jeu 06 novembre 2025 - 22:11

Les secrets des Francs-maçons à Kiev : une promenade initiatique au cœur de la ville éternelle

De notre confrère ukrainien kiev.vgorode.ua

Kiev, la mère des villes russes, n’est pas seulement un joyau architectural byzantin ou un creuset d’histoires slaves : elle abrite aussi des mystères discrets, gravés dans la pierre et les symboles, qui murmurent les secrets d’une confrérie millénaire. La Franc-maçonnerie, cette société initiatique née au XVIIe siècle en Angleterre et rapidement diffusée en Europe, a laissé son empreinte subtile sur l’urbanisme et la culture ukrainienne.

Pour percer ces voiles, une excursion thématique intitulée « Les secrets. Les Francs-maçons. Kiev » invite les curieux à une balade inédite, où l’histoire se mêle à la légende, et où chaque façade raconte une énigme. Organisée par Vgorode.ua, cette promenade ne se contente pas de guider : elle éveille, questionne et enchante, tout en soutenant une cause noble. Une partie des recettes sera reversée aux Forces armées d’Ukraine, rappel poignant que la lumière maçonnique peut éclairer les heures sombres.

Une plongée dans l’ombre et la lumière de la Franc-maçonnerie

Église Saint-André de Kiev

Imaginez-vous errant dans les ruelles pavées de Podil, le quartier historique de Kiev, où les échos de la révolution orange se fondent encore dans l’air automnal. C’est là que commence cette excursion, guidée par des passionnés qui transforment la ville en un temple vivant. L’objectif ? Révéler comment la Franc-maçonnerie – avec ses principes de tolérance, de progrès moral et de fraternité universelle – a imprégné l’âme de Kiev, sans jamais s’imposer ostensiblement.

Née des guildes de tailleurs de pierre médiévaux, la maçonnerie spéculative s’est propagée en Ukraine au XVIIIe siècle, sous l’influence russe et polonaise. Des loges secrètes, comme celles affiliées au Grand Orient de Russie, ont attiré intellectuels, artistes et réformateurs. À Kiev, ces cercles discrets ont influencé l’architecture : des motifs géométriques sur les façades du Théâtre d’opéra (inspiré des symboles maçonniques comme l’équerre et le compas) aux bas-reliefs de la cathédrale Sainte-Sophie, où des yeux omniprésents évoquent l’Œil de la Providence. La promenade décrypte ces signes : un compas dissimulé dans une rosace, un niveau gravé sur une corniche, autant d’invitations à la réflexion sur l’ordre cosmique.

Mais au-delà des pierres, l’excursion explore l’humain. Les participants découvrent comment des figures emblématiques de l’Ukraine, comme Ivan Franko – poète et militant nationaliste, initié dans une loge galicienne – ou Mykhailo Hrouchevsky, historien et premier président de la République populaire ukrainienne, ont puisé dans la maçonnerie des idées de liberté et d’égalité. Franko, dans ses écrits, y voyait un rempart contre l’oppression tsariste ; Hrouchevsky, un modèle pour une nation unie. Ces portraits vivants rappellent que la franc-maçonnerie n’est pas une société secrète pour le pouvoir, mais un chemin initiatique vers la sagesse, où le « connais-toi toi-même » socratique rencontre le Grand Architecte de l’Univers.

Le programme : symboles, rituels et initiation ludique

La balade, d’une durée d’environ deux heures, serpente à travers le cœur historique de Kiev, du quartier de Lvivska Brama aux berges du Dniepr. Le guide, expert en histoire ésotérique, commence par les origines : la franc-maçonnerie, fondée sur les Constitutions d’Anderson (1723), repose sur une symbolique riche – outils de maçon comme l’équerre (rectitude morale) ou le maillet (volonté de transformation). À chaque arrêt, un décryptage : sur la façade du Musée national d’histoire, un œil triangulaire symbolise la vigilance divine ; près de la Porte d’Or, des motifs floraux cachent des codes alchimiques, hérités des Rose-Croix influençant les loges ukrainiennes.

Plan de Kiev par Melenski en 1803 : La ville haute est enserrée dans ses fortifications et c’est la ville basse (Podil) qui concentre l’essentiel du développement urbain.

La discussion s’approfondit sur les codes maçonniques : méthodes de cryptage des lettres (comme l’alphabet pigpen) et gestes traditionnels – la poignée de main secrète ou le signe de reconnaissance. L’accent est mis sur les principes moraux : tolérance religieuse, philanthropie et quête de vérité, valeurs qui ont inspiré les Lumières ukrainiennes au XIXe siècle. Une anecdote émouvante : les loges de Kiev, fermées sous Staline, ont été rouvertes dans les années 1990, symbolisant une renaissance post-soviétique.

Le clou du spectacle ? Une partie interactive : un jeu simulant un « rituel d’initiation » dans une loge maçonnique. Sans révéler de secrets authentiques, les participants expérimentent une mise en scène ludique – un serment symbolique, une « épreuve des ténèbres » – pour saisir l’essence de l’initiation : passer de la pierre brute à la pierre taillée, de l’ignorance à la lumière. C’est un moment convivial, où le rire dissout les préjugés, rappelant que la maçonnerie est une école de vie, ouverte à tous les chercheurs sincères.

Kiev, ville des mystères : une redécouverte enchantée

Vue de la ville de Kiev en 1651: la ville basse de Podil ramassée aux pieds de la colline.

Cette excursion n’est pas une simple visite guidée : elle métamorphose Kiev. Des lieux familiers – la rue Andriivskyi descent, avec ses ateliers d’artistes – révèlent des légendes oubliées : un monument à Taras Chevtchenko, poète national, porte des inscriptions évoquant les idéaux maçonniques de liberté. En flânant le long du Dniepr, on mesure l’influence : la ville, pont entre Orient et Occident, a accueilli des loges cosmopolites, où Juifs, Orthodoxes et Catholiques se côtoyaient en fraternité.

Dans un Ukraine résiliente, face aux ombres de la guerre, cette initiative prend une dimension poignante. Soutenir les Forces armées via les recettes, c’est allier culture et solidarité, rappelant que la franc-maçonnerie, dans son essence, est un appel à l’unité humaine. Les participants, qu’ils soient touristes curieux ou Kievites en quête de racines, repartent transformés : la ville n’est plus un décor, mais un palimpseste vivant de symboles, invitant à une quête personnelle.

Pour réserver, rejoignez les réseaux de Vgorode.ua : Telegram pour les alertes culturelles, Facebook pour les débats animés, ou Instagram pour des visuels envoûtants. Une occasion rare de percer les voiles de Kiev, où chaque pierre chuchote : « Cherche, et tu trouveras. ».

Une excursion qui, en dévoilant les secrets maçonniques, illumine non seulement l’histoire de la ville, mais aussi l’âme de ceux qui la foulent.

5 Commentaires

    • Cher François
      La question ne serait-elle pas ce que fait la Grande Loge fondatrice des deux Grandes Loges… La question de la responsabilité et des choix politiques de la Grande Loge Nationale Française (GLNF) face à ses « loges filles » (ou Grandes Loges fondatrices comme la Grande Loge d’Ukraine en 2005 et la Grande Loge de Russie en 1995) suscite des débats récurrents dans les milieux maçonniques.
      D’ailleurs, pourquoi la GLNF a-t-elle consacré ces obédiences ? La tradition maçonnique dite régulière prévoit que les nouvelles Grandes Loges nationales soient consacrées par une ou plusieurs Grandes Loges reconnues, agissant comme « loge mère ». La GLNF, déjà établie comme obédience dite régulière reconnue internationalement (notamment par la Grande Loge Unie d’Angleterre), a ainsi joué ce rôle pour la Grande Loge d’Ukraine (2005, à Paris avec la Grande Loge d’Autriche) et la Grande Loge de Russie (1995), afin de donner aux nouvelles obédiences un ancrage dans la régularité maçonnique universelle.
      Une fois la filiation établie, le principe officiel veut que la « loge mère » ne s’immisce pas dans les affaires internes de ses « loges filles » : chaque Grande Loge est souveraine sur son territoire national, et la non-ingérence permet d’assurer leur légitimité vis-à-vis de la communauté internationale des Grandes Loges régulières. C’est cette idée qui est généralement invoquée pour ne pas s’impliquer dans les crises internes, les difficultés démocratiques, ou les conflits opposant, par exemple, la Grande Loge d’Ukraine et la Grande Loge de Russie.
      Cependant, cette posture peut être perçue comme insatisfaisante par de nombreux francs-maçons :
      – elle peut sembler contradictoire en cas de violations manifestes de la régularité, d’atteintes à la fraternité, ou de non-respect des principes éthiques essentiels par une « loge fille » ;
      – elle entraîne parfois un malaise lorsque la loge mère, comme la GLNF, refuse toute médiation ou prise de position, alors qu’elle reste moralement et symboliquement liée à ses créations, particulièrement si des loges sont en crise ouverte ou souffrent d’atteintes graves à leur autonomie, comme cela a pu être reproché dans le contexte de la guerre Russie/Ukraine.
      En pratique, la doctrine de non-ingérence est donc souvent utilisée davantage comme un paravent institutionnel ou diplomatique, que comme un impératif absolu. Elle ne résout pas les tensions lorsqu’une loge fille se détourne clairement de l’idéal maçonnique ou que la fraternité est rompue entre loges « sœurs ». Certains contestent donc la suffisance d’un simple formalisme régulier au détriment d’une responsabilité éthique vis-à-vis de la franc-maçonnerie universelle.
      Bien que la GLNF invoque la non-ingérence, du moins nous semble-t-il, après avoir consacré des Grandes Loges nationales, ce principe est de plus en plus jugé insuffisant dans des contextes de crise majeure ou de conflit portant atteinte à la fraternité maçonnique fondamentale.

    • Cher Volodymyrovytch,
      Voici quelques pistes sur l’histoire de la franc-maçonnerie en Ukraine.
      Elle s’implante en Ukraine à la croisée des influences occidentales, polonaises et russes. Dès le début du XVIIIe siècle, l’ordre maçonnique bénéficie d’un double apport. C’est à la fois depuis la Pologne voisine, où les premières loges sont attestées à partir de 1738, mais aussi via l’impulsion venue de Russie, qui fonde sa première loge en 1731, que la tradition s’établit sur le sol ukrainien. L’année 1742 marque la fondation d’une première structure maçonnique à Vyshnivets, en Volhynie, à l’initiative de l’aristocratie polonaise locale. Une seconde étape notable survient en 1758, avec l’émergence d’une loge à Lviv (Les Trois Déesses). Les réseaux maçonniques se diffusent en même temps vers l’est, touchant l’Ukraine orientale (rive gauche du Dnipro, Slobidska) à partir des années 1740 sous impulsion russe.
      Le développement de la franc-maçonnerie en Ukraine orientale doit beaucoup à Kyrylo Rozumovsky, initié à Varsovie, qui favorise la pénétration de l’idéal maçonnique dans les milieux dirigeants. Cette dynamique est prolongée par d’autres membres de la famille Rozumovsky et nombre de familles nobles, dont les Kapnist, Kochubei, ou encore Tarnovsky et Skoropadsky, dont plusieurs représentants reviennent de leurs études supérieures en Europe imprégnés de l’esprit maçonnique. L’influence s’étend rapidement à la noblesse cosaque et à l’élite administrative.
      L’essor maçonnique se double d’une perte progressive du monopole polonais au profit d’une circulation des idées nationalistes et réformatrices ukrainiennes, notamment à travers le retour des étudiants et la multiplication des liens avec les Loges d’Europe centrale et de Russie. Ce brassage participe à la diffusion de la franc-maçonnerie jusque dans les réseaux administratifs, militaires, médicaux ou commerciaux étrangers installés en Ukraine. Les années 1800 voient éclore des loges célèbres, par exemple à Odessa (« Pontus Euxinus »), Kamianets-Podilskyi ou Lviv. À Kiev, la Loge « Les Slaves Unis » fondée en 1818, et à Poltava « Amour de la Vérité » deviennent des foyers majeurs, reliés à la mouvance décembriste russe.
      Les Loges ukrainiennes s’impliquent, dès la fin du XVIIIe siècle et au XIXe, dans l’émergence d’un mouvement national opposé à l’absolutisme tsariste, ce qui déclenche des mesures de répression : dès 1819, la dissolution de plusieurs loges marque le début d’une période clandestine, aggravée par l’interdiction de la franc-maçonnerie dans l’ensemble de l’Empire russe en 1822. Malgré la surveillance étroite, certaines structures survivent dans la clandestinité et contribuent à inspirer des mouvements réformateurs, comme la Confrérie de Cyrille et Méthode à Kiev.
      À la charnière des XIXe et XXe siècles, la franc-maçonnerie parvient à structurer son organisation sur une base ukrainienne, avec la création de la Grande Loge d’Ukraine dès 1900. Des créations de loges nouvelles à Kharkiv ou Tchernihiv suivent, sans pour autant que cette obédience obtienne une reconnaissance internationale durable. L’entre-deux-guerres et la période soviétique sont marqués par l’exil et la survie des structures en diaspora, notamment en Galicie ou à l’étranger (France, Suisse, États-Unis). En 1966, la loge « Vox Ucrainae » voit le jour à Paris, sous l’égide de la Grande Loge nationale Française
      Après l’indépendance ukrainienne, la franc-maçonnerie retrouve un dynamisme national. En 2005 (24 septembre), la Grande Loge d’Ukraine est consacrée à l’Orient de Paris, bénéficiant du soutien de la Grande Loge Nationale Française et de la Grande Loge d’Autriche. Depuis, le paysage maçonnique ukrainien s’est étoffé d’une quinzaine de loges réparties dans les principales villes du pays, comptant parmi elles des structures reconnues internationalement et animées par une ouverture vers l’ensemble du monde maçonnique.
      Ce parcours, fait de périodes d’essor, de persécutions et de renaissances, témoigne de la capacité de la franc-maçonnerie à se réinventer face aux bouleversements géopolitiques et sociaux, tout en contribuant à la réflexion sur l’identité et l’émancipation nationale.

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