La Plume et la Pensée : « à propos des Rites Égyptiens »

0
1469

Sommaire

A propos des Rites Égyptiens
Editorial par Christian Eyschen……………………………………………….p 3
Actes du colloque national
Bicentenaire de l’exécution des 4 Sergents de la Rochelle……p 5
Memphis-Misraîm, un Rite maçonnique méconnu
par François Bourcier………………………………………………………………..p 6
Un autre regard sur les Rites égyptiens
de Memphis-Misraïm par Christian Eyschen………………………….p 32
Une lettre de François Bourcier
de l’Ordre des Rites Unis de Memphis-Misraïm……………………..p 48
Les 11 Neters d’une Loge égyptienne par GADLU-INFO………..p 52
Il y a deux cent ans : 4 Républicains Francs-Maçons
étaient exécutés par la Monarchie,
la Libre Pensée rend hommage
aux 4 Sergents de la Rochelle !…………………………………………………p 56
Histoire de la Loge des 4 Sergents de la Rochelle
par Philippe Taurisson………………………………………………………………p 60
Soutien à la Libre Pensée par François Bourcier…………………..p 68

Rites Égyptiens de Memphis, de Misraïm & de Memphis-Misraïm :Vivat ! Vivat ! Semper Vivat !

Ce Supplément à La Plume et la Pensée est consacré à l’étude et à la présentation des Rites Égyptiens de Memphis, de Misraïm, de Memphis-Misraïm. Je remercie très fraternellement notre Très Illustre Frère François Bourcier de nous avoir permis de publier son Histoire de ces Rites. Elle est un guide essentiel pour en comprendre la problématique. Nos prochains Suppléments seront consacrés à l’étude et la présentation des Rites Anglo-saxons et ensuite du Rite Écossais Rectifié et de son environnement.

Dans mon travail, j’ai voulu jeter un autre regard qui m’a beaucoup éclairé sur la forme et sur le fond des choses. Il y a toujours un débat sous-jacent, surtout pour les Francs-Maçons Libres Penseurs sur l’acception de ce que veut dire « Religare » ou « Religere ». Selon les cas, on peut comprendre « relier » ou « recueillir ». Mais dans tous les cas, l’obligation de croyance dans une entité suprahumaine est loin d’être obligatoire.

On sait comment les Constitutions d’Anderson, texte fondateur de la Franc-Maçonnerie spéculative ont contourné la difficulté : « Un MAÇON est obligé par sa Tenure d’obéir à la Loi morale et s’il comprend bien l’Art, il ne sera jamais un Athée stupide, ni un Libertin irréligieux. Mais, quoique dans les Temps anciens, les Maçons fussent astreints dans chaque pays d’appartenir à la Religion de ce Pays ou de cette Nation, quelle qu’elle fût, il est cependant considéré maintenant comme plus expédient de les soumettre seulement à cette Religion que tous les hommes acceptent, laissant à chacun son opinion particulière, et qui consiste à être des Hommes bons et loyaux ou Hommes d’Honneur et de Probité, quelles que soient les Dénominations ou Croyances qui puissent les distinguer ; ainsi, la Maçonnerie devient le Centre d’Union et le Moyen de nouer une véritable Amitié parmi des Personnes qui eussent dû demeurer perpétuellement Éloignées. »

Débattre sur « être des Hommes bons et loyaux ou Hommes d’Honneur et de Probité » est mille fois plus intéressant et enrichissant à analyser en profondeur que les sempiternelles controverses sur l’Athée stupide et le Libertin irréligieux. Des centaines de livres, qui ont rempli des centaines de bibliothèques, ont été écrits là-dessus, sans que cela fasse réellement avancer les choses et mette tout le monde d’accord.

La formule andersonienne était la Sagesse même et le Bon sens érigé en vertu. Si toutes les Obédiences qui ont traversé les trois siècles écoulés en étaient restées là, nous n’aurions pas connu toutes les divisions, heurts et malheurs que nous avons dû subir. C’est véritablement et seulement à cette aune-là que l’on peut déterminer qui est « Régulier » et qui ne l’est pas. Je suis de ceux qui pensent fortement que le GADLU ne me dérange pas du tout, si on ne le rend pas obligatoire. Que chacun soit libre et les « croyances » seront bien gardées.

Dans Le Régulateur du Rite de Memphis-Misraïm il est dit : « L’Ordre des Rites Unis de Memphis & Misraïm est spiritualiste, ce qui implique la croyance au Grand Architecte de l’Univers, Il n’est lié et ne dépend d’aucune religion particulière, et laisse depuis toujours ses membres dans une pleine et totale liberté de conscience. ». Constatons que la moitié du chemin avait été fait, il faudra sans doute le poursuivre pour affirmer une totale liberté de conscience dans les faits.

Les Rites Égyptiens ont une puissance libératrice dont j’ai essayé de dégager la gangue qui les a parfois englués pour tenter de faire disparaître la volonté initiale d’Émancipation humaine contre tout cléricalisme et dogmatisme.

Beaucoup de choses tournent autour (Égypte oblige) de la question de « l’Être unique » et de ce qu’il faut en comprendre. Ma Loge Bleue L’Homme libre du Grand Orient De France est jumelée avec la Loge Les Amis Philanthropes Henri-Saint Jean N°4 du Grand Orient de Belgique et nous élevons nos Apprentis en commun au Grade de Compagnon, c’est toujours profondément émouvant et puissant. Nous tenons notre Chantier de Compagnons dans le magnifique Grand Temple Égyptien de la rue du Persil à Bruxelles.

Dans ce Temple, il y a un cartouche sur lequel est inscrit la formule : « L’Être Unique a plus d‘un nom ». Ce qui est la reprise d’une citation d’Aristote : « L’Être unique est polyonyme, les Sages donnent à l’Être Unique des noms divers ». On voit bien que souvent sous un même nom se cachent bien des choses différentes et il est bien qu’il en soit ainsi. On sait qu’un symbole, à la différence d’un signe, a plusieurs acceptions selon celui ou celle qui le regarde et l’analyse.

En lisant les ouvrages nécessaires à mon travail pour Un autre regard sur les Rites Égyptiens, et notamment sur les Rituels égyptiens, on voit que cette conception de la diversité d’appréhensions n’est nullement une litote. J’y ai appris beaucoup de choses. Je vais vous en livrer deux comme une mise en bouche pour vous donner l’envie d’en savoir plus en les lisant.

@Au moment de la cérémonie d’exaltation qui fait revivre la mort brutale d’Hiram, lors d’un voyage, le prétendant au Grade fait trois pas, comme au Grade d’Apprenti pour lui rappeler son Initiation. L’explication égyptienne est que ces trois pas sont le rappel du Très-Pas d’Hiram, il faut faire mourir le « vieil homme » en nous pour que naisse l’Initié.

@Une autre explication est donnée sur le Mot sacré de Maître : « Les significations qui lui sont attribuées habituellement sont diverses. Si on l’interprète d’après l’Hébreu, tout comme les autres mots de nos Rituels, M.·.B.·. a le sens de «Poseur de Pierres polies» et, par extension, de « Constructeur, ou Ordonnateur ». Le mot B.·. signifie : « Chef des Constructeurs, ou Architecte ». On peut en déduire que les deux versions tendent à la même signification. D’après la légende du Grade, il avait été convenu que le premier mot qui aurait échappé en découvrant le cadavre d’Hiram : « C’EST L’ARCHITECTE ! », serait adopté comme Mot Sacré, substitué au Mot véritable, connu d’Hiram et perdu avec lui. »

On le voit, il n’y a pas que la chair qui quitte les os, le sens des mots quitte aussi parfois le son des mots. Je trouve que ces deux exemples prêtent à la réflexion pour celles et ceux que cela intéresse.

Nous espérons que ce Supplément vous intéressera et qu’il ouvrira d’autres portes pour vous.

Si vous voulez le recevoir directement par internet sans passer par une diffusion dans votre Atelier…

…il vous suffit de le demander en écrivant à : c.eyschen-VP@fnlp.fr

Pour conclure et pour souhaiter le meilleur pour les Rites Égyptiens, je citerai l’Acclamation Ecossaise : Vivat ! Vivat ! Semper Vivat ! (Qu’il vive… Qu’il vive toujours !).

Christian Eyschen

Memphis-Misraïm

Avant-propos

Avant d’aborder notre sujet de plein pied et afin d’en saisir pleinement sa quintessence, il nous faut passer tout d’abord par ce que la Franc-Maçonnerie nomme le dépouillement des métaux. Pour cela, posons un instant aux portes de ce livre nos croyances, nos certitudes, nos préjugés et pour un bref instant, imaginons-nous remonter le cours du temps, à l’origine de l’humanité, sur le continent africain à l’époque où nous n’étions encore que des primates à peine séparés de la lignée des chimpanzés en donnant naissance à celle des hominidés. Nous sommes, allez, à environ deux millions d’années nous sommes des Australopithèques (de Malapa) au milieu de la brousse sous le soleil d’Afrique. Regardons cette boule qui chauffe, qui brûle parfois ou qui assèche les cours d’eau.

Au loin des drôles de formes noires (pourquoi tout ce sombre au milieu de cette masse bizarre qui grossit et qui semble mettre le ciel en colère) Et puis, tout se met à bouger et, une force invisible semble se déchaîner : le vent, l’AIR Et puis, un trait brillant violent suivi d’un bruit assourdissant qui fait peur : La foudre. Puis un autre éclair jaillit et encore un autre et un plus grand qui tombe du ciel et brise en deux un arbre d’où jaillit un étrange ballet de volutes jaunes et rouges chaudes et …qui brûle : Le FEU. Et puis, le ciel semble fondre en milliers de gouttes : la pluie. Qui fait tout cela ? Le tableau est impressionnant merveilleux et effrayant à la fois. Et si nous pouvions le reproduire nous-mêmes ce phénomène, cela pourrait peut-être nous servir. Mais comment ? Comment élucider ce mystère du feu, cela fait trop peur. Alors Comment prolonger la main ? Plus tard, Australopithèques et devenus homo habilis, nous avons trouvé une solution, du moins pour la main : de simples cailloux fracassés les uns contre les autres. La taille est simple et quasiment sans retouche. Mais cela aide.

Puis encore plus tard nous sommes devenus Homo erectus qui comme son nom l’indique, se tient debout. Nous avons une capacité crânienne plus développée qui nous permet de fabriquer les premiers vrais outils. Nous nous sommes affranchis de notre peur naturelle du feu et nous avons pu le domestiquer. Puis encore plus tard, devenus Homo sapiens, nous inventons l’art, la gravure, la sculpture. Nous inventons l’aiguille qui permet la couture. Parois, outils, armes, tous les supports sont bons pour représenter graphiquement notre environnement. Nous enterrons nos morts avec soin et selon un certain cérémonial (colliers, objets divers). Nous commençons à vouloir comprendre tout ce qui nous entoure. Nos sens se développent de plus en plus et quand nous levons la tête, un monde inconnu nous apparaît et il émerveille… Pourquoi, tous ces points lumineux dans le ciel ? Sont-ce d’autres feux allumés par d’autres êtres comme nous ? Et cette boule de feu qui semble tout puissant le jour et qui disparaît la nuit ? Commence alors la quête du savoir et au-delà …celle de la connaissance.

PRÉFACE

Dans le Théétète de Platon (155d) souvent cité, il est dit que l’émerveillement est le commencement de la philosophie. On pourrait dire que l’émerveillement est le commencement de l’initiation maçonnique. Et c’est dans le livre de la Métaphysique1 qu’on trouve exprimée la célèbre idée selon laquelle à l’origine comme aujourd’hui, c’est l’étonnement et l’admiration qui conduisirent les hommes à la quête de la connaissance.

L’initié est donc celui qui, comme l’enfant aux premiers jours, (ou comme l’humanité à ses premiers jours) s’étonne et s’émerveille des phénomènes qui l’entourent ; et que ce qui est soit, et qu’il soit tel.

« La vie est la chute d’un corps », disait Paul Valéry. Et à mesure que nous tombons, nous cessons de susciter l’émerveillement. On s’émerveille d’autant moins que pour être capable d’un tel sentiment, il faut soi-même échapper à la pesanteur. L’émerveillement est un sourire de l’esprit qui s’élève dans un être fait à l’esprit qui règne dans un autre être. Pour paraphraser Marcel Maus, c’est un don pour le don.

Et parmi les sciences, sont particulièrement philosophiques celles que l’on recherche pour elles-mêmes et non pour un quelconque avantage matériel. Tel est la quête de l’initié. Telle devrait être la quête de tous maçons de tous le rites.

Surgit alors en contre point, le verso de cette belle approche, son contraire qui peut s’amplifier à l’excès avec les degrés et les grades, et plus ceux-ci sont nombreux, plus le risque est grand et plus la hiérarchie est verticale et plus la tentation est forte : Une notion permet de l’appréhender au plus juste, celle que l’on retrouve en psychanalyse chez Freud : L’Idéal du Moi.

L’Idéal du Moi (allemand : Ichideal). Cette notion désigne les valeurs positives auxquelles aspire le sujet, il est lié au narcissisme (Freud 1914) et à la seconde topique freudienne. Le Moi idéal (allemand : Idealich) désigne une instance reposant sur un idéal de toute-puissance infantile fondée sur le narcissisme infantile. L’Idéal du Moi est une instance du discours. L’Idéal du Moi est lié au stade du miroir (le cabinet de réflexion). Le moi idéal se rapporte au sujet se percevant comme idéalisé. N’est-ce pas aussi ce qui se produit en loge et qui vient parasiter parfois la démarche de l’initié ? N’est-ce pas également la raison des egos de certains hauts dignitaires qui finissent par prendre les sautoirs et les charges et les confondre avec la réalisation de soi et l’illusion d’un MOI idéalisé ? Au vu de l’histoire de ce Rite (qui ne compte pas moins de 95 degrés), la question reste entière.

Gageons cependant que l’émerveillement reste l’un des principaux ressort qui sous-tend la quête de l’initié comme l’exprimait l’architecte André Bruyère attaché à l’expression de la sensualité et à la quête d’un certain merveilleux dans son œuvre. Voilà ce qu’il écrivait dans son livre, le voyage en Egypte : « J’ai le vertige à bien regarder la pyramide. Au fur et à mesure de la progression, vers le sommet, les assises diminuent de hauteur et, par définition, de largeur. L’accélération évidente de la perspective fait basculer le cerveau, qui regarde plus vite qu’il ne comprend. L’émerveillement, c’est peut-être ça : avoir devant soi plus à aimer qu’à comprendre… »

INTRODUCTION

Le rite de MM fait l’objet de beaucoup de mystère. Mal connu par ceux qui le pratiquent, décrié par ceux qui le regardent comme un « ovni », pourchassé dans son histoire la plus ancienne, infiltré pour celle plus récente.

Ce qui est sûr c’est qu’au cours des siècles et encore aujourd’hui, ce rite maçonnique fait l’objet de toutes les controverses mais aussi de tous les fantasmes et de toutes les convoitises. Alors qu’en est-il réellement ?

La littérature sur ce rite est peu prolixe et malheureusement leurs auteurs sont loin d’être objectifs et, pour certains pas toujours recommandables. Engagés dans des courants de pensées ou politiques parfois plus que douteux (intégristes religieux, extrémistes plutôt versés à l’extrême-droite, voir au-delà). Quoiqu’il en soit, presque tous s’inscrivent cependant, dans une volonté d’idéaliser (au sens premier du terme) le Rite. Ce sont bien souvent des penseurs « réalistes » qui à l’inverse de ce que l’on pourrait entendre sous ce terme, pensent que seules les idées sont réelles et qui attribuent aux idées-formes une réalité indépendante de la réalité elle-même. Platon en est l’un des pères fondateurs, et tous les courants chrétiens vont s’y engouffrer allègrement et pour cause, il est plus facile de courir après une idée que de regarder le monde tel qu’il est2. Ce détail peut paraître anodin, mais nous verrons plus tard qu’il a son importance dans la compréhension de l’histoire du rite comme il l’est également dans celle de l’Occident.

Pour l’appréhender dans toutes ses ramifications et ses composantes, il faut d’abord, en préambule, que je me présente et dire ce qui m’autorise à parler du Rite dans les termes qui vont suivre3. Je me permets donc, d’indiquer ici mon parcours maçonnique, non pas par orgueil déplacé (mon métier m’offrant suffisamment d’espace pour assouvir mon ego) mais bien plutôt persuadé que notre histoire de vie, à l’instar des « réalistes » construit ce que nous sommes et produit ce que nous pensons.

Voilà pourquoi, me rappelant toujours la porte basse par laquelle j’ai pénétré dans le temple pour la première fois, je propose que nous pensions ensemble l’histoire de Memphis Misraïm à hauteur d’homme, bien loin des brumes souvent fumeuses du mysticisme et de l’occultisme fascisant (qui n’a rien à voir avec l’ésotérisme et encore moins avec l’hermétisme), mais également bien loin des thèses universitaires et froides qui ont transformé nos Rites en pensée vulgaire, grossière, réservée uniquement au monde profane friand de fantastique au rabais.

Je fus initié au Rite Écossais Ancien et Accepté en 1985 au Droit Humain à Paris. J’y fus Vénérable Maître de la loge « Art et Pensée » et plus jeune vénérable de France du Droit Humain.

J’ai découvert Memphis Misraïm en 1988 pour la célébration de son bicentenaire en présence de Robert Ambelain, pour lequel j’ai créé, à la demande de l’Ordre, un spectacle sur Cagliostro, personnage multi-facettes dont nous serons amenés à reparler plus tard.

La même année, je me suis affilié à la Loge N°1 Hermes (loge mère de l’Ordre à l’époque et atelier en autre de Robert Ambelain, Gérard Kloppel et de nombreux dignitaires de l’Ordre). J’y occupe par la suite de nombreux postes d’Officiers, puis, plus tard, je suis élu à plusieurs reprises à la charge de Vénérable Maître de nombreux ateliers.

Je rentre au Conseil de l’Ordre où j’y occupe de nombreuses charges de Grands Officiers jusqu’à celle de Grand Maître Adjoint. Je suis élu Grand Maître de l’Ordre en 1999. Je crée également au sein de l’Ordre la première Commission historique du Rite que je préside durant plus de trois ans.

A l’origine, avec un certain nombre de mes FF et SS et suite aux bouleversements que va rencontrer le Rite dans les années 2000, je travaille en tant que Grand Maître de la Grande Loge Mixte de Memphis Misraïm avec le Grand Orient De France pour que le Rite puisse retrouver un peu de son axe historique et un peu de sérénité.

Je suis entré en 2002 au Grand Orient de France un 1er mai, un bien joli symbole, avec la loge « les 4 sergents de la Rochelle » travaillant au rite de Memphis Misraïm. Je maçonne également dans les hauts grades ayant reçu jusqu’au 12° du REAA au Droit Humain et ayant reçu tous les degrés de Memphis Misraïm jusqu’au 95° et 96° et 97° (Grand Maître Général de France et de ses dépendances) et 98° Substitut Grand Maître Général.

Je fus initié également au degré de Royal Arch par le 20° de MM, à tous les degrés du Rite Ecossais Rectifié (jusqu’aux classes secrètes), initié également au sein de l’Ordre des Elus Cohen de l’Univers de Martinez de Pasqually. Je rentre au Suprême Conseil de l’Ordre Martiniste lié au Rite de MM : l’Ordre Martiniste Initiatique Réformé (l’OMIR), puis à l’Ordre Kabbalistique de la Rose-Croix (OKRC) puis au R+C d’Orient (Ordre Hermétique de la Rose-Croix). Et pour « la petite histoire », je suis ordonné prêtre au sein de l’Église Gnostique4. Puis fait évêque Templier au sein de l’ORUMM.

Je travaille La Pierre sur les voies de l’Oeuvre alchimique opérative, aussi bien sur la Pierre végétale de Paracelse que sur la voie sèche par le 28e degré de MM qui est une passerelle directe avec les FARC (Frères Ainés de la Rose Croix).

Ce sont toutes ces expériences, diverses et parfois antagonistes, mais toujours vécues pleinement, qui me portent à croire que le rite de Memphis Misraïm est avant tout une voie initiatique empirique, c’est à dire qui place au cœur même de son système, l’accès à la connaissance de toutes choses par l’expérience. Véritable expérience existentielle.

Cette voie est également poétique, dans son sens étymologique5 et qui peut se lire également comme la possibilité offerte de pouvoir créer le monde à partir du réel. Elle est également spiritualiste dans le sens premier du terme, d’une spiritualité qui s’inscrit dans la quête d’un retour au cosmos, étymologiquement : Ordre du monde. Spiritualité transcendantale et non transcendante, de celle que prône les religions.

Nominaliste (seul le réel peut donner un sens au réel) parfois teinté de chamanisme, nomade, le Rite de Memphis Misraïm s’oppose par-là, à la sédentarisation qu’elle soit réelle ou d’esprit, et donc se place dans le courant des traditions orales, à l’opposé de celle du Livre, c’est à dire donnant priorité à la vie plutôt qu’au « savoir par procuration » et de ce fait résolument païen de par son origine et par son attachement au cosmos.

Constitution du rite de Memphis Misraïm.

Origine et Histoire des rites dits égyptiens.

Si l’on fait abstraction du mythe maçonnique qui fait remonter l’origine de cette dernière à Adam et Eve et de ceux du Rite de Memphis Misraïm à de mystérieux mages en lien avec l’Agartha6, l’origine plus sérieuse des rites maçonniques dits « égyptiens » remonte, toutefois à une période bien lointaine. Ces rites ont revendiqué une première filiation, venant d’un Rite Primitif qui aurait été pratiqué à Paris en 1721. D’autres supposent qu’il s’agirait des Frères de la Rose Croix d’Or ou Frères Initiés d’Asie où ces mêmes études étaient à l’honneur et qui fusionnèrent avec quelques loges allemandes pour devenir les Vrais et Anciens Maçons Rectifiés ; c’est sur ces derniers que le baron d’Eckhoffen se serait appuyé pour constituer son Ordre des Architectes Africains (le mot africain étant pris dans le sens d’Égyptien)7.

Toutefois aucun document n’atteste l’hypothèse de l’origine et de cette fusion car il paraît peu probable que des courants dits « chrétiens » fusionnent alors avec des courants considérés comme « néopaïens », mais l’a encore, rien n’a été historiquement démontré car les frontières demeurent bien floues. Et là encore, nous verrons plus tard que des alliances que l’on ne pouvait deviner se sont nouées au cours des siècles.

Ce qui est plus sûr c’est que ces rites s’inspiraient de ce que l’on appelait la « tradition égyptienne », et consistaient en une association de traditions et de textes, tels qu’ils étaient compris à cette époque. C’est le cas par exemple du « Séthos » de l’Abbé Jean Terrasson (1731), l’ « Oedipus aegyptiacus » d’Athanasius Kircher (1652) et du «Monde primitif » d’Antoine Court de Gébelin (1773). La Kabbale judéo-chrétienne, l’hermétisme néo-platonicien, l’ésotérisme, les traditions chevaleresques et autres trouvaient également là une source naturelle d’expression. C’est ainsi que Joseph Balsamo dit le comte de Cagliostro, qualifia le rite qu’il constitua dans les années 1780 de « Rite de la Haute Maçonnerie Egyptienne ». Arrêtons-nous un instant sur cette figure emblématique de la naissance des rites égyptiens, et qui fut en son temps, lui aussi, très controversé.

Cagliostro

Il y aurait à dire sur ce personnage qui fonda à Lyon en 1785 la loge égyptienne, « la parfaite harmonie ». Retenons de lui, que, loin d’être le charlatan qu’on imagine, Cagliostro participa activement à la chute de Marie Antoinette qui précipita l’avènement de la Révolution Française8. Il fut enfin le dernier prisonnier de l’Inquisition et disparut dans les geôles de la Prison San Léo à Rome en 1795. Dans sa « Lettre aux Français » écrite en exil à Londres en 1786, il écrit :

« Quelqu’un me demandait si je retournerai en France, dans le cas où les défenses qui m’en écartent seraient levées. Assurément, ai-je répondu, pourvu que la Bastille soit devenue une promenade publique. ».

Une belle réflexion prémonitoire. Et plus loin, il ajoute :

« Français, changez d’opinion enfin et méritez la liberté par la raison. Il est digne de vos parlements de travailler à cette heureuse révolution… ».

Nous sommes loin de l’image sulfureuse fabriquée autour ce personnage qui fut membre également des « Illuminés de Bavière »9 du Fameux Baron de Hund (l’équivalent aujourd’hui d’une Bande à Baader, version maçonnique). Le Cardinal de Rohan lui-même et qui fut impliqué au premier chef dans l’affaire du collier de la Reine, appartenait, lui, aux Philadelphes (nous en parlerons plus loin). Étranges coïncidences qui pourraient faire de cette affaire, si l’on y regarde de plus près, un véritable complot ourdi en grande partie par des maçons et digne de l’application pratique du rituel du 30° du rite de Memphis Misraïm et du REAA. Mais attention à ne pas glisser dans la théorie du même nom. Opportunité, coïncidence, occurrence, autant de possible dont l’Histoire est friande et qui discréditent ces théories du complot si simplistes qui ne servent qu’à trouver un bouc émissaire à nos propres malheurs. Lorsqu’après la pluie on constate un nombre important de grenouilles, cela ne veut pas dire qu’il pleut des grenouilles !

Naissance d’un Rite

Le Rite de Memphis-Misraïm, comme on peut déjà le constater hérite, au cours des siècles, de traditions bien curieuses, antérieures à la maçonnerie du XVIIIe siècle, dont il va, petit à petit, « syncrétiser » les principes, la force morale, la discipline et les enseignements.

Par ailleurs, il s‘inspirera dans ses formes et son organisation, en grande partie, de la Maçonnerie des Philalètes de Paris, fondé en I772 par Savalette de LANGES, des Frères Architectes Africains de Bordeaux, de l’Académie des Vrais Maçons de Montpellier, du Rite de Pernety des Illuminés d’Avignon (branche française des fameux Illuminés de Bavière), des courants Rose-Croix (R+C) d’Orient, et, en premier lieu du Rite Primitif des Philadelphes de Narbonne (1779) que nous avons évoqué plus haut et dont le Cardinal de Rohan était membre. Arrêtons-nous un instant plus particulièrement sur la fondation de ce rite.

Le Rite des Philadelphes de Narbonne

« Je suis Homme et rien de ce qui est humain ne m’est étranger »

*(Préambule des principes du Rite de Narbonne).

Ce rite des Philadelphes est d’abord une affaire de famille10. A l’origine, un père, ses six fils, cinq officiers et un prêtre. Ils en seront les premiers membres fondateurs. Les tenues se déroulent tout simplement à la maison (Le martinisme11 conservera encore de nos jours, cette pratique). Les Frères contractent le devoir de « sauver leurs fils, leurs neveux, leurs parents ».12

Le fondateur reconnu du Rite de Narbonne, le marquis François-Marie de Chefdebien, est né à Narbonne le 15 avril 1753, sous le règne de Louis XV. Sa famille était installée dans le Midi depuis le treizième siècle. Son père, officier du régiment de Piémont-Infanterie fut fait prisonnier au cours de la guerre de Sept Ans et devint franc-maçon au cours de sa captivité en Allemagne, dans un pays en pleine effervescence rosicrucienne13.

Nous connaissons peu la jeunesse du marquis. Au hasard d’une lettre de son père nous apprenons « qu’il n’était que lieutenant en 1776 ». Deux ans plus tard son père sollicite pour lui une bourse pour l’École Militaire. Mais cette même année, surprise, le jeune marquis prend la parole au Convent des Gaules qui s’est tenu à Lyon du 25 au 28 décembre 1778, à l’initiative des maçons français affiliés à la Stricte Observance, mais désireux d’acquérir leur autonomie par rapport à cet Ordre. Cette prise de parole montre que François-Marie était alors un maçon d’une certaine envergure. Avait-il été initié dans son régiment qui servait en Corse ?

On peut le supposer. Le 29 février de l’année 1778, il fait état de lettres patentes accordées à trois de ses amis pour l’ouverture d’une loge des Hauts Grades, qui devint bientôt le « Chapitre de l’Amitié à l’Épreuve ». Dans ces lettres, il se désigne comme « Grand Inspecteur, Inquisiteur Général des Travaux du Premier, Second et Troisième Temple de Jérusalem ». Mais de quel rite ? Mystère. Il est fort probable qu’il faut y voir là, la présence des Chevaliers de Palestine et l’influence des degrés des R+C d’Orient.

En 1778, le Convent des Gaules parvint à rompre avec la tradition templière dont se prévalait la Stricte Observance ; Chefdebien, cependant, resta fidèle à l’Ordre du Temple, qui lui, se démarque curieusement d’un christianisme à outrance (d’où sa chute). Toute sa vie, il chérira le titre de « Chevalier à la Tête Casquée » conféré au 6ème grade de la Stricte Observance, selon le rituel d’adoubement des chevaliers du Moyen Age. Faut-il y voir l’attachement à la chevalerie de mérite qui fut remplacé à partir de 1552 par une chevalerie de quartier (donc réservée à la caste aristocratique et fermée à tout jamais, au plus valeureux, quelles que soient leurs conditions sociales) ? Cet épisode de notre histoire reste très important pour comprendre pourquoi un certain nombre de valeurs chevaleresques furent transmises à la maçonnerie par ces chevaliers de mérites, gentiment « licenciés » car par trop roturiers. Ceux-ci furent nombreux à transmettre cette chevalerie de mérite dans les divers courants des sociétés secrètes de l’époque.

Nature du Rite des Philadelphes

Le rite a pour adage : « je suis Homme et rien de ce qui est humain ne m’est étranger », ce qui, et cela est à souligner, dans un siècle ou la religion est liée au pouvoir monarchique et prône la transcendance absolue, tend déjà à reconnaître que l’homme s’inscrit dans un tout cosmique et qu’aucune chose ne doit rester dans l’ignorance ou plus symboliquement dans l’ombre. En effet connaître au regard de sa propre expérience existentielle, c’est construire un savoir populaire qui passe par le vivant et non par le « livresque ». Le livre, par divers aspects peut devenir religion. C’est d’ailleurs ce que prôneront les trois grandes religions monothéistes qui se décrivent elles-mêmes comme la « religion du Livre ». Leurs prêtres s’érigeant comme intermédiaires incontournables entre les hommes et Dieu, ou le divin. En maçonnerie, c’est tout l’inverse. Il est même fort intéressant de retrouver dans certaines loges, la pratique du livre blanc. Pages vierges. Seul son rapport au monde va remplir les pages de notre livre. Ce qui rend la maçonnerie de Memphis Misraïm profondément non-cléricale (et non pas forcément anticléricale) de nature.

Poursuivons : En dehors de l’humain14, rien n’est étranger, ce qui signifie qu’il n’y a pas de rapport de transcendance mais d’immanence, nous sommes là en présence d’une affirmation qui démontre bien l’aspect moniste du rite : un seul monde, celui du vivant, une seule âme matérielle et commune aux trois règnes. En cela le rite se révèle presque animiste et détache discrètement mais sûrement avec le christianisme imposé par l’Église romaine qui affirme le contraire. Cette déclaration d’intention tend à faire de tous les Hommes un peuple de Frères intimement lié au vivant, constituant précisément une prétention à l’internationalisme et à l’universalisme, l’invitant à retrouver sa place au sein du cosmos, place perdue depuis la mainmise des Églises sur l’État et de la civilisation du profit.

En 1790 la Loge des Philadelphes fit imprimer une brochure intitulée « Notion générale sur le caractère et l’objet du Rite primitif », et l’on y trouve de précieux renseignements. Le Rite (ou Rit) est un syncrétisme des cinq sciences mères15 empruntées à Martinès de Pasqually, en particulier à la Réintégration de l’Homme spirituel dans son essence originelle, (théorie qui sera déformée par la suite par certains ésotéristes à tendances chrétiennes pour la faire coïncider avec leur doxa alors que Martinez de Pasqually est juif et s’inscrit beaucoup plus dans les mouvances kabbalistes et théurgiques juives qui restent parfaitement vitalistes à la source et monistes16).

Le Rite Primitif fut pratiqué jusqu’en 1790-91. Dans la nuit du 5 au 6 août 1792, des effractions causèrent la perte des titres, registres et cartons. Les Frères décidèrent alors de supprimer les Tenues, de suspendre les admissions, de ne se réunir que par petits groupes et surtout de ne plus tenir de registres. En avril 1805, ils sollicitent du Grand Orient de France des lettres d’agrégation. Des difficultés surgissent alors quand il leur faut produire les actes constitutifs du Rite. Comme par miracle, ces documents sont « miraculeusement retrouvés par un profane » et l’affiliation est accordée le 27 septembre 1806.

Quoiqu’il en soit, le Rite ne tarda pas à s’éteindre… Mais, en avril 1815, à Montauban, une sorte de renaissance a lieu qui donnera bientôt naissance au Rite de Memphis. Le phénix renaissait de ses cendres.

Les origines de Memphis

Son origine, la plus ancienne est probablement, (au-delà du mythe fondateur crée par Marconis de Negre et qui fait remonter son origine aux Templiers qui auraient eux-mêmes reçu une filiation remontant jusqu’à un sage d’Egypte converti par Saint Marc), son origine historique passe, elle, par la fondation, au Caire, de la Loge Isis, en 1798, qui comptait parmi ses membres des savants et des officiers français ainsi que des notables égyptiens initiés aux mystères des Pyramides. Plusieurs auteurs pensent que Napoléon Bonaparte s’y est fait initier par Kléber, d’autres affirment qu’il fut l’un des membres fondateurs. Une autre thèse veut qu’il fût initié à Valette à Malte, ce qui paraît improbable quand on connaît la dérive que représente l’Ordre de Malte17. Quoiqu’il en soit, rien jusqu’à présent, ne vient étayer toutes ces hypothèses.

Ce qui est plus sûr, c’est que Le Rite primitif de Narbonne avait, en 1798, été importé en Égypte par ces officiers de l’armée de Bonaparte, qui avaient installé cette Loge Isis au Caire. Ces FF, appartenaient aux divers courants initiatiques dont le Rite des Philadelphes. Ils sont entrés en contact avec les FF de la Grande Loge d’Égypte, descendants des R+C de la période constantinienne18. Ils furent également en contact avec des initiés du Soufisme et des Collèges initiatiques Druzes du Liban. Ils décidèrent de renoncer à la filiation de la Grande Loge d’Angleterre et de créer un nouveau Rite. Ainsi naquit plus tard, la Loge « Les Disciples de Memphis », suivant la tradition du Rite de Narbonne.

Les FF, de retour en France, rapportèrent dans leur bagage cette loge et, avec elle, les sciences et sagesses qu’ils avaient acquises. C’est dans cette Loge que fut initié Samuel Honis, lequel, venu en France en 1814, établit à Montauban, en 1815, une Grande Loge19 sous le nom Les Disciples de Memphis, avec l’assistance de Gabriel Marconis de Nègre, du baron Dumas, du marquis de la Roque, de J. Petit et Hippolyte Labrunie, anciens frères du Rite. Le Grand Maître était Marconis de Nègre lui-même. À la suite d’intrigues, cette Grande Loge fut mise en sommeil le 7 mars 1816. Les travaux furent repris en 1826 par une partie de ses membres, mais sous l’autorité du Grand Orient de France.

Mais tel le phénix, le rite de Memphis va renaître plusieurs fois de ses cendres.

Toutefois le 15 Juin 184I fut une date néfaste pour l’Ordre. En effet, à la suite de diverses intrigues fomentées par des adversaires du Rite, une interdiction est promulguée par le Préfet de Police de Paris sans aucun motif valable.

Au début de l’année 1842, sept frères constituèrent un Temple Mystique pour la garde des Archives et la propagation du Rite à l’étranger. Le gouvernement de l’Ordre se met toutefois en sommeil. Ce sommeil va durer encore sept ans.

Le 5 Mars 1848, le Rite de Memphis reçut une autorisation de réouverture et le 25 Mars, les loges furent réveillées par Marconis de Nègre. Trois Loges, un Chapitre et un Conseil reprennent force et vigueur. En 1849, le Rite est introduit dans divers pays. A la suite des accusations dirigées, au cours de l’année 1850, contre la Maçonnerie en général, l’autorisation de se réunir est retirée aux Loges de Memphis le 23 Décembre de la même année.

En 1851, le Rite de Memphis sur l’initiative de Marconis de Nègre, ouvre plusieurs Ateliers à l’étranger ; il établit à Londres la Grande Loge. C’est dans une des trois loges « Les Philadelphes » que vont se retrouver de nombreux proscrits du coup d’Etat du Prince-Président Louis-Napoléon Bonaparte. Parmi les membres de cet Atelier, on trouve les noms de Garibaldi, Auguste Blanqui, Alfred Talandier, Louis Blanc …

En 1856, Marconis de Nègre se rend aux Etats-Unis où il établit le 9 Novembre, à New-York, un souverain Grand Conseil avec David Mac Lellan. En 18861 c’est Harry Seymour qui lui succédera comme Grand Maître du Souverain Conseil Général des Etats-Unis. Durant cette période, de nombreux Souverains Sanctuaire verront le jour : Égypte, Australie…

En 1862, le Maréchal MAGNAN, Grand Maître du Grand Orient de France, d’accord avec le Conseil de l’Ordre, adresse à toutes les autres Obédiences une circulaire en vue de l’unité maçonnique en France et à se ranger sous la bannière de Napoléon III. Le Rite de Memphis s’unit au Grand Orient de France qui l’admet dans son Grand Collège des Rites et des loges de Memphis sont constituées sous le contrôle du Grand Orient. Seul Misraïm refusera cette allégeance.

La même année, le Souverain Sanctuaire du Rite de Memphis consacre comme Grand Hiérophante Harry Seymour.

En Juin 1863, le Grand Hiérophante Seymour établit définitivement son Souverain Sanctuaire des États-Unis.

En 1869, après la Mort de Marconis de Nègre, le Gouvernement Suprême du Rite se déplace en Egypte avec le Marquis de Beauregard comme Chef du Rite. La même année, Gustave Naquet, rédacteur en chef du Journal « Le Peuple » est initié à Londres au Rite de Memphis dans la Loge « Proscrits », nom de loge qui en dit long sur les orientations du Rite.

En 1876, le Grand Orient National d’Egypte (Rite de Memphis) confère le 25 Octobre à l’Illustre Frère Garibaldi, les grades de 95ème et 96ème avec le titre de Grand Maître ad Vitam.

Garibaldi qui, nous le verrons plus tard, va jouer un rôle important dans l’histoire des deux rites.

En attendant tel est, très brièvement survolé, l’origine et la constitution du Rite ancien et primitif de Memphis, auquel est venue s’adjoindre, par la suite, le Rite de Misraïm 20.

Les origines de Misraïm

La première loge française de Misraïm21 qui apparaît historiquement dans l’histoire, fut fondée en 1814-1815 à Paris par les trois frères Marc, Michel et Joseph Bédarride. Cadres moyens de l’armée impériale en Italie, ils ramenèrent ce rite de Naples. Dans l’état actuel des recherches historiques, il semble que ce rite ait puisé ses premières racines en Italie, peut-être à partir d’une patente délivrée par Cagliostro lui-même, avant de commencer son développement dans les loges franco-italiennes du Royaume de Naples. Il est plus probable que le rite ait puisé ses sources dans les milieux maçonniques du Comtat Venaissin, milieux férus de « sciences spirituelles »22 et dans lequel le père des frères Bédarride aurait été initié vers 1771-1773.

Ce qui semble certain c’est que le système et les chartes des frères Bédarride ont convaincu divers maçons, dont Thory et le Comte Muraire, qui les mirent alors en relation avec d’autres maçons des rites écossais (RER et REAA).

Plusieurs autres loges furent créées, mais les frères Bédarride, réduits au chômage avec la fin de l’Empire et n’ayant pu réussir à se reconvertir dans la parfumerie, commencèrent à vivre exclusivement de la diffusion de leur rite, ce qui poussa quelques frères à s’en retirer et à demander en 1816, sans succès, leur admission au sein du « Grand Consistoire » du Grand Orient de France.

Le rite de Misraïm poursuivra son destin avec des hauts et des bas jusqu’en 1822, date à laquelle, ayant abrité de très nombreux réseaux politiques, bonapartistes, révolutionnaires et républicains23, il fut interdit par la police de la Restauration. Celle-ci ferma la dizaine de loges qui le composaient et confisqua une grande partie de ses archives. En 1831, le rite obtint toutefois, à la suite de la Révolution de 1830, le droit de se reconstituer, mais seules quatre loges parisiennes y parvinrent à cette époque ; elles restaient toutefois, un terreau privilégié pour tous les révolutionnaires.

Le Frère Morrison (1780-1849) jouera un rôle important dans l’histoire de ce rite. Originaire d’Écosse, ancien médecin militaire des armées britanniques pendant les guerres napoléoniennes, passionné par les hauts grades maçonniques, Morrison fut dignitaire de tous les systèmes de hauts grades existant à l’époque à Paris et contribua à la reconstitution du rite. Il n’y a pas de hasard, il s’était établit à Paris en 1822 ; la même année où les sergents de la Rochelle (tous misraïmites et carbonaristes) furent guillotinés. Toutefois, arrêtons-nous un instant sur l’histoire des sergents de la Rochelle.

Les quatre sergents de la Rochelle.

Dès 1821, sous la Restauration, le 45e régiment d’infanterie, en garnison à Paris inquiète les autorités militaires et civiles à cause de son mauvais esprit. En particulier, les soldats refusent de crier « Vive le Roi ». Aussi, afin de couper le régiment « des mauvaises influences politiques » (leur caserne se situant en plein quartier latin à Paris, là où les étudiants entretiennent déjà, à cette époque, la contestation), il est transféré à la Rochelle en janvier 1822.

Comme nombre de militaires hostiles à la Restauration monarchique imposée par l’ennemi vainqueur, quatre jeunes sergents nommés Jean François Bories, Jean-Joseph Pommier, Marius-Claude Raoulx et Charles Goubin, âgés respectivement de 26, 25, 24 et 20 ans, ont fondé dans leur unité une Vente (l’équivalent d’une loge) de Carbonari24, en lien avec une loge de Misraïm.

À La Rochelle comme dans la capitale, les conspirateurs entendent bien poursuivre leur action clandestine. Mais quelque peu imprudents par leurs propos, les quatre compagnons sont dénoncés. Ils sont traduits en justice avec une vingtaine de complices, mais comme ils ont fait solennellement serment de silence, lors de leur adhésion, les principaux accusés refusent de dénoncer leurs chefs, malgré les pressions et les promesses de grâce. Ils paient donc pour ces derniers, au premier rang desquels figure un F de renom : le marquis de La Fayette.

Accusés de complot, ils sont traduits devant la cour d’assises de la Seine, condamnés à mort et guillotinés le 21 septembre 1822 en place de Grève à Paris.

Revenons à Misraïm.

C’est le 18 Janvier 1823, que sur la référence à des documents violemment anticléricaux de sa Loge de Montpellier découverts au cours d’une perquisition chez le F Vernhes, que le tribunal de police correctionnelle ordonne la dissolution en France de l’Ordre de Misraïm. Certes, ses membres vont continuer à travailler clandestinement, mais cette mesure en leur interdisant toute activité légale, va paralyser pendant une longue période, le développement du Rite.

Entre les années 1848 et 1862, le rite traversa une crise importante. Ses positions et le profil de ses membres (pour beaucoup républicains convaincus) déplaisent au pouvoir en place. En 1858, le Grand maître du Grand Orient de France (alors aux ordres du pouvoir impérial) fit savoir que les frères de Misraïm ne pouvaient être reçus en visite dans les loges du Grand Orient de France. En 1862, comme nous l’avons décrit plus haut, Le Maréchal Magnan, alors Grand Maître du Grand Orient de France appelait tous les Maçons à se rassembler sous la bannière impériale de Napoléon III. Misraïm décline de manière nette, l’invitation. En effet, le GODF obtiendra pour toute réponse : « Le Rite de Misraïm tient trop à son indépendance pour reconnaître vos pouvoirs et subir votre domination ; si l’Empereur croit devoir nous supprimer, qu’il le fasse ; mais nous ne nous soumettrons jamais », ce qui valut à Misraïm, à nouveau, les foudres du pouvoir impérial et déboucha sur de nouvelles interdictions.

Michel Bédaride avait transmis avant sa mort, en 1856, la charge de diriger l’ordre à Hayère auquel avait succédé Girault en 1876, Osselin père vers 1884, puis Jules Osselin en 1887. Ce dernier fermera la Grande loge Misraïmite en 1899.

La Fusion de Memphis et Misraïm

Plusieurs frères, parmi lesquels Étienne Marconis de Nègre, fils du Grand Maître des Disciples de Memphis et haut gradé du Rite de Misraïm, eurent l’idée, bien avant la fusion, de réunir les degrés des divers Rites pratiqués jusqu’alors et de les consolider sur les principes adoptés à Montauban.

Ils examinèrent les degrés des divers Rites, les révisèrent et les encadrèrent d’un certain nombre de degrés rassemblant et expliquant la doxa des initiations anciennes, puis ils donnèrent à cette organisation le titre de Rite ancien et primitif de Memphis. Il faudra attendre 1881 et la grande Maîtrise de Joseph Garibaldi pour concrétiser officiellement la réunion des deux rites (Memphis et Misraïm) et non pas sa fusion.Joseph Garibaldi

Garibaldi est la pierre angulaire de l’unification italienne, pour avoir personnellement conduit et combattu dans un grand nombre de campagnes militaires qui ont permis la constitution de l’unité de l’Italie et réduit les Etats pontificaux aux limites du Vatican.

Il est surnommé le « Héros des Deux Mondes » en raison des entreprises militaires qu’il a réalisées aussi bien en Amérique du Sud qu’en Europe, ce qui lui a valu une notoriété considérable tant en Italie qu’à l’étranger. Celle-ci est due à la couverture médiatique internationale exceptionnelle dont il a bénéficié pour l’époque, et qui a relaté, parfois avec romantisme, son épopée. Parmi les plus grands écrivains, beaucoup, notamment français, Victor Hugo, Alexandre Dumas, George Sand lui ont montré leur admiration. Le Royaume-Uni et les États-Unis lui ont été d’une grande aide, lui proposant, dans les circonstances difficiles, leur soutien financier et militaire.

Garibaldi fut Grand Maître de presque toutes les obédiences italiennes. Il fut initié en 1844 dans la loge irrégulière Asilo de la Virtud, de Montevideo, Uruguay, puis le 15 juillet de la même année dans la loge régulière Les Amis de la Patrie du Grand Orient de France. En 1861, après l’élection à l’Assemblée constituante du Grand Orient d’Italie de Turin, le Grand Orient d’Italie lui décerne le titre honorifique de « Premier franc-maçon d’Italie ».

Pour Alessandro Mola professeur d’histoire contemporaine à l’université de Milan et historien de la franc-maçonnerie et du Risorgimento, l’Expédition des Mille menée par Garibaldi aurait bénéficié d’un financement de trois millions de francs et d’une assistance permanente. Ce serait la franc-maçonnerie du Rite écossais qui aurait financé l’opération avec le soutien des États-Unis, alors sans représentation diplomatique, afin d’éliminer le pouvoir temporel du pape. Là encore cela reste des hypothèses qui demandent à être sérieusement étayées.

En 1862, il sera élu Grand maître du suprême conseil écossais de Palerme, le principal concurrent du Grand Orient d’Italie, titulaire en une journée de tous les degrés jusqu’au 33e du rite écossais ancien et accepté, ce qui lui apporte la reconnaissance officielle et le soutien de la maçonnerie américaine. En 1864, il occupera la plus haute charge de l’ordre, celle de Grand Maître du Grand Orient d’Italie.

C’est en 1872, que John Yarker nomme Garibaldi membre honoraire du « Souverain sanctuaire du rite ancien et primitif » pour la Grande-Bretagne et l’Irlande. Un véritable camouflet pour la Grande Loge Unie d’Angleterre.

En 1876, le Grand Orient national d’Égypte, de langue italienne, le fait Grand Maître honoraire.

Et enfin, en 1881, (un an avant sa mort) les rites de Memphis et Misraïm s’unissent et se placent alors sous son égide en lui attribuant le titre de Grand Hiérophante.

Dans son testament symbolique, Garibaldi écrivit : « Je lègue : mon amour pour la Liberté et la Vérité ; ma haine du mensonge et de la tyrannie ».

Fin de Misraïm, naissance de Memphis-Misraïm

En 1889, le Rite de Misraïm placé sous la juridiction française ne comptait plus que trois loges à Paris, huit en province, deux à New-York, une à Buenos-Aires et une à Alexandrie. À celles-ci, il convenait d’ajouter les loges de la juridiction italienne qui était alors indépendante.

Toutefois, la montée en puissance de Memphis et les interdictions répétées que subit le Rite de Misraïm et le rapprochement des deux rites opéré en 1881 et placés dorénavant sur la seule Grande Maîtrise de Garibaldi finit par affaiblir le Rite de Misraïm. Des fusions s’opèrent alors entre le deux rites et c‘est en 1899 que l’on voit apparaitre sur les tableaux de loges des ateliers placés sous l’égide du Rite de Memphis-Misraim. En 1900, les Loges indépendantes du Rite de Misraïm disparaissent les unes après les autres. En 1902, le Rite de Misraïm indépendant disparaît. Les grades s’enchevêtrent désormais les uns avec les autres. La même année le Souverain Sanctuaire d’Angleterre constitue le Souverain Sanctuaire d’Allemagne avec comme Grand Maître : Théodore Reuss.

En Juin 1908, à la suite du Congrès Maçonnique Spiritualiste à Paris, dans le Temple du Droit Humain à Paris, est constitué un Souverain Grand Conseil Général du Rite de Memphis-Misraim pour la France et ses dépendances.

La patente constitutive est délivrée par le Souverain Sanctuaire d’Allemagne, signée et scellée le 24 Juin à Berlin par Théodore Reuss qui assistait au Congrès de Paris. Le Docteur Gérard Encausse (Papus) est nommé Grand Maître et le Docteur Charles Detre (Teder) Grand Maître adjoint. S’ouvre alors une nouvelle histoire : celle de Memphis-Misraïm.

L’Histoire contemporaine de Memphis-Misraïm

L’histoire contemporaine du Rite est encore plus complexe. Cette complexité est due principalement à plusieurs particularités :

– la légitimité maçonnique y est réputée provenir principalement de la transmission de pouvoirs de dirigeant à dirigeant, via des « chartes ».

– les dirigeants étaient, jusqu’à la scission de 1925, tous nommés à vie.

– La pratique du rite ayant toujours été minoritaire dans le paysage de la maçonnerie mondiale. Et pour cause puisque ce/ces Rite(s) fut(rent) de tous temps, pourchassé(s) par les polices monarchistes et impériales et dissous en permanence. En rupture de ban avec la maçonnerie régulière et en particulier avec celle du Grand Orient de France (qui, rappelons-le portait jusqu’en 1822, trois fleurs de lys dans sa bannière).

– Le fait que ces rites furent l’abri privilégié de tous les révolutionnaires, bonapartistes et carbonaristes pourchassés par la police de la Restauration26.

Puis à la fin du XIXème siècle, quand les pouvoirs politiques changeaient de mains, que les Républiques s’instauraient plus ou moins définitivement et que le marxisme balayait violemment tous les courants libertaires et ceux du socialisme utopique27. Il ne resta alors, majoritairement, en apparence, au sein de l’Ordre, que les férus « d’occultismes ». Nous retrouvons entre autres : Stanislas de Guaita, Pelladan, Rudoph Steiner, Aleister Crowley, Marc Haven, Paul Sédir, René Guénon et Papus… C’est dans cette fin de XIXe siècle et dans l’avènement du suivant que l’histoire du rite se double d’une histoire complexe mêlant de nombreux courants occultistes plus ou moins authentiques. Ce sont eux qui vont teinter le Rite, d’une couleur « sulfureuse » qui continue encore aujourd’hui à lui coller à la peau. D’où cette mise au point nécessaire afin de restituer ses vraies dimensions à cette maçonnerie égyptienne protéiforme.

Le Rite de Memphis-Misraïm au début du XXème siècle.

Papus ou Le Balzac de l’occultisme

Comme nous l’avons signalé précédement, Théodore Reuss fit nommer à la tête de l’Ordre en France Gérard Encaussse dit Papus.

Encausse était un médecin doublé d’un occultiste. Surnommé “Le Balzac de l’occultisme”, il écrit plusieurs dizaines d’ouvrages sur l’occultisme et la magie. Il est l’un des plus proches disciples de Maître Philippe de Lyon. Il fonde avec Augustin Chaboseau l’Ordre Martiniste Traditionnel. Après avoir sans succès demandé son admission à la Grande Loge Misraïmite et à la Grande Loge de France, Papus obtint de JohnYarker une patente lui permettant d’ouvrir une loge au rite de Swedenborg. En 1906, il obtint également de Yarker l’autorisation de constituer la Loge « Humanidad » en compagnie d’Henri Charles Détré dit « Teder » qui deviendra bientôt la loge-mère du Rite. Le 24 juin 1908, Papus organise le IIe Congrès internationale Maçonnique et Spiritualiste à Paris dans le Temple du Droit Humain rue Jules Breton. René Guénon était présent comme secrétaire de bureau sur l’estrade, revêtu de son cordon de Chevalier Kadosh du chapitre INRI. Et c’est donc également à cette occasion, que Théodore Reuss, Grand Maître du Souverain Sanctuaire d’Allemagne délivre à Papus, une charte pour fonder un Suprême Grand Conseil Général des Rites Unis de la Maçonnerie Ancienne et Primitive de Memphis-Misraïm qui le propulse alors en France à la tête de l’Ordre.

Théodore Reuss Grand Maître du Souverain Sanctuaire allemand, l’autorisa à transformer en compagnie de Teder la loge Humanidad précédemment rattachée au Rite National Espagnol en Loge Mère pour « l’Antique et Primitif Rite Oriental de Memphis-Misraïm » en France.

C’est par l’intermédiaire de cette Loge Mère Humanidad, pour les trois premiers degrés et de son Chapitre INRI converti au Rite Ancien et Primitif des Hauts Degrés, que le Rite de Memphis Misraïm va pouvoir bientôt sortir de l’ombre. Du moins, en France.

C’est donc en 1908, que Papus devient Grand Maître pour la France. Il décèdera le 25 octobre 1916, laissant à son adjoint le docteur Henri Charles Détré, alias Téder, la charge de lui succéder à la tête de l’Ordre jusqu’au décès de ce dernier le 26 septembre 1918. Nous sommes encore alors en plein conflit mondial, la Grande Guerre ne s’achevant que quarante-six jours plus tard, le 11 novembre 1918. Pendant ce premier grand conflit qui marque un tournant décisif dans l’histoire du monde et le bascule brutalement dans le modernisme, le rite fut mis en sommeil en Angleterre, en France, en Allemagne, mais également en Roumanie et en Égypte. Alors que dirige le nouveau Grand Maître Detre (Teder) depuis la mort de Papus ?

Et c’est là que nous devons faire une petite pause dans cette histoire. Car peu de biographes ou d’historiens s’y retrouvent dans toutes ses successions.

Memphis Misraïm, toile d’araignée de l’occultisme ou occupation de tous les courants maçonniques ?

En effet il faut savoir que tous ces frères ne faisaient pas qu’appartenir à la maçonnerie du rite de Memphis Misraïm, loin s’en faut. Ils faisaient tous partis de différents Ordres et courants dont beaucoup en avaient été les fondateurs. Cela allait de l’Ordre martiniste, de l’Eglise catholique gnostique, de l’Ordre du Temple Oriental, de la Société Théosophique, l’Ordre kabbalistique de la Rose Croix, en passant par l’Hermetic Order of the Golden Down et bien d’autres groupes moins connus et dont les objectifs et les outils se trouvent parfois en totales contradictions voir opposés …

Et pourtant, les équivalences de grades, c’est à dire des passerelles ou raccourcis entre les degrés des différents ordres jouaient alors à plein. Cet aiguillage qui ressemble plus à la complexité d’une toile d’araignée n’est compréhensible que de l’intérieur.

Des Ordres, et des points bien particuliers qui peuvent les relier voir parfois les opposer par des divergences trop grandes et créer de véritables étincelles. On ne mélange pas impunément des courants de 110, 220 ou 380 volts. Tel fut le cas parfois pour l’histoire de Memphis Misraïm dans ce début du XXème siècle. Mais cela ne cacherait il pas autre chose ? Une nouvelle hypothèse qu’aucun historien du rite n’a encore osé avancer.

Reprenons, cependant – avant d’en venir à cette hypothèse – le cours de notre histoire. Donc Memphis Misraïm ressemble plus alors à un des plus grands carrefours de traditions et courants initiatiques occidentales et même, orientales encore beaucoup plus important que celui des origines. C’est dans ce contexte bien particulier qu’à la mort de HenriCharles Détré, on lit partout que son ami Jean Bricaud prend la succession de l’Ordre de Memphis Misraïm. Mais comment ? Qui lui confère le titre ? Détré lui-même ?

Henri-Charles Détré (Teder)

On a pu lire partout que Henri-Charles Détré, dit Teder, fut tout d’abord un martiniste, un occultiste avant d’être un franc-maçon. Il débute paradoxalement dans l’anti­maçon­nisme avec un livre intitulé Les apologistes du crime, dirigé contre la Maçonnerie écossaise, les Jésuites et les Catholiques. Arrivé en Belgique, il se fait expulser pour une affaire de chantage, et se réfugie en Angleterre où il rencontre John Yarker qui lui transmet ses titres de maçonnerie dite irrégulière, c’est à dire non reconnu par la Grand Loge Unie d’Angleterre c’est à dire à peu de chose près tous les courants maçonniques restants. Mais toutefois quelques passerelles très discrètes existent tout de même avec cette maçonnerie qui se dit régulière. Une passerelle existe en effet par la Societas Rosicruciana in Anglia et sur le continent par la Rose croix d’Or qui fut fondée (ou plutôt réveillée par Joseph Pelladan).  Est-ce par-là que ces Frères étaient toutefois en contact avec les membres de la Grande Loge Unie d’Angleterre ?

Quoiqu’il en soit, à la mort de Papus, Henri-Charles Détré dirigea l’Ordre martiniste, la section française du Rite de Memphis-Misraïm et de l’Ordo Templi Orientis ; et de 1916 à 1918 il sera le Grand Maître de la Grande Loge swdenborgienne de France. Il composa le Rituel de l’Ordre Martiniste, initialement établi uniquement pour les dignitaires de l’ordre. C’est son ami Jean Bricaud qui lui succédera à la tête de l’Ordre Martiniste. Un ami, de près de trente ans son cadet. Un Frère en martinisme avant tout. Et c’est encore là que l’histoire a le hoquet.

La Grande maîtrise de Memphis Misraïm ne lui pas été transmise directement. En effet, à la mort de Teder, le Rite semble s’être mis en sommeil du fait de la guerre mais dans les autres Ordres les FF continuaient d’œuvrer. La succession officielle c’est donc faite par une reconnaissance tacite des équivalences de grades à travers les autres ordres. Cette hypothèse semble se préciser quand on sait que le 25 Septembre I919, des Frères travaillant au Rite Français et appartenant au Grand Collège des Rites du Grand Orient de France et des Frères travaillant au Rite Écossais et membres du Suprême Conseil de la Grande Loge de France, tous possédant les Hauts-Grades du Rite de Memphis-Misraim, et désireux tout en restant fidèles à leurs Obédiences respectives de travailler au rite de Memphis-Misraïm adoptent la résolution de rétablir le Rite de Memphis-Misraim en France.

« Pour cela, ils réveillent, à l’Orient de Lyon la Mère-Loge Humanidad, d’accord avec la puissance maçonnique qui délivra la Charte de Constitution en 1908 du Rite de Memphis-Misraim pour la France. » dixit Bricaud. Quelle est cette puissance maçonnique si ce n’est Théodore Reuss dont la nationalité allemande devient gênante à la sortie de la guerre. Même si la fraternité doit régner parmi tous les frères, le conflit mondial avec l’Allemagne fut trop violent et est allé trop loin pour ne pas laisser des traces profondes dans le corps et la psyché des Frères qui en sont revenus marqués à vie. Bricaud prend soin de pas le nommer par gêne ou par respect pour les victimes de ce conflit dont on tient alors l’Allemagne (et tous les Allemands avec) responsable. Mais par cette phrase il reconnaît valide celui que John Yarker lui-même avait pris soin de désigner comme son successeur et qui ne fut pas respecté par certains membres du Souverain Conseil Universel qui ne voyait plus en Théodore Reuss que le « boche » et non un Frère. Les métaux sont bien durs à déposer dans certains cas.

On trahit donc les volontés de Yarker et les membres donnèrent le titre de Grand Hiérophante Général du Rite à Edouardo Frosini (membre du Souverain Sanctuaire de Venise). Pour comprendre la suite qui est un imboglio encore plus complexe, je renvoie le lecteur au livre Jaune n°1 de Joseph Castelli qui reprend en détail et en parallèle mieux que je ne saurais le faire, toute cette période.

Mais revenons à notre histoire.

Cette « puissance » délivre donc à Jean Bricaud, le 10 Septembre 1919, une Charte pour la Constitution en France d’un Souverain Sanctuaire de Memphis-Misraim. Parallèlement, le 30 Septembre de la même année, le Suprême Conseil des Rites Confédérés des Etats-Unis, lui délivre également une Charte pour l’établissement en France d’un Suprême Grand Conseil des Rites Confédérés (Early Grand Scottish Rite, Memphis-Misraim, Royal Order of Scotland, rite de Cerneau …) ce qui aurait dû clore l’affaire car il n’y a rien à dire de la régularité des transmissions faite par le Suprême Conseil des Rites Confédérés de États-Unis.

Dès ces années 20, Théodore Reuss va s’appuyer sur le Souverain sanctuaire de France. Il aurait fait Jean Bricaud alors déjà Grand Maître, vice Grand Hiérophante. Mais aucun document atteste de ce fait. Une autre version nous dit que la succession du Grand Hiérophante Théodore Reuss n’ayant pas été assurée avant sa mort le 28 octobre 1923, (pour des raisons qui sont liées en grande partie au conflit mondial qui opposa alors son pays au reste du monde) le Souverain Sanctuaire de France réunit à Lyon se considère, en vertu des Chartes de 1919 données par le même Théodore Reuss28) comme parfaitement légitime et pouvant reprendre à son compte les prérogatives légitimes accordées en 1919. Très logiquement et pour être conforme à la situation et en l’absence de succession officielle, ou du fait de la branche italienne qui revendiquait alors cette Grande Hiérophanie, le Souverain Sanctuaire de France transforme à ce moment, le titre de Grand Hiérophante en Grand Maître Général.

Arrêtons-nous encore une fois sur cet épisode fort instructif car cela signifie que nul ne pouvait plus se prévaloir de ce titre. D’ailleurs Bricaud et ses successeurs (Constant Chevillon, Dupont…) vont toujours signer Grand Maître Général. Et pourtant, l’histoire du Rite se complique encore un peu plus car en septembre 1933 est constitué un Suprême Conseil International du rite Ancien et primitif de Memphis Misraïm par les Frères belges dissidents. En 1934 Georges Bogé de Lagreze, Jean-Henri Prost-Biraben et Victor Blanchard fondent en 1934 la FUDOSI (Fédération universelle des Ordres et Socitétés Initiatiques) avec à sa tête Spencer Lewis (Impérator de l’AMORC) et Emile Dantine (Sâr Hyeronimus, R+C universelle continuatrice de la R+C Catholique de Péladan).

Mais revenons en 1934, le 21 Février plus exactement, le Grand Maître Général Jean Bricaud décède à Lyon. Constant Chevillon, député Grand Maître et membre du Comité permanent, est reconnu, en Mars, comme nouveau Grand Maître Général. La proclamation consécutive à son élection est publiée dans le Bulletin Officiel de la Saint Jean d’Été de la même année. Le nouveau Grand Maître Général constitue deux nouvelles provinces administratives et nomme deux Grands Maîtres Adjoints pour les diriger.

En 1937, le convent annuel du Souverain Sanctuaire de France se tient à Lyon, dans le Temple de la Loge-Mère Humanidad, avec entre autres une importante délégation du Souverain Sanctuaire de Suisse.

Cette date marque une période florissante pour l’Ordre qui ne cessera qu’à la guerre. A la déclaration de guerre et sous l’occupation, Constant Chevillon décide alors de mettre en sommeil le rite de Memphis-Misraïm au moins en apparence car celui-ci va toutefois perdurer dans la clandestinité.

1933-1944 -Les années sombres. *Gémissons*Gémissons*Gémissons*mais espérons.

Zentralbild 153-40 II. Weltkrieg 1939-45 24.10.1940 Adolf Hitler begrüßt den französischen Staatschef Marschall Henry Philippe Petain in Montoire-sur-le-Loir. In der Mitte Chefdolmetscher Gesandter Dr. Paul Schmidt. Rechts Reichsaußenminister Joachim von Ribbentrop.

Quand la seconde guerre mondiale éclate et que la France se voit occupée par les nazis et dirigée par un gouvernement de collaboration, toute la Franc-maçonnerie subit de plein fouet la violence de la barbarie nazie et des milices collaborationnistes. Les locaux et les temples sont détruits et/ou pillés. L’hôtel du Grand Orient de France est saccagé et transformé en une vitrine antimaçonnique mise au service du régime de Vichy. Le Rite de Memphis-Misraïm, en pleine expansion avant guerre paye lui aussi un lourd tribut à son attachement à la liberté et à sa lutte contre le fléau nazi. Constant Chevillon, alors Grand Maître National du Rite sera abattu à quelques kilomètres de Lyon au printemps 1944 par la milice de Vichy. Mais la répression contre les FF et SS ne s’arrête pas aux frontières de la France et le Rite de Memphis-Misraïm se voit particulièrement pourchassé par les régimes nazis et fascistes.

George Delaive, Grand Maître du Rite en Belgique, après avoir rejoint la Résistance en France est emprisonné et décapité à la hache par les nazis à la prison de Brandebourg. Raoul Fructus, qui avait de hautes responsabilités dans le Rite avant la guerre, meurt en déportation en février 1945. Otto Westphal, responsable du Rite en Allemagne, est interné en camp de concentration puis torturé et assassiné.

Un jeune maçon toutefois, va braver les interdits, et au risque de mettre sa vie en danger, il va maintenir allumé dans la clandestinité, le flambeau de la Franc maçonnerie au cœur de cette nuit noire pavoisée au couleur de la svastika. Ce jeune maçon c’est Robert Ambelain qui durant toute l’occupation tiendra des réunions de Loge clandestine dans son salon à Paris, dissimulant les décors maçonniques dans le pied de table de sa salle à manger. Aidé en cela de quelques frères courageux comme le TPSGC du REAA de la GLDF. C’est en souvenir de cette triste période que Robert Ambelain fera rajouter à la batterie maçonnique de Memphis-Misraïm : Liberté-égalité-Fraternité, le triptyque adopté durant l’occupation : Unité-Stabilité-Continuité.

Pendant et à la sortie de la guerre d’autres FF illustres viendront enrichir les colonnes du Rite : Robert Amadou, Jules Boucher …

Plus tard, Robert Ambelain fonde la loge Hermes qui deviendra après la seconde guerre Mondiale la loge mère du rite depuis la mise en sommeil d’Humanidad. Le « hasard » veut que je fus affilié en 1989 à la loge Hermes à Paris et que je fus l’un des membres (avec Gérard Kloppel, Grand maître Mondial du rite, Richard Gaillard Grand Maître de France pour le Rite) à avoir réveillé à Lyon dans les années 90 la Loge Humanidad. Le hasard toujours, veut également que la maison familiale que j’habite se situe à quatre kilomètres de l’Arbresle, là-même où se trouve la maison de Maître Philippe de Lyon, là où Papus, Teder, Sédir et Marc Haven en autres, se sont maintes fois retrouvés autour de Monsieur Philippe. Toutefois, il n’y a pas de fumée sans feu. Voilà pourquoi afin de comprendre les enjeux et les bouleversements que va subir, de nouveau, le Rite à la fin du XXème siècle, (je renvoie le lecteur au paragraphe Alkaest). Il est bon de revenir sur la vraie personnalité de celui qui fut à l’origine de la construction contemporaine du Rite : Robert Ambelain.

ROBERT AMBELAIN

Qui est donc Robert Ambelain ?

Robert Ambelain est né à Paris le 2 septembre 1907. Il passe à l’Orient Éternel le 27 mai 1997. Il est l’un des grands auteurs français, spécialisé dans l’ésotérisme, l’occultisme, l’astrologie… Homme de lettres, historien et membre sociétaire des Gens de Lettres et de l’Association des écrivains de langue française « mer, outre-mer », il est l’auteur de quarante-deux ouvrages (dont certains sous le pseudonyme d’Aurifer, son nom en tant que Supérieur inconnu initiateur dans l’Ordre Martiniste).Son intérêt pour l’ésotérisme commence par l’astrologie, vers 1921. Entre 1937 et 1942 il publie un Traité d’astrologie ésotérique en trois volumes.

Il est initié en Franc-Maçonnerie, le 24 mars 1939 dans le temple de la porte d’Orléans à Paris, parrainé par le grand maître de la maçonnerie égyptienne : Constant Chevillon, dans la loge « La Jérusalem des vallées égyptiennes ».

Il est ensuite reçu compagnon et maître au cours d’une tenue clandestine au camp d’Epinal. Pendant l’occupation alors que toute la maçonnerie a été mise en sommeil ; il dirige à son domicile les tenues de la loge « Alexandrie d’Égypte », au Rite de Memphis-Misraïm. Il reçoit de Georges Bogé de Lagrèze les hauts grades de ce rite, du 4e au 33e et les 55e, 66e, 90e et 95e.

En 1942 toujours, il réveille l’Ordre des Élus Coëns, dont il est le Souverain Grand Commandeur. L’Ordre Martiniste des Élus-Cohens, lié pendant un temps à l’Ordre de Papus dirigé par Philippe Encausse au sein de l’Union des Ordres Martinistes, va poursuivre son activité jusqu’en 1967. Robert Ambelain fondera alors l’OMI durant la réforme de l’Ordre en 1968

C’est en 1942 que Georges Bogé de Lagrèze et Camille Savoire, tous deux membres du Grand Prieuré des Gaules du Rite Ecossais Rectifié auraient donné patente à Robert Ambelain, afin de créer l’Ordre Martiniste des Élus-Cohens et d’y intégrer les classes secrètes de Profès et Grand Profès.

Robert Ambelain, une fois devenu Grand Maître de la « Grande Loge Française du Rite ancien et primitif de Memphis-Misraïm » en 1960, va tenter de rassembler, dans une même Obédience mondiale, les Ordres se réclamant du Rite de Memphis-Misraïm. Il parvient à établir des relations fraternelles avec la plupart des Grandes Obédiences Françaises. Il ne réussit pas néanmoins à unifier certains groupuscules de Memphis séparés, ni les Rites de Memphis-Misraïm d’Italie issus d’une filiation différente. Sous sa Grande Maîtrise, il est décidé que le siège de la Grande Maîtrise générale sera obligatoirement Paris et que le Grand Maître devra autant que possible être francophone. En outre, en 1963, les 33 premiers degrés de Memphis-Misraïm sont revus pour les conformer au « Rite Écossais Ancien Accepté » et faciliter ainsi les contacts avec les autres Obédiences.

Voilà pour la bibliographie que l’on peut trouver un peu partout. Mais son rôle ne s’arrête pas là. En effet, après avoir reçu toutes les initiations à tous les degrés, Robert Ambelain va en 1968 rectifier le Martinisme29 et s’éloigner radicalement des courants papusiens trop « christiques» à son goût et terriblement éloignés de leur origine plus alchimique et kabbalistique. Il va pour cela fonder l’OMI (Ordre Martiniste initiatique), se rapprochant en cela par la branche russe et ukrainienne de Louis Claude de Saint Martin et non de Jean Baptiste Willermoz où Joseph de Maistre restés beaucoup trop fidèles aux idées monarchiques et contre-révolutionnaires.

Dans la nuit du 31 décembre 1984 au 1er janvier 1985, Robert Ambelain transmet sa charge de Grand Maître Mondial ad-vitam du Rite à Gérard Kloppel, alors Grand Maître Général adjoint depuis deux ans. Quelques mois plus tard, en juillet, il lui transmettra également les degrés du Rite Écossais Primitif. Parallèlement en 1985 il réveille le Rite écossais primitif. Il est aussi Chevalier bienfaisant de la Cité sainte dans le Rite écossais rectifié, avec le nom d’ordre d’Eques a reconciliatione

Gérard Kloppel

Né le 5 mars 1940, Gérard Kloppel est initié en 1963 dans la loge « Papus » de la Grande Loge de France, puis deux ans plus tard il rejoint le Rite de Memphis-Misraïm de Robert Ambelain au sein de la Loge « Hermès » qui l’élève aux degrés de Compagnon et de Maître.

Le 3 avril 1976, les 66, 90 et 95e Degrés du Rite de Memphis Misraïm lui sont conférés par Ambelain. Les 26 et 27 novembre 1983, un Convent du même Rite le nomme Grand Maître Mondial Substitut, selon le vœu de Robert Ambelain.

Le 30 juin 1984, il sera désigné comme Grand Maître pour la France et Grand Maître mondial du même Rite le 1er janvier 1985. De même, Gérard Kloppel sera nommé par Robert Ambelain comme son successeur à la Présidence du Suprême Conseil des Rites Confédérés pour la France et ses dépendances, le 4 juillet 1985.

En 1987, Gérard Kloppel fonde le premier Souverain Sanctuaire féminin, mais ce Souverain Sanctuaire prend son indépendance en 1990 et une nouvelle fédération féminine, devenue par la suite Grande Loge sera recréée en 1993. En 1997 une structure mixte est instaurée.

En 1998, un vrai cataclysme atteint le Rite qui explose, Gérard Kloppel démissionne et cède la grande Maîtrise Mondiale à Cheikna Sylla. Mais en réalité il la transmet à Joseph Castelli qui en reçoit tous les arcanes. Nous analyserons ces faits dans un autre chapitre. Le 6 octobre 2008, Gérard Kloppel décède à l’âge de 68 ans.

L’Echelle des degrés à Memphis Misraïm29

La pyramide de Giza et son Sphinx
La pyramide de Giza et son Sphinx

Les degrés d’initiations une fois fusionnés furent divisés en trois séries et sept classes, qui sont bien moins des rangées de degrés que des Écoles, où, comme dans le Rite primitif de Narbonne, sont enseignées les sciences maçonniques les plus poussées.

@La première série enseigne la partie morale, reposant sur la connaissance de soi-même. Elle offre l’explication des symboles, des emblèmes et des allégories. Elle dispose les initiés à l’étude de la philosophie maçonnique.

@La deuxième série comprend l’étude de l’histoire et des Rites maçonniques les plus universellement répandus, ainsi que des mythes poétiques de l’Antiquité et des initiations anciennes.

@La troisième série renferme le complément de la partie historique de la philosophie, elle étudie le mythe religieux dans les différents âges, de même que toutes les branches de la science appelée secrète (synthèse des 5 sciences mères ; cf notes 14) ou Arcana Arcanorum.

Enfin, relativement à la Maçonnerie, elle en fait connaître la plus intérieure, composée d’enseignements antérieurs au christianisme, voir pré-socratique, et admet les études pratiques les plus avancées sur ces cinq sciences mères. Non seulement chacune de ces trois séries est formée de plusieurs divisions dans lesquelles sont conférés tous les degrés maçonniques modernes, mais encore, tout en conduisant progressivement à travers les anciens mystères des différentes traditions où se révèle la raison d’existence de ces degrés, la dernière série permet d’accéder à une lecture cosmogonique de la Maçonnerie, à sa gnose qui repose avant tout sur la synthèse des différents courants composant l’Histoire de l’humanité et de ses arcanes les plus mystérieuses. In fine : les intégrer tous pour mieux les transcender. C’est l’hypoténuse du triangle pythagoricien qui lie la verticalité et l’horizontalité, la Croyance et le Savoir (représentés par l’équerre du Vénérable Maître aux trois premiers degrés et permet d’atteindre à la Connaissance. Une connaissance qui permet de lire le monde à 360°. L’aigle à deux têtes sur le sautoir du 95° du rite de Memphis Misraïm en est le symbole car l’aigle est censé voir à 180°, les deux têtes regardent dans les deux directions opposées couvrant ainsi les 360°. C’est à dire une possible lecture du monde dans toute son amplitude, mais aussi, une lecture poétique du monde dans son sens étymologique : créer. C’est à dire créer le monde ici et maintenant et non dans un ailleurs et un futur hypothétique fait d’arrière monde, de paradis perdus et d’idéologies plus ou moins fumeuses. Dans ces conditions, on comprend mieux pourquoi le rite attira également tous les courants libertaires (Bakounine fut initié à Florence dans les années 1864/65)

Memphis-Misraïm se détache, par-là, des maçonneries plus platoniciennes, et inscrit ses recherches non pas dans la conceptualisation du monde mais bien dans sa perception, dans ce que le réel nous offre pour créer un monde ici et maintenant, plus fraternel et plus humain, en harmonie avec le cosmos. Le parcours de l’initié à travers cette forêt de symbole et à travers les âges n’est-ce pas la quête d’un supplément d’Âme ? Ou sommes-nous tout simplement les héritiers d’une très ancienne tradition qui permit de voir éclore l’agriculture mais aussi et malheureusement la guerre. Cette tradition, celle des forgerons et des métallurgistes. Mais cela est une autre histoire… Quoique ?

François Bourcier

Notes :

1 La Métaphysique est une des œuvres principales d’Aristote. Il s’agit d’un ensemble de quatorze livres, réunis de manière posthume. Le titre de Métaphysique lui est donné par le bibliothécaire Andronicos deRhodes, qui a rassemblé et organisé les livres. En effet, Les ouvrages regroupés sous le titre de Métaphysique par Andronikos de Rhodes (le premier éditeur des œuvres d’Aristote, qui a choisi ce nom parce qu’il avait placé ces livres aprèsl a Physique) sont au nombre de quatorze. Les quatorze livres de la Métaphysique sont désignés par une lettre grecque, à laquelle on fait correspondre traditionnellement un numéro d’ordre.

2 Il faut prendre en ligne de compte qu’une religion comme le précise Guy Debord est généralement accolé à un système politique (capitalisme, libéralisme) qui permet au pouvoir de maintenir la masse dans l’idée d’un monde meilleur, d’un arrière monde comme le définit Nietzsche, arrière monde qui se situe toujours « ailleurs ». Les souffrances vécues dans celui-ci ne seraient rien moins qu’une épreuve permettant d’accéder à un Paradis.

3 En effet, souvent en FM, les FF et SS opposent au discours, un « il verra plus tard quand il aura franchi les degrés » ou « il ne possède pas assez de degrés et d’initiations pour en parler ». Dans mon cas, j’ai reçu de ce rite tous les degrés, ce qui me permet d’en parler en connaissance de cause, ayant ouvert le compas au maximum.

4 Cette voie s’est substituée au cours du siècle dernier à une autre beaucoup plus secrète et fermée à laquelle je serai toutefois initié : les Compagnons d’Adonhiram. Voie de maçonnerie dite « noire », très proche de certains rites bouddhistes mais dont le cœur rejoint ceux très fermés également des anathèmes (rites d’excommunication) des églises chrétiennes et celui plus encore hermétique du Herem juif.

5 L’étymologie du mot « poésie » est déjà une interprétation du fait poétique : poiêsis pour les grecs signifie « création », du verbe poiein (« faire », « créer »). Le poète, qui s’est appelé d’abord l’« aède », le chanteur, est considéré comme le créateur, l’artiste par excellence, car il invente en même temps le langage, avec ses figures et son rythme, et l’objet du langage, que doit conserver l’architecture du poème. Voilà une piste intéressante sur la quête de la Parole perdue.

6 L’Agartha, Agarthi, Agardhi ou Asgharta est une cité, un royaume, ou un monde souterrain mythique. Sa description est apparue dans la littérature française au XIXe siècle au sein d’ouvrages romancés témoignant de légendes et de mythes hindouistes et bouddhistes. Le thème réapparaît au début du XXe siècle avec le témoignage, contesté, d’un universitaire aventurier ayant parcouru la Mongolie. Cette légende se lie ensuite aux mythes des mondes disparus (Hyperborée, Thulé, Atlantide, Lémurie), et à partir des années 1950 aux théories de la Terre creuse. Il a été adopté par des mouvements New Age. L’Agartha est en général présentée comme un monde idéal dépositaire de connaissances ou de pouvoirs surnaturels.

7 On trouve traces d’un chapitre provincial d’un Ordre des Architectes Africains créé à Paris dès 1777.

8 L’affaire du collier reste, pour l’histoire, une des plus grande escroquerie qui, en 1785, eut pour soi-disante victime, le Cardinal de Rohan, évêque de Strasbourg. Affaire qui éclaboussa définitivement la réputation de la reine Marie Antoinette, discrédita l’autorité du Roi et renforça le pouvoir du Parlement. Premier « coup de canon » de la Révolution française.

9 Dom Pernety fonde le Rite des Illuminés d’Avignon en 1766 qui donnera plus tard l’Académie des Vrais et Anciens Maçons de Montpellier (qui était l’appellation même du rite originel allemand).

10 Le Rite Primitif de Narbonne (1759). Le Rite est ramené de Prague par le Vicomte de Chefdebien d’ Aigrefeuille. C’est son fils, membre de l’Ordre des Frères Africains, le Marquis François Chefdebien d’Armissan, Chevalier de Malte, qui se fit propagandiste actif du Rite Primitif de Narbonne, avec la Loge Mère les Philadelphes de Narbonne en 1779. C’est de cette Loge Mère que vient l’appellation de ” Rite Primitif des Philadelphes”. Il comporte trois classes de 10 degrés d’instruction, en réalité plusieurs de ces degrés ne sont qu’une collection de grades :

– 1ère classe : les trois grades bleus, à savoir apprenti, compagnon et compagnon fini (qui deviendra plus tard celui de Maître)

– 2° classe : (Subdivisée en 3) Maître Parfait, Élu et Architecte. Sublime Écossais. Chevalier de l’épée, Chevalier de l’Orient et Prince de Jérusalem. *En fait ces 2 classes ne sont qu’une introduction à la troisième qui contient la véritable essence du Rite. Cette dernière classe comprend 4 chapitres de Rose+Croix :

                – 1er Chapitre symbolique : étude poussée sur le symbolisme de la fraternité secrète.

                – 2° Chapitre historique : étude de l’histoire de la Tradition et sa transmission d’école en école.

                – 3° Chapitre philosophique : étude de la science maçonnique.

                – 4° Chapitre dit de Fraternité Rose + Croix de Grand Rosaire : exclusivement dédié aux sciences spirituelles perdues, (et non à l’occultisme comme certains le prétendent) avec pour but la réintégration (ou construction) spirituelle de l’homme.

11 Louis Claude de Saint martin et le martinisme issue du martinésisme de Martinez de Pasqually. Louis Claude de Saint Martin comme Chefdebien va rompre avec la Stricte Observance, mais également avec le Rite Ecossais Rectifié, issue de cette rupture et qui vit le jour avec le Convent des Gaules et celui de Wilhelmsbad ; Rite à tendance chrétienne fondé avec Joseph de Maîstre et Jean Baptiste Willermoz. Louis Claude de Saint Martin va quitter ce Rite et prendre une autre direction. *Il faut savoir que Louis Claude de Saint Martin fit partie de la première Constituante révolutionnaire et fut chargé de garder Marie Antoinette au Temple (section des piques), lors de sa captivité. Nous sommes loin encore une fois des doux rêveurs qu’on nous présente bien souvent.

12 Mais de quoi ? A cette réponse, personne, à ce jour, ne s’y est penché sérieusement pour y apporter une réponse. Il serait bon d’y voir une volonté beaucoup plus consciente et raisonnable de fonder un mouvement qui permet de « préserver les dépôts initiatiques » des bouleversements qui ne vont pas tarder à marquer la fin du 18ème siècle. Dans les rituels martinistes, certaines invocations se rapprochent de cette « mission ». Mais nous pouvons y lire également l’attachement plus symbolique à la valeur de la cellule familiale vu comme symbole de la cellule cosmique primordiale, de la tribu primitive comme dirait Freud.

13 Un mot sur les mouvements Rose Croix. Ce mouvement n’est pas celui qu’on imagine aujourd’hui. Il possède deux courants distincts. L’un d’inspiration chrétienne, issue des Rose Croix d’Or et qui donnera les mouvements rosicruciens d’aujourd’hui et l’autre en lien avec l’Orient (dont ils prendront le nom) et pré « révolutionnaire » pour l’époque puisque son mot d’ordre était et demeure encore : une République universelle, une Religion universelle, une Médecine universelle. La Rose Croix d’Orient se donne alors pour but d’en finir avec la Monarchie et l’Eglise romaine (toute puissante et accolée au pouvoir politique) et les divers charlatans qui s’érigent en médecin afin d’instaurer une médecine pour tous, particulièrement pour les plus défavorisés. En quelques sorte et si l’on se réfère à la symbolique alchimique : l’un sur la voie humide et l’autre sur la voie sèche.

14 Humain dans le sens humaniste, il faut donc entendre par là les trois règnes : car l’homme possède en lui le minéral, le végétal et l’animal (il fait donc partie intégrante d’un grand tout, le cosmos, traversé par une force vitale qui interpénètre l’ensemble du vivant, mais dans des degrés différents et non dans une nature différente, ce que prône les 3 religions du Livre).

15 Les Cinq sciences mères sont : La Symbolique et la Mythologie, l’Astrologie, (plus proche de l’astronomie que de la divination par les astres) la Kabbale, la Théurgie et, enfin, la science qui se place à la pointe sommitale de l’étoile à 5 branches : l’Alchimie.

16 Il sera le fondateur des Élus Cohen de l’univers ; rite profondément opératif qui replace l’homme au centre de lui-même afin de le détacher de l’idée chrétienne d’une nature séparée et d’un Dieu omniprésent pour qu’il puisse retrouver sa place perdue dans le cosmos depuis l’apparition du platonisme et surtout d’un christianisme récupéré par les divers Eglises.

17 Il faudrait reprendre ici, toute l’histoire de la chute de l’Ordre du Temple et de la récupération par divers Ordres de son héritage. Retenons seulement que les derniers chevaliers du Temple vouaient une antipathie profonde envers l’Ordre des hospitaliers qui deviendra plus tard l’Ordre de Malte. Par ailleurs, il est bon de rappeler que de nos jours, en dehors de son aspect humanitaire très louable au demeurant, l’Ordre de Malte est la seule structure au monde exclusivement réservée à une classe aristocratique, très lié aux mouvances d’extrêmes droites.

18 Il est à noter que le symbole des R+C pour la branche orientale ne fait pas allusion à la croix du Christ sur lequel fleurit la rose comme beaucoup se l‘imagine. La croix est plus proche de celle de Saint André (+) et illustre plutôt l’équilibre des mondes du Chevalier Prince R+C. Le titre de prince signifie ici « la maîtrise des principes ». Le chevalier Prince R+C est donc maître du principe. Il équilibre par-là, et les principes de chevalerie qu’il maîtrise, et l’aristocratie intérieure qu’il a acquise et qui le fait souverain de lui-même, couronnant par là sa propre matière (d’où toutes ces couronnes que l’on retrouvent dans les symboles maçonniques). A noter que le grade de Maître de Saint André au RER (Rite Ecossais Rectifié) se rapproche de cette symbolique. Rappelons qu’André : andros signifie l’Homme dans sa signification d’être englobant les deux sexes bien sûr.

19 Une Grande Loge est constituée d’au moins trois loges bleues.

20 Dont on prétend que le Rite fut fondé en 1788 à Venise, par un groupe d’une cinquantaine de Sociniens, survivants de la secte du 17ème siècle, secte protestante antitrinitaire, fondée par Lélio Socini, né à Sienne en 1525, décédé en 1562. Mais là encore ce ne sont que des hypothèses. Il est dit aussi que le Rite de Misraïm aurait été fondé par LECHANGEUR, un maçon initié au plus haut grade du Rite Ecossais Ancien et Accepté. Le successeur de LECHANGEUR, Théodore GÉRBER, donna à Milan, pouvoir à Michel BEDARRIDE pour implanter le nouveau rite en France en 1810. Mais là encore rien n’est avéré.

21 Misraïm signifiant Égypte ou égyptiens en hébreu.

22 A noter que ces sciences étaient à cette époque, tout à la fois exotériques et/ou ésotériques, c’est à dire révélées et cachées… à la fois ! A cette époque la science recouvrait également l’alchimie et même la magie.

23 On sait que des FF.°. comme Briot proche de Buonarotti (l’auteur du manifeste des égaux) et Bunarotti lui-même furent membres de Misraïm. John Yarker à Londres fut grand Maître pour L’Angleterre et participa à la 1ère Internationale ouvrière. Charles Longuet gendre de Karl Marx était également misraïmite. Enfin, Joseph Garibaldi qui devint le Grand Maître des deux rites réunis et tous ses compagnons carbonaristes donnèrent à Misraïm cette couleur Noire et rouge qui marqua profondément celui-ci.

24 La Charbonnerie, société secrète au même titre que la Franc-Maçonnerie, tire son nom des rites d’initiation des forestiers (rituels forestiers) fabriquant le charbon de bois à l’origine dans le Jura et en Franche-Comté. C’est en quelque sorte la maçonnerie du bois. Bois qui permet de forger les outils mais aussi les armes. La Franc-Maçonnerie entretient un rapport étroit à l’art de la forge et du travail des métaux qui remontent à l’âge du cuivre et principalement dans le Levant dont certaines tribus furent à l’origine de la fondation d’Israël. Le lien rituélique à Caïn et à Tubalcaïn en est une trace notoire. *C’est tout le mythe énochien qu’il faudrait développer ici. Retenir qu’il s’agit ici d’un mythe attaché à la terre et plus particulièrement au monde souterrain et au seul métal qui peut citer dans le temple. Rappelons que Caïn est le père fondateur de ce mythe. Il est le révolté mais également le nomade par excellence et finira par se cacher de la colère de Dieu sous la terre. A ce titre, le Rite de Memphis Misraïm peut se revendiquer comme étant les héritiers de la lignée des enfants de Caïn, de celle des quénites, tout comme le sont les carbonaristes. Ces sociétés de « bons cousins charbonniers » sont très antérieures au phénomène politique du carbonarisme italien et de la charbonnerie française. Issues de l’ancienne corporation du métier de charbonnier, ces associations usaient de signes secrets de reconnaissance et favorisaient l’hospitalité et l’entraide. Chaque section locale d’une société des « bons cousins » s’appelle une « vente » (vendita en italien).

La tradition du Compagnonnage charbonnier est particulière. A la différence des compagnonnages de maître Jacques, de Salomon et du père Soubise (le plus proche car regroupant les métiers du bois et les premiers compagnonnages de couverture), la Charbonnerie refusera par essence de « s’embourgeoiser », respectant en cela son attachement aux valeurs populaires. D’où la réalité et les légendes de leurs forêts abritant proscrits et rejetés de la société du monde, le long des siècles, et cela depuis Jeanne d’Arc ou les guerres de religions, jusqu’aux rencontres « fortuites » de nobles « se perdant dans la forêt » et se faisant initier aux rites des plus humbles de leurs sujets : on parle par exemple de François Ier, Henri IV…La littérature en retiendra la figure mythique et l’immortalisera à tout jamais sous les traits de Robin des bois.*Comme pour Misraïm, La Charbonnerie fut à l’origine de la première grande vague d’agitation contre le Congrès de Vienne en Europe au début des années 1820. En raison de la répression, Misraïm, comme les Carbonari ou la Charbonnerie, constituaient alors l’un des seuls moyens d’expression politique libre. *Le phénomène politique et insurrectionnel de la Charbonnerie fut d’abord italien, avant de connaître par la suite des ramifications en France. C’est le révolutionnaire français Pierre-Joseph Briot, lui-même franc-maçon du rite de Misraïm et « Bon cousin charbonnier » du rite du Grand Alexandre de la confiance, qui importa ce rite à Naples, fin 1809. Il participa sans doute à l’unification secrète des divers groupes italiens sous l’égide de la Carbonaria. La figure de l’Italien Buonarotti, ami de Robespierre, issu lui aussi de l’illuminisme, membre également de Misraïm, et R+C, y jouera un rôle essentiel : Avec Briot, ils furent l’âme des insurrections en France, en Italie, en Belgique et jusqu’en Pologne. Etant de plus, à la tête de la Haute Vente. Cette Haute-Vente (équivalant à un Suprême Conseil d’un Ordre maçonnique) dirigeait les Ventes particulières composées de vingt membres. Ce mouvement était cloisonné, ceux des ventes inférieures ne connaissaient pas ceux des ventes supérieures et les ventes étaient inconnues les unes aux autres. (Organisation issue du Martinisme, et qui inspirera les Francs-Tireurs Partisans sous l’occupation) Chaque membre versait une cotisation mensuelle d’un franc germinal et devait se pourvoir d’un fusil et de cinquante cartouches. Chaque vente devait se tenir prête à obéir sans discussions aux ordres de la vente supérieure. Nous sommes loin encore une fois des doux rêveurs que l’histoire retiendra. Très active de 1820 à 1823, la Charbonnerie conduisit à des coups de mains que le pouvoir en place déjouea. En décembre 1821, un premier complot est découvert au sein de l’école de cavalerie de Saumur. Début 1822, des complots similaires sont déjoués à Belfort, Toulon et Nantes. Le 25 février 1822, des éléments de la garde nationale sous les ordres du général Berton s’emparent de la ville de Thouars et marchent vers Saumur le lendemain, mais échouent à mobiliser la population. C’est à cette période qu’éclate l’affaire des sergents de La Rochelle qui aura le plus fort impact sur l’opinion.

25 à laquelle j’ai participé activement étant l’un des membres déclencheurs de la crise, (cf le doc Alkaest).

26 « La violette de Parme » fut le signe de ralliement des bonapartistes durant les Cent-Jours. Couleur que l’on retrouve sur les tabliers, les sautoirs et les cordons du rite.

27 Pierre Leroux fut l’un de ces premiers grands théoriciens du socialisme. Il fréquenta en exil après le coup d’état de Napoléon III la loge des philadelphes à Londres du Rite de Memphis. Sa philosophie s’appuie sur une vison idéale d’une société « qui ne sacrifiera aucun des termes de la devise : liberté, égalité, fraternité ». Il critique symétriquement l’individualisme absolu et le socialisme absolu (1834, Anthologie, p. 44). Cet équilibre est au fondement de sa pensée. Il souhaite un socialisme républicain, c’est-à-dire qui fasse toute sa place à la liberté tout en pronant l’idéal d’égalité dans son sens le plus exigeant, le sens social. Comparant l’humanité à un homme qui marche, il disqualifie tout plan social arrangé d’avance comme le saint-simonisme en a donné la première image. C’est à Pierre Leroux que nous devons le sauvetage de la devise utilisée en 1794 par Robespierre et son adoption par la République en 1848, mais sa proposition de mettre “la fraternité au centre”, pour signifier la tension irréductible entre les deux valeurs incontournables que sont la liberté et l’égalité (Anthologie, p. 265), n’a pas été retenue. L’enjeu est de taille : fonder un socialisme républicain, ou une république sociale. De telles idées ont inspiré les mesures initiées en autre par Louis Blanc en 1848. Cette vision d’un socialisme utopique avant l’heure s’appuie sur une anthropologie qui comme en franc maçonnerie, repousse le dualisme, qu’il soit spiritualiste ou matérialiste, au profit d’une ontologie triadique : l’homme est triple, sensation, sentiment, connaissance. Dieu, qu’il appelle aussi Vie universelle, n’est donc pas à concevoir comme un être transcendant. Leroux critique sévèrement l’Église catholique pour son dualisme métaphysique autant que pour ses péchés historiques, son alliance avec les privilégiés que ce soit l’aristocratie de jadis ou la bourgeoisie actuelle. Cela ne l’empêche pas d’admirer l’Évangile. Le spectacle de la lutte de tous contre tous qui prévaut sous l’orléanisme, le conduit à affirmer qu’aucune société ne peut vivre sans religion, et à prôner une religion républicaine ouverte à la morale de l’Évangile. Il réclame l’ouverture des cultures judéo-chrétienne et gréco-romaine aux ressources de l’Orient, Inde et Chine en particulier. Ce syncrétisme est à retenir pour mieux comprendre ce qui va se jouer dans les périodes qui vont suivre dans l’histoire du rite de Memphis Misraïm.

28 Avec la permission à l’époque du Grand Hiérophante Grand Maître Général du rite John Yarker de donner l’initiation et la patente à Papus 95° nommé Grand Hiérophante pour la France. Ce qui contrairement à certaines affirmations est tout fait régulier puisque c’est par délégation et sous l’autorité du Grand Hiérophante Général que cela fut fait. Quoiqu’il en soit, nous verrons dans un prochain chapitre le problème qu’engendra ce/ces titre(s) de Grand(s) Hiérophante(s) car de nombreuses confusions furent involontairement ou non entretenues. Mais c’est par là que le rite subira la pire crise de son histoire dans les années 2000 et dans laquelle je me suis retrouvé alors à en être l’un des principaux acteurs.

29 La spécificité du Rite ancien et primitif de Memphis-Misraïm réside principalement dans ses grades maçonniques spécifiques, bien qu’elle s’affirme également, dans une moindre mesure, dès son premier degré. Ses degrés d’instruction et d’enseignement se situent sur une échelle de 95 grades divisés en plusieurs séries distinctes

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici