De notre confrère Ouest France
Les archives départementales de la Mayenne ont reçu un complément au fonds Auguste François Félix Morillon. Parmi les effets, des documents à la chronologie étrange.
Le service-conseil et collecte des archives départementales de la Mayenne a reçu un complément au Fonds Auguste François Félix Morillon. Un document a retenu l’attention : un registre des actes, constitutions et réceptions de la loge maçonnique de la paix de l’orient de Craon, le 1er janvier 5754.
Une conversion chronologique
Malgré la date, le document ne provient pas du futur ! Simplement d’un calendrier différent. L’an du calendrier maçonnique est l’ « Année de la Vraie Lumière », et marque le début de l’ère du même nom, qui est estimée à -4 000 avant JC. Après avoir rajouté les ans manqués, ce registre daterait du milieu du XVIIIe siècle.
Parlons quelques instants de Robert de Craon qui donna son nom à la ville
Robert IV le Bourguignon dit Robert de Craon, sire de Craon, fils de Renaud le Bourguignon et d’Ennoguen de Vitré est un croisé. Il est le deuxième maître de l’ordre du Temple, de 1136-1137 jusqu’en janvier 1149.
Né sans doute à la fin du xie ou au début du xiie siècle, et d’origine angevine, il est le fils de Renaud de Craon, et le cadet de trois frères. Il s’installe en Aquitaine et est fiancé à la fille d’un seigneur de l’Angoumois. Peut-être à la suite d’une déception amoureuse, il quitte l’Occident en 1125 et part pour la Terre sainte. Il y devient rapidement Templier.
Robert n’est pas présent au concile de Troyes, réuni pour légiférer sur l’ordre du Temple. Toutefois, il est de retour en Occident en 1132. À ce moment, il est sénéchal du Temple, ce qui permet d’attester que, déjà à l’époque, une hiérarchie était en place. On remarque que sénéchal est un titre qui sera ensuite réservé au Temple en Orient : on pourrait en déduire qu’alors l’ordre n’était pas assez implanté en Occident pour distinguer les hiérarchies. Or donc, Robert est en Occident en 1132, probablement pour faire connaître l’ordre. Il y retourne en 1136.
Il s’impose à la fois par sa valeur militaire, mais aussi par sa piété. Aussi est-il désigné maître, sans doute en juin 1136, à la mort du fondateur de l’ordre, Hugues de Payns. Il se révèle un brillant organisateur et fait de l’ordre du Temple un acteur majeur des États latins d’Orient. Son rôle législatif interne est considérable et, le 29 mars 1139, le pape Innocent II, par sa bulle « Omne datum optimum », accorde à l’ordre un certain nombre de privilèges. Ainsi, les Templiers sont exemptés de la dîme, de la juridiction épiscopale (ce qui signifie que l’ordre a ses propres ecclésiastiques, qui ne relèvent pas des évêques), et ils sont habilités (1147) à arborer leur signe exclusif, la fameuse croix de gueules (rouge) pattée sur champ d’argent (blanc).
Robert de Craon est moins heureux sur le plan militaire. À peine élu, il bat l’émir d’Alep, mais laisse ses chevaliers se livrer aux pillages. L’émir se retourne alors contre eux et les taille en pièces. Robert de Craon autorise les Templiers d’Espagne à lancer une expédition importante (près de 70 vaisseaux) contre Lisbonne, mais c’est aussi un échec. En 1140, les Templiers résistent avec héroïsme à une armée de Turcs bien plus nombreuse à la bataille de Teqoa.
Le chroniqueur Guillaume de Tyr le cite comme participant en 1148 à la deuxième croisade, notamment au cours du siège de Damas. Il semble que Robert de Craon soit mort le 13 janvier 1149. L’obituaire de la commanderie de Reims signale en effet sa mort le jour des ides de janvier, soit le 13, et son successeur, Évrard des Barres, est déjà en place en avril 1149.