuse et ouverte à toutes les confessions, est née dans l’Europe chrétienne du Siècle des Lumières, ce qui explique l’influence de symboles chrétiens dans ses rituels, notamment le lien avec Saint-Jean le Baptiste et Saint-Jean l’Évangéliste. Les Loges maçonniques portent traditionnellement le nom de « Loges de Saint-Jean », une identité affirmée dans le dialogue rituel où le Frère, interrogé par le Tuileur, répond venir d’une telle Loge. Lors de l’ouverture des travaux, le Volume de la Loi Sacrée, en règle la Bible, est disposé sur l’autel, ouvert au prologue de l’Évangile de Jean, sous l’équerre et le compas, formant les « Trois Grandes Lumières ». Ce prologue, proclamant « Au commencement était le Verbe », symbolise le Logos (Parole/Raison) et la lumière universelle, incarnant une vérité transcendant les dogmes religieux.

Saint-Jean le Baptiste est le « Précurseur », annonçant le Messie avant de s’effacer, symbolisant le zèle, la rigueur et le passage, tandis que Saint-Jean l’Évangéliste, célébré au solstice d’hiver, est le « disciple bien-aimé », auteur du quatrième Évangile. Représentant la sagesse et l’amour fraternel, il complète le Baptiste en incarnant la conclusion du cycle christique, où la lumière renaît. Ensemble, ils symbolisent les deux faces d’une même quête maçonnique : passion et connaissance.

Le prologue de l’Évangile de Jean, inspiré de Béreshit (« Au commencement »), célèbre le Verbe comme créateur, associé à la lumière et à la vie.

En maçonnerie, ce texte évoque le souffle primordial du GADLU, principe universel au-delà des dogmes, animant l’univers ordonné où l’homme s’interroge sur sa place. Les Loges de Saint-Jean, particulièrement en France et au Rite Écossais Ancien et Accepté, incarnent un espace de réflexion fraternelle, unissant les maçons dans une quête de lumière, de respect, et d’amour universel, sous l’égide du Grand Architecte. Ce sont ces dimensions, complétées de leurs éclairages historiques, qu’explorera Jean-Jacques ZAMBROWSKI, dans sa conférence en ligne, suivie d’un temps d’échanges avec les participants.

Le rituel : fil rouge de la Tenue…

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La vie sans rituel peut nous faire penser à une musique sans tempo ou sans harmonie.

« le rituel est l’élément qui va faire naître la création. »

La tenue est sans aucun doute le théâtre où va se dérouler et évoluer notre rituel, de plus nous sommes dans un temple qui favorise cette union entre la spiritualité et les symboles présents tout autour de nous. La notion de répétition du même rituel, chaque fois que nous nous réunissons crée en nous cette demande qui nous fait se retrouver.

C’est une attente qui bien que similaire à chaque fois va nous procurer de nouveau une joie, une intensité qui nous porte dans une réflexion toujours inattendue.

J’ai envie de faire cette comparaison avec les acteurs, chanteurs et autres artistes qui enchaînent les représentations les unes après les autres sur de longues périodes. Eux aussi sont soumis aux rituels qui vont les guider et sur lesquels ils s’appuierons pour donner le meilleur d’eux même.

« Le rituel apparaît alors comme le guide nécessaire et indispensable. »

Certains d’entre vous me dirons que j’enfonce des portes ouvertes, que les rituels sont présents dans toutes les cérémonies, dans tous les moments qui accompagnent notre vie, chez les chercheurs, les joueurs, les fumeurs, notamment de cigares en franc maçonnerie…

Les rituels rythment notre vie et permettent d’installer en nous la stabilité qui progresse avec la régularité. Il est bon parfois de désacraliser le rituel car à mon avis il s’appuie sur des notions simples.

Cependant, certains médias souvent trop proches d’une mode commerciale nous relèguent, nous Francs maçons, à ce niveau, dans la catégorie « des rites » qui arrivent à frôler parfois la sorcellerie, mais cela est une autre histoire comme la vidéo du grand rené ci-dessous:

L’énigme des Maîtres -23- La ligature

Pour lire l’épisode précédent : ici

Guido appela avec euphorie son ami Alexander resté à la résidence avec Caris.

– Ça y est Alex ! Dis à Caris que nous avons le diamant et vous comprendrez le trésor que cela représente quand je vous le montrerai ; il a le plus incroyable des pouvoirs ! Le temps pour Sir Archibald de discuter de détails encore un peu avec le Grand Maître et je préviens Parker de venir nous chercher d’ici deux petites heures pour rentrer à Eaton square.

La soirée s’installait sur Londres. La lumière dorée des lampadaires d’Eaton Square se reflétait sur les pavés, formant des éclats scintillants dans l’obscurité grandissante de ce quartier cossu et silencieux.

Cela faisait un peu moins de deux heures que Parker avait reçu l’appel de Guido lui demandant de venir les chercher au Freemasons’ Hall, laps de temps des derniers palabres et courtoisies avec le Grand Maître. Le moment était venu.

Caris, pressée de retrouver Guido, après un signe amical à Alexander qui, lui, préférait rester au salon, se goinfrant de chocolats pour calmer son excitation, accompagna son père qui sortait pour aller chercher Sir Archibald et Guido. Elle enfila un trench beige ceinturé à la taille, mis son sac à l’épaule.

La lumière dorée des réverbères donnait à ses boucles blondes des reflets ambrés comme ceux des vénitiennes se séchant les cheveux, sur leur terrasse, dans le couchant du soleil. Ses talons résonnèrent sur le trottoir lorsqu’elle descendit les quelques marches de l’entrée principale. Elle esquissa un sourire à son père, lui se dirigeant vers la voiture, elle entamant une petite promenade pour patienter.

Mais, quelque chose, peut-être un instinct ou une ombre fugace, fit soudain vaciller son expression.

Venu de nulle part, un van noir aux vitres teintées, jaillit de l’angle de la rue. Les pneus crissèrent sur le pavé tandis que le véhicule s’arrêtait brutalement à quelques mètres d’elle. Trois hommes vêtus de noir, masqués, bondirent hors de la camionnette. Tout se passa en une fraction de seconde. L’un d’eux attrapa Caris par le bras avec une force brutale, la faisant lâcher son sac qui s’écrasa sur le sol.

Elle se débattit, criant « papa, papa ! », mais un deuxième homme lui plaqua un chiffon imbibé d’une substance sur le visage. Ses gestes désespérés faiblirent rapidement. Le troisième homme, armé, fit un geste menaçant Parker, lui intimant avec un fort accent italien de rester immobile.

– Pas un geste, ou elle meurt ici !

Avant de monter à l’arrière du véhicule, l’un des ravisseurs se tourna vers Parker et lança une enveloppe sur le trottoir.

Le van démarra en trombe, laissant derrière lui le bruit des pneus sur les pavés et un nuage d’échappement.

Tremblant de rage et de désespoir Parker entra en trombe dans  la résidence hurlant et appelant Alexander à son secours qui le rejoignit dans le hall.

– Ils ont enlevés Caris, les salauds ! Tenez, et il lui tendit l’enveloppe. Il n’ajouta pas ce qu’il ne pouvait s’empêcher de penser :

– C’est de votre faute.

Alexander comprit aussitôt ce que les ravisseurs exigeaient mais surtout que son téléphone avait été piraté par Amélie et que Savonarole avait dû intercepter l’annonce de la découverte du diamant. Sir Archibald et Guido ne tarderaient pas à rentrer, mais il ne les attendit pas et en ouvrant l’enveloppe découvrit le message qu’il lut à haute voix à Parker :

Tu sais ce qu’on veut, Milan dans deux jours, le 8 mars, derrière l’église Santa Maria delle Grazie, 2 via Guiseppe Antonio Sassi, 13 h.

L’objet contre sa vie. Pas de police.

Le chauffeur ressortit furieux pour aller retrouver le comte.

– Ça alors ! C’est à côté de Santa Maria delle Grazie où se trouve la fresque de La Cène de Léonardo ! Buonvincini savait donc le rôle joué par De Vinci et il nous fait savoir ainsi qu’il savait ! Il avait dû en trouver des indices dans le vol des documents soustraits d’une partie des archives de Mensura à Prague où sans doute se trouvait déjà une information sur le diamant et qu’Amélie avait complétée en lui envoyant, aussi, toutes les photos prises des lettres à Istanbul, notamment celle qui narre la transmission du diamant par Léonard. Alors c’était cela ! Tout n’était qu’un leurre ! Et peut-être même les tableaux qu’il voulait voler et prétendument détruire ! Nous avons été piégés. Même la transmission du dossier par le valet, qui n’était probablement que son complice, était voulue pour qu’Interpol mette toute sa puissance dans la quête du seul diamant où les tableaux conduiraient les enquêteurs, pensa à haute voix Alexander.

Mis au courant des événements par Parker c’est en trombe qu’Archibald et Guido rejoignirent Alexander qui les attendait, tous désespérés sous le poids de leur responsabilité qu’ils mesuraient de l’enlèvement de Caris. Là, on ne jouait plus.

– C’est moi qui porterai le diamant, toute vie vaut une vie, mais certaines ont plus de valeur pour moi, déclara avec fermeté et gravité Guido

– Je me propose aussi, renchérit Alexander. Lhermitt, tu sais que l’on aura besoin de toi pour diriger les opérations car voilà ce que je suggère. Tu sais que nous n’aurons  qu’une seule chance, murmure-t-il.

Ils convinrent que  la solution proposée était la meilleure.

La suite la semaine prochaine

L’élémentaire, lucarne et vestibule de l’essentiel

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(Les « éditos » de Christian Roblin paraissent le 1er et le 15 de chaque mois.)

Petite leçon pratique, d’autant plus brève qu’elle invite à la méditation : comme témoins de l’univers, nous sommes perdus ; dans notre quête de l’essentiel, nous devons chercher, au moins, à nous en tenir à l‘élémentaire. Voici pourquoi c’est un chemin d’accès et de circulation pour la connaissance et la sagesse.

Si l’on conçoit l’essentiel comme ce qui constitue la nature des êtres et des choses, qui ne dépend de rien et qui ne devient jamais volatil, l’élémentaire, pour sa part, réunit des principes que l’on distingue, qui entrent en composition avec d’autres forces pour engendrer les phénomènes de la vie.

L’essentiel est donc quelque chose de plus profond, quelque chose qui nous saisit parfois mais que nous ne parvenons pas à saisir dans son entièreté. Dans la recherche des équilibres qui sont censés nous gouverner et que nous voudrions respecter, nous ne pouvons pas les atteindre aussi directement, nous en participons, certes, mais nous ne les voyons pas nettement.

Or, à la petite surface de cet essentiel se dégage de l’élémentaire, ce que nous pouvons toucher, ce que nous pouvons appréhender et construire. Cet élémentaire, il nous appartient de nous en occuper. Nous en avons conscience. Pour bien faire, nous devons nous y appliquer avec constance, de même que, l’expérience se consolidant, la combinaison voire la conjugaison des éléments permettent de mettre à jour le fil rouge des réalités, ainsi que la trame sous-jacente des événements, pour mieux situer notre présence et, le cas échéant, pour mieux déterminer notre action.

Ainsi, notre vie se déroule à l’entrée des choses et, en y prêtant attention, nous découvrons que la nature a doté notre être d’un œilleton. Je crois précisément que l’initié se reconnaît à celui qui prend grand soin de l’élémentaire, sachant combien il est à la fois la lucarne et le vestibule de l’essentiel.

Le Voyage Symphonique des Symboles : « Une Odyssée Maçonnique vers l’Harmonie Intérieure »

Dans l’écrin sacré de la loge maçonnique, où chaque symbole vibre d’une signification profonde, le voyage symphonique des symboles propose une méditation envoûtante sur l’initiation, la vibration universelle et la quête de l’amour inconditionnel. Ces trois notions – voyage, symphonie et symboles – s’entrelacent pour former une partition philosophique et spirituelle, un chant qui invite le Franc-maçon à redécouvrir son lien avec l’univers et avec lui-même.

Inspiré par un texte vibrant qui amplifie le message en explorant chaque facette de cette odyssée intérieure, de la géométrie des rituels à la mémoire cosmique, en passant par les défis de la modernité et l’appel à une liberté authentique. À travers une prose riche et évocatrice, célèbrons la Franc-maçonnerie comme un Art vivant, une symphonie où chaque note unique, résonne avec l’éternel.

Le voyage initiatique : un cycle d’aller et de retour

Le voyage, au cœur de l’initiation maçonnique, n’est pas un simple déplacement, mais un cheminement cyclique, un aller-retour vers l’essentiel. Étymologiquement, le mot « voyage » puise ses racines dans le latin viaticus, dérivé de via, la voie. Cette voie, c’est celle de l’initiation, le commencement d’une quête spirituelle où le profane, en frappant à la porte du temple, s’engage dans une transformation profonde. Ce n’est pas un chemin linéaire, mais un cycle complet, un retour enrichi à l’origine, semblable à une mélodie qui, après avoir exploré de nouvelles tonalités, revient à sa note fondamentale.

Dans la loge, ce voyage se manifeste à travers les rituels, où chaque geste, chaque symbole, est une étape vers l’unité. Le néophyte, en entrant dans le temple, commence par entendre les trois coups frappés à la porte, une première vibration qui marque le début de son périple. Ce son initial, loin d’être anodin, est une invitation à s’accorder avec le rythme de l’univers, à retrouver l’harmonie originelle qui vibre au cœur de toute chose. Le voyage maçonnique devient ainsi une quête de réconciliation, un effort pour retrouver le « son pur » de la création, cette fréquence primordiale qui relie l’humain aux lois universelles de la création exprimées par chaque symbole du premier degré.

La symphonie des symboles : un orchestre spirituel

Le concept de symphonie, au centre de ce texte, est une métaphore puissante pour décrire l’expérience maçonnique. Issu du grec sym, qui signifie « ensemble », le mot « symphonie » évoque l’union des sons, des vibrations qui s’harmonisent pour créer une œuvre cohérente. De même, le symbolon, cet objet brisé en deux pour sceller une entente, incarne l’idée d’une unité retrouvée à travers la réunion des parties séparées. Ces deux notions, unies par leur racine commune, reflètent l’essence de la loge : un espace où les différences – entre les individus, les idées, les énergies – se fondent dans une harmonie supérieure.

La loge maçonnique, ornée de ses symboles – maillet, compas, équerre, règle, pavé mosaïque – est une partition géométrique, un orchestre où chaque élément joue un rôle précis. Ces symboles ne sont pas de simples objets ; ils sont des instruments vibratoires, des vecteurs d’énergie qui permettent au Franc-maçon de s’accorder avec l’univers. La symphonie maçonnique, c’est l’écho du « verbe créateur », cette vibration initiale qui, selon les traditions spirituelles, a donné naissance au cosmos.

En participant aux rituels, le maçon devient à la fois musicien et auditeur, cherchant à retrouver en lui l’écho de cette musique primordiale, celle qui résonne dans chaque atome, chaque étoile, chaque âme.

Une géométrie vibratoire : la musique des rituels

Arts libéraux

L’un des aspects les plus fascinants est le décodage des rituels maçonniques comme une expérience vibratoire, une géométrie sonore qui imprime sa marque dans l’esprit et le corps du récipiendaire. Dès l’initiation, le profane est immergé dans un univers de sons : les trois coups à la porte du temple, la batterie des officiers, le coup de maillet du Vénérable Maître. Ces sons ne sont pas fortuits ; ils sont structurés, géométriques, reflétant l’architecture même de la loge.

Au Rite Français, les trois Lumières – Vénérable Maître, Premier et Second Surveillant – forment un triangle isocèle, tandis qu’au Rite Écossais Ancien et Accepté, elles dessinent un triangle équilatéral. Cette géométrie se retrouve dans la batterie, dont le rythme – deux coups rapprochés, un coup éloigné, ou trois coups égaux – reproduit la forme du triangle.

Chaque geste rituelique amplifie cette vibration. Lors de l’initiation, le néophyte longe la colonne du midi, traçant une ligne droite avec ses pas, semblable à la règle. Il effectue un demi-cercle devant l’Orient, évoquant le compas, puis ressent le basculement de la planche, qui symbolise l’équerre et le passage de l’horizontale à la verticale. Ces mouvements ne sont pas seulement symboliques ; ils sont physiques, vibratoires, imprimant dans la chair du récipiendaire les « trois joyaux de la loge » : la règle, le compas, l’équerre. Chaque rituel devient une onde concentrique, une vibration qui s’étend du centre de la loge pour toucher chaque participant, les reliant à travers le temps et l’espace.

Associant maintenant les officiers de la loge à des notes musicales et à des planètes, nous inspirant de la « musique des sphères » conceptualisée par Plutarque, Kepler et Newton. Le Vénérable Maître, lié à Jupiter et à la note SOL, incarne la Sagesse ; le Premier Surveillant, associé à Mars et à la note FA, représente la Force ; le Second Surveillant, rattaché à Vénus et à la note RE, symbolise la Beauté. L’Orateur, le Secrétaire, l’Expert et le Maître des Cérémonies complètent cet orchestre cosmique, chacun apportant sa note unique – MI, SI, LA, DO – pour former une harmonie qui reflète l’ordre universel. La loge devient ainsi un microcosme, un espace où le Franc-maçon peut entendre et ressentir la musique des sphères.

La mémoire de Mnémosyné : lever le voile de l’oubli

Au cœur de l’initiation maçonnique se trouve une dialectique entre oubli et mémoire, incarnée par le breuvage de l’oubli et celui de Mnémosyné, la déesse grecque de la mémoire. Lors de la cérémonie, le Vénérable Maître déclare :

« Tout à l’heure, vous avez bu le breuvage de l’oubli, destiné à vous dépersonnaliser […]. Voici une seconde coupe, celle du breuvage de mémoire, l’eau de Mnémosyné. »

Ce double mouvement est essentiel : l’oubli efface les conditionnements profanes, tandis que la mémoire révèle une vérité enfouie, une connexion avec le divin.

Cette vérité, désignée en grec par Alètheia (« lever le voile sur ce qu’on a oublié »), est au centre de la quête maçonnique. Elle ne se trouve pas dans un savoir intellectuel, mais dans une intuition profonde : l’amour inconditionnel de soi. Le texte propose une hypothèse audacieuse : le « secret » de la Franc-maçonnerie réside dans cet amour pur, dénué d’attentes ou de jugements, semblable à celui d’une mère pour son enfant. Pourtant, cet amour effraie, car il oblige à confronter ses doutes, ses peurs, ses illusions. Pour fuir cette rencontre, l’humanité moderne s’agite, cherchant l’immortalité dans la technologie, les divertissements ou les promesses de paradis futurs.

La loge, en revanche, offre un espace de retour à l’essentiel. À travers ses rituels, ses symboles, ses vibrations, elle invite le maçon à se souvenir de sa propre lumière, de cette fréquence originelle qui le relie à l’univers. La mémoire de Mnémosyné n’est pas une simple recollection de faits ; c’est une réactivation de l’harmonie intérieure, un retour à l’unité perdue.

La Franc-maçonnerie face à la frénésie moderne

Osons une réflexion lucide sur les défis de la modernité. L’humain du XXIe siècle vit dans un paradoxe : jamais le monde n’a été aussi pacifique, aussi prospère, aussi solidaire, et pourtant, jamais il n’a été aussi rongé par la peur. Enfermé dans une « grotte » d’écrans et de pseudo-contrôles, il s’éloigne de son rythme intérieur, de cette musique primordiale qui le relie à l’univers. La technologie, en accélérant le tempo du quotidien, crée une illusion d’immortalité, mais elle ne donne pas plus de vie aux années. Au contraire, elle entraîne l’humanité dans une danse arythmique, une frénésie qui l’éloigne de sa propre essence.

Genève,-,17 novembre:,Chef d'orchestre,Antoine,Marguier,Conduits, The,United, Musique, orchestre
Chef d’orchestre et son orchestre

La Franc-maçonnerie elle-même n’échappe pas à cette démence. Certaines Loges, en cédant à la tentation d’accélérer les travaux ou de se perdre dans des « divertissements » – ces sirènes modernes qui divisent –, risquent de s’éloigner de leur vocation originelle. Pourtant, la Franc-maçonnerie a historiquement joué le rôle d’un chef d’orchestre, guidant la société par son rythme progressiste. Au XVIIIe siècle, elle était une locomotive, un espace d’innovation et de liberté dans une société conservatrice.

Aujourd’hui, elle doit retrouver ce rôle en rappelant à l’humanité l’importance de ralentir, d’écouter, de se reconnecter.

Concentrons-nous sur l’image du « mâât », symbole de rectitude et de stabilité, auquel le maçon doit s’attacher pour résister aux chants des sirènes. Ces sirènes – les distractions, les illusions de la modernité – représentent la division, l’opposition entre lumière et ténèbres, unité et fragmentation. En restant centré, le Franc-maçon peut poursuivre son voyage sans se perdre, en gardant les yeux fixés sur l’horizon de l’harmonie.

Le pardon et la liberté : une quête d’amour universel

Expérimentons maintenant une méditation bouleversante sur le pardon, défini comme un acte de « libération » (du latin perdonare, « être quitte de »). Ce pardon n’est pas dirigé vers les autres, mais vers soi-même. Le véritable « péché originel », selon cette réflexion, n’est pas d’avoir cherché la connaissance, mais d’avoir douté de son propre amour, de sa propre valeur. Ce doute, profondément ancré, pousse l’humanité à chercher à l’extérieur ce qui se trouve à l’intérieur : la paix, l’harmonie, la liberté.

La Franc-maçonnerie, en tant que voie initiatique, offre une opportunité unique de surmonter ce doute. À travers ses rituels, elle invite le maçon à se pardonner, à se libérer de la « dette » qu’il croit avoir envers lui-même. Ce pardon est la clé de la véritable liberté, celle du « freemason », affranchi des chaînes de l’auto-jugement. Cette liberté ne dépend ni de l’espoir ni de la réussite, mais de la persévérance, comme l’exprime la citation de Guillaume d’Orange :

« Point n’est besoin d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer. »

Chaque pas sur le chemin maçonnique contient l’intégralité du voyage. Les rituels, les symboles, les vibrations de la loge sont autant de miroirs qui reflètent l’unité entre l’intérieur et l’extérieur, entre soi et l’autre, entre l’humain et le divin.

Le miroir de l’initiation, première note de la symphonie maçonnique, est aussi la dernière : il révèle que chaque Frère, chaque Sœur sur la colonne d’en face, est un reflet de soi-même, une partie de la même harmonie universelle.

Une symphonie pour l’éternité

Le voyage symphonique des symboles est une ode à la Franc-maçonnerie, un appel à écouter la musique intérieure qui résonne en chaque être. La loge, avec ses symboles, ses rituels, ses vibrations, est un orchestre où chaque note contribue à l’harmonie cosmique. En s’inspirant des intuitions de Nikola Tesla

« Si vous voulez trouver les secrets de l’univers, pensez en termes d’énergie : fréquence et vibration »

Portrait d’Albert Einstein (Photo d’Oren Jack Turner, Princeton, N.J.)

et d’Albert Einstein

« Ce que nous avons appelé matière est l’énergie, dont la vibration a été hautement réduite »

Rappelons que tout, dans l’univers est vibration, énergie, musique.

Pour le Franc-maçon, le travail en loge est une invitation à s’accorder à cette musique primordiale, à retrouver la mémoire de sa propre lumière. C’est un chemin de patience, de persévérance, d’amour. Chacun doit ressentir l’écho d’une symphonie universelle, un appel à marcher, pas à pas, vers une liberté qui commence par l’amour de soi et s’étend à l’humanité tout entière. La Franc-maçonnerie, dans sa beauté intemporelle, reste une voie d’espoir, un espace où l’on peut apprendre à vibrer à l’unisson avec l’univers.

L’Exaltation à la Maîtrise : Un Guide Essentiel pour les Francs-Maçons

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Dans son dernier ouvrage avant de nous quitter, L’Exaltation à la Maîtrise, Pierre Audureau offre une exploration profonde et accessible d’une étape clé du parcours initiatique maçonnique : le passage au grade de Maître. Destiné aux jeunes Maîtres et Maîtresses, mais également précieux pour les plus expérimentés, ce livre éclaire les dimensions rituelles, morales, psychiques et intellectuelles de ce grade, tout en proposant des outils concrets pour en tirer le meilleur profit.

Une étape cruciale du chemin maçonnique

L’accession à la Maîtrise marque un tournant dans la progression du Franc-maçon. Ce grade, riche en symboles et en significations, invite à une introspection profonde et à une responsabilité accrue. Pierre Audureau, avec sa double expertise de pédagogue et de maçon aguerri, décrypte les enjeux de cette étape. Il ne se limite pas aux aspects rituels, mais explore comment ce grade influence la psyché et l’intellect, offrant ainsi une vision holistique de la transformation initiatique.

Un guide pratique et inspirant

Ce livre se distingue par son approche pragmatique. Pour les nouveaux Maîtres, il fournit des clés pour appréhender leur statut et s’épanouir dans leur pratique. Pour les Maîtres confirmés, il propose des pistes pour enrichir leur cheminement et préparer une progression future dans leur rite. À travers des conseils avisés, l’auteur encourage une démarche personnelle et authentique, essentielle pour faire vivre les valeurs maçonniques au quotidien.

Pierre Audureau : une plume éclairée

Normalien, agrégé de mathématiques et Franc-maçon du Rite Écossais Ancien et Accepté, Pierre Audureau apporte une rigueur intellectuelle et une sensibilité spirituelle à son œuvre. Membre de la loge anglaise n°204, fondée à Bordeaux en 1732, il s’appuie sur une riche expérience maçonnique et une carrière d’enseignant pour livrer un texte à la fois érudit et accessible. Auteur de nombreux ouvrages, dont L’Initiation maçonnique et La Spiritualité et la science moderne, il est reconnu pour sa capacité à allier réflexion profonde et pédagogie.

L’Exaltation – Pierre Audureau – Editions DERVY

Pourquoi lire cet ouvrage ?

L’Exaltation à la Maîtrise est bien plus qu’un manuel : c’est une invitation à approfondir sa quête intérieure et à donner du sens à son engagement maçonnique. Que vous soyez un jeune Maître en quête de repères ou un maçon expérimenté souhaitant renouveler votre pratique, ce livre vous accompagnera avec clarté et inspiration.

Disponible aux Éditions Dervy, cet ouvrage est un incontournable pour tout Franc-maçon désireux de faire de la Maîtrise une étape lumineuse de son parcours initiatique.

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