jeu 17 avril 2025 - 00:04
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 Jacques Fontaine ose descendre aux racines naturelles de l’homo sapiens. Il découvre une autre manière de vivre ensemble. AU CHEVET D’UN MONDE FIÉVREUX n°III Des marionnettes rebelles ?

Les technologies :
Un humain omniscient et hyperactif.

D’abord, la majesté effrayante, écrasante des armes nucléaires, capables de pilonner une vaste partie du globe. Le traité de non-prolifération date de 1968, en lien vident, pour moi, avec les aspirations des mouvements des jeunes. Ce texte et les suivants ont beau s’arcbouter suer la raison collective, les pays nucléarisés leur font la nique. Plus loin, un jour ?
Les technologies informatiques nous aident grandement mais elles fourrent nos vie, de brutalités déguisées. L’intelligence artificielle, la robotique, l’existence artificielle, les algorithmes génétiques, la bio-informatique, les nanotechnologies, les bioénergies… vont si vite que nous n’avons plus le temps de la pause sur soi et de notre relation aux autres. Elles imposent aux consentants que nous sommes en grande majorité, la très grande vitesse, la centration sur soi, l’hymne au scientisme. Parmi mille, des exemple vécus par tous les Français : les analyses médicales remplacent la relation au médecin. La télévision assure un lien lâche et frelaté aux autres ; l’ordinateur dispense les connaissances en écartant l’enseignant. L’achat de nourriture, dans une relation vivante au commerçant, est remplacé par la livraison.
Je reviens sur les prestations médicales : la dictature des faits, avec les trainées du scientisme, est le brouet quotidien de ces technologies informatiques. Avec de graves conséquences sur notre santé : les études de médecine ignorent presque complètement la subjectivité de la relation au malade. Une vieille lune pourtant, vérifiée, en 1960 par Michaël Balint : il confirma que le mieux-être, la guérison dépendent de la triangulation malade, médecin, maladie. Consultez un médecin, a fortiori un psychiatre, c’est stupéfiant :; neutre, distant, froid parfois : « Vous n’avez rien, c’est psychique ! » Au grand dam d’un malade qui, oui, c’est vrai ! ne se sent pas bousculé mais ni pris en empathie ; un de nos mots très à la mode ce qui est d’ailleurs très significatif d’un manque.

En joie, vers l’abolition des frontières géographiques car les amis seront de tous les pays. L’individu se sentira citoyen du monde. 130 « clicamis » en moyenne, dans les pays occidentaux. Pourquoi pas ? J’écoute plus averti que moi: « Plus on utilise Internet, plus on est sociable, plus on est capable de se rapporter aux autres, plus on est polarisé, plus on est participatif. Plus on a d’amis sur Internet, plus on rencontre d’amis physiquement. Ça se renforce, c’est un résultat empirique général : Internet n’est pas un instrument d’isolement ».
Vient-on à affirmer que la fraternité s’accroit ? Sans doute. Les réseaux sont des supports plus que des suppôts de la fraternité et de la liberté d’expression. Il n’est que de voir les barrages d’accès aux réseaux des totalitarismes. Ainsi s’abolissent de plus en plus « limites, contours, frontières, lignes de partage, bornes, démarcations… » Atlan, Droit ; de la liberté en sus.
Notre devise républicaine signe aussi avec l’égalité. Alors qu’en est-il avec les applications informatiques ? Elles renforcent l’égalité, avec l’immense diffusion de portables, comptés en milliards dans le monde. Ajoutons, l’accès au savoir toujours plus facilité : les apprenants sur les MOOC (Massive Open Line Course), ne s’ennuient plus, ou s’enchantent en écoutant un professeur ; désormais ils décident quoi, comment quand. Jimmy Wales, fondateur de Wikipédia, le déclare tout de go. « Imaginez un monde dans lequel chaque personne, où qu’elle soit, dispose d’un libre accès à la somme de tout le savoir humain ». C’est une démonétisation complète du savoir. Je reviens sur la liberté : il est impossible de ne pas se mettre sur pied d’alerte quand on s’ahurit devant les progressives mutilations de la liberté dans tous les pays, Chine en tête. Les flicages, la reconnaissance faciale., la captation d’identité… Sans aller plus loin, le déport des tâches administratives sur les usagers, les adhérents, les clients .Et je ne crois pas que les observatoires éthiques y puissent grand-chose. Notre CNIL est une dame sourcilleuse mais qui, bientôt n’en pourra mais. Le progrès, et en particulier celui du aux informatiques, est une machine qui ne cesse d’avancer, soutenue par les ombres de la meute humaine. J’en parlerai d’abondance dans la dernière partie. Dans cette attente, rappelez-vous le roman prémonitoire de René Barjavel, paru en 1943, qui traite de l’inévitable rouleau compresseur de la dignité ; ce monstre d’illusions, sans possibilité de crier : halte !

Vous savez tout cela : les technologies ont du bon, comme on dit, mais l’intelligence de leurs algorithmes et de leurs robots donnent des sueurs froides Nos relations aux autres, garantes du bon fonctionnement de notre société, et par là de notre calme intérieur se dégradent sans pauses, dans l’essoufflement du temps. Avant le temps humain, c’était le passé, le présent, le futur. Aujourd’hui c’est du 24 heures sur 24, du 7 jours sur 7, c’est l’instantanéité. Il ne faut pas que le réflexe remplace la réflexion. De toute urgence, il nous serait très utile de ralentir cette frénésie de vitesse, que les technologies de la communication n’encouragent pas. Symbolique, la traduction en 22 langues de l’ouvrage « L’Éloge de la lenteur », paru en 2004. On ne saurait mieux dire que cet extrait d’une conférence produite, en 2017, au Palais de la Découverte : « Nous avons plus de temps devant nous, nous ne cessons de gagner du temps, et pourtant nous souffrons de cette “famine temporelle”… Étrange époque où le temps se rétrécit subjectivement alors qu’il ne cesse de s’emplir objectivement. Est-ce réellement de repos dont nous avons besoin, ou du besoin de ressentir la distinction entre l’activité et le repos, donc entre la rapidité et la lenteur ? Mais c’est peut-être une question de rythme… » Un autre conférencier descend dans l’arène, si je puis dire : « Privilégier la marche, prendre le temps de cultiver des plantes, les regarder pousser… Ce sont des moyens de se sentir exister ! Et, ne pas oublier que « Pour faire un jardin, il faut un morceau de terre et l’éternité ». Tu avais bien raison, Voltaire, il faut cultiver notre jardin !

L’effarant déploiement des technologies atteint le monde entier, en déclenchant, avec la consommation, un état fébrile. Nous devons, pour y voir plus clair dans les causes de ces symptômes, rappeler un facteur, encore plus indépendant de notre volonté humaine. La fièvre commence avec lui.

Traduction poétique de l’américain « follower » si répandu dans le monde.
Manuel Castells cité par M Atlan et JP Droit. Voir biblio.
Ibidem.
MOOC : Massive Open Line Course. Avec pour ancêtre français et mondial (mais oui !) l’Enseignement Assisté par ordinateur, EAO.
F. Lenoir, voir biblio.
cf biblio.
Je n’ai pas le nom du conférencier. Le propos est rapporté sur le site de France Culture.

La Boulomie – Editions LOL

Le principe dignité

J’allais en Loge un soir (avant le confinement) quand j’ai vu le spectacle navrant des grandes métropoles : la population qui va travailler, avec toujours plus de tristesse dans le regard, et qui enjambe les laissés pour compte de notre belle modernité : les SDF, junkies, réfugiés abandonnés et autres marginaux. J’en croise de temps en temps qui tiennent des propos incohérents, d’autres qui sont en recherche d’une pièce pour espérer survivre. J’ai également croisé ces fameux migrants et j’ai vu dans leur regard des choses que nous, occidentaux bourgeois épargnés par la guerre ne pouvons réellement pas connaître.

Un soir, en rentrant chez moi, j’ai discuté avec une dame SDF qui mendiait. Malheureusement, je n’avais rien à lui donner, mais elle était déjà heureuse que quelqu’un lui réponde et la traite en être humain… Je me dis que j’ai dû être un des rares passants à lui avoir parlé ce jour là.

A l’automne dernier, j’étais allé au cinéma. J’ai bien évidemment vu le splendide et effrayant Joker, très bien construit et très bien écrit, dans lequel on voit la déliquescence d’une société incapable de s’occuper de ses marginaux. On y voit Arthur Fleck (magistralement interprété par Joaquin Phenix), le futur Joker, consulter son assistante sociale, qui lui annonce que le service va fermer, faute de crédits. Rappelons que nous sommes dans les années Reagan, dans ce film. Les années Reagan, ce merveilleux moment où des économistes ô combien compétents ont expliqué à nos dirigeants que l’Etat ne savait pas gérer l’argent et que les services publics, c’était trop cher et qu’au fond les plus pauvres n’avaient qu’à payer pour en profiter. Ou mieux, ne plus être pauvres.
Plus loin dans le film, Arthur Fleck commet malgré lui un meurtre fondateur : il abat par accident un cadre des entreprises Wayne alors que ce dernier harcelait (avec un certain sentiment d’impunité) une passagère du métro.
Dans un Gotham City déliquescent, après ce meurtre, des émeutes de la misère éclatent et tous arborent le maquillage d’Arthur Fleck tandis que celui-ci, abandonné de la société, glisse peu à peu vers la folie criminelle, jusqu’au meurtre de sang-froid et en direct de l’animateur et humoriste Murray Franklin (joué par De Niro), 2e acte fondateur de la carrière du Joker.
Autrement dit, un laissé pour compte, à qui ses soutiens sont retirés (notamment le fait de pouvoir parler) par l’arbitraire d’hommes politiques devient un dangereux criminel. Bien sûr, ce n’est que de la fiction. C’est sûrement pour cette raison que les insurgés d’Amérique du Sud ont pris pour emblème le maquillage du Joker lors des émeutes d’automne 2019…

Quelques jours après, j’ai vu le fameux Les Misérables de Ladj Ly et j’y ai vu quelque chose de très intéressant, mais aussi de très inquiétant. Attention, divulgâchis.
Le personnage du jeune Issa, l’adolescent à l’origine de l’enchaînement dramatique du film, est gravement blessé par les policiers de la Brigade Anti Criminalité, la BAC. Ce qui est intéressant (et que le film ne montre volontairement pas), c’est la construction de l’émeute qui suit, avec quelque chose que j’ai trouvé terrible mais aussi très intéressant : le silence du jeune Issa. Ce gamin blessé par la police fomente une émeute contre les officiers de la brigade anti-criminalité, mais, dans le film, le personnage ne dit plus un seul mot.

Ce qui est frappant dans ces deux fictions, c’est ce silence auxquels sont contraints les personnages d’Arthur Heck et d’Issa. Arthur Heck n’a plus son aide psychologique et s’enfonce dans l’isolement, le jeune Issa est contraint de se taire par la BAC. L’expression de ce qu’ils ont en eux devient alors la violence. Bien évidemment, ce ne sont que des œuvres (remarquables, à mon avis) de fiction.

Sauf que… depuis les années 80, la psychiatrie en France est devenue le parent pauvre de la Sécurité Sociale. Les structures d’accueil de jour sont régulièrement fermées, faute de budget. Les enfants de l’assistance publique (ceux que nous appelions dans les années 80 « les enfants de la DASS ») se retrouvent littéralement à la rue dès leur majorité. Combien y-a-t-il de ces anciens enfants parmi les SDF que nous croisons tous les jours sur notre chemin ? Combien de personnes qui devraient être accueillies en structure de jour se retrouvent à la rue la nuit ? Combien survivent et meurent isolés et abandonnés, dans l’oubli et la misère, sans que personne ne se souvienne d’eux ?

Certains me diront que les collectivités et les pouvoirs publics organisent des maraudes en hiver pour apporter les premiers secours aux plus nécessiteux. Les associations sur le terrain font un travail exceptionnel. Malheureusement, cela ne suffira jamais, tant la misère augmente. Et nous sommes tous complices: la misère vient de décisions politiques, comme le refus de construire des logements, le refus de maintenir des usines et bien sûr, le refus d’entretenir des structures d’accueil et de soin pour les plus fragiles. Nous avons voté et choisi ce monde, nous allons devoir en assumer les conséquences.

Les Francs-maçons ont inventé le solidarisme sur lequel repose notre contrat social. A ce titre, c’est à l’État de prendre en charge les personnes les plus vulnérables, comme le dit la loi. A notre échelle de petite société, nous disposons en Loge d’instances pour aider les plus malheureux d’entre nous et leurs proches. Mais nous ne sommes qu’une petite communauté de gens plutôt bien lotis, appartenant en grande majorité à la classe moyenne. La rue reste un événement rare pour nous et nous ne restons jamais trop seuls dans l’affliction.
Mais quand je vois comment nous tous, hors Loge, traitons les plus miséreux, je m’inquiète pour notre propre humanité. Hans Jonas appelait, dans le Principe Responsabilité à “privilégier l’action compatible avec la permanence d’une vie authentiquement humaine sur Terre”.
Or, quand j’entends un chef d’Etat expliquer que dans une gare il y a des gens “qui ne sont rien”, quand je vois des décisions politiques ou économiques de destruction des instances de soin (crèches, écoles, accueils divers, hôpitaux, plannings familiaux, protection des femmes), quand je vois des lois de programmation budgétaire qui mettent des personnes à la rue ou qui les y condamnent et qui les écartent désormais de la vie en société, les condamnant à une vie qui n’a plus rien d’humain, alors, oui, je m’inquiète.
Je m’inquiète pour la dignité humaine.
Je m’inquiète pour l’avenir de nos enfants, notre avenir à tous.
Je m’inquiète d’autant plus qu’à notre époque de confinement, la police, qui devrait protéger les plus faibles, se comporte de plus en plus en milice au service d’un pouvoir qui n’a plus que faire de la dignité humaine, à en juger par les enquêtes récentes (cf. https://www.franceinter.fr/confinement-plusieurs-personnes-affirment-avoir-ete-brutalisees-et-insultees-lors-de-controles-de-police?).

Au final, Joker ou les Misérables sont-ils des fictions, des explications ou pire, des prédictions ? Je ne sais pas. Par contre, je suis certain qu’aujourd’hui, plus que jamais, il nous faut vraiment nous rappeler ce texte: Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. 

En refusant de reconnaître la dignité de chacun ou en la retirant, c’est autant de Joker ou d’Issa que nous contribuerons à créer.

J’ai dit.

 Jacques Fontaine ose descendre aux racines naturelles de l’homo sapiens. Il découvre une autre manière de vivre ensemble. AU CHEVET D’UN MONDE FIÉVREUX Des marionnettes rebelles ? 2

 Le présent est également adoubé dans les récentes expressions de méditation ; mais il s’agit d’une autre étoffe de jouissance et j’y reviendrai. Tant de facteurs nous précipitent du haut de la falaise : le fric, notre Seigneur et notre dieu, la qualité de nos informations parcellisées, les écrans qui font écran, l’assèchement de la courtoisie, particulièrement dénoncée dans notre beau pays. Et, j’insiste sur un autre facteur, trop souvent négligé (tiens ! Pourquoi ?), la sale renaissance de la division du travail, depuis trois décennies. Les métiers de l’informatique ne fouettent pas plus le sang de leur serviteur que ne le faisait la chaîne. Moins pénible quand même m’objecte-t-on. Oui mais pas plus « épanouissant » mot bienvenu pour rester dans la mode, mais évocateur. FW Taylor revient sur un char victorieux. D’ailleurs, tout comme lui, l’ingénieur, nous encensons les avancées scientifiques, les seules crédibles aux yeux de beaucoup. En outre, notre socio-religion hyper-capitaliste possède ses prêtres, la majorité d’économistes, fervents zélateurs et développeurs du système.
Car il nous faut, dans cette danse de l’Avoir, du visible, du démontré même si la raison, cette folie cérébrale, nous entre le rationnel et le concret. La vogue scientiste nous avale dans les tourbillons : « Quoiqu’il en soit, le but de la vie, de la vie réussie, c’est une satisfaction sans effort du désir ». Et en jolie redondance : « Vous jetez l’ancre à un endroit, vous la remontez, vous allez ailleurs et vous la jetez à nouveau. Il ne vous arrive rien de fâcheux, juste des aventures ».

Balance entre l’avidité frénétique et l’hécatombe apocalyptique. Oui, avec le décervèlement, des réactions qui me donnent des motifs (pas des raisons !) d’espérer. Malgré des rébellions, en crispation sur le système actuel mondial. Ne descendons pas en nous-mêmes. Des comportements, surtout, et fichez moi cette psychanalyse nauséeuse, au trou ! Comme toutes les approches de nos profondeurs. Les Américains s’en font les chantres et le monde suit ; tout en inventant des formes de réconfort plus subtiles et qui, je le reconnais loyalement, nous aident, parfois, à sortir de la cave où les chiens aboient. Les TCC, les pratiques de développement personnel, les retraites méditatives, les recentrements sur soi… sont désormais des réponses à notre grande peur instinctuelle qui bout dans nos inconscients et se réveille brutalement avec un virus menaçant. Ce qui pourrait bien être une chance pour déloger le scientisme, qui prétend donner de la raison dans une société folle d’Avoir. Cet arsenal ne mène pas à l’introspection bagarreuse, mais ventile en fait les fumées malodorantes, voire néfastes. Pas toutes quand même ! Je vais citer une pratique prometteuse, je le dis par expérience : le Dialogue intérieur de Hal et Sidra Stone (années 70) : chacun est amené à jouer, devant un groupe, tous les rôles que nous endossons. Alors nous dévoilons notre semblant de personnalité, par la descente mesurée, en soi. Et la retrouvaille émouvante avec notre « Enfant vulnérable ».
Il faut bien tout cet arsenal pour parer aux dépressions, ce virus psycho-organique dont nous sommes de plus en plus nombreux à être porteurs. Ainsi, on compte plus de 300 millions de personnes dans le monde souffrant de dépression soit une augmentation de plus de 18 % de 2005 à 2015. Chaque année, près de 800 000 personnes meurent en se suicidant. Cela, bien souvent, parce que Nous sommes contraints à réduire la complexité de nos rôles à des marionnettes manipulées, non pas sur leur besoin de relations mais sur les gratifications les plus rapides possibles, vaines.

Une phrase bien sentie : « Bref on cherche plus l’accomplissement de soi, qui est l’impératif de la modernité psychologique, que la dépossession de soi qui est le mot d’ordre de la spiritualité traditionnelle ».
La consommation est le premier et grand symptôme d’un vacillant état de santé du monde. Symptôme à ne pas confondre avec la maladie. Elle en est une conséquence ; Mais il faut continuer à identifier les symptômes pour mieux remonter au virus. Les technologies, sont, à n’en pas douter, une autre expression fiévreuse, visible à en hurler !

La Boulomie – Editions LOL

 Jacques Fontaine ose descendre aux racines naturelles de l’homo sapiens. Il découvre une autre manière de vivre ensemble. AU CHEVET D’UN MONDE FIÉVREUX

Des marionnettes rebelles ?

Des désastres ont toujours menacé l’humain et la liste est longue : guerres incessantes, famines endémiques, plus récemment le désastre écologique et l’épidémie virale. Cet article se réclame d’une double filiation : l’écosophie et l’anarchie verte. Son propos est d’aider à prendre du recul, non point pour régler, en un clic, ce que nous vivons. Avec plus de modestie, il pourrait contribuer à prendre mieux en charge, l’angoisse, notre inquiétude et nos effrois. En un mot, à augmenter, quand elle est malmenée, notre joie de vivre.

Introduction

D’abord prendre le pouls pour observer la santé et, en fonction des résultats, prescrire des remédiations, le cas échéant. Alors précisons : qui donc est celui qui est le centre de notre attention ? Le monde, d’accord mais quelle vastitude ! Alors définissons, en quelques lignes, le sujet que va ausculter le stéthoscope.
Le monde, on le sait, respire dans un système socio-planétaire universel. La seule différence : des pays sont plus infectés par des symptômes de la maladie ; comme la Chine avec le contrôle au faciès, symbolique de la privation intangible des libertés. Pouvait-on imaginer l’alliance à peine concevable il y a trente ans, de ces mœurs liberticides avec l’hyper-capitalisme occidental ? D’autres pays sont en train de contracter ce virus planétaire telle l’Afrique noire. Prenons alors l’exemple le mieux connu de nous, l’Occident. Il serait à ce jour, avancent beaucoup et de plus en plus les observateurs, en état de fièvre. En bref, quand nous évoquons « le monde », nous sortons de l’astronomie et de la géologie, pour porter notre regard sur ceux qui ont pris possession de notre planète : nous, les Hommes. Maintenant que le sujet est défini, analysons de plus près la réalité d’une telle allégation.

Six palpations pour une remédiation vont être nécessaires. Les voici : La consommation, les technologies, la prolifération des humains au grand dam de l’écologie, l’anthropocentrisme, les directives inconscientes qui modèlent nos comportements, l’angoisse primordiale, enfin les lois naturelles des animaux de meute que nous sommes et qui entravent notre remise en cause. Je pourrai alors, après ce diagnostic, proposer la remédiation souhaitable et possible, pour affronter l’effondrement plus que probable.
Ces six tâches accomplies, je serai alors en mesure de qualifier, avec tous les zézaiements d’usage, en quelques mots, l’état de santé du monde. Ces facteurs sont inextricablement mêlés ; l’écosophie l’a révélé il y a déjà quelques décennies. Alors pour plus d’aisance de lecture, j’ai donc construit six parties, en proposant pour chacune d’elles, les moyens de remédiation. En bref, je propose de partir des symptômes les plus évidents de l’état fébrile de la santé mondiale, puis examiner ce terrain si favorable à la pandémie ; pour revenir à la lumière éventuelle de notre avenir.

La consommation
Des marionnettes compulsives et avides

L’économie financière (et non l’économie réelle d’avant 1939, en gros) est le bubon le plus perceptible de l’hyper-capitalisme. Elle construit, régule nos sociétés et tire la bourre, de plus en plus, au politique. Un exemple sidérant : Blackrock le plus gros investisseur américain du monde  « pèse » (oui il est lourd !) 6515 milliards de dollars d’actifs, soit 2,5 fois le PIB de la France. Mais la frénésie issue de la consommation forcenée s’observe partout. Elle touche au moins 80% des personnes. Pas question de se rebeller mais, bien au contraire, se prosterner devant la quasi-religion de l’Avoir. Elle amène à frôler le bonheur mais se contente de délivrer des certificats temporaires et illusoires de bien-être ; elle suscite, en douce, nos délires frénétiques et nos vides carences. Elle induit un monde de parade, de paraître, dans la grande accusation des médias omnipotents. Cela ragaillardit, encore et encore, le système, on le constate sans mal. Dans ce décor d’opérette où chacun est invité à chantonner, les Droits de l’Homme ont porté des fruits succulents mais désormais arrêtent leur mûrissement ; ils deviennent une vitrine ou un alibi, avec la dénonciation effrayante des « droits de l’hommistes », qui germe dans les nations dites civilisées comme notre douce France.
Nous plaquons le masque rigolard de la commedia dell’arte : que de progrès depuis le Moyen-Âge. Oui cela semble fondé mais depuis cette époque haïssable, nous apprîmes à nous déguiser, en nous alignant en troupeau, convaincu de la solidité des cultures passagères ; par exemple celles des philosophes dictant nos pensées… bref les modes, de toutes époques même si le mot semble sorti du carquois actuel. Actuellement, « on ajuste son vocabulaire à celui de sa tribu » comme l’écrit Michel Maffesoli : On fait semblant d’être jeune, « in », dans le coup. Jusqu’à satiété, nous nous bassinons de termes en vogue : « communication, pédagogie, initiatique… ». Mais, pour compenser la grisaillerie qu’ils charrient à notre insu, nous compensons avec des «  magique, résilient ». Le phénomène tribaliste est partout : je vis dans le 9-3, en non dans le 93, et j’entends les gamins lancer des « rebeu, like, ouf, teuf, mecton, daron… ». Son identité fabriquée dans les forges des autres. Mode encore et toujours. En grand désarroi d’une l’outrecuidance personnelle, tant espérée…
Ce désir fou de l’Avoir : « tout, tout de suite et pour moi », engerme une exigence de jouissance immédiate. Le présent devient la boussole du moment. Prenons l’exemple des températures d’hiver : en février 2020, 13, 14 degrés. Certains jours des jouisseurs s’enquillent dans les forceps des plaisirs immédiats : « Quelle chance ce temps ! », en abandon des lendemains gris, annoncés dans ces bosses chaudes. Tenez : « Ces manières de se tourner vers le passé, de le chercher, l’explorer, le goûter- semblent en panne Au moment où le stockage tend vers l’infini, sa consultation nostalgique tend vers zéro. Le passé n’attire plus  ».
Je précise que beaucoup d’exemples choisis pour ce texte sont emblématiques. Malgré leur modestie, ils emblématisent le propos ; ils en sont des symbole d’une réalité très actuelle.

Le présent est également adoubé dans les récentes expressions de méditation ; mais il s’agit d’une autre étoffe de jouissance et j’y reviendrai. Tant de facteurs nous précipitent du haut de la falaise : le fric, notre Seigneur et notre dieu, la qualité de nos informations parcellisées, les écrans qui font écran, l’assèchement de la courtoisie, particulièrement dénoncée dans notre beau pays. Et, j’insiste sur un autre facteur, trop souvent négligé (tiens ! Pourquoi ?), la sale renaissance de la division du travail, depuis trois décennies. Les métiers de l’informatique ne fouettent pas plus le sang de leur serviteur que ne le faisait la chaîne. Moins pénible quand même m’objecte-t-on. Oui mais pas plus « épanouissant » mot bienvenu pour rester dans la mode, mais évocateur. FW Taylor revient sur un char victorieux. D’ailleurs, tout comme lui, l’ingénieur, nous encensons les avancées scientifiques, les seules crédibles aux yeux de beaucoup. En outre, notre socio-religion hyper-capitaliste possède ses prêtres, la majorité d’économistes, fervents zélateurs et développeurs du système.
Car il nous faut, dans cette danse de l’Avoir, du visible, du démontré même si la raison, cette folie cérébrale, nous entre le rationnel et le concret. La vogue scientiste nous avale dans les tourbillons : « Quoiqu’il en soit, le but de la vie, de la vie réussie, c’est une satisfaction sans effort du désir ». Et en jolie redondance : « Vous jetez l’ancre à un endroit, vous la remontez, vous allez ailleurs et vous la jetez à nouveau. Il ne vous arrive rien de fâcheux, juste des aventures ».

La Boulomie – Editions LOL

Attachez vos ceintures… la secousse va être brutale

(Le Syndrome du Pachyderme)

Pendant que chacun concentre son attention sur l’épidémie en s’interrogeant sur ses chances de survie, nous allons aborder le futur. Je ne parle pas de 2050, mais bien du choc sismique à venir pour notre économie mondialisée.

Actuellement, un terrien sur deux se met aux abris tant que ce fléau viral ne sera pas éradiqué. Pendant ce temps, l’activité économique de la moitié la plus productive de la planète est au point mort ou presque. Si tout redémarre avant fin mai, chacun mettra les bouchées doubles pour rattraper le retard afin d’éviter le chaos. Mais il ne faut pas rêver, compte tenu des courbes de croissance des contaminés à travers le monde et plus particulièrement aux Etats-Unis, nous ne sommes pas encore au bout du tunnel. Nous pouvons probablement prévoir que la machine économique sera grippée (elle aussi) au moins jusqu’à septembre.

En 2008, lors de la crise des subprimes, seules les banques furent initialement impactées, avant d’entraîner le monde entier dans la crise. Les lignes de crédits accordées par les états étaient venues prêter renfort à un système bancaire fortement vacillant. Mais cette fois, c’est l’intégralité des secteurs économiques (banques comprises) de tous les pays industrialisés qui se trouve dans la spirale infernale de la récession. Le crédit ne peut fonctionner durablement que sur la confiance d’un prêteur à un emprunteur. Or là, les deux parties sont impactées par le mal qui ronge l’économie planétaire. La dette mondiale est supérieure à 250 000 milliards de dollars, soit 320 % du PIB[1]. C’est-à-dire en tension extrême, ce qui signifie que la marge de manœuvre est limitée. Il faut s’attendre à une secousse sismique d’une amplitude encore jamais vue sur l’échelle économique. Si vous doutez de cette prévision, je vous invite à lire le propos de Kristalina Georgieva, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) qui déclarait le 23 mars 2020 : « Une récession paraît inévitable en 2020, mais son ampleur tient à la durée de la crise. Le repli de l’activité cette année pourrait être le pire depuis les années 1930.[2] »

Avant d’aborder l’aspect analytique et d’envisager le futur proche, plongeons-nous dans l’histoire. Tel que je le rappelle dans mon dernier ouvrage[3] à paraître dès que le monde de l’édition se remettra en route, je souligne que très peu de livres d’histoire suggèrent l’idée d’une influence de la révolution française due à l’éruption du volcan « Laki », en 1783 au sud de l’Islande[4]. Pour étayer cette thèse l’historien britannique Richard H. Grove[5] affirme, preuves à l’appui, que la France connut une suite de situations météorologiques extrêmes avec une moisson exceptionnelle en 1785 provoquant une chute des prix des produits agricoles et une pauvreté dans les campagnes, suivies d’épisodes de sécheresse, de mauvais hivers ou étés, dont de très violents orages de grêle en 1788 qui détruisirent les récoltes. Ce dérèglement climatique résultant du volcan, contribua de manière significative à la pauvreté et à la famine, un des facteurs importants qui entraînèrent la Révolution française en 1789.  Ulf Büntgen est paléoclimatologue à l’Institut fédéral de recherches de Zurich. Il déclare qu’en examinant les 2 500 dernières années, on trouve des exemples où le changement climatique a affecté l’histoire de l’humanité. Il est aussi auteur d’une étude qui démontre que le changement climatique aurait contribué à la chute de l’Empire romain[6].

Il ressort de ce constat deux points cruciaux de réflexion :

  • Chaque année la grippe tue dans le monde entre 300 000 et 650 000 personnes[7]. Au 1 avril 2020, nous sommes au maximum à 10% des victimes grippales, soit 30 000 personnes. Si on analyse ces chiffres avec un œil purement statistique, ce virus n’a rien de révolutionnaire pour le moment. En revanche, il est fortement novateur du côté économique et médiatique, car il monopolise 100% de l’attention depuis des semaines et neutralise la quasi-totalité des forces productives de la planète pour quelques semaines encore. Personne n’avait encore réussi cet exploit. Un mouvement de contestation militait activement pour la préservation de l’environnement et c’est un modeste agent infectieux qui est venu mettre tout le monde au pas.
  • Nous prenons souvent comme exemple, le monde d’avant le 11 septembre 2001. Il y a fort à parier que nous allons prochainement parler du monde d’après 2020. Pour étayer cette affirmation, je vous propose de nous appuyer sur le cycle théorique d’Elisabeth Kübler-Ross[8]. Nous allons nous attarder sur ce second point afin d’envisager ce qui nous attend et comprendre comment le monde pourrait changer de paradigme et atteindre le point de bascule.

La psychiatre Kübler-Ross est très souvent citée dans le cadre de la résilience après un deuil. Elle a énoncé un modèle en 5 étapes : 1° déni /2° colère /3° négociation /4° dépression /5° acceptation.

Pour bien comprendre ce mécanisme, imaginons qu’un médecin vous annonce un cancer du fumeur. La première étape sera le déni. Vous allez aussitôt consulter deux autres médecins afin de contredire le premier.

Si les 3 diagnostiques médicaux concordent, vous vous résignez au verdict, mais vous refusez la situation avec colère. Ainsi, vous accusez les fabricants de tabac d’être responsables. Cette étape passée, vous allez tenter un marchandage, ou parfois un chantage, afin de créer un contrepoids ou gagner un peu de temps sur la vie. Il s’agit là de la phase de négociation. Lorsque toutes les voies auront été explorées, vous allez vous résigner et aborder ensuite la phase de dépression. Elle se caractérise par un lâcher prise et une acceptation de la réalité. C’est alors que la phase de libération peut maintenant intervenir.

Chacun comprend aisément qu’on ne peut jamais se libérer si on reste dans l’espoir d’un retour des choses passées. Il en est de même si on entre en combat contre les boucs émissaires, responsables de nos anciens malheurs.

Quel rapport avec notre expérience actuelle me direz-vous ?

Ces 5 étapes peuvent parfaitement se transposer sur la situation économique. Si nos usines et nos entreprises redémarrent en juin, tout cela n’aura été qu’un mauvais souvenir qui entrera dans les livres d’histoire. En revanche, si la machine économique restait grippée jusqu’en septembre, à l’instar d’un individu qui déclenche un AVC, le cerveau doit être oxygéné  dans les 5 minutes au risque de provoquer des dégâts structurels irréversibles. Dans ce cas, les prévisions de la présidente du FMI Kristalina Georgieva, deviendraient une réalité désastreuse.

La défaillance de groupes industriels, entraînerait immanquablement la chute des institutions financières et de tout le tissu économique. Ce scénario catastrophe nous conduirait de facto dans les 5 étapes du deuil. Etape 1°) Après avoir refusé la mutation du système économique proposé depuis de longues années par certains. Etape 2°) Après avoir enduré  la colère des gilets jaunes et autre revendications concernant les retraites des derniers mois. Etape 3°) Après avoir tenté de négocier pour éviter le naufrage, nous nous trouverions face à une grande dépression… c’est-à-dire l’étape n°4. Nous passerions alors dans la configuration d’une proposition de changement de paradigme : Etape n°5 et la boucle serait bouclée.

Cette hypothèse, aussi effrayante qu’elle puisse paraître pourrait être l’opportunité de changer de système financier. Il n’est pas question ici de remplacement des enseignes ou des propriétaires de nos banques, mais bien du système de crédit actuel dans son fondement et son organisation structurelle. Les mécanismes actuels s’appuient sur une émission de crédit émanant des banques centrales qui alimentent les organismes de crédit qui fournissent ainsi leurs clients. Dans un système rénové, le crédit serait issu des fournisseurs eux-mêmes. Cela signifie que la circulation du circuit de création monétaire ne serait plus de haut en bas, mais de bas vers le haut.  Cette gestion directe du crédit fournisseur pourrait ainsi alimenter de manière illimitée tous les besoins financiers du marché en rendant le crédit totalement gratuit. Ce sont les réels producteurs de richesse qui deviendraient alors les créateurs de monnaie (bien concrète cette fois).

Ce scénario chaotique du système bancaire a un air de déjà-vu. En effet,  en Argentine lors de la crise de 1995. Durant quelques années, le système fut soutenu par les sociétés privées de compensation interentreprises. On peut juste déplorer que cette opportunité de transmutation du système financier ne se pérennisa pas. L’histoire se répétera peut-être à l’échelle de la planète.

Seras-ce une chance pour l’humanité… tout est à écrire. Le meilleur est certainement devant nous. Il suffit d’y croire et d’appeler de nos vœux cette mutation. Que cette crise nous serve au moins à évoluer et quitter un système archaïque afin de faire notre deuil d’un vieux système sans avenir.

La suite de cette palpitante aventure dans le « Syndrome du Pachyderme »
aux Editions ECE-D  – Avril 2020 – ISBN 978-2-37939018-0 – 25 € –  www.lesyndromedupachyderme.com

[1] Source : Les Echos du 17 nov. 2019 – https://tinyurl.com/dettemondiale

[2] Source : Le Revenu du 28/03/2020 – Crise économique : https://tinyurl.com/lerevenumars2020 – le spectre de 2009, voire de 1929.

[3] « Le syndrome du pachyderme » (Editions ECE-D – mai 2020) www.lesyndromedupachyderme.com

[4] Le Point « Les mystères de l’histoire – Le volcan de la Révolution » 9/07/2013 http://tinyurl.com/PLG-volcanlaki

[5] Richard Hugh Grove est un historien britannique né en 1955 à Cambridge, en Angleterre. Spécialiste de l’histoire de l’environnement.

[6] Source : Le point du 19 janvier 2011 https://tinyurl.com/chuteempireromain

[7] Source : Organisation mondiale de la santé (OMS).

[8] Psychiatre helvético-américaine née le 8/07/26 à Zurich et morte le 24/08/04.

De la guerre

Nous serions en guerre, dixit le chef de l’État. Vraiment ? En bon franc-maçon joueur de wargames, jeux de rôle et autres battle RPG (ces activités ne sont pas incompatibles, le fondateur de Donjons & Dragons, Gary Gygax était un des nôtres), je me suis penché sur la question. J’ai demandé leurs avis à des témoins. Ainsi, ma grand-mère, qui a vécu plusieurs guerres, dont la 2e Guerre mondiale à Paris. Son avis ? Non. Une guerre, ce n’est pas ça. Nous n’en sommes pas encore à craindre un bombardement ou les exactions des soldats de l’un ou l’autre camp. J’ai aussi demandé son avis à un ami, ancien soldat, qui a vécu des opérations extérieures. Même avis, pour des raisons différentes : ce n’est pas ça, une guerre. Et si je me fie à ses arguments, employer le terme de guerre pour une épidémie est un insulte pour ceux qui ont réellement vécu la guerre.

Comme je suis curieux, je suis allé un peu plus loin. Je me suis donc intéressé aux théoriciens de la guerre et de la stratégie : Thucydide, Sun Tzu, et bien sûr, Clausewitz, le grand théoricien prussien de la guerre. Selon lui, « la guerre est un acte de violence dont l’objectif est de contraindre l’adversaire à exécuter notre volonté ». Elle est aussi « le moyen d’une fin politique ». La guerre serait donc une affaire d’humains. Selon Freud, la guerre est une désillusion, dans le sens où elle fait perdre tout espoir, et tout sentiment de contrôle sur la vie. Elle est aussi la manifestation de la pulsion de mort couplée à d’autres pulsions, entrant en jeu avec un mécanisme d’identificationi. La guerre mène l’homme dans un état de dégradation notoire, lui faisant perdre toute sa dignité et mettant à mal tout le travail de civilisation. La guerre est donc un désastre.

En fait, si je me réfère à Frédéric Lordonii, on ne tolère le désastre que si celui-ci a lieu dans les règles. Or, la guerre étant un processus meurtrier, celle-ci implique un certain nombre de victimes civiles et militaires, les « pertes ». Employer le terme de guerre et le champ lexical associé permet donc de rendre acceptables pour chacun les morts de la maladie du virus, ainsi que les mesures de destruction du contrat social français (ben oui, c’est « l’effort de guerre »). Pratique, non ? Sauf que… Employer le terme de guerre est une erreur grave de vocabulaire : on ne « contraint » pas un virus, fût-il couronné. Par construction, donc, nous ne sommes pas en guerre. Nous sommes en pandémie, ce qui n’est pas tout à fait la même chose.

Peut-être que certains emploient ce vocabulaire à dessein pour tenter de restaurer une union nationale sévèrement abîmée par des années de politiques ineptes, n’ayant eu pour effet que le creusement d’inégalités pourtant évitable, et la violence allant avec… Ou peut-être que ce vocabulaire est employé pour éviter à d’autres d’avoir à répondre de certaines choses, comme la destruction programmée des hôpitaux, ou le traitement désinvolte de l’épidémie, ou encore l’absence de préparation réelle, comme le dépistage systématique…

Rappelons-nous donc que « mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde » disait Albert Camus, l’auteur de la Peste. L’emploi du vocabulaire guerrier dans le but de faire accepter (et rejeter la responsabilité) des morts qu’on aurait dû éviter si nos systèmes de santé n’avaient pas été sabordés par 30 années de politiques d’austérité, de New Public Management ou de politique d’asphyxie (le fameux starve the beast de Greenspan) du service public au nom de vulgaires objectifs comptables ou budgétaires relève ici de l’escroquerie intellectuelle. L’application de politiques d’austérité, les révisions de politiques publiques, le choix de la comptabilité ont eu pour effet direct la fermeture de lits et d’hôpitaux. Le service public de la santé, ça coûte et ça ne rapporte rien ! D’où cette politique larvée de sabotageiiidepuis des décennies des élites face à ce qui devait rectifier les inégalités.

Le dispositif de pandémie mis au point suite à l’épidémie de grippe H1N1 a été démantelé quasiment d’un trait de plume. Certes, il y a des questions graves sur le poids des lobbies dans la campagne vaccinale ou la commande des médicaments, mais aussi sur la quantité de masques achetés (et arrivés à leur date de péremption, pas de bol)… et non renouvelés pour raison d’économies. Mais cela ne relève en rien de la guerre. Juste d’une gestion de stocks, elle-même issue de choix politiques : économiser et rogner tout ce qu’on peut.
Sauf qu’à force de rogner sur le fonctionnement et l’entretien, au bout d’un certain temps et en conséquence de la politique de sabotageinfligée au service public, plus rien ne fonctionne et tout tombe en ruine.

Il est aussi dommage d’avoir autorisé des fermetures d’usines capables de produire le matériel nécessaire sur le territoire. Tiens, puisque « nous sommes en guerre », pourquoi ne réquisitionnerait-on pas ces usines (ou d’autres, encore en France) en mesure de fabriquer ces masques ou ce matériel qui nous manquent tant ? A ce propos, les ateliers de confection s’y sont (volontairement) mis, en créant des masques en tissus.

Dans ma quête de vérité, en tant que Franc-maçon, je me dois de lutter contre l’ignorance sous toutes ses formes, l’ignorance étant un terreau très fertile pour le mal. Or dans cette histoire, j’ai l’impression que ceux qui nous gouvernent cherchent à anesthésier nos consciences par l’emploi du champ lexical de la guerre et celui de l’urgence, qui empêche de se poser et de réfléchir. Une stratégie de ruse pour éviter qu’on ne se rende compte que les morts auraient pu être évités si on avait ouvertement mené une politique de santé publique digne de ce nom, au lieu de détruire sans ménagement les hôpitaux et les personnels soignants. Une stratégie pour éviter qu’on n’emploie un terme, celui de négligence. Bien sûr, il appartiendra à la juridiction compétente de qualifier l’ensemble de ces faits graves. Ceux qui auront survécu devront donc rendre des comptes. Pour les autres, ce sera le « Tribunal de l’Histoire ».

D’ici là, restons vigilants et ne nous laissons plus faireiv.

J’ai dit.

PS : Petit rappel mythologique. Esculape, dieu romain de la médecine fut foudroyé par Jupiter pour avoir soigné qui il ne fallait pas…

iSigmund Freud, Albert Einstein, Pourquoi la guerre ? In Propos d’actualité sur la guerre et la mort, Garnier-Flammaration, Garnier-Flammaration, 2017

iiFrédéric Lordon, Les affects de la politique, Seuil, 2016.

iiiJ’étais tenté de parler de guerre contre le service public, mais c’eût été faire preuve de mauvaise foi, ce qui n’est pas mon genre, on le sait bien.

ivPour la petite histoire, j’emprunte ce delenda Carthago au blog Maliki, que je suis depuis 14 ans. Voici le strip : https://maliki.com/strips/2020-strip/.

La Loge Internet Robert Burns ouvre ses portes numériques

La Loge Internet Robert Burns ouvre ses portes aux Frères de toutes Obédiences

La « Loge Robert Burns » de La Grande Loge Écossaise de France est une Loge dite de recherche. Elle est surtout, la première Loge internet au REAA dans le monde.

Elle ouvre aujourd’hui ses portes aux Frères issus de toutes obédiences dans le respect de la confidentialité et de la double appartenance.

Elle est novatrice sur bien des aspects.

A qui s’adresse-t-elle ?

Aux Frères Maitres qui sont dans des Loges REAA
A tous les autres, intéressés par ce rite.
Aux Frères qui sont éloignés pour diverses raisons (maladie, vieillesse, isolement géographique, déception, manque de ressources, expatriation…). Enfin, à tous ceux veulent reprendre le chemin maçonnique du REAA

Quel est son contenu ?

C’est une Loge de travail et d’échange : 

Planches avec des sujets et des thèmes de travaux.
La parole circule : des forums interactifs sur des sujets relatifs Au REAA
Une bibliothèque interactive pour mettre à disposition des ouvrages, des articles, des Planches et des recherches sur le REAA
Trois Tenues Physiques par an, des Tenues Dématérialisées (sous forme de réunions vidéo avec un logiciel interne au site et sécurisé) le reste du temps

Chaque frères apporte sa pierre et fait vivre le contenu.

Un site, des sites ?

Cette Loge est effectivement une Loge internet avec un site de travail. Elle est également une Loge itinérante. L’objectif est que les Frères de Robert Burns qui le souhaitent puissent se réunir pour des tenues physiques. Elles se tiendront plusieurs fois par an dans différents sites, sur le territoire national, mais aussi à l’étranger.

Cette Loge mondiale n’est donc pas limitée par le nombre de Frères.

Notre Chaîne d’Union ne cesse de s’enrichir par son concept novateur et fait de Robert Burns une Loge unique sans frontière.

Robert Burns, est plus quune Loge, c’est un voyage initiatique !

« Où que je sois, mon cœur est toujours dans les Highlands. »

Robert Burns (1759-1796)

La Respectable Loge assure la confidentialité à tous ses membres dans le pur respect de la double appartenance. Son accès est exclusivement réservé aux membres.

La capitation est volontairement réduite (33€ / an) afin que chacun puisse participer.

 

Informations 

HTTPS://robert-burns.glef.fr

Mail : robert-burns@glef.fr

VM : Jean-Jacques BOR

GLEF

45 avenue Gambetta – 75020 Paris

Déontologie ou conséquentialisme ?

Pendant le confinement, je passe du temps sur les réseaux sociaux (qui se révèlent être des cafés du commerce en moins sympathique). J’ai pu constater qu’il y avait chaque jour une polémique sur pas grand-chose. Much ado about nothing. Celle du moment est plutôt sérieuse puisqu’elle concerne le bien-fondé d’un travail de recherche sur un traitement à base d’un antipaludéen pour soigner les symptômes du SARS-Covid-19. Un éminent virologue de Marseille affirme avoir un traitement efficace contre le virus. Soit. L’Académie et la Faculté lui reprochent de ne pas avoir été assez rigoureux et de ne pas avoir suivi la procédure en vigueur pour faire valider ledit traitement. La polémique est toujours en cours. Je crains qu’on ne sache qu’au nombre de morts qui avait raison ou tort… Mais il faut respecter la procédure.

Dans un tout autre registre, en fonction publique territoriale, des travaux sont nécessaires pour faire une réparation d’urgence dans une école, mais le montant nécessite l’ouverture d’un marché public, ce qui prend du temps. Impossible de faire travailler une entreprise proche, sous peine d’accusation de « favoritisme ». L’école n’est pas sécurisée pour la rentrée, mais la procédure a été respectée.
Autre exemple, toujours en territoriale, toujours en école. Pour faire un trou pour déplacer un tableau, il faut effectuer des diagnostics plomb et amiante (plusieurs mois d’attente) avant de faire les deux trous. Et tant pis si le tableau est trop haut pour le professeur. Les procédures sont là pour être respectées.

Encore l’école. Imaginons qu’un enseignant se rende compte d’une difficulté dans sa classe et qu’il décide de la corriger en utilisant des outils hors de la pédagogie autorisée par le rectorat ou l’Académie. La difficulté sera peut-être rectifiée, mais l’enseignant aura de gros ennuis avec son inspecteur, parce qu’il n’aura pas respecté la procédure.

Plus sinistre, la polémique autour des attentats du 13 novembre 2015. Il y avait une troupe de militaires de l’opération Sentinelle à proximité du Bataclan, qui aurait reçu l’ordre de ne pas intervenir, au motif qu’on n’était pas en guerre. La préfecture a préféré faire venir de plus loin les troupes du RAID et du GIGN. On connaît malheureusement la suite. Mais soyons rassurés, la procédure a bien été respectée, semble-t-il. Voilà qui devrait porter du baume au cœur des proches des victimes…

Cynisme, me direz-vous ? Que non point. En fait, ces situations réelles comme imaginaires illustrent une réalité de nos fonctions publiques. Nous autres fonctionnaires sommes astreints à une déontologie, et donc à une éthique déontologique. L’éthique déontologique dérive de l’éthique kantienne et pose l’existence de principes à valeur de sacré, et avec lesquels il est impossible de transiger. Ce peut être un principe tel que « toute vie est sacrée » ou bien d’autres choses. Dans le cas de l’administration française, les valeurs avec lesquelles on ne transige pas sont la probité et l’intégrité du fonctionnaire, l’obéissance, le respect de la procédure. Et dans le cas de la commande publique, la liberté d’accès, l’égalité de traitement et la transparence de la procédure. Si la boussole de la fonction publique est l’intérêt général, ou le bien public je me demande si on ne les confond pas avec le respect de la procédure, au point que le respect de la procédure peut nuire à l’intérêt général. Si je fais un parallèle avec la chose militaire, c’est un peu l’inverse. Il faut savoir que la Prusse au XIXe siècle avait créé un mode de fonctionnement par résultat : les militaires étaient libres du choix du moyen pour atteindre l’objectif, ou la fin. Ils étaient ainsi « libres d’obéir »i. L’administration française fait l’exact contraire.

Face à cette éthique de déontologie s’oppose l’éthique conséquentialiste. Le conséquentialisme consiste à n’avoir pour fin que la bonne atteinte des objectifs, sans souci de principes initiaux. Une forme de machiavélisme contemporain : « la fin justifie les moyens ». Les deux éthiques (déontologique et conséquentialistes) sont incompatibles et inconciliables, et il n’existe aucune solution simple à un dilemme entre ces deux approches.

En fait, on peut imaginer pour les quatre situations ci-dessus une autre fin : donner l’ordre d’agir pour l’intérêt général envers les principes de l’administration et contre la procédure, faire les travaux nécessaires dans l’école dans l’intérêt des élèves et de l’enseignant ou encore utiliser massivement le traitement contre le virus. Malheureusement, tout cela constitue une désobéissance (donc une faute pouvant être sanctionnée par l’administration ou la juridiction compétente). Mais parfois, la transgression est nécessaire pour le bien de tous, surtout en période de crise. Par contre, elle suppose un sacré sens des responsabilités, car en cas de non-respect de la procédure (et même en cas de respect de la procédure), l’administration n’hésitera pas à désavouer, voire à lâcher ses agents, qui devront donc assumer la responsabilité de leur action. Ceux qui désobéiront seront souvent seuls en cas d’ennui.

Le fonctionnaire est un agent, mais pas un sujet politique. Il n’a pas à désobéir à un ordre, sauf si celui-ci est manifestement illégal ou s’il présente un danger grave. La peur de la sanction amène en effet à se réfugier derrière la procédure. Mais qu’en est-il de la souffrance éthique de l’agent ? Savoir qu’on peut régler un problème et être empêché de le faire à cause d’une procédure est en effet très perturbant. Le respect de la procédure ou le management par process peuvent atteindre très vite leur point d’absurdité et l’agent son point d’objection, voire son « point d’abjection ». Pire, si on en revient à Hannah Arendt, obéir aux ordres sans se poser de questions, c’est s’exposer à la « banalité du mal ».

En tant que Franc-maçon et fonctionnaire, je connais malheureusement bien ce dilemme et je sais qu’il n’a pas de solution simple. La seule chose que je puisse faire est de me mettre à l’ordre, et symboliquement, de donner les coups de maillet sur la pierre brute, afin de faire jouer mon discernement pour faire mon devoir. L’idéal de la Franc-maçonnerie est l’accomplissement du Devoir, quels que puissent en être les sacrifices qui en résultent. Le devoir doit être fait en toutes circonstances. Nous ne devons être satisfaits qu’à l’approbation de notre seule conscience. Le choix entre déontologie et conséquentialisme est donc un choix personnel, qui demande notre entière responsabilité, et qui nécessite donc que nous soyons des sujets, et non simplement les agents d’un système ou d’une machine.

Ne nous laissons pas faire, restons humains.

J’ai dit.

iOn pourra lire à ce propos l’excellent essai de Johan Chapoutout, Libres d’Obéir-Le management, du nazisme à aujourd’hui paru chez NRF en janvier 2020.

Réflexions pour le monde d’après

Comme tout le monde, je suis confiné chez moi. J’ai pu trouver de quoi m’occuper, qui me prend du temps : recoudre ma tenue d’arts martiaux, aménager un coin bureau digne de ce nom pour m’occuper de projets de longue haleine, classer ma bédéthèque (8 mètres linéaires), tenter de télétravailler, réduire mon année de retard en lecture de livres divers, me refaire une santé et bien sûr, garder les liens avec les outils modernes. D’ailleurs, mes Frères et moi parvenons à communiquer ensemble via des outils de téléconférence.

Et comme je suis souvent connecté, je peux lire les journaux divers et réfléchir non seulement au présent mais aussi à l’avenir. Ainsi, j’ai appris avec joie que des milliards allaient être débloqués pour soutenir les entreprises, et peut-être même l’hôpital public. Il me semblait qu’en pleine crise, il avait été rétorqué aux personnels soignant qu’il n’y avait « pas d’argent magique ». Si ces milliards sont disponibles d’un coup de baguette magique, pourquoi ne pas les avoir mobilisés avant, pour, au hasard, créer des logements sociaux (voire des logements tout court) là où il y en avait besoin, dans les « zones en tension » pour reprendre les termes à la mode ? Ou permettre le maintien d’activités industrielles et donc les équilibres socio-économiques locaux ?

L’avantage des crises, pour les dirigeants, c’est que ces derniers peuvent créer des lois vers la société d’ordre et par conséquent s’amuser à réduire chaque jour un peu plus les libertés individuelles. Il n’y a qu’à étudier certaines dispositions de lois d’exception passées dans le droit commun durant l’état d’urgence proclamé au lendemain des attentats du 13 novembre 2017. Dispositions qui tendent à renforcer le pouvoir de l’exécutif au détriment du judiciaire, par exemple…

Là, le danger est différent, même si le principe est le même. D’après l’hebdomadaire Mariannei, il semblerait que le gouvernement ait décidé d’utiliser la crise comme prétexte pour revenir sur certains acquis sociaux comme les 35 heures ou les congés payés… Certes, il s’agit de lois d’exception. Néanmoins, le mot «provisoire » a été omis de ces textes de lois. Négligence ou malveillance ?

Nous avons une tradition dans notre beau pays de voter des lois d’exception pour chaque situation exceptionnelle, qui perdurent dans le droit commun. Parfois même au détriment des rédacteurs et législateurs de la loi d’exception, d’ailleursii. Néanmoins, le danger est grand, très grand de voir ce que nos ancêtres avaient acquis réduit à néant par une clique néolibérale et inhumaine, dont l’ardoire ne cesse de s’alourdir : réforme des retraites inepte, injuste et impopulaire passée par article 49-3, refus d’extension des congés de deuil d’enfants, au motif de coût trop élevés pour l’entreprise, accélération de la casse des hôpitaux (dont nous subissons les conséquences aujourd’hui), réforme de la fonction publique (adoptée en douce en août), réforme des impôts et de la fiscalité qui ont eu pour effet de priver le secteur associatif de ressources indispensables, privatisations diverses de biens stratégiques au profit d’intérêts privés, sans compter les nombreux conflits d’intérêt des uns et des autres. Nous avons aussi sur cette même ardoise le blocage d’une directive européenne sur l’allongement du congé parental pour les jeunes pèresiii. L’égalité homme-femme n’entre donc pas dans le « proooooooooojeeeeeet » de la « start-up nation ». Trop cher pour l’entreprise, paraît-il. Dommage, car si les femmes étaient payées de manière égale aux hommes, il y aurait étrangement moins de problème de coûts pour les assurances sociales. A méditer…

Mes problèmes de hernie font que je ne m’abaisserai à évoquer les frasques des uns des autres, assez idiots pour être pris en photo ou vidéo dans des situations compromettantes. Le tableau est chaque jour un peu plus moche, certes, mais au final, stationnaire. On se souviendra de l’éloge funèbre de Clémenceau à l’endroit du président Félix Faure, retrouvé mort en compagnie de sa maîtresse : « il voulut finir César, il ne finit que Pompé ». Ah, que des gens comme Clémenceau nous manquent.

J’en viens à me demander ce que nous attendons des gens qui nous dirigent. De l’efficacité pour les missions de l’État, certes. Mais dans ce cas, des hauts fonctionnaires formés au commandement ou à la gestion de crise devraient suffire, non ? De l’amour, peut-être ? Ou au moins, de la considération ? Hum, quand un chef d’État parle de « gens qui ne sont rien » en évoquant le peuple qui l’a porté au pouvoir, je crois qu’on a encore du boulot. Se départira-t-on un jour du mépris de classe ?
Le problème est qu’il est difficile d’attendre quoi que ce soit d’une aristocratie privilégiée, coupée de la réalité du monde ( aristocratie souvent héréditaire et endogame, rendant ainsi caduque l’espérance de la méritocratie républicaine). En fait, je me demande si nous n’attendons pas de nos dirigeants une éthique des vertus, à savoir se comporter comme des gens de bien, vertueux. D’où le fait que leurs frasques filmées nous sont de plus en plus intolérables.

Pour ma part, outre un minimum d’exemplarité, j’attends de nos dirigeants un peu de pensée à long terme dans leur action, avec peut-être un peu de régulation dans l’économie, ne fût-ce que pour éviter de laisser fermer, par exemple une usine d’équipements sanitaires tels que des masques médicauxiv , en Bretagne, pour le profit de quelques uns. Les plans de relance montrent bien que l’économie est un fait politique et non un phénomène en tant que tel. Donc il est faisable de créer une économie respectueuse du droit, de l’environnement et surtout, utile en cas de problème. Oui, c’est keynesien. Mais John Maynard Keynes ne s’est jamais trompé, contrairement à Alan Greenspan.

En fait, il faut comprendre, que dans l’esprit français, il y a toujours de la méfiance entre ce qui vient du pouvoir central et la base, en raison de l’absence de connexion entre ces deux lieux. L’histoire de l’administration française est celle de la centralisation du pouvoir et de la gestion d’un territoire vaste, liant plusieurs territoires que tout sépare. La Convention et les régimes qui ont suivi ont tenté d’instaurer une langue, le français parlé en Touraine et un grand récit (le fameux « Nos ancêtres les Gaulois ») pour tenter d’assembler ce qui était épars. Malheureusement, l’imposition de cette norme s’est faite par la force. A ce propos, les corps intermédiaires, ceux que le pouvoir en place a méprisés et lessivés, avaient pour fonction d’adoucir les esprits. Je crains qu’il ne soit trop tard maintenant.

Dernière petite réflexion pour la semaine, à propos de contrat social : l’Acte Unique, le Traité de Maastricht et tous ces documents qui constituent le « droit primaire » imposent à l’État de ne garder que ses fonctions régaliennes (police, armée, justice, fiscalité). Et si, dans ces fonctions régaliennes, on y incluait aussi la santé ? On aurait ainsi un peu plus de contrôle sur le nombre de lits disponibles, on paierait un peu mieux le personnel soignant, et on limiterait les dégâts des Diafoirus des grands laboratoires ! Dans la mesure où les fonctions régaliennes consistent à maintenir l’existence de l’État et donc celle de ces citoyens ou sujets, la santé y a largement sa place. Le débat doit être lancé, pour notre futur à tous.

Certains me reprocheront de trop politiser mon propos, voire d’être un pilier de café du commerce. Ils en ont le droit. Néanmoins, je crois utile, en tant que Franc-maçon, d’appeler à la vigilance, voire d’alerter sur la casse du contrat social français, contrat social dans lequel nos prédécesseurs ont été très impliqués, quand ils ne l’ont pas tout simplement établiv.

Plus que jamais, soyons vigilants.

Ne nous laissons plus faire.

J’ai dit.

ihttps://www.marianne.net/societe/c-est-confirme-la-loi-urgence-coronavirus-va-revenir-sur-les-droits-aux-conges-les-35-heures

iihttps://youtu.be/O2Vq0SVSdXg

iiihttps://www.marianne.net/societe/conge-parental-la-france-la-manoeuvre-pour-bloquer-une-directive-europeenne-favorable-l

ivhttps://www.ouest-france.fr/bretagne/plaintel-22940/cotes-d-armor-38-emplois-menaces-honeywell-le-fabricant-de-masques-plaintel-5764734?fbclid=IwAR0gpIOnMBk8KkARVexKjEylQgaLy-lDWjL961IgACi0ncxm4sLGgfuwzd0

vVoir à ce propos mon billet sur le solidarisme, sur cette même plate-forme.

Negredo

En raison des mesures prophylactiques prises par notre gouvernement dues à la crise sanitaire, je n’étais pas en Loge hier soir. Les Francs-maçons sont connus pour être des gens raisonnables et disciplinés, surtout dans ma Loge qui est un modèle historique d’exemplaritéi. Me voilà donc en confinement comme pas mal de monde. Je fais partie des privilégiés, ceux que Marx désignait comme les « analystes symboliques », je peux donc me permettre d’exercer mon emploi à domicile, sous certaines réserves et conditions. Mais mon boulot s’apparentant plus à un « bullshit job », je pense que notre pays ne souffrira pas d’éventuels retards dans le traitement de mes dossiers…

Plus sérieusement, l’avantage que je vois à cette crise sanitaire, c’est que nous allons réellement prendre la mesure de ce qui est important et de ce qui ne l’est pas. Ainsi, en ces temps de crise, nous réalisons combien sont importants les métiers du soin, de l’hygiène, les missions régaliennes, bref, ce qui, par un très étrange hasard relève des missions de service public parce que non lucratif. Il est quand même dommage que les services publics (si, vous savez, les hôpitaux, les écoles, les crèches, le nettoiement, la voirie etc.) aient été si souvent vus comme des charges, des poids, des dettes, ou accusés de lester la dette de l’État. Mais pourtant, c’est souvent vers l’État qu’on se tourne en cas de crise (cf. les banques en 2008).

En fait, j’ai l’impression que notre société est terrassée par ce micro-organisme comme Mme Mim, transformée en dragon le fut par Merlin transformé en microbe dans le Merlin l’enchanteur de Walt Disney.

Il a donc suffi d’un virus pour se rappeler de ces choses fondamentales : nous sommes mortels, et les politiques d’austérité tuentii. Le nombre de lits a été dramatiquement baissé depuis une vingtaine d’années, des hôpitaux ont fermé, nous manquons de médecins dans les régions rurales, la situation des aides-soigants et infirmiers est honteuse, etc.

A l’heure à laquelle j’écris ces lignes, je ne sais rien de ce qui va se passer, à part qu’on en a pour au moins quinze jours et qu’il faudra un laisser-passer pour des courses élémentaires. La seule chose que je sais, c’est qu’il faut rester chez soi jusqu’à nouvel ordre. Non pour éviter de tomber malade, mais plutôt pour éviter de saturer des hôpitaux déjà à bout de souffle avec les complications que ce virus peut engendrer. N’infligeons pas à un praticien de devoir choisir entre la vie ou de mort sur un patient, parce que nous manquons de matériel. Ils n’ont vraiment pas besoin d’ajouter cette souffrance éthique à une situation déjà inhumaine.

A ce propos, je tiens à rappeler à mes Frères et Soeurs sur la Terre une partie de nos obligations : respecter les lois et l’autorité légitime du pays où nous vivons et nous réunissons librement (même si en ce moment, c’est un peu compromis). C’est notre devoir, à accomplir même si ça nous coûte.

Aller en Loge me manque, certes. Mais je vais utiliser ce laps de temps de repos forcé pour travailler à après la crise : rédiger mes prochaines planches et prochains billets, travailler à des projets professionnels comme des formations continues. Et bien entendu, lire, écrire, visionner les années de séries que j’ai en retard, rattraper mon retard dans mes jeux vidéo… Bref, je vais utiliser ce temps d’ermitage pour me ressourcer, j’en ai bien besoiniii.

J’espère que nous tirerons les leçons de cette crise sanitaire, qui va, je le crains en entraîner d’autres dans d’autres domaines : difficultés pour les commerçants, dont les affaires ont déjà bien été entamées par les grèves et mouvements sociaux, paniques boursières,

Dans un précédent billet, j’avais écrit en pompant honteusement Camus que la société des morts avait pris le pas sur celle des vivants. C’est plus encore aujourd’hui le cas. Mais nous autres Maçons savons aussi qu’il faut savoir mourir (symboliquement) pour renaître.

Certes, nous sommes confinés, cloîtrés. Mais nous pouvons utiliser ce temps pour penser, et réfléchir au monde que nous voulons créer. Je vous offre quelques pistes, avec mon biais d’affreux socialo-marxiste à tendance keynesiennes. Par exemple, voulons-nous continuer à dépendre de la Chine ou d’autres pays, où nous avons installé nos usines pour des raisons de coûts, nous rendant de facto dépendants d’eux pour des industries importantes, voire stratégiques (au hasard, la production de médicaments) ?
Allons-nous continuer à mettre à sac l’environnement pour produire des biens et des services finalement très futiles ?

Allons-nous continuer de surexploiter les ressources naturelles et de gaspiller impunément ?

Devons-nous conserver l’Acte Unique, ce traité européen qui impose pour tous les Etats membres la concurrence libre et non faussée pour leurs services publics non régaliens ?
Allons-nous persévérer dans cette voie du profit pour quelques uns et de la précarité pour les autres ?
Allons-nous continuer de laisser réduire nos libertés individuelles en raison des crises différentes que nous avons traversées?

Bref, allons-nous continuer dans cette voie de la mort lorsque nous reviendrons à la vie ?

J’ai dit.

iLes initiés auront décelé une antiphrase dans mes propos.

iiJ’emprunte ce parallèle à Thomas Porcher, des Economistes Atterrés

iiiRassurez-vous, j’ai quelques billets d’avance, vous pourrez toujours me lire le jeudi !