sam 19 avril 2025 - 04:04
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Des chiffres et des maux (2)

Nous sommes dirigés par des Shadoks. Vraiment. J’en veux pour preuve la déclaration d’une secrétaire d’État un matin à la radio, qui expliquait doctement que tout le monde allait devoir faire des efforts pour lutter contre la crisei. En très gros, il faudrait s’attendre à produire un « effort de guerre » (même si on n’emploie plus ce vocable, étrangement) et consentir à une baisse des revenus et un recul des droits pour les salariés. Certes, il est peut-être question de demander aux grands patrons et autres toucheurs de dividendes de se restreindre un peu. Bonne idée, demandons-leur, poliment. Ce qui reviendrait à dire à un tigre prêt à bondirii « couché kiki » ! D’ici là, tapons sur les salariés, car « pour qu’il y ait le moins de mécontents possibles, il faut taper sur les mêmes », principe Shadok bien connu. Sauf que, tout comme les Cauchemars d’Iznogoud, les Shadoks sont une satire, mais en aucun cas un manuel politique.

D’un autre côté, en lisant la presse, j’ai appris qu’un grand patron d’entreprise française (bénéficiant d’aides d’État) allait toucher un bonus d’environ 800 000 Euros au titre de l’exercice 2019. Autrement dit, une rémunération en plus de son salaire normal (que je ne connais pas, s’il en touche un).

Certes, en comparaison de bonus invraisemblables, la somme de 800 000 Euros est petite, ridiculement petite. Mais elle a quand même un sens. En fait, elle représente plus que ce que la plupart d’entre nous toucherons dans toute notre vie. Ainsi, ces 800 000 Euros représentent près de 33 années de salaire à 2 000 Euros mensuels. Soit plus que toute la carrière d’un enseignant, d’une infirmière, d’un éboueur ou d’une caissière… Plus que le salaire d’un travailleur de « première ligne ». D’où mon questionnement : qu’est-ce qui justifie un tel écart de salaire? Pourquoi un type qui siège dans un conseil d’administration reçoit-il en une année plus que ce que d’autres gagneront difficilement en une carrière ? A l’inverse, pourquoi des gens dont l’emploi est indispensable à la société ont-ils autant de mal à joindre les deux bouts ?

L’anthropologue David Graeber énonce cette « loi d’airain du capitalisme » : l’utilité de l’emploi est inversement proportionnelle à sa rémunération. Si on peut ratiociner sur les origines de cette situation d’inégalités, décidément insupportables, la question que nous devrons nous poser est : jusqu’à quel point supporterons-nous encore ces inégalités dans notre pays ? Et surtout, comment nous en sortir ?

Le symbolisme maçonnique nous amène à tous nous réunir sur le Niveau, au même âge, et ce, dépouillé des Métaux. Autrement dit, à faire abstraction des distinctions sociales. Par conséquent, le fait qu’un homme puisse, par sa seule présence, gagner en quelques mois plus que ce que d’autres gagnent en une vie nous est difficilement explicable, voire supportable (ou alors, je n’ai rien compris). Les ouvriers doivent toucher le salaire qui leur est dû, mais face à ce type d’inégalité, que dire, que faire ?

Par ailleurs, on peut voir la situation autrement. On demande aux salariés des sacrifices pour sauver la société ou l’entreprise. Soit. Leurs salaires vont potentiellement baisser et la charge de travail augmenter. Soit, même si c’est très injuste. Mais dans ce cas, cet effort consenti pour sauver la société ou l’entreprise n’implique-t-il pas de sacrifier sa vie ou sa famille à ladite société ou entreprise? Mais surtout, l’entreprise ou la société en fera-t-elle autant pour ses salariés ?
Quand les grands patrons reçoivent des bonus équivalents à 400 fois un salaire, on est en droit de se douter que non, et que les salariés se feront taper dessus, ou sacrifier, en bonne chair à canon. Logique Shadok, vous dis-je. Taper sur les mêmes pour limiter le mécontentement…
Créer de la valeur, c’est bien, mais partager équitablement cette valeur, c’est mieux. Car il ne faudrait pas oublier que ce sont les salariés, les ouvriers qui font vivre la boite, pas les gestionnaires.

C’est un peu pareil en Loge. Une loge qui n’aurait plus qu’un ou deux Maîtres sur les Colonnes et son Collège d’officiers serait condamnée à mourir ! Ce sont ses Ouvriers qui maintiennent le chantier et le font vivre. Un Ouvrier qui ne perçoit plus son salaire, c’est un Frère perdu et une Loge qui se délite irrémédiablement. Alors pour protéger la Loge, protégeons ses Ouvriers, en leur donnant envie de rester.

Et faisons pareil dans le monde profane : la valeur, la vraie vient du travail fourni par les salariés, les ouvriers, les travailleurs « de base », pas des bullshit jobs. Ceux qui perçoivent ces bonus indécents ne devraient pas l’oublier…

J’ai dit.

ihttps://www.franceinter.fr/emissions/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-03-juin-2020

iiClin d’oeil à un sketch de Franck Lepage

Le soin ou la santé ? Telle est la question.

Depuis l’intervention d’André Comte-Sponville sur France Inter, intervention durant laquelle il faisait part de son inquiétude sur l’érection de la santé comme valeur suprême, le débat est ouvert. Doit-on sacrifier la liberté, les droits les plus élémentaires au nom de la santé publique, qui est elle-même un leurre à en juger par les politiques de destruction de l’hôpital public depuis plus de 30 ans, et accélérées depuis 2017 ?

Le confinement avait pour effet de ne pas saturer les hôpitaux, dont le nombre de lits disponibles était clairement insuffisant, nous le savons tous. Si nous commençons à revenir à une forme de normalité (qui consiste à ne faire que travailler et à s’interdire de vivre), je crains qu’on n’assiste aussi à une vague de pathologies psychologiques. D’après un certain nombre d’études, l’épidémie a aussi mis en lumière un certain nombre d’inégalités sociales : accès au soin, décence du logement, reconnaissance du statut etc. D’ailleurs, en reconnaissance de leurs efforts, les soignants auront droit à une médaille. Bon, recruter du monde, augmenter décemment les salaires, payer les heures supplémentaires, rouvrir les lits, en finir avec les politiques délétères inspirées des moments les plus sombres du management et de l’austérité, ça, visiblement, ce n’est pas à l’ordre du jour.

Sinon, il m’est venu une autre inquiétude, à la lecture du numéro de Charlie Hebdo du 13/5/20, numéro spécial santé. Les éducateurs spécialisés y faisaient part de leur questionnement et de leurs craintes sur les conséquences du confinement sur les patients dont ils avaient la charge : enfants, ados ou jeunes adultes à risques, et dont il faut prendre soin. Les décisions politiques sont, et ce depuis 30 ans, très défavorables à la psychiatrie. Les accueils de jours ferment régulièrement, mettant à la rue des patients légers et les condamnant à la mort, autant sociale que physique. Parmi les SDF et marginaux que nous croisons dans les grandes villes, combien devraient être en structure d’accueil ? Combien devraient être suivis par des éducateurs et des praticiens? Mais la vraie question serait plutôt : dans quels critères RH rentre la santé mentale des plus fragiles…

En France, nous avons gardé en mémoire les grandes épidémies qui ont régulièrement décimé la population : la peste, le choléra, la rage, etc. Les grandes découvertes médicales du XIXe siècle, telles que l’ensemble des travaux de Louis Pasteur, la découverte du bacille de Koch (responsable de la tuberculose) en 1882 par le médecin éponyme, ou encore la découverte du bacille de Yersin (responsable de la peste) en 1894, avec le courant de pensée scientiste de cette époque, nous incitent à penser que la science peut tout, doit tout résoudre… Y compris les grandes épidémies ! Bon, la grippe espagnole de 1917, la grippe asiatique de 1967, le SRAS issu du virus SARS-Cov-2 ont montré que même la science avait ses limites. Limites d’autant plus restreintes qu’elles peuvent être issues de décisions politiques, comme abandonner un programme de recherche en virologie en 2004, consacré aux coronavirus (cf. Charlie du 13/5 et l’appel du virologue Bruno Canard). Et ceci, sans compter les innombrables conflits d’intérêt de personnes politiques inféodées aux grands laboratoires pharmaceutiques, ceux-là même qui s’approprient le résultat de la recherche publique pour en tirer une rente (cf. la polémique sur les médicaments contre l’amyotrophie spinale vendus à un prix prohibitif, d’autant plus indigne qu’aucun investissement n’est à rembourser par les fabricants). Tout n’est pas rose non plus dans le beau monde de la science : querelles d’ego, politiques mesquines etc. font que le vrai travail critique et le vrai examen scientifique (clarté des hypothèses, choix des variables, reproductibilité de l’expérience etc.) se réduit souvent à des attaques ad personam pour de sombres histoires somme toute bien humaines.

Mais si ces querelles de chapelle ont toujours existé dans l’histoire de la recherche, il en est une autre que notre société industrielle a totalement occultée. Cette question fut posée par un de nos Frères, un certain François-Vincent Raspaili. Il s’agit de la corrélation entre la maladie et la situation sociale.
Ainsi, Raspail avait réfléchi aux causes sociales de la maladie. Il pensait entre autres, outre sa théorie sur les vers et animalcules (à soigner par son remède miracle, la liqueur de camphre Raspail et le système Raspailii…), que l’hygiène et les conditions d’habitat jouaient un rôle majeur dans la propagation des épidémies. Il militait donc pour une république sociale, capable de permettre à tous d’habiter dans un logement sain et non un infâme bidonvilleiii. Cette idée a été rapidement abandonnée au profit des campagnes de vaccinations et des mesures prophylactiques initiées entre autres par Pasteur. Peut-être parce qu’elles sont moins coûteuses à mettre en place qu’une vraie politique de création de logements salubres, éclairés, aérés, ou une vraie politique d’urbanisation qui éviterait de mettre les bureaux d’un côté et les logements beaucoup plus loin. J’espère que nos politiques se poseront cette vraie question d’aménagement urbain configuré de manière à limiter la propagation d’agents infectieux… Ce serait une belle revanche pour notre Frère Raspail !

Et pour en revenir au soin et à la santé : le coup de gueule (salutaire) d’André Comte-Sponville dénonçait l’avènement de la santé comme valeur suprême. Je pense qu’on peut aller plus loin. S’il s’agissait réellement de l’érection de la santé comme valeur suprême, aurait-on fermé les cabinets de psychiatrie, de psychologie, d’orthopédie, de médecine spécialisée, bref, de tout ce qui constitue le soin ?
Je me demande si on n’a pas plutôt érigé un ersatz de santé publique, une forme de santé se réduisant à des indicateurs statistiques ou RH, comme la variable aléatoire que constitue le nombre de morts de la pandémie, ou pire, la santé comme l’absence de maladie ! Ce qui serait stupide, car au sens de l’OMS, la santé se définit comme « un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ».

Décidément, comme disait Camus, « mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde ». Et là, on est en plein dedans ! En fait, le problème que pose cette décision de confinement, c’est qu’au nom de la santé comme absence de maladie, on détériore la santé en tant qu’état de bien-être physique, mental et social (déjà bien entamée par 30 ans de politiques hospitalières plutôt inhospitalièresiv). Comment peut-on oser décemment évoquer la santé publique quand on ferme des hôpitaux de jour ou des structures de soin ?

En un sens, la santé (en tant qu’absence de maladie) ne doit pas devenir une valeur. Par contre, le soin, ou le care comme disent nos contemporains peut en être une, dans le sens où elle contribue au bien-être de l’humanité. Une belle valeur, même. Pourquoi ? Parce qu’elle fait appel à ce que nous avons de meilleur en nous, le sens de l’hospitalité, elle-même à rapprocher de la fraternité, qui est une valeur éminemment républicaine et maçonnique.

« Le meilleur des chefs, c’est celui qui se bat pour la dignité des plus vulnérables» dit Arthur à Lancelot dans Kaamelot. Or, le soin, c’est justement s’occuper de la dignité des plus vulnérables. Malheureusement, tant que perdureront les dogmes de rentabilité et de virilité imbécile qui voient le chef comme le plus mariole ou qui autorise les plus grands profits, le soin sera considéré comme attribut féminin, donc mineur, par l’entièreté de la phallocratie institutionnelle. Il suffit de voir comment les petit cons aux manettes considèrent les femmes, et plus particulièrement les femmes enceintes, au nom du mythe de l’homme viril n’ayant besoin de personnev

Et si on se réhumanisait un peu ? Et si on apprenait à prendre soin de soi, mais aussi des autres ? Et si on créait une vraie politique du soin, en réajustant en profondeur les travaux liés au soin ? Vaste chantier, peut-être, mais peut-être le plus important de tous.

Ne nous laissons plus faire !

J’ai dit.

i On peut lire sa biographie dans l’ouvrage Les aventuriers de la République-Ces Francs-maçons qui ont fait notre histoire de Jacques Ravenne et Laurent Kupferman

iiMerci de ne pas faire d’amalgame avec la crise actuelle, où un virologue renommé (et iconoclaste) tente de faire son travail de médecin alors que la presse, les politiques, etc. lui tombent sur le râble au nom d’une rigueur qu’ils n’exercent pas forcément sur leurs propres travaux.

iiiAh Seigneur mon Dieu, qu’aurait-il dit en voyant l’état déplorable des logements actuels dans les « quartiers », ou les centres des grandes villes ?

ivJe devrais avoir honte de faire des jeux de mots aussi douteux !

vVoir à ce titre le numéro de Cash Investigation consacré aux inégalités homme/femme : https://www.france.tv/france-2/cash-investigation/1470509-egalite-hommes-femmes-balance-ton-salaire.html

Bienvenue dans le monde d’après!

Comme j’avais un rendez-vous, j’ai dû sortir de ma retraite de confinement. Je devais me rendre dans un quartier normalement animé, avec des cinémas, des théâtres, des bars, des restaurants et des bistrots. Tout était fermé ! Quelle tristesse, vraiment. On se serait cru dans un roman post-apocalyptique de Pierre Bordage, tel que Les derniers hommes ou les Chroniques des Ombres ou encore dans le monde de Dragontown, sur la Brutal Planet d’Alice Cooperi, ce fabuleux dyptique de rock-indus-opéra. Par contre, la rue commerçante était moins inanimée : les petits magasins et les grandes enseignes étaient bien ouvertes. Certes, il fallait faire la queue pour entrer, porter un masque, se laver les mains, etc. Mais tout est fait pour que le commerce se porte bien. Même les librairies commencent à rouvrir. Bon, il est dommage que les jardins, plages, forêts, bref, tout ce qui peut apporter de la vie, du plaisir ou contribuer au bonheur reste irrémédiablement fermé et donne un aperçu de ce que peut être un camp de travail (toutes proportions gardées, bien évidemment). Nous n’en sommes certes pas encore aux conditions de l’île de Sakhaline, telle que les décrit Anton Tchékhov, mais quand même, on tend de plus en plus vers le modèle de société du Village, le cadre de la série Le Prisonnier. Grosse différence, on n’a pas besoin de badge, nos smartphones nous suffisent. Et au Village, il y avait quand même des concerts, des séances de théâtre et de cinéma. Et on pouvait aller sur la plage pour y jouer aux échecs, ou s’asseoir dans un parc…

Bien évidemment, plus de Tenues jusqu’à nouvel ordre. Prendre les transports ? Oui (et encore). Bosser ? Bien évidemment. Consommer ? Naturellement, il faut relancer l’économie, vous savez, ce processus indirectement responsable de ce que nous vivons en ce moment. Mais le reste ? Retrouver des amis ? Non, sauf chez soi. Aller prendre un verre ou un repas ailleurs ? Non. Aller au cinéma, au théâtre ? Et puis quoi encore ! Vivre et trouver d’autres intérêts que la consommation ? Vous n’y pensez pas ! Rendre visite à un membre de sa famille qui vient d’avoir un bébé? Inconcevable!

Bref, nous voilà condamnés à faire œuvre au noir. Mais rappelons-nous que c’est aux heures les plus noires que point la lumière. C’est ainsi pendant le Confinement que j’ai reçu une grande nouvelle.

Malgré le contexte difficile que nous vivons, j’ai la joie de vous annoncer la sortie prochaine de mon ouvrage : l’Ethique en Franc-maçonnerie, chez Numérilivre-Editions des Bords de Seine (https://numerilivre.fr/fr/accueil/174-166-l-ethique-en-franc-maconnerie-142.html#/35-type_ouvrage-livre_papier). J’ai fêté ça aussi dignement que notre existence actuelle le permet : soirée pizza avec des amis chez moi. Il nous reste encore ça, profitons-en.

Vivement que nous retrouvions un semblant de vie normale, que je puisse avoir la joie de vous rencontrer en salons ou en librairie, et peut-être même en Loge !

J’ai dit.

PS : l’ouvrage est disponible sur le site de l’éditeur en pré-commande et aussi en librairie à partir de juin. Mais si vous m’en voulez vraiment, vous pouvez le commander sur le site fondé par Jeff Bezos, l’homme aux mille milliards de dollars.

iSoit dit en passant, Alice Cooper a sorti un single confiné, avec ses musiciens, fort justement intitulé Don’t give up. Je vous encourage à l’écouter, et à visionner le clip. Une belle chaîne d’union virtuelle.

Dîner de cons

Nos dirigeants sont cons.

Ce n’est pas un jugement de valeur ou un quelconque mépris de classe, mais bien une réalité. Prenons l’exemple de la gestion de la crise sanitaire. Dès décembre 2019, nos dirigeants ont été avertis de la présence d’un virus dangereux en Chine. Ont-ils pris les précautions nécessaires (au hasard commander des tests, du matériel médical adapté ou vérifier le bon état des réserves stratégiques de masques et de médicaments etc.) ? Non. Il faut dire qu’en décembre 2019, la priorité de nos dirigeants était plutôt la gestion du mouvement social de contestation de la très impopulaire (et inutile) réforme des retraites, décidée unilatéralement, passée en force et contre la volonté générale. Alors, la pandémie… « Gouverner, c’est prévoir », dit-on. Visiblement, nous avons porté au pouvoir une clique d’incompétents notoires, incapables de voir à quelques semaines ! C’est bien la peine de vanter les « Grandes Ecoles », la « méritocratie », qui n’est qu’une forme dévoyée d’aristocratie pour en arriver à ce désastre causé par cette incapacité d’anticipation et cet aveuglement, quand il ne s’est pas agi de mentir délibérément au peuple.
Ceci dit, ces braves gens ont quand même été prévoyants : en prévision des plaintes qui ont été déposées contre quelques uns, leurs séides dans les deux Chambres tentent de faire passer un amendementi, qui exonérerait les décideurs et autres édiles de leur responsabilitéii… Un genre d’amnistie préventive, en fait. Affaire à suivre de très près.

Un confinement et une catastrophe économico-psycho-sociale plus tard, nous allons retourner au travail (et pas retrouver une vie normale, j’insiste là-dessus). Bon, je ne crois pas utile d’alimenter la polémique sur le retour à l’école, l’obligation basée sur le volontariat de remettre les enfants à l’école, qui n’est au fond qu’un prétexte pour remettre les travailleurs au travail et contribuer aux dividendes des grandes entreprises du CAC40iii. Là, ce n’est pas de la connerie, mais de la malveillance, voire de la haute trahison. Mais la vraie connerie est ailleurs.

Maintenant que nous allons retrouver une portion de liberté de circuler, les dirigeants d’entreprises de services et d’administrations ont décidé de ramener leurs salariés dans leurs locaux et bureaux. Et visiblement peu leur importe si les conditions de transport ne garantissent pas la protection des travailleurs… Le paradoxe est que dans les services divers (et parfois dispensables, mais c’est une autre histoire), le télétravail a plutôt donné de bons résultats. Donc pourquoi imposer une présence dans des locaux inadaptés (les open spaces et autres déclinaisons du Panoptikonivdestinés à humilier l’Autre sous couvert d’efficacité), quand on a montré qu’elle n’était pas nécessaire ?

J’en viens donc à me demander comment et pourquoi dans les structures entrepreneuriales ou administratives, on en vient à désigner des incompétents, des abrutis ou des malveillants aux postes de management ou de commandement. J’ai donc cherché des réponses et j’en ai trouvé : les biais cognitifs (et je remercie mon Frère et ami Franck Fouqueray de me les avoir fait connaître par son travail à paraître : http://www.lesyndromedupachyderme.com/).

Parmi ces biais, j’en ai trouvé deux dont la combinaison est aussi dangereuse que le sodium et l’eau :

l’effet Dunning-Kruger, ce biais cognitif qui incite les personnes incompétentes à se croire plus qualifiées qu’elles ne le sont, et les empêche de se remettre en question.

le principe de Dilbert, créé par le cartoonist Scott Adams dans son comic Dilbert, qui est une satire de la vie en entreprise. Ce principe consiste à élever les salariés les plus incompétents à un poste plus élevé afin de s’en débarrasser et à empêcher la promotion d’éléments compétents afin qu’ils continuent à faire les tâches qui font vivre l’entreprise.

Ajoutons à cela les intérêts de la classe dirigeante des cadres, qui préféreront avoir à leur disposition des adjoints qui ne remettront jamais en cause leurs décisions pour conserver leurs privilèges minables, sachant que ces cadres sont eux-mêmes des planneursqui planifient des réformes et des restructurations inutiles ou nuisibles, sauf pour les maîtres qu’ils servent. Le problème est qu’on enseigne à ces cadres qu’il faut toujours protéger l’adjoint, pas la victime, ou encore les intérêts de la direction, pas ceux des personnes.

On dispose ainsi de l’ordre social suivant :

  • les plus incompétents (et les plus nuisibles) sont reconnus et promus soit parce qu’ils ont exécuté des ordres sans se poser de questions soit, pour les retirer d’un service, avec une peine d’exil déguisée en promotion.

  • ceux qui tentent de faire leur travail et qui le font avec soin et compétence ne le sont pas et sont amenés à rester à leur poste, sans reconnaissance. Ceux là sont irrémédiablement condamnés à stagner ou plus rarement à se révolter.

  • Ceux qui tentent de protéger leur dignité sont neutralisés d’une manière ou d’une autre.

  • Les managers s’imaginent être des chefs et croient qu’ils vont être obéis en raison de leur simple estampille de chef, ou peuvent en toute impunité humilier ou mettre en danger leur subordonnés parce qu’on leur enseigne que leur hiérarchie les protège. C’est ainsi que des harceleurs sont promus et des victimes neutralisées. En effet, la transgression des règles est permise du chef vers le subordonné, mais surtout pas l’inverse.

  • Enfin, c’est dans cette optique que des incompétents se retrouvent à des postes qu’ils ne méritent pas, et pour lesquels ils ne sont pas aptes et détruisent des vies, parce qu’ils estiment en avoir reçu l’ordre, comme actuellement ces chefaillons qui font revenir leurs ouailles dans les bureaux quand les instructions diverses demandent à maintenir les postes en télétravail pour ne pas saturer les réseaux de transport…

Faire courir un risque inutile pour une vulgaire satisfaction d’exercice d’un simulacre de pouvoir, c’est être con. Ou ignorant. Or l’Ignorance est un mauvais compagnon du Franc-maçon. A ce propos, Camus, dans la Peste nous avertit : « Le mal qui est dans le monde vient presque toujours de l’ignorance, et la bonne volonté peut faire autant de dégâts que la méchanceté, si elle n’est pas éclairée. ». Le problème de nos dirigeants et managers, c’est ce biais, cet effet Dunning-Kruger. Ainsi, sûrs d’eux et voulant contenter leurs maîtres, ils restent sourds et aveugles à la réalité en prenant les pires décisions sans jamais douter. L’ignorance les maintient dans leur bêtise, et leur volonté de plaire les amène au désastre.

Garde à moi de ne pas devenir comme ces gens que je méprise. Heureusement, la Franc-maçonnerie et plus particulièrement le Rite Ecossais Ancien et Accepté me donnent des garde-fous et m’aident à lutter contre l’Ignorance. Ce qui me rappelle le grand secret maçonnique qui m’a été révélé quand j’étais apprenti : « Avant, j’étais con. Maintenant, je le sais. ».

Ne nous habituons pas au désespoir, car comme l’écrivait Camus, toujours dans la Peste : « l‘habitude du désespoir est pire que le désespoir lui-même ».

Ne nous laissons plus faire.

J’ai dit.

ihttps://www.franceinter.fr/justice/responsabilite-penale-des-elus-que-dit-la-loi?

iiLe Canard Enchaîné, 6/5/2020, « Le front de maires effraie ». Il semblerait que la loi d’amnistie ne soit pas de mise, mais restons vigilants !

iiiPetit parallèle freudien :  CAC40 se lit « caca-rente ». De là à penser que ces entreprises sont réellement pestilentielles, il n’y a qu’un pas…

ivConcept de surveillance de prison inventé par le philosophe anglais Jeremy Bentham, permettant à un gardien de surveiller l’ensemble des prisonniers depuis sa place.

Pour aller plus loin:

Christian Morel, les décisions absurdes, Folios Essais, Gallimard, 2002.

 Jacques Fontaine ose descendre aux racines naturelles de l’homo sapiens. Il découvre une autre manière de vivre ensemble. AU CHEVET D’UN MONDE FIÉVREUX Des marionnettes rebelles ? 13 Conclusion Première partie

Conclusion
En route !

Cri dans le désert d’Arne Naess, dès les années 60 : « L’homme ne se situe pas au sommet de la hiérarchie du vivant, mais s’inscrit au contraire dans l’écosphère comme une partie qui s’insère dans le tout » L’extrait vient de son livre au titre déjà révélateur : « Écologie, communauté et style de vie ». Déjà le lien entre notre état de nature et le fonctionnement de notre société. Et le monde commençait à avoir de la fièvre.
Au bout du chemin sur l’état de santé du monde, on se rend compte que ce qui parle au plus profond de l’humain, ce ne sont pas les cultures mais sa nature. Son étude relève d’abord et impérativement de l’éthologie. Nous sommes en cousinage de deux singes ; ils nous apprennent l’essentiel qui palpite dans nos tréfonds : les chimpanzés sont aiguillonnés par la compétition et règlent leurs fréquents conflits sans effusion de sang. Leur organisation est plus pyramidale. Les bonobos, eux, vivent sous le signe de la coopération ; ils règlent leurs conflits par l’affection et la sensualité. Ils préfèrent plutôt, entre eux, les relations en réseaux. En nous, jusqu’alors, le chimpanzé domine. En nous, avec l’hyper-capitalisme et les tristes affabulations qu’il provoque, la déification de l’argent, la consommation frénétique t les technologies pour le meilleur et pour le pire, les guerres en horreurs consommées, nous sommes, hébétés, sous le signe de la compétition. Mais nous sommes aussi des bonobos qui savons coopérer avec intelligence et dévouement, dans les situations douloureuses. Il nous reste donc à recouvrer la santé. Pour cela, osons rebâtir avec les blocs des pyramides qui nous contemplent depuis des siècles.
Commençons par changer radicalement notre regard d’observateurs de nous-mêmes, scientifique ou pas. Prenons la métaphore de l’arbre : l’éthologie nous pose en animal grégaire. C’est notre racine. En sort, le tronc de l’anthropologie et de la sociologie qui étudient les structures et les cultures. Les grosses branches avec les approches de la dynamique des groupe qui nous éclairent, en particulier, sur le fonctionnement des cellules anarchistes Puis les psychanalyse et psychologies qui en sont les branches ; enfin la connaissance de l’humain par lui-même : l’introspection et l’holistivité, ce regard qui embrasse spontanément le tout, le complexe, en dépassement de l’objectivité et la subjectivité.
Avec un regard renouvelé, retrouvons la concentration, la communion et la contemplation. Je me suis efforcé à prescrire un remède à l’état fiévreux du monde. Je le crois susceptible de l’aider à recouvrer une nouvelle santé et de palpiter en ces trois mots de rencontre. Le risque ? La complexité qui empêcherait l’humain de bien prendre en compte ses enjeux d’une société future libertaire.
Car « Quand le travail se fait brouillard, l’humain aussi se vaporise». J’espère que le brouillard s’est, au moins vaguement levé, grâce à la liste des personnages que le système nous demande d’endosser. En ordre croissant d’influence : des marionnettes compulsives et avides, un humain omniscient et hyperactif ; un saigneur, un seigneur, un soumis, des schizophrènes, un humanimal  agressif, et peureux, enfin un humain en passe de devenir un libertaire.

Notre conscience collective prend en charge ces personnages d’importation. Mais le retournement, avant l’effondrement exige, en premier lieu que l’on regarde en face ce que nous sommes sans doute : des schizophrènes qui balbutient de plus en plus entre de nombreuses injonctions contradictoires. Le système, de plus en plus prégnant, de double contrainte nous fait trébucher : nous voulons tout à la fois ; et rien en même temps. Nous sommes avides de modes et de clans, dans l’occultation par l’écran des écrans
Les révoltes et les découvertes pointent leur museau dans des essais. Ils sont, à ce jour et malgré, les pesanteurs d’arrière, concluants : l’éducation libre, l’exemplarité revisitée avec les neurones-miroirs, l’après-vie avec les EMI et les hypothèses sur la survie de notre conscience hors du corps, la transmission épigénétique …et les éco-villages… tout cela, des traductions des utopies en anarchie pacifique. Reste la question métaphysique et vitale de tous les temps : mais qui sommes-nous ?

Oui sommes- nous, aujourd’hui, dans cet imbroglio, ce charivari, ce bredouillis ? Il faut, de plus en plus, que nous soyons à la fois, sous la pression de la société d’argent et de pouvoir, les humains ci-dessous :

• Cratophile ET arquéphile,
• En pyramide ET en réseau,
• Compétitif ET coopératif,
• Ocnophile ET stylobate,
• Solitaire ET solidaire,
• Prédateur, guerrier ET pacifiste,
• Individualiste ET mondialiste,
• Pressé ET méditatif.

C’est ainsi, la société actuelle nous moule, nous façonne, nous modèle en forte schizophrénie. En outre, elle sait bien réveiller nos peurs ancestrales avec le principe de précaution. Et le déversement publicitaire manipulateur. Enfin dans ces doubles injonctions, cette société nous menace d’abandon devant une épidémie virale : c’est la panique. Trembler, ensemble, devant ces dangers, devient la norme de la norme. C’est cela la norme. Elle est un puissant facteur de paix et une sécurisation intérieure. S’efforcer sans cesse de revêtir ces tuniques contradictoires, fait de nous des normosés. Alors, le pari de l’écolo-anarchie, de l’anarchie verte n’est-il pas pure utopie, puisqu’il exige de revenir à notre racine grégaire et à en remettre en cause des composantes « chimpanzées » pour mieux s’embrasser dans des réflexes bonobos ? Moi, j’y crois. Et vous qui lisez ce texte ?

Vite, cassons la voix ! Avant il fallait choisir, sous le joug religieux, un rôle réputé bon et fuir un autre de mauvaise réputation. C’était le règne du OU. Aujourd’hui, avec « la double contrainte », l’injonction paradoxale, nous devons ingérer des contradictions indigestibles. C’est le royaume du ET. Demain, me semble-t-il, nous aborderons d’autres rives, avec le NI/NI. La société en réseaux, l’écolo-anarchie, l’holistivité sont les conditions de cette alchimie. Le Grand Œuvre ? Un humain biophile, dans l’écologie de l’harmonie : avec soi, les autres, la nature.
Ils étaient des bagagistes tranquilles, nous somme des voyageurs inquiets, nous serons des explorateurs courageux. Par les effets d’ « une spiritualité pour agir », chaque humain sera un lac d’amour, dans le réseau de la société humaine. Ainsi, ce sera un NI/NI de douce rébellion. Quoi ? Pas une moyenne, ni une synthèse, ni un juste milieu, pas plus que l’ «aurea mediocritas » des sages de l’Antiquité, mais un nouvel hôte terrestre en tunique d’humble splendeur. Regards vers la Lune et le Soleil ésotériques.
Quand l’eau se transforme en vapeur, quand le feu rayonne de lumière, quand la terre jalouse ses germes, quand l’air balaie les montagnes, alors la Lune et le Soleil s’unissent en effusion circulaire d’amour. C’est la syzygie. Quand l’Homme, à l’instar des deux planètes, s’embrasera de la sagesse du sens de la vie, d’adaptabilité mesurée, de connaissance de soi, de fraternité pour lui est les autres, de biophilie en grande révérence pour les vivants, alors il agrippera le Sol(eil) et la Lune. Les astres l’adouberont « Solune », pour que la chouette hulule et la souris file.

La Boulomie – Editions LOL

Jacques Fontaine ose descendre aux racines naturelles de l’homo sapiens. Il découvre une autre manière de vivre ensemble. AU CHEVET D’UN MONDE FIÉVREUX Des marionnettes rebelles ?

L’anarchie
Le libertaire

1ère partie

L’approche écologique radicale, pas en seul friselis de mode, se façonne en chacun, par un amour du vivant, sans concession. J’ai déjà citée cette attitude : la biophilie. Je vais expliquer le lien subtil à notre conscience actuelle, mais évident dans les expériences sociétales anarchisques, des deux attitudes : Devenir de plus en plus écologiste radical mène à vivre en sociétés libertaires. C’est pourquoi, nous ne pouvons pas considérer l’anarchie comme une simple forme d’organisations sociale culturelle. Tout comme l’organisation pyramidale aux effets abominables est naturelle, elle aussi. Auparavant faisons un sort au dégoût et au mépris déclenchés par l’évocation de l’anarchie, dans quasiment toutes nos têtes.
« Anarchie » est un mot exécrable ; il précipite dans nos têtes les frayeurs d’autres termes tels, émeutes, troubles, confusion, violences, dégénérescence. Alors quand la nécessité s’en fait sentir –ce n’est pas surprenant, nous l’allons voir- on lui préfère les convenus autogestion, libertaire, utopie et, avec plus d’audace, de mépris et de confusion, débauche. Dans l’organisation comme dans une sexualité débridée ; tout cela à cause des « soixante-huitards attardés, ces hippies qui nous ont retardés ! » L’anarchie est de l’ordre du tabou, à l’instar du sexe, malgré toutes les dénégations rassurantes. F. Lenoir dans une prescience pudique qui lui est habituelle, déclare : « Nous nous éloignons d’un pouvoir hiérarchique et nous nous rapprochons du pouvoir latéral ». L’anarchie n’est pas du tout le chaos. Bien au contraire, c’est un renversement extraordinaire de l’organisation pyramidale qui engendre l’état fiévreux du monde, comme le dévoile la déclaration supposée de PJ Proudhon, le père putatif du mouvement : « L’anarchie c’est L’ordre sans le pouvoir. ». Entre hiérarchie et anarchie, le hiérarque, prêtre de haute fonction chez les orthodoxes hurle car on le forcerait à devenir anar, à savoir privé de …lui ! Élisée Reclus, libertaire et Franc-maçon, (1830-1905), met les points sur le I : « L’anarchie est la plus haute expression de l’ordre ».

La démocratie elle-même, forme très aboutie de l’organisation pyramidale, chante une devise magnifique. L’air de rien elle préconise d’autres modes alternatifs. C’est « Liberté, Égalité, Fraternité ». Hallucinante de grossesse anarchiste. F Lenoir est chatouillé par l’espoir, sans rien avouer, toutefois : « Désormais tout le monde est à égalité : tout le monde peut se déplacer, tout le monde peut échanger. Ainsi naissent des structures fluides, changeantes, informes, incontrôlées, au sein desquelles se forment des courants d’opinion, se transforment les consciences et les comportements ».
Le fonctionnement anarchique fait tomber la pyramide des pouvoirs ; en ce sens l’anarchie est opposée à l’État qui, selon elle, ne cesse d’exercer sa domination sur les individus. Elle préconise des réseaux de cellules humaines liées, autogérées et inter-indépendantes. Comme les écovillages, terme générique, pour désigner des groupes autogérés de cent personnes, tout au plus.
Ainsi, la meute humanimale s’efforcerait de se débarrasser de la folie du pouvoir et de la soumission concomitante : la cratophilie ou amour du pouvoir et l’arquéphilie ou besoin de soumission. Cette pyramide qui rend le terrain de la santé mondiale, favorable aux fièvres : consommation délestant les choix libres, technologies des progrès de confort de l’hyper-capitalisme, prolifération de l’espèce, directives conditionnantes, qui sont les premiers symptômes toujours les héritages de la loi du troupeau. Le fonctionnement anarchique enfin modifie la perméabilité contagieuse des peurs, de l’angoisse primordiale. Les réseaux, eux, par leur vie préhensible par les sensibilités individuelles, tendent à amenuiser ces frayeurs si puissantes et enfouies dans le collectif et l’individuel. Premiers pas sur la route : « De manière concomitante la naissance du mouvement altermondialiste et des forums sociaux, le progrès de la conscience écologique, l’essor du développement personnel, des spiritualités orientales ou de la philosophie comme sagesse, l’irruption de nombreuses initiatives de solidarité à l’échelle de la planète, comme le microcrédit, la finance solidaire ou encore, plus récemment, le mouvement des Indignés » déclare en beauté additive bienvenue, F Lenoir, si souvent cité dans ce texte. Les années 60, répétition générale. Aujourd’hui, les Indignés, les Gilets jaunes. Et tant d’autres mouvements de révolte, ci et là, dans le monde. Oui le mouvement est parti !
Il est lui-même l’héritier de, non pas une tradition, mais d’un rêve à lourdeur d’expériences, dans le passé. Des modèles théoriques, grandioses, dans leur ambition, leurs réalisations et leur influence, se diffusent partout, en pleine créativité. : l’autogestion et l’économie libérative, en amours mêlées. Elles suscitent des atterrissages concrets, démonstratifs de l’économie en anarchie :
L’autogestion d’abord, sans qu’il soit, surtout ici, question de préséance ! En voici, en pillant, comme il se doit ! Wikipédia , les traits et, par-là, les valeurs caractéristiques :

• La suppression de toute distinction entre dirigeants et dirigés,
• La transparence et la légitimité des décisions,
• La non-appropriation par certains des richesses produites par la collectivité,
• L’affirmation de l’aptitude des humains à s’organiser sans dirigeant.
En résumant quelque peu, l’autogestion s’oppose à l’idée de hiérarchie ; les responsables sont élus et transitoires. L’autorité quitte la verticale pour rejoindre l’horizontale où tous sont égaux. En inverse, le capitalisme est une forme de dépossession du bien commun au profit des « riches », les empereurs du CAC 40, en France, terre de milliardaires à l’instar des plus fortunés qu’elle. En d’autres termes, la finalité de l’’autogestion vise concrètement une réappropriation des choix du travail , de l’outil de travail et des résultats issus du travail.

Quant à l’économie collaborative, en cousinage d’autogestion, elle peut, sinon se résumer, du moins être entendue ainsi, en inspiration du site Économie Magazine: L’économie collaborative a deux visées : l’économie et le social. Elle tient sur les piliers du partage et de l’échange de biens, de services ou de connaissances entre particuliers. Elle se traduit par un échange monétaire tel que la vente, la location ou la prestation de services, ou un échange non monétaire comme le troc, le don ou le volontariat. Aujourd’hui, les « échangeurs-partageurs »se relient avec des plateformes numériques. En l’occurrence, elles sont une aubaine pour amoindrir les délais, les coûts, avec le risque toutefois que cette fluidification des échanges ne se fassent au détriment de la qualité des échanges de valeurs et de fraternité.

Autogestion, économie collaborative ne sont pas que des bannières flottant au vent creux et volatil de la réalité anarchiste et même parfois des préoccupations écologiques. L’histoire, en effet, distribue des exemples souvent convaincants mais réprimés dans le sang, par exemple par les communistes, si épris d’ordre bâillonnant. Rappels furtifs : la Catalogne et de nombreuses villes et pays, dans l’Espagne entre 1936 et 1939. Les femmes, lors de la mise en place de l’anarchie dans ce pays, nous font faire un grand pas de plus dans l’instauration de réseaux, à la place des pyramides. Elles donnèrent un exemple captivant. En prouvant qu’elles étaient sans doute, très proches des mises en œuvre concrètes de l’anarchie. Pour ce faire elles n’hésitèrent pas alors, à militer en grand nombre pour cette cause qu’elles tiennent, je le crois, plus prometteuse de paix que nos organisations de meute actuelles. La pyramide de pouvoir, une évidence pour les mâles de notre espèce ? Avec la répression sanguinolente de Franco, vendue comme une réponse juste aux violences réelles de certains anarchistes.
Je ne remonte pas à « L’Utopie », le roman d’anticipation de Thomas More (1516) ni à Libertalia, cette colonie de pirates, sur la côte malgache, où tous les biens étaient distribués également. Il suffit de vivre notre époque pour constater que les réseaux libertaires, qu’ils se réclament ou peu anarchiste ou libertaires, deviennent de plus en plus fréquents et éclairants. En phare, la communauté dite Institut d’Esalen, près de San Francisco, dont l’influence est toujours mondiale, depuis sa fondation (1962). Elle est le berceau de la psychologie humaniste et du mouvement du potentiel humain qui engendrèrent et engendrent toujours mille pratiques d’approches douces de l’humain. Je cite encore les SEL, qui se fondent sur la réciprocité, en l’absence d’argent. On en compte aujourd’hui environ 600 dans l’Hexagone. Ce qui est passionnant, avec les SEL, c’est qu’ils sont tous différents. Ils affirment dans l’article 1 de leur Charte : « Le lien est plus important que le bien ». L’animation et la créativité sont aux avant-gardes, Un mouvement à suivre de près. Adieu la pyramide, vivent les réseaux !

La Boulomie – Editions LOL

Réflexions pour le monde d’après : vers une société sans joie ?

La date du déconfinement approche. Vais-je retourner en Loge et retrouver ma phrase fétiche d’introduction (« j’étais en Loge hier soir »), ainsi que tous mes Frères ? Vu le chaos qui s’annonce, je crains que non. On devra aller à son poste, si le télétravail n’est pas possible (et quand on connaît le côté rétrograde du patronat, ce ne sera sûrement pas possible). Par contre, pas de café, pas de pub, pas de salle de sport, pas de théâtre, pas de cinéma, pas de soirées entre amis. Dans la même optique, pas de possibilité d’aller à la plage, en forêt ou à la montagne. Mais nous aurons le devoir de nous entasser dans les transports en commun (qui fonctionneront eux-même en capacité limitée). J’en viens à me poser une question légitime : quelle est la dangerosité du virus pour les travailleurs ? Serait-on moins exposé, entassé dans les transports en commun que dispersé sur la plage ? Je ne crois pas utile d’en rajouter sur les masques : au départ inutiles, et en quantité insuffisante (surtout pour les soignants…), et maintenant indispensables, voire obligatoires et bien sûr payants (bien qu’il ait été demandé aux bonnes volontés, y compris aux professionnels de la couture de créer des masques gratuitement… et que la certification AFNOR soit payante). Et il semblerait qu’on se dirige vers une pénalisation du non-port du masque : 135 Euros d’amende si on se promène à visage découvert. Euh, il me semblait que dans le cadre de l’état d’urgence (dont les dispositions d’exception sont passées en droit commun), il était justement interdit de se déplacer masqué dans les lieux publics… J’avoue être un peu perdu entre ces injonctions contradictoires, et, privilège de privilégié, le déconfinement ne me fait vraiment pas envie.

Pour en revenir à mon propos initial, je pense que nous nous dirigeons vers un monde orienté exclusivement vers l’emploi (du moins pour ceux qui l’auront conservé…), avec toujours moins de droits sociaux. Je ne puis m’empêcher de faire un parallèle avec l’Angleterre des XVIIIe et XIXe siècle, où la caste dominante (les protestants généralement anglicans ou méthodistesi) voulait imposer à la population son mode de vie puritain : pas d’alcool (donc contrôle strict des public houses ou pubs), pas de loisirs, surtout pas de temps libre, pas de spectacles ou d’échanges, et bien évidemment toujours du travail mal payé, car seul le travail rend libre (et est rentable pour le capitaliste, notons-le). A ce propos, le monde de la culture est très inquiet, car les mesures de confinement ont mis les intermittents du spectacle au chômage. En même temps, quand on voit l’abyssal déficit culturel de nos dirigeants, il n’est malheureusement pas étonnant que le monde de la culture soit menacé d’annihilation.

En fait, il faut savoir que la haine contemporaine de la culture remonte à Margaret Thatcher, qui détestait les arts, les humanités. La Dame de Fer avait donc modifié en profondeur la formation des britanniques et avait oeuvré à ce que les cursus soient exclusivement orientés vers ce qui est professionnellement utile. Le reste, autrement dit, les arts, les sciences humaines, la littérature, la poésie, les langues mortes, bref les lettres en général, était très mal considéré. Malheureusement, cette recherche de l’utilitarisme des savoirs s’est installée aussi dans notre pays : les lettres sont (très) mal considérées, étudier les arts revient à être considéré comme un fainéant, et la culture semble être devenue une abstraction. Au point que des hommes politiques peuvent, lors d’un discours ou d’une interview proférer des énormités, traduisant leur ignorance…

La culture est importante dans notre vie prétendument civilisée. En fait, c’est la culture qui civilise, dans le sens où elle permet de créer un langage commun. J’en veux pour preuve que lorsqu’on cite du Audiard, un lien se noue immédiatement entre les interlocuteurs qui connaissent son oeuvreii. Le partage des grands récits, par exemple, nous transporte et nous élève (d’où l’utilité politique d’un roman national, néanmoins absurde historiquement). Les comédies les plus grasses qui nous font honteusement rire ont le bienfait de la catharsis. Les humoristes nous aident à mieux supporter le monde qui nous entoure. La culture apporte de la joie, ne l’oublions pas. C’est pour cela qu’il faut impérativement en protéger les professionnels, incluant les fameux « intermittentsiii » et leur permettre de vivre décemment !
La culture porte la beauté. Or, le contact avec la beauté, quelle qu’elle soit, nous apporte une forme de joie, dans le sens où elle nous aide à nous améliorer. C’est pour cela que nous avons besoin, dans nos Temples maçonniques, de Sagesse, de Force et de Beauté.

Enfin, la culture est une arme redoutable. En effet, l’histoire nous aide à comprendre le monde dans lequel nous sommes et nous enseigne les erreurs des générations passés, alors que la connaissance de la langue nous aide à trouver le sens profond des mots, ce qui peut la rendre très dangereuse pour un Etat policier. Prenons l’exemple d’un terme à la mode en ce moment : obéir. Obéir aux règles de l’état d’urgence sanitaire. Or, le verbe obéir a la même racine latine, audire, que le verbe ouïr, qui signifie entendre. Etant donné les discours discordants, la cacophonie des plans divers, le chaos des instructions de l’exécutif sans oublier les mensonges proférés depuis le début de la crise, je crains fort qu’il n’y ait plus rien à entendre, et donc plus rien ou plus personne à qui obéir

Ne laissons pas s’installer ce monde sans joie que nous promettent les grands patrons et leurs séides politiciens. Ne nous laissons pas voler le temps de la culture qui est aussi le temps de la civilisation et de l’humanisation. Cultivons-nous, résistons au monde qui vient, et soutenons les artistes et autres vecteurs de la culture qui en ont réellement besoin ! Protégeons la culture et sauvons notre joie !

Ne nous laissons plus faire.

J’ai dit.

iCf. Tom Hogkinson, Eloge de l’Oisiveté, Les Liens qui Libèrent, 2019

iiJe n’aurais jamais pensé que citer Audiard me ferait passer pour un être cultivé !

iiiPetite précision utile : je côtoie pas mal d’intermittents du spectacle. Et leur quotidien n’a rien, mais alors rien d’une vie de privilégié. Alors, arrêtons de vouloir leur pourrir la vie et de remettre en cause leur statut. Ils en ont besoin pour vivre et créer.

Jacques Fontaine ose descendre aux racines naturelles de l’homo sapiens. Il découvre une autre manière de vivre ensemble. AU CHEVET D’UN MONDE FIÉVREUX Des marionnettes rebelles ? 13 Conclusion

Conclusion
En route !

Cri dans le désert d’Arne Naess, dès les années 60 : « L’homme ne se situe pas au sommet de la hiérarchie du vivant, mais s’inscrit au contraire dans l’écosphère comme une partie qui s’insère dans le tout » L’extrait vient de son livre au titre déjà révélateur : « Écologie, communauté et style de vie ». Déjà le lien entre notre état de nature et le fonctionnement de notre société. Et le monde commençait à avoir de la fièvre.
Au bout du chemin sur l’état de santé du monde, on se rend compte que ce qui parle au plus profond de l’humain, ce ne sont pas les cultures mais sa nature. Son étude relève d’abord et impérativement de l’éthologie. Nous sommes en cousinage de deux singes ; ils nous apprennent l’essentiel qui palpite dans nos tréfonds : les chimpanzés sont aiguillonnés par la compétition et règlent leurs fréquents conflits sans effusion de sang. Leur organisation est plus pyramidale. Les bonobos, eux, vivent sous le signe de la coopération ; ils règlent leurs conflits par l’affection et la sensualité. Ils préfèrent plutôt, entre eux, les relations en réseaux. En nous, jusqu’alors, le chimpanzé domine. En nous, avec l’hyper-capitalisme et les tristes affabulations qu’il provoque, la déification de l’argent, la consommation frénétique t les technologies pour le meilleur et pour le pire, les guerres en horreurs consommées, nous sommes, hébétés, sous le signe de la compétition. Mais nous sommes aussi des bonobos qui savons coopérer avec intelligence et dévouement, dans les situations douloureuses. Il nous reste donc à recouvrer la santé. Pour cela, osons rebâtir avec les blocs des pyramides qui nous contemplent depuis des siècles.
Commençons par changer radicalement notre regard d’observateurs de nous-mêmes, scientifique ou pas. Prenons la métaphore de l’arbre : l’éthologie nous pose en animal grégaire. C’est notre racine. En sort, le tronc de l’anthropologie et de la sociologie qui étudient les structures et les cultures. Les grosses branches avec les approches de la dynamique des groupe qui nous éclairent, en particulier, sur le fonctionnement des cellules anarchistes Puis les psychanalyse et psychologies qui en sont les branches ; enfin la connaissance de l’humain par lui-même : l’introspection et l’holistivité, ce regard qui embrasse spontanément le tout, le complexe, en dépassement de l’objectivité et la subjectivité.
Avec un regard renouvelé, retrouvons la concentration, la communion et la contemplation. Je me suis efforcé à prescrire un remède à l’état fiévreux du monde. Je le crois susceptible de l’aider à recouvrer une nouvelle santé et de palpiter en ces trois mots de rencontre. Le risque ? La complexité qui empêcherait l’humain de bien prendre en compte ses enjeux d’une société future libertaire.
Car « Quand le travail se fait brouillard, l’humain aussi se vaporise». J’espère que le brouillard s’est, au moins vaguement levé, grâce à la liste des personnages que le système nous demande d’endosser. En ordre croissant d’influence : des marionnettes compulsives et avides, un humain omniscient et hyperactif ; un saigneur, un seigneur, un soumis, des schizophrènes, un humanimal  agressif, et peureux, enfin un humain en passe de devenir un libertaire.

Notre conscience collective prend en charge ces personnages d’importation. Mais le retournement, avant l’effondrement exige, en premier lieu que l’on regarde en face ce que nous sommes sans doute : des schizophrènes qui balbutient de plus en plus entre de nombreuses injonctions contradictoires. Le système, de plus en plus prégnant, de double contrainte nous fait trébucher : nous voulons tout à la fois ; et rien en même temps. Nous sommes avides de modes et de clans, dans l’occultation par l’écran des écrans
Les révoltes et les découvertes pointent leur museau dans des essais. Ils sont, à ce jour et malgré, les pesanteurs d’arrière, concluants : l’éducation libre, l’exemplarité revisitée avec les neurones-miroirs, l’après-vie avec les EMI et les hypothèses sur la survie de notre conscience hors du corps, la transmission épigénétique …et les éco-villages… tout cela, des traductions des utopies en anarchie pacifique. Reste la question métaphysique et vitale de tous les temps : mais qui sommes-nous ?

Oui sommes- nous, aujourd’hui, dans cet imbroglio, ce charivari, ce bredouillis ? Il faut, de plus en plus, que nous soyons à la fois, sous la pression de la société d’argent et de pouvoir, les humains ci-dessous :

• Cratophile ET arquéphile,
• En pyramide ET en réseau,
• Compétitif ET coopératif,
• Ocnophile ET stylobate,
• Solitaire ET solidaire,
• Prédateur, guerrier ET pacifiste,
• Individualiste ET mondialiste,
• Pressé ET méditatif.

C’est ainsi, la société actuelle nous moule, nous façonne, nous modèle en forte schizophrénie. En outre, elle sait bien réveiller nos peurs ancestrales avec le principe de précaution. Et le déversement publicitaire manipulateur. Enfin dans ces doubles injonctions, cette société nous menace d’abandon devant une épidémie virale : c’est la panique. Trembler, ensemble, devant ces dangers, devient la norme de la norme. C’est cela la norme. Elle est un puissant facteur de paix et une sécurisation intérieure. S’efforcer sans cesse de revêtir ces tuniques contradictoires, fait de nous des normosés. Alors, le pari de l’écolo-anarchie, de l’anarchie verte n’est-il pas pure utopie, puisqu’il exige de revenir à notre racine grégaire et à en remettre en cause des composantes « chimpanzées » pour mieux s’embrasser dans des réflexes bonobos ? Moi, j’y crois. Et vous qui lisez ce texte ?

Vite, cassons la voix ! Avant il fallait choisir, sous le joug religieux, un rôle réputé bon et fuir un autre de mauvaise réputation. C’était le règne du OU. Aujourd’hui, avec « la double contrainte », l’injonction paradoxale, nous devons ingérer des contradictions indigestibles. C’est le royaume du ET. Demain, me semble-t-il, nous aborderons d’autres rives, avec le NI/NI. La société en réseaux, l’écolo-anarchie, l’holistivité sont les conditions de cette alchimie. Le Grand Œuvre ? Un humain biophile, dans l’écologie de l’harmonie : avec soi, les autres, la nature.
Ils étaient des bagagistes tranquilles, nous somme des voyageurs inquiets, nous serons des explorateurs courageux. Par les effets d’ « une spiritualité pour agir », chaque humain sera un lac d’amour, dans le réseau de la société humaine. Ainsi, ce sera un NI/NI de douce rébellion. Quoi ? Pas une moyenne, ni une synthèse, ni un juste milieu, pas plus que l’ «aurea mediocritas » des sages de l’Antiquité, mais un nouvel hôte terrestre en tunique d’humble splendeur. Regards vers la Lune et le Soleil ésotériques.
Quand l’eau se transforme en vapeur, quand le feu rayonne de lumière, quand la terre jalouse ses germes, quand l’air balaie les montagnes, alors la Lune et le Soleil s’unissent en effusion circulaire d’amour. C’est la syzygie. Quand l’Homme, à l’instar des deux planètes, s’embrasera de la sagesse du sens de la vie, d’adaptabilité mesurée, de connaissance de soi, de fraternité pour lui est les autres, de biophilie en grande révérence pour les vivants, alors il agrippera le Sol(eil) et la Lune. Les astres l’adouberont « Solune », pour que la chouette hulule et la souris file.

Ne tardons plus pour que le monde reprenne des couleurs. Quatre premières tâches urgentes :
1 Maîtriser les épidémies
2 Sauver les 22 000 enfants qui meurent chaque jour de faim ou de violences.
3 Développer une stratégie pour une contraception choisie.
Étudier et mettre en place tous les moyens, préconisés par une recherche mondiale, pour réorienter l’agressivité des humanimaux mâles.

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Jacques Fontaine ose descendre aux racines naturelles de l’homo sapiens. Il découvre une autre manière de vivre ensemble. AU CHEVET D’UN MONDE FIÉVREUX Des marionnettes rebelles ? 12 L’anarchie ; le libertaire (2ème partie)

Nous sommes, pour la majorité d’entre nous, sous la domination du scientisme, le royaume de l’objectivité . Il est réputé que ce qui se démontre rigoureusement est exact. Et avec des dérives actuelles inacceptables. Premier exemple de la tyrannie de la loi du « Des faits, rien que des faits ! ». Les expériences sur l’efficacité et l’innocuité des médicaments sont très encadrées, menées selon les rigueurs de la statistique. Il en ressort souvent que les personnes traitées représentent x% de la population étudiée. Et qu’un autre pourcentage de guérisons est dû à l’effet placebo : ces personnes ont guéri alors qu’elles n’ont pris que des substituts neutres. Et que faisons-nous, empêtrés de scientisme ? Médicament sur le marché sir le pourcentage de guérison est assez élevé. Point, rien d’autre. Mais ceux qui ont guéri grâce à l’effet placebo ? « Pfuitt, circulez, il n’y a rien à voir, ce n’est qu’un effet placebo, on l’a démontré ! ». Inaudible, puisque ce fameux et méprisé effet a guéri effectivement en toute subjectivité. Alors qu’une recherche mondiale devrait, de toute urgence, répondre à la question centrale : Qu’est-ce qui a déclenché l’effet placebo ? Que se passe-t-il dans la tête d’une personne qui en bénéficie ? Comment le provoquer ?… Les humains arriveront à se poser cette question quand les « sciences » humaines connaîtront un essor significatif. Ce qui est envisageable, aujourd’hui, vu l’état fiévreux du monde.
Un second exemple précis de cette attirance vers les faits, au détriment de la descente en soi : la psychanalyse est boutée hors du champ psychiatrique car ses résultats ne sont pas démontrés. Et tant pis si les analysants se sentent en meilleure harmonie interne, comme externe. Mais on ne peut se passer d’approches psychologiques. Et on le saura de moins en moins avec la croissance des dépressions. Alors on réduit l’exploration à ce qui marche vraiment, c’est-à-dire qui est observé, mesuré, avalisé. Ainsi le champ psychique n’est acceptable qu’à ces conditions. Résultat, l’invention, l’invasions des psychologies cognitives et comportementales, les TCC. En grand renfort de l’approche dualiste boiteuse : subjectivité et objectivité. Demain la guérison du malade exigera, c’est mon avis, une autre approche mentale, hors du OU/OU, du ET/ET, pour atteindre le NI/NI. Ce n’est plus la subjectivité OU l’objectivité ; pas plus que la subjectivité ET l’objectivité. NI l’une NI l’autre mais une troisième manière de vivre Il fallait donc trouver un nouveau terme pour caractériser cette faculté mentale. À savoir, susciter en soi, d’emblée, une vision qui prenne en compte la complexité et cherche à lui donner un sens. J’ai trouvé que cette faculté avait un nom depuis 1926 : l’«Holisme » décrit ainsi par Jan Christiaan Smuts : « La tendance dans la nature à constituer des ensembles qui sont supérieurs à la somme de leurs parties au travers de l’évolution créatrice…L’holisme se défi nit donc globalement par la pensée qui tend à expliquer un phénomène comme étant un ensemble indivisible, la simple somme de ses parties ne suffisant pas à le définir. De ce fait la pensée holiste se trouve en opposition à la pensée réductionniste qui tend à expliquer un phénomène en le divisant en parties » ; Dans la foulée, en 1975, Joël de Rosnay lance un ouvrage majeur pour inciter à la pensée holiste, « Le Macroscope ».Tout y est annoncé de la révolution de la pensée. J’ai tiré de « holisme » le terme « holistivité », en consonance avec ceux de subjectivité et objectivité.
Aujourd’hui déjà, et demain plus sûrement, l’humain situera sa relative possibilité d’émancipation au croisement des chemins de réseaux de groupes libertaires et de ceux de l’écologie, d’une part et de l’holistivité d’autre part. Ces deux facteurs se rejoignent dans la pleine conscience de notre fonctionnement en meute. Ainsi l’écologie et l’anarchie trouvent leur point de jonction. L’affaire n’est pas nouvelle : L’écologie libertaire, l’anarchisme vert naissent vers 1930, en références aux travaux de Pierre Kropotkine et d’Élisée reclus, géographe et Franc-maçon. Déjà, ces courants dénonçaient le seigneur-saigneur, comme j’ai appelé l’humain plus haut. Renoncer à dominer la nature et d’abord la sienne, la vie en meute, l’instinct grégaire.

Chaque individu, dans des réseaux, ne passera plus son temps à acheter tout et rien, à guigner le pouvoir ou s’y soumettre. Il conjuguera, comme déjà dit, le solidaire et le solitaire. Les spiritualités déploieront leurs ailes, le développement personnel, aussi. Le mouvement est enclenché clairement depuis les années 60. Auparavant, quelques élus seulement accédaient à ces recherches d’ascendance. Aujourd’hui, sous l’influence des spiritualités orientales, le mouvement gagne de nouveaux élus de tous horizons. Les thérapies abolissent leur frontière avec les spiritualités et les éclosions des approches du potentiel humain. Cette révolution quasi-génétique, nous fond avec le vivant. L’efflorescence spirituelle est la croisée des chemins. On sent bien, aujourd’hui, que quelque chose cloche au-delà des névroses individuelles inévitables. Ce quelque chose, avant, c’était une divinité. Le libertaire recherche l’UN et le TOUT, dans son harmonie avec lui-même, les autres et la nature. Il me semble que plus les souplesses d’une anarchie revisitée animeront la meute, plus les besoins de spiritualité, de développement personnel s’atténueront formellement. La quête de l’harmonie passera, en partie, par ces modes de vie. L’expérience plus que la connaissance , en belle aube d’une anarchie verte en partage avec les autres. Bien moins en ce qui touche la connaissance de soi-même qui restera un royaume luisant et grimaçant à explorer encore et encore. Ce sera un fruit de la liberté… de l’égalité, de la fraternité !

Je laisse le mot de la fin à P. Teilhard de Chardin, pas un révolté mais un visionnaire! Il pressentit les lendemains : « Pas d’avenir évolutif à attendre pour l’homme en dehors de son association avec tous les autres hommes ».

Nous voici au terme de notre périple. Je vous ai invités à aller des symptômes les plus criants pour remonter progressivement au terrain, celui de l’angoisse primordiale caractéristique d’une meute humaine. Avec une réponse possible et, je le crois et le pense, probable.
Jusqu’où la vie en libres réseaux et l’holistivité apporteront-elles. à l’état fiévreux du monde, une claire vigueur de joyeuse santé? En deux mots : une anarchie verte !

La Boulomie – Editions LOL

Arbeit macht frei

Sinistre devise que cette incantation que l’on retrouve en frontispice des camps de concentration et des camps d’extermination. Et pourtant, cette devise n’est pas une création des nazis. C’est un héritage luthérien. Pour ces braves gens, le travail est censé rendre libre, avec les grands poncifs de la prédestination, l’expiation de la faute et toutes ces fadaises. Cette devise est née en Allemagne au XIXe siècle sous la plume d’écrivaillons divers, qui estimaient que seul le travail pouvait permettre la rédemption des délinquants. Il est aussi intéressant de noter que les usines chimiques de l’IG Farben (le consortium des grandes entreprises allemandes de la première moitié du XXe siècle, fabricantes notamment de l’ypérite et du Zyklon B) avaient comme frontispice de leurs usines cette devise, reprise par les nazis à l’entrée des camps de concentration et d’exterminationSinistre proximité, n’est-ce pas ? Mais ce n’est pas mon propos que de chercher les liens entre Industriekultur et nazisme i.
On retrouve cette idée de salut par le travail en Angleterre, autre pays protestant, où ont été créées les « maisons de travail » aux XVIIIe et XIXe siècles pour les gens désoeuvrés ou au chômage suite aux crises diverses. Le travail y était fort simple : il s’agissait de casser des cailloux plusieurs heures par jour. Pour qui ? Pour quoi ? Dunno. Finalement, le bullshit job n’est pas si récent qu’on ne le croit…

Mais au fond, qu’est-ce que le travail ? Hannah Arendt nous invite dans La condition de l’homme moderne à distinguer l’animal laborans (le labeur absurde et déshumanisant) de l’homo faber (le processus de création de l’oeuvre qui humanise). La bonne question est de savoir quel est ce travail qui rend libre. Labeur ou ouvrage ? C’est plus compliqué que ça. J’aurais envie de dire aucun des deux, et que cette incantation est une vaste escroquerie de protestants capitalistes d’un autre siècle. On peut aussi se poser la question ô combien marxiste de la distinction emploi-travail. Reste à savoir lequel rendrait le plus libre, mais surtout lequel a le plus de sens. Un parent qui travaille à élever ses enfants n’est pas reconnu comme employé et n’a pas droit à la protection sociale ni à un quelconque revenu. Une personne qui occupe un emploi indispensable à la vie en société est souvent méprisée ou décriée. Ce sont les personnes qui travaillent dans le soin ou qui assurent le lien social comme les caissières. Le lien social n’étant pas quantifiable et le soin n’étant pas rentable, ces personnes sont payées en raison inverse de leur utilité sociale. En revanche, une personne qui occupe un emploi inutile ou néfaste, comme consultant RH en conduite du changement (vous savez, ces gens qui ont transformé France Télécom au début des années 2000 ou qui massacrent la Poste), ou trader (vous savez, ces gars qui font un pognon de dingue en spéculant sur le prix de matières premières alimentaires) gagnent en quelques semaines ce que les catégories socio-professionnelles essentielles gagnent en une année, voire plusieurs. Ce qui montre bien qu’on ne s’enrichit pas par le travail salarié, surtout quand on réalise que la vente d’un bien immobilier familial rapporte plus que plusieurs vies de travail…

A présent, imaginons un monde dans lequel il faudrait travailler jusqu’à 60 heures par semaine pour ceux qui ont un emploi, où il n’y aurait plus de congés payés (ou moins que les 5 semaines réglementaires, quand ils ne sont pas imposés arbitrairement), et où les lieux de loisir et de détente seraient fermés pour cause de sécurité sanitaire, la bonne blague. Un monde sans Loges ? Ah Seigneur, mon Dieu ! Un monde sans partage, sans amour et sans joie. Un monde où toute la politique, toutes les décisions seraient orientées vers l’économie (terme thucydidéen signifiant les profits des grands groupes). L’État lui-même serait au service de l’économie, au point que les pertes des grandes entreprises seraient mutualisées et renflouées par l’État, alors que les profits seraient individualisés et partagés par une oligarchie. Un monde où les salariés de base seraient interchangeables, pendant que les cadres et décideurs appliqueraient avec soin « la méthode », qui consiste à remplir des tableaux, dont les cases changent de couleur selon les données qu’on y insère, ces données étant ce que l’on appelle des indicateurs RH. Des données qui, à l’instar du PIB, mesurent tout sauf l’essentiel. Bien évidemment, dans ce monde, les instances de surveillance comme l’Inspection du Travail se retrouveraient bridées et ne pourraient plus exercer leurs missionsii.
Donc, ceux qui auraient la chance d’avoir un emploi devraient travailler plus, et gagner moins, et ce jusqu’à leur épuisement total, voire leur mort. Mais comme personne n’est irremplaçable
et que du boulot, il y en a pour ceux qui veulent s’investir à fond, ça ne posera pas de problème. Bon, pour le drame humain que peuvent représenter un burn-out voire un suicide, ce sera toujours la faute de l’employé, trop faible et pas assez investi Ah, le monde merveilleux de la Start Up Nation, cette gigantesque escroquerie. J’aurais envie de répondre ce que chantent les métalleux de Sidilarsen : Start Up Nation ? Fucked up generation.

Je pourrais continuer des pages, mais vous aurez compris où je veux en venir. Ce monde qui nous attend, c’est le monde d’après le Grand Confinement. Un monde dans lequel nous aurions tous à bosser comme des tarés, où nous aurions tous à payer l’incurie de nos dirigeants, et dans lequel nous devrions nous sacrifier pour l’économie et les profits de quelques uns. Sombre dystopie, me direz-vous ? Non, vous répondrai-je. C’est le monde dont rêvent les grandes organisations patronales européennes. Un monde où le travail salarié serait à la fois valeur, garantie etc. Tous ces braves gens sont très imprégnés de l’éthique protestante, celle-là même qui a fondé le capitalisme et soigneusement analysée par Max Weber. Toujours travailler et faire travailler les autres, parce que rien ne doit exister en dehors du travail rédempteur, à en juger par les prises de position d’organisations patronales européennes. Cette même pensée est celle qui a engendré le terrible Arbeit macht frei. Travailler toujours plus. Pourquoi ? Pour être libre ? Donc travailler des heures par jours pour gagner un salaire à peine suffisant pour vivre devrait rendre libre ? J’ai plutôt l’impression qu’il s’agit d’acheter sa libération de prison par une peine forcée, un genre de travail de Sisyphe à durée déterminée. Le fameux labeur décrit par Hannah Arendt, qui nous animalise ou nous éloigne de notre humanité.

Nous autres Francs-maçons avons l’habitude de dire « Gloire au Travail ». Mais il ne s’agit pas de glorifier le travail salarié à la con, ou alors je n’ai rien compris du tout. Le vrai travail est le travail de civilisation et de culture (dans lesquels on peut inclure le travail du soin et le travail reproductif), et c’est ce travail qui est à glorifier, pas celui qui consiste à accomplir des tâches mal salariées, plus ou moins utiles et plus ou moins néfastes, au nom de l’enrichissement d’une élite dévoyée. Je me souviens d’une parole prononcée par feue la philosophe Monique Castillo, à l’occasion d’un cours du soir sur Hannah Arendtiii. Elle nous invitait à « nous mettre au service de quelque chose de plus grand que nous». La définition du plus grand que soi est à l’appréciation de chacun, mais je doute que faire progresser les dividendes d’un quelconque CEO d’événementiel d’entreprise en B2B n’en fasse partie… Je pense plutôt qu’il s’agit de la troisième déclinaison du travail proposée par Hannah Arendt, dans la condition de l’homme moderne : l’action. L’oeuvre nous humanise, et l’action nous permet de bâtir l’histoire, d’écrire notre récit. Le hic est que l’action ne plaît pas du tout aux politiques autoritaires, ni les regroupements, ni tout ce qui peut permettre de se poser des questions.

En fait, je crains que les jours heureux ne soient que ceux des organisations patronales, qui auront des ouvriers interchangeables, que ni la loi ni les syndicats ne protégeront et sans aucune autre perspective que le labeur et l’emploi à mort. Encore un pas en avant qui sera un retour en arrière. La régression, c’est le progrès, visiblement. Un peu Orwellien, non ? Est-ce cela que nous voulons, vraiment ?

Sinon, l’Espagne est en train de mettre en place un système de revenu universel.

Ne nous laissons plus faire. Agissons. Vite.

J’ai dit.

PS: exemples d’action, le boycott et le soutien à l’économie locale. Le soin aussi.

iVoir plutôt le très bon Libres d’obéir – les racines nazies du management de l’historien Johan Chapoutot, qui explique la pensée prussienne antérieure au nazisme, ainsi le parcours d’un nazi, Otto Hahn, devenu enseignant, et dont les idées ont influencé le management moderne contemporain.

iiPolémique la plus récente en date : https://www.liberation.fr/france/2020/04/21/des-inspecteurs-du-travail-se-rebellent-face-aux-pressions-de-leur-ministre_1785845

iiiEt là, vous avez compris d’où je tiens mes sources.