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A comme Aéropage en Franc-maçonnerie

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Le terme « Aéropage » (ou « Aréopage ») en franc-maçonnerie désigne à la fois un ensemble de degrés supérieurs au sein du Rite Écossais Ancien et Accepté (REAA) et, dans certains contextes, l’atelier ou le conseil maçonnique chargé de les administrer. Issu de l’antique conseil judiciaire athénien situé sur la colline d’Arès (Areopagus en grec), ce mot évoque symboliquement un lieu de jugement suprême, de sagesse et de décision morale, adapté au cadre initiatique maçonnique.

En Franc-maçonnerie, les degrés de l’Aréopage représentent la dernière étape du parcours des ateliers supérieurs du Rite Écossais Ancien et Accepté avant les Ultimes Vaillances, marquant la dernière phase vers la réintégration de l’unité ontologique de l’initié.

Cette notion, profondément ancrée dans les traditions ésotériques et philosophiques du REAA, illustre l’évolution de l’initié vers une maîtrise spirituelle et éthique suprême. Nous explorerons ici son étymologie, son historique, sa structure rituelle, son symbolisme, ses enseignements, ses variations selon les obédiences, et son rôle contemporain, pour en dresser un portrait exhaustif adapté à un glossaire maçonnique.

Étymologie et Origines Historiques

temple du parthénon acropole d'Athènes
temple du Parthénon

Le mot « Aéropage » tire son origine du grec ancien « Areopagos » (Ἀρεοπάγος), désignant la colline d’Arès à Athènes, où siégeait un conseil antique composé de juges et d’anciens, chargé de juger les crimes graves comme les homicides et de veiller à la moralité publique. Ce conseil, mentionné dans les mythes (notamment le jugement d’Oreste par Eschyle dans Les Euménides) et les textes historiques (comme chez Aristote), symbolisait l’autorité judiciaire suprême, indépendante et sacrée, souvent associée à la déesse Athéna pour sa sagesse.

Dans la Franc-maçonnerie, ce terme a été emprunté au XVIIIe siècle pour conférer une aura d’antiquité et de légitimité aux degrés supérieurs, en lien avec les thèmes de justice, de vengeance divine et de quête spirituelle. L’intégration de l’Aéropage dans la maçonnerie spéculative remonte à la formation du REAA en 1801 à Charleston (États-Unis), sous l’impulsion de figures comme John Mitchell et Frederick Dalcho, qui ont compilé et structuré 33 degrés à partir de rites antérieurs comme le Rite de Perfection (25 degrés) de Stephen Morin.

Le REAA, influencé par des sources kabbalistiques, hermétiques et chevaleresques, a adopté « Aéropage » pour désigner les degrés 19 à 30, formant un bloc thématique cohérent axé sur la chevalerie spirituelle et la justice. Ce choix lexical reflète l’éclectisme maçonnique, mêlant références grecques classiques à des éléments bibliques et templiers, pour élever l’initié au-delà des degrés symboliques (1°-3°) et philosophiques (4°-18°).

Place de l’Aéropage dans la Structure du Rite Écossais Ancien et Accepté

Dans l’architecture du REAA, l’un des rites maçonniques les plus pratiqués au monde (notamment au sein du Suprême Conseil pour la France ou du Southern Jurisdiction aux États-Unis), l’Aéropage occupe une position centrale parmi les « hauts grades » ou « degrés philosophiques et chevaleresques« .

Le REAA est divisé en plusieurs ateliers :

  • Loges de Perfection (4°-14°) : Focus sur la moralité et la reconstruction du Temple intérieur.
  • Chapitres de Rose-Croix (15°-18°) : Thèmes christiques et alchimiques, culminant dans la quête de la Parole Perdue.
  • Aréopages (19°-30°) : Étape chevaleresque, où l’initié devient un « chevalier » défendant la justice et la vérité.
  • Consistoires (31°-32°) : Degrés administratifs et de commandement.
  • Suprême Conseil (33°) : Grade suprême, honorifique.

L’Aéropage, en tant que tel, regroupe les degrés 19 à 30, souvent conférés collectivement dans un « Conseil de Kadosh » (du 30° degré, « Chevalier Kadosh« ). Ces degrés sont administrés par un atelier spécifique appelé « Aréopage« , qui fonctionne comme une loge supérieure, avec ses officiers (comme le Très Puissant Commandeur) et ses rituels propres.

Par exemple, en Suisse, l' »Aréopage Les Amis de la Lumière » à Lausanne, fondé en 1875, est un atelier dédié aux hauts grades du REAA, illustrant comment ce terme désigne aussi une entité organisationnelle vivante.

Cette structure n’est pas uniforme : dans certaines juridictions anglo-saxonnes, les degrés 19-30 sont gérés par un « Consistory« , tandis qu’en France et en Europe continentale, « Aréopage » est plus couramment utilisé, reflétant des influences latines et grecques plus marquées.

Description des Degrés de l’Aréopage (19°-30°)

Les degrés de l’Aréopage forment un arc narratif chevaleresque, où l’initié passe de la vengeance à la justice transcendante, en passant par des épreuves morales et spirituelles. Voici un aperçu détaillé, basé sur des sources rituelles publiques (sans révéler d’éléments secrets) :

  • 19° : Grand Pontife ou Sublime Écossais : Introduction à la Nouvelle Jérusalem céleste, symbolisant la reconstruction spirituelle post-apocalyptique (inspiré de l’Apocalypse de Jean).
  • 20° : Grand Maître de toutes les Loges Symboliques : Enseignement sur l’administration maçonnique et la sagesse organisatrice.
  • 21° : Noachite ou Chevalier Prussien : Thème de la justice impartiale, avec référence aux descendants de Noé et à la tour de Babel.
  • 22° : Chevalier de la Hache Royale ou Prince du Liban : Allégorie du travail manuel et de la fraternité ouvrière, liée à la construction du Temple.
  • 23° : Chef du Tabernacle : Rôles sacerdotaux, explorant les mystères du sacerdoce lévitique.
  • 24° : Prince du Tabernacle : Approfondissement des symboles mosaïques et kabbalistiques.
  • 25° : Chevalier du Serpent d’Airain : Guérison spirituelle, référence à l’épisode biblique du serpent d’airain (Nombres 21).
  • 26° : Prince de Mercy ou Écossais Trinitaire : Thèmes de miséricorde et de trinité ésotérique.
  • 27° : Chevalier Commandeur du Temple : Engagement chevaleresque, avec vœux de pauvreté, chasteté et obéissance, évoquant les Templiers.
  • 28° : Chevalier du Soleil : Degré philosophique, centré sur la lumière solaire comme symbole de vérité éternelle.
  • 29° : Grand Écossais de Saint-André : Protection de la foi maçonnique contre les hérésies.
  • 30° : Chevalier Kadosh ou Chevalier de l’Aigle Blanc et Noir : Point culminant, où l’initié affronte la tyrannie et la superstition, symbolisant la victoire de la raison et de la justice.

Ces degrés sont souvent conférés en série lors de « réunions » ou « convocations » spéciales, avec des décors incluant des épées, des crânes, des bannières et des symboles alchimiques.

Symbolisme et Enseignements

Symboliquement, l’Aréopage représente la « chevalerie de l’esprit« , où l’initié, tel un chevalier errant, combat les vices intérieurs (ignorance, fanatisme, ambition) pour atteindre l’illumination. Il incarne la transition de la « maçonnerie rouge » (philosophique) à la « maçonnerie blanche » (administrative), avec un accent sur la justice vengeresse qui évolue vers une miséricorde éclairée. Le 30° degré, en particulier, symbolise la crucifixion symbolique de l’ego, menant à la résurrection ontologique – la réintégration de l’unité primordiale de l’être, inspirée de la Kabbale et du néoplatonisme.

Les enseignements portent sur l’humanisme, la tolérance religieuse et la responsabilité sociale : l’initié est appelé à défendre les opprimés, à juger avec équité et à poursuivre une quête gnostique de la vérité absolue. Des auteurs comme Joseph Castelli, dans ses rituels publiés, soulignent l’aspect thérapeutique de ces degrés, aidant l’initié à transcender les dualités (bien/mal, lumière/ténèbres) pour une unité ontologique. Les rituels de l’Aréopage, décrits dans des ouvrages comme ceux de Castelli (éditions de 2005), impliquent des épreuves dramatiques : interrogatoires, serments sur l’épée, méditations sur des symboles macabres (crânes pour la vanité), et des processions. Le candidat est souvent confronté à des « tyrans » symboliques (représentant l’Église ou l’État oppressifs), qu’il doit « vaincre » par la raison. Ces cérémonies, tenues en « chambre noire » ou avec des éclairages théâtraux, visent à une catharsis psychologique.

Bien que confidentiels, des versions expurgées sont disponibles dans des publications maçonniques.

Variations et Usage Contemporain

Dans les obédiences françaises comme le Grand Orient de France (GODF) ou la Grande Loge de France (GLDF), l’Aréopage est actif, avec des adaptations modernes pour inclure des thèmes sociétaux (égalité, écologie). Aux États-Unis, le Scottish Rite Southern Jurisdiction met l’accent sur le patriotisme. Des critiques, comme dans l’essai de Bernard Filoche (2025), notent une évolution vers une symbolique plus introspective, loin des accents anti-cléricaux du XIXe siècle.

Aujourd’hui, l’Aréopage reste un pilier du REAA, pratiqué dans plus de 50 pays, symbolisant l’engagement maçonnique pour une élite spirituelle.En conclusion, l’Aéropage encapsule l’essence chevaleresque et philosophique du REAA, guidant l’initié vers une réintégration ontologique.

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A comme Adoption

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Adoption en Franc-maçonnerieLe terme « Adoption » en Franc-maçonnerie revêt une double acception historique et symbolique, profondément ancrée dans les traditions maçonniques, particulièrement en France où il a émergé au XVIIIe siècle. D’une part, il désigne le processus symbolique d’intégration d’un enfant de maçon au sein d’une loge, une cérémonie qui engage la communauté maçonnique à veiller sur l’enfant et à l’accompagner dans sa vie. D’autre part, il renvoie aux « Loges d’Adoption », des structures mixtes ou féminines rattachées à des loges masculines, qui ont marqué les débuts de la participation des femmes à la Franc-maçonnerie.

Ces deux sens, bien que distincts, soulignent l’importance de l’inclusion et de la transmission au sein de l’ordre maçonnique. Nous explorerons ici ces deux dimensions de manière exhaustive, en nous appuyant sur l’histoire, les rituels, les évolutions et les contextes socioculturels, pour en dresser un portrait complet.

1. L’Adoption Symbolique des Enfants de Maçons : Les « Louveteaux » et le Protectorat Maçonnique

Alan Cockman (Trésorier de la Loge) avec Joshua et Izzie à la présidence, avec le chef de section Andy Dunsworth

Dans son premier sens, l’« Adoption » maçonnique concerne l’intégration symbolique d’un enfant né d’un parent franc-maçon (généralement le père, mais cela peut inclure la mère dans les obédiences mixtes ou féminines) au sein de la loge. Cette pratique, souvent qualifiée à tort de « baptême maçonnique », n’est pas un rite religieux mais une cérémonie laïque et symbolique qui vise à étendre les liens fraternels de la loge à la progéniture des membres. L’enfant adopté est désigné sous le nom de « louveteau » (ou « lowton » en anglais), un terme évoquant l’idée d’un jeune loup élevé par la meute, symbolisant la protection collective et l’éducation morale au sein de la « famille maçonnique ».

Origines et Contexte Historique

Cette forme d’adoption remonte aux traditions maçonniques du XVIIIe et XIXe siècles, influencées par les idéaux des Lumières qui mettaient l’accent sur l’éducation, la solidarité et la transmission des valeurs humanistes. En Espagne, par exemple, sous l’influence krausiste et positiviste à la fin du XIXe siècle, les francs-maçons espagnols voyaient dans l’adoption non seulement un engagement symbolique, mais aussi une obligation éducative. L’influence philosophique interdisait toute notion de baptême religieux, transformant l’adoption en un acte de responsabilité collective envers l’enfant.

Dans une famille maçonnique, considérée comme une extension de la société idéale, l’éducation des enfants adoptés devenait primordiale, avec la loge s’engageant à orienter leur formation morale et intellectuelle.

En France, cette pratique est attestée dès le XVIIIe siècle, mais elle s’est développée plus formellement au XIXe siècle au sein d’obédiences comme le Grand Orient de France (GODF) ou la Grande Loge Féminine de France (GLFF). Un exemple récent illustre sa pérennité : en décembre 2016, à la GLFF, une loge du sud de la France a adopté un enfant nommé César, âgé de 8 ans, lors d’une tenue blanche ouverte, en présence de sa famille et de maçons. Cette cérémonie, initiée par la mère maçonnique de l’enfant, visait à introduire le jeune garçon aux valeurs de la Franc-maçonnerie sans l’initier formellement, car l’initiation est réservée aux adultes.Le Rituel et les SymbolesLa cérémonie d’adoption se déroule généralement lors d’une tenue spéciale, souvent une « tenue blanche ouverte » accessible aux profanes (non-maçons). Elle n’est pas obligatoire et dépend des traditions de chaque obédience ou loge.

Les éléments rituels incluent :

  • L’engagement de la Loge : La loge s’engage collectivement à protéger l’enfant, à le guider dans la « bonne fortune » et à lui venir en aide en cas de malheur. Cela inclut une assistance morale, éducative et, si nécessaire, financière, particulièrement en cas de perte d’un parent maçonnique.
  • Les Parrains et Marraines : Deux parrains (ou une marraine) sont choisis parmi les membres de la loge. Ils ne dispensent pas une « initiation » mais agissent comme intermédiaires entre l’enfant et la communauté. Leur rôle est de veiller à l’évolution de l’enfant, de l’informer sur les idéaux maçonniques (tolérance, fraternité, quête de vérité) et de le soutenir. La loge entière devient une « famille élargie », avec les autres maçons considérés comme des « oncles » et « tantes ».
  • Symboles Utilisés : L’eau (pour l’ablution symbolique, évoquant la pureté), le glaive (symbole de justice), des guirlandes (représentant l’innocence et la joie), et parfois une batterie d’applaudissements ou des coups de maillet pour marquer les étapes. Le rituel peut inclure des allocutions sur l’humanité, l’intelligence et l’éducation, inspirées de thèmes bibliques comme le Déluge ou l’Arche de Noé, adaptés de manière laïque.
  • Âge de l’Enfant : Traditionnellement, l’adoption concerne les enfants de moins de 7 ans pour les plus jeunes (« baptême » symbolique), mais elle peut s’étendre à des enfants plus âgés. L’enfant doit avoir au moins un parent maçonnique.

Signification et Évolution

Cette adoption renforce le concept de « famille maçonnique » universelle, où les liens fraternels transcendent la biologie. Elle assure la continuité des valeurs maçonniques au sein des générations futures et offre un filet de sécurité social, particulièrement important au XIXe siècle lorsque les assurances sociales étaient inexistantes. Au XXe siècle, avec la sécularisation croissante, cette pratique a parfois été critiquée comme un « fatras pseudo-rituel » par certains maçons, préférant une aide discrète et efficace sans cérémonial.

Cependant, elle persiste dans des obédiences comme la GLFF ou le GODF, où elle est vue comme un moyen d’ouvrir la maçonnerie aux familles sans compromettre son caractère initiatique réservé aux adultes.

Dans les pays anglo-saxons, des pratiques similaires existent au sein d’organisations paramaçonniques comme l’Ordre de l’Étoile Orientale (Order of the Eastern Star), qui intègrent femmes et enfants de maçons, mais sans le terme « adoption » formel. En Hongrie et en Autriche au XVIIIe siècle, des adoptions d’enfants sont également documentées, soulignant l’universalité de cette tradition.

Les Loges d’Adoption : Les Débuts de la Franc-Maçonnerie Féminine ou Mixte

Le second sens, plus historique, désigne les « Loges d’Adoption » (ou Maçonnerie d’Adoption), des entités maçonniques créées au XVIIIe siècle pour intégrer les femmes, généralement épouses, sœurs ou filles de maçons, dans une forme adaptée de la franc-maçonnerie. Ces loges, sous tutelle masculine, représentaient une réponse aux exclusions des constitutions d’Anderson (1723), qui limitaient la maçonnerie aux hommes libres de bonnes mœurs. Elles marquèrent les premiers pas vers une maçonnerie mixte ou féminine, influençant l’évolution de l’ordre en Europe.

Origines et Développement au XVIIIe Siècle

Les Loges d’Adoption émergent en France vers les années 1740, dans un contexte où les femmes, inspirées par les idéaux des Lumières, aspiraient à participer à des cercles intellectuels et sociaux. La première loge attestée date de 1746 à Bordeaux, sous le nom de « Loges de Franches-Maçonnes ditte sœurs de l’Adoption ».

En 1751, une Grande Loge d’Adoption est créée à La Haye aux Pays-Bas par le baron de Wassernaer. En France, la Duchesse de Bourbon préside la première loge parisienne en 1775, initiée comme Grande Maîtresse.

Initialement, les maçons masculins étaient réticents, voyant ces loges comme des « ateliers de récréation » secondaires. Cependant, leur popularité croissante – elles devinrent nombreuses et influentes – força le Grand Orient de France à les réguler par un édit du 10 juin 1774, assumant leur contrôle et protection. Cela évita une opposition qui aurait pu menacer l’institution maçonnique. Les loges étaient rattachées à des loges masculines, avec des rituels adaptés, non basés sur la construction du Temple de Salomon (comme chez les hommes), mais sur des thèmes bibliques comme l’Arche de Noé, le Déluge ou la Tour de Babel, tirés du Livre de la Genèse.

En Angleterre, des loges d’adoption mixtes ou féminines apparaissent dès le milieu du XVIIIe siècle, subvertissant l’exclusivité masculine. Des documents du Burney Collection et de la Bibliothèque des Francs-Maçons de Londres attestent de cérémonies incluant femmes et hommes, avec des rituels comparables mais adaptés aux constructions de genre de l’époque.

Le Rite d’Adoption, propre à ces loges, comportait initialement quatre degrés (Apprentie, Compagnonne, Maîtresse, Maîtresse Parfaite), évoluant parfois jusqu’à dix. Les rituels, cachetés dès 1761, incluaient des thèmes comme la Reine de Saba (au degré supérieur). Contrairement à la maçonnerie masculine, ils mettaient l’accent sur la médiation féminine des valeurs (vertu, charité, discrétion). Les femmes étaient initiées lors de cérémonies mixtes, présidées par un Vénérable Maître masculin, mais avec une Grande Maîtresse féminine.

Des figures comme la Princesse de Lamballe (Grande Maîtresse en 1781) ou Benjamin Franklin (honoré en 1778) illustrent l’influence de ces loges. Elles se répandirent en Europe continentale, mais furent déclarées inconstitutionnelles par le GODF au début du XIXe siècle, entrant en éclipse pendant près d’un siècle.

Renaissance au XXe Siècle et Héritage

En 1901, au sein de la Grande Loge de France, les Loges d’Adoption reprirent vigueur, évoluant vers des loges féminines autonomes. Cela mena à la création de l’Union Féminine Maçonnique de France en 1945, devenue la Grande Loge Féminine de France en 1952, première obédience féminine mondiale. Aux États-Unis, des rites similaires comme l’Ordre de l’Étoile Orientale émergèrent au XIXe siècle, distinguant clairement le rituel mixte de la maçonnerie masculine.

Cette évolution marque un « éclosion d’une conscience collective maçonnique féministe », transformant l’adoption en un pont vers l’égalité. Aujourd’hui, elle symbolise l’ouverture de la maçonnerie aux femmes, influençant des obédiences mixtes comme Le Droit Humain.

En conclusion, l’« Adoption » en franc-maçonnerie illustre l’engagement de l’ordre pour l’inclusion familiale et l’égalité des genres. Que ce soit par la protection des enfants ou l’intégration des femmes, elle incarne les valeurs de fraternité et de solidarité, évoluant avec les sociétés tout en préservant son essence symbolique.

Pour un glossaire, ce terme mérite d’être croisé avec « Louveteau », « Rite d’Adoption » et « Maçonnerie des Dames ».

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A comme Activité (Maçon en)

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Définition principale

Un maçon est dit « en activité » lorsqu’il remplit régulièrement ses obligations matérielles (paiement intégral et à jour de ses cotisations, ou « capitation ») et morales (présence assidue aux tenues, participation active aux travaux, respect des engagements pris envers la Loge et envers les Frères). L’expression complète est généralement « Frère en activité » ou « maçon en activité ».

pierre brute,outils apprenti,ciseau,maillet

C’est l’état normal, naturel et attendu de tout Franc-maçon après sa réception. Être en activité est la condition sine qua none pour exercer pleinement ses droits maçonniques : voter en Loge, accéder aux grades supérieurs, porter le bijou de son grade, participer aux élections, être éligible aux offices, visiter d’autres Loges, etc.Opposition avec l’état de « sommeil »

L’expression « maçon en sommeil » (ou « Frère dormant ») désigne l’état d’un maçon qui, pour des raisons personnelles (éloignement géographique, problèmes de santé, contraintes professionnelles ou familiales, difficultés financières temporaires, lassitude passagère, etc.), choisit ou se voit contraint de suspendre temporairement sa participation active sans pour autant démissionner.

Le maçon en sommeil :

  • reste affilié à sa Loge,
  • conserve son grade et son ancienneté,
  • figure toujours sur les tableaux de la Loge,
  • peut être réveillé à tout moment sur simple demande (et règlement des cotisations échues selon les Règlements particuliers),
  • mais perd, pendant cette période, la quasi-totalité de ses droits (il ne vote pas, ne peut être élu, ne peut assister aux tenues sauf exception très rare et motivée, ne porte pas le cordon ou le bijou de grade en Loge, etc.).

Le sommeil est donc une sorte de « congé » maçonnique, une parenthèse, jamais une rupture définitive. Il est conçu comme une mesure de bienveillance permettant à un Frère de traverser une période difficile sans perdre son appartenance.

Origine et évolution du concept

L’opposition activité/sommeil apparaît clairement en France dès la seconde moitié du XVIIIe siècle, mais se systématise vraiment au XIXe siècle avec la multiplication des Loges et l’augmentation du nombre des membres. Avant cela, l’absence prolongée entraînait souvent la radiation pure et simple.

À partir des années 1830-1840, les grandes obédiences (Grand Orient de France, Suprême Conseil pour la France, Grande Loge de France, etc.) introduisent dans leurs Constitutions et Règlements généraux la possibilité du « sommeil » pour éviter que des Frères, temporairement empêchés, ne soient exclus définitivement et que la Loge ne perde ainsi des éléments précieux.

Aujourd’hui, toutes les obédiences françaises (GODF, GLDF, DH, GLNF, GLMU, GLTSO, LNF, etc.) et la très grande majorité des obédiences étrangères reconnaissent ces deux états, avec parfois des nuances :

  • Certaines obédiences très strictes (notamment certaines Loges de tradition anglo-saxonne ou certaines Juridictions du REAA très rigoristes) limitent fortement la durée du sommeil ou exigent un vote de la Loge pour l’accorder.
  • D’autres, plus souples (certaines Loges du GODF ou de la GLDF), acceptent des périodes de sommeil très longues, parfois plusieurs décennies.

Dimension symbolique et spirituelle

Au-delà de l’aspect administratif, l’activité est chargée d’une forte signification initiatique.

Le Franc-maçon est censé être un « travailleur » permanent sur la Pierre brute. Le sommeil prolongé est vu comme une stagnation, un retour partiel à l’état profane, une mise en veille de la Lumière reçue. Être en activité, c’est maintenir vivant le feu sacré, entretenir la chaîne d’union, participer à l’œuvre collective du Grand Architecte (ou, dans les Loges libérales, à l’œuvre collective d’amélioration de l’humanité).

De nombreux Vénérables Maître, dans leur « morceau d’architecture » d’installation, insistent sur ce point :

« Le sommeil est une mort apparente ; l’activité est la vie véritable de la Loge. »

Dans le Rite Écossais Rectifié particulièrement (qui est très exigeant sur ce point), l’activité est presque élevée au rang de vertu chevaleresque : le Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte doit être « en permanence au service », et le sommeil prolongé est considéré comme incompatible avec l’esprit de l’Ordre. Certaines Commanderies du RER refusent même purement et simplement l’état de sommeil et exigent la démission ou la radiation au-delà d’une ou deux années d’absence.

Conséquences pratiques actuelles (2025)

Dans la plupart des Loges françaises aujourd’hui :

  • La cotisation annuelle moyenne varie entre 250 € et 600 € selon l’obédience et la Loge (les Loges parisiennes prestigieuses étant souvent les plus chères).
  • Un Frère qui a trois ou quatre ans de retard de cotisation voit généralement son état basculer automatiquement en « sommeil » (parfois après vote ou simple décision du Vénérable)… ou en radiation.
  • Le réveil exige le règlement des cotisations de l’année en cours + parfois une ou deux années échues (pratique variable).
  • Certaines Loges, pour encourager le retour, accordent des remises exceptionnelles ou des étalements de paiement.

Citation souvent reprise en Loge

« La Franc-maçonnerie n’est pas un club de retraités où l’on vient quand on a le temps ; c’est un engagement de chaque instant. Celui qui dort volontairement s’éloigne de la Lumière et risque, un jour, de ne plus la reconnaître. » (Attribuée à Oswald Wirth, mais probablement apocryphe ; on la retrouve cependant dans de nombreux discours d’installation depuis les années 1920.)

En résumé, être « maçon en activité » n’est pas seulement un statut administratif : c’est l’expression concrète de l’engagement initiatique, la preuve que la Lumière reçue lors de l’initiation continue d’éclairer et de réchauffer le cœur du Frère au service de ses semblables et de l’idéal maçonnique. Le sommeil, toléré avec bienveillance, reste une exception ; l’activité est la règle et la vocation profonde de tout Franc-maçon véritable.

A comme Accolade (Fraternelle) : le baiser sacré de la Fraternité maçonnique

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1. Définition et origine du geste

L’accolade fraternelle, souvent appelée simplement « l’accolade » ou « les trois baisers », est un geste rituel fondamental en Franc-maçonnerie consistant en trois baisers échangés entre maçons lors de moments solennels.

Ces baisers sont traditionnellement :

  • le premier sur la joue gauche,
  • le second sur la joue droite,
  • le troisième sur la bouche ou (plus fréquemment aujourd’hui) sur le front selon la cérémonie. Lors d’une simple rencontre, les 3 baisers s’effectuent sur les joues.

Ce geste est administré par le Vénérable Maître, le Premier Surveillant ou le Deuxième Surveillant au nouveau récipiendaire (Apprenti, Compagnon ou Maître) immédiatement après la prestation de serment, ou lors d’une augmentation de salaire, d’une élévation ou d’une réception dans une loge.

L’accolade scelle symboliquement l’entrée du nouveau Frère (ou de la nouvelle Sœur) dans la chaîne d’union et marque son acceptation pleine et entière dans la communauté maçonnique.

2. Origines historiques et symboliques anciennes

La bise en maçonnerie

Le baiser fraternel n’est pas une invention maçonnique : il plonge ses racines dans les traditions les plus anciennes :

  • Tradition biblique : le « baiser de paix » (osculum pacis) est mentionné plusieurs fois dans le Nouveau Testament (Romains 16:16, 1 Corinthiens 16:20, 1 Pierre 5:14) : « Saluez-vous les uns les autres par un saint baiser. »
  • Liturgie chrétienne primitive : jusqu’au XIIIe siècle, les fidèles s’embrassaient sur la bouche après la consécration, en signe de paix et de communion spirituelle.
  • Ordres chevaleresques : les Templiers, les Hospitaliers et les chevaliers teutoniques s’embrassaient sur la bouche lors de l’adoubement ou de la réception d’un nouveau frère.
  • Corporations médiévales : les compagnons du Tour de France se donnaient aussi un baiser fraternel lors de l’adoption d’un nouveau compagnon.

La Franc-maçonnerie spéculative du XVIIIe siècle reprend ce geste millénaire en le laïcisant et en le chargeant d’une symbolique initiatique : le baiser devient le sceau de l’alliance spirituelle entre les Frères.

3. Signification maçonnique profonde

L’accolade fraternelle porte plusieurs niveaux de lecture :

A. La Trinité maçonnique
Les trois baisers correspondent aux trois principes fondamentaux :

  • 1er baiser (joue gauche) → Liberté (côté du cœur, émotion, intériorité)
  • 2e baiser (joue droite) → Égalité (côté de la raison, action extérieure)
  • 3e baiser (front ou bouche) → Fraternité (union des cœurs et des esprits)

B. Le sceau de l’initiation
L’accolade est le premier contact physique après la prestation de serment. Elle marque le passage de l’isolement (cabinet de réflexion, bandeau) à la communion fraternelle. Le nouveau Frère n’est plus seul : il est désormais lié par le baiser.

C. Le baiser de paix
Il signifie que dans la Loge, toute rancœur profane est abolie. Le Frère reçoit le baiser comme Judas reçut celui du Christ… mais ici, c’est pour être sauvé, non trahi.

D. Dimension érotique sublimée
Certains auteurs (Oswald Wirth, Marius Lepage) voient dans le troisième baiser sur la bouche une allusion à l’union des polarités masculine et féminine, à l’androgynie spirituelle, ou au baiser alchimique du Roi et de la Reine.

4. Description rituelle précise (selon les rites)

RiteNombre de baisersLieu du 3e baiserQui donne l’accoladeMoment précis
Rite Français3Bouche ou frontVénérable Maître, puis SurveillantsAprès le serment et la lumière
REAA3 ou 5 (selon loges)Bouche ou frontVénérable, puis tous les Frères en chaîneÀ la fin de la cérémonie
Rite Écossais Rectifié3Bouche (traditionnel)Vénérable et SurveillantsTrès solennel, avec formule « Paix soit avec vous »
Rite d’York / Émulation5 (cinq points de fellowship)Pas de baiser, accolade avec cinq points de contactMaître Installé ou SurveillantsLors de l’élévation au grade de Maître
Loges féminines (GLFF)3Joues + frontVénérable MaîtresseAccent sur la sororité
Loges mixtes (DH, GLMF)3Front (souvent)Vénérable, sans distinction de genreAdapté à la mixité

Dans certaines loges très traditionnelles, le troisième baiser est parfois donné sur la bouche (surtout dans les rites anciens ou en Belgique/Suisse). Dans la majorité des loges françaises contemporaines, il est déplacé sur le front ou remplacé par une simple accolade pour des raisons d’hygiène et de pudeur.

5. Évolution et adaptations modernes

  • Depuis les années 1980-1990 : le baiser sur la bouche a progressivement disparu dans la plupart des obédiences françaises, remplacé par le front ou une simple embrassade.
  • Covid-19 : de nombreuses loges ont suspendu temporairement l’accolade physique, la remplaçant par un salut à distance ou une main sur le cœur ou encore… le poing tendu et frappé.
  • Loges mixtes et féminines : l’accolade reste trois baisers, mais souvent sur les joues et le front, avec une grande douceur sororale.
  • Loges jeunes ou modernes : parfois réduite à une accolade virile ou un check fraternel, mais les puristes regrettent cette perte de symbolisme.

6. Citations rituelles et références

  • Rite Français : « Recevez l’accolade fraternelle qui vous unit désormais à tous les Francs-Maçons répandus sur la surface de la Terre. »
  • Oswald Wirth : « Le baiser maçonnique est le sceau de l’alliance éternelle entre les âmes qui se sont reconnues. »
  • Albert Pike (Morals and Dogma) : « The fraternal kiss is the symbol of the union of souls in the pursuit of truth. » (Le baiser fraternel est le symbole de l’union des âmes dans la quête de la vérité.)
  • Dans les loges féminines : « Par ce baiser, je te reconnais comme ma Sœur à jamais. »

7. Pourquoi l’accolade reste irremplaçable

Dans une époque où le contact physique est devenu rare, l’accolade fraternelle reste l’un des moments les plus émouvants d’une initiation. Beaucoup de Maîtres disent que c’est le seul moment où ils ont pleuré en Loge.

Elle rappelle que la Franc-maçonnerie n’est pas seulement une école de pensée : c’est une famille choisie, où l’on s’embrasse comme des frères et sœurs qui se retrouvent après une longue séparation.

« Par l’accolade, je te donne ce que je n’ai jamais donné à personne : ma confiance absolue et mon amour fraternel. »

C’est peut-être le geste le plus simple et le plus profond de toute la Franc-maçonnerie.

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A comme Acclamations en Franc-maçonnerie : la voix joyeuse et solennelle de la Loge

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1. Définition et fonction rituelle

Les acclamations sont des interjections collectives, prononcées à voix haute et en chœur par l’ensemble des Frères et Sœurs présents, immédiatement après la batterie (série de coups de maillet) qui marque l’ouverture ou la fermeture des travaux.

Elles constituent la réponse sonore et enthousiaste de la Loge au Vénérable Maître et sont l’un des moments les plus vibrants d’une tenue.

Leur triple rôle :

  • Marquer solennellement l’entrée ou la sortie du temps sacré.
  • Renforcer l’unité et la communion fraternelle.
  • Exprimer la joie d’être ensemble et l’approbation des travaux accomplis.

2. Les principales acclamations selon les rites

Rite / ObédienceAcclamation d’ouvertureAcclamation de fermetureParticularités
Rite Écossais Ancien et Accepté (REAA)« Houzzé ! Houzzé ! Houzzé ! » (3 fois)« Houzzé ! Houzzé ! Houzzé ! » (3 fois)Prononcé avec vigueur, accent sur la première syllabe « Houz– ». Origine incertaine (hébreu ? cri de guerre écossais ?).
Rite Français (GODF, tradition)« Vivat ! Vivat ! Semper Vivat ! » (3 fois)« Vivat ! Vivat ! Semper Vivat ! » (3 fois)« Qu’il vive ! Qu’il vive ! Qu’il vive à jamais ! » – souhait de pérennité à la Loge et à la Franc-maçonnerie.
Rite Français moderne (GODF depuis 1877)« Liberté ! Égalité ! Fraternité ! » (3 fois)« Liberté ! Égalité ! Fraternité ! » (3 fois)Remplace le Vivat après la suppression du Grand Architecte de l’Univers et l’affirmation laïque.
Rite Écossais Rectifié (RER)« À la Gloire du Grand Architecte de l’Univers ! » (parfois suivi d’un triple « Vivat »)IdemAccent sur la dimension spirituelle et chevaleresque.
Rite d’York / Émulation« So mote it be ! » (réponse aux annonces)« So mote it be ! »Pas d’acclamation hurlée, mais réponse solennelle.
Rite de Memphis-Misraïm« Isis ! Isis ! Isis ! » ou « À la Gloire du Suprême Architecte… »IdemAccent égyptien ou théosophique.

3. Structure rituelle complète (exemple REAA)

  1. Le Vénérable Maître frappe la batterie d’ouverture (ex. : 1 + 3 + 3 + 3 coups).
  2. Il dit : « Frères 1er et 2e Surveillants, annoncez dans vos colonnes que la Loge est ouverte… »
  3. Les Surveillants répètent.
  4. Le Vénérable Maître : « Ensemble, mes Frères ! »
  5. Toute la Loge crie : « Houzzé ! Houzzé ! Houzzé ! »
  6. Le Vénérable Maître : « La Loge est ouverte au nom du Grand Architecte de l’Univers. »

Le même schéma se répète à la fermeture, avec parfois une nuance de ton plus chaleureux.

4. Origine et symbolisme du nombre trois

L’acclamation est presque toujours répétée trois fois :

  • Symbole de la Trinité maçonnique : Sagesse – Force – Beauté.
  • Écho des trois coups de maillet, des trois grades, des trois lumières, des trois piliers.
  • Résonance avec les trois « Vive ! » de la Révolution française.

5. Signification profonde

2 femmes mûres et complices à table pour le thé
  • Joie fraternelle : c’est le seul moment où la Loge peut crier ensemble. Le silence rituel est rompu par une explosion de vie.
  • Unanimité : l’acclamation collective manifeste que tous sont d’accord et en harmonie.
  • Énergie vitale : le cri est un acte de souffle partagé, une sorte d’expiration commune qui scelle l’entrée ou la sortie du sacré.
  • Mémoire historique : le « Houzzé » ou le « Vivat » rappelle les anciens cris de ralliement des bâtisseurs ou des chevaliers.

6. Évolution contemporaine

  • Dans certaines loges très laïques (GODF post-1877), on entend parfois des variantes ironiques ou affectueuses : « Santé ! Santé ! Santé ! » ou « À la bonne vôtre ! » juste avant l’agape.
  • Dans les loges féminines ou mixtes, l’acclamation prend une coloration particulièrement chaleureuse et égalitaire.
  • Certaines loges écologistes ou pacifistes expérimentent des acclamations comme « Paix ! Paix ! Paix ! » ou « Terre ! Terre ! Terre ! ».

7. Citations rituelles célèbres

  • « Que l’acclamation retentisse comme un tonnerre d’amour fraternel ! » (discours d’installation traditionnel).
  • « Par le Vivat, nous affirmons que la Loge est vivante et que la Franc-maçonnerie ne mourra jamais. »
  • « Le Houzzé est le cri du cœur des Maîtres qui ont vaincu la mort symbolique. »

En résumé, les acclamations ne sont pas un simple formalisme : elles sont le battement de cœur sonore de la Loge, l’expression la plus directe et la plus joyeuse de l’unité fraternelle.
Quand la Loge crie « Houzzé ! » ou « Liberté ! Égalité ! Fraternité ! », elle ne fait pas que respecter un rite : elle célèbre qu’elle est vivante, unie et libre.Et c’est peut-être le moment où même le plus discret des Frères sent monter en lui une émotion indescriptible : celle d’appartenir à quelque chose de plus grand que soi.

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A comme Accepté : l’acte fondateur de la Franc-maçonnerie spéculative

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Accepté : l’acte fondateur de la franc-maçonnerie spéculative

1. Étymologie et sens premier

Le mot « Accepté » (en anglais Accepted Mason) désigne, dans la langue maçonnique ancienne, une personne reçue dans une loge de maçons opératifs sans exercer le métier de tailleur de pierre ou de bâtisseur.

Le verbe to accept (du latin acceptare : recevoir favorablement) souligne ici l’idée d’une réception exceptionnelle, d’une admission par grâce ou par cooptation, en dehors des règles corporatives habituelles qui exigeaient un apprentissage de sept ans et la maîtrise du métier.

2. Contexte historique : XVIIe siècle, Écosse et Angleterre

C’est en Écosse, dès la fin du XVIe siècle, que l’on trouve les premières traces écrites de cette pratique.

  • Statuts Schaw (1598-1599) : William Schaw, Maître des Travaux du roi Jacques VI d’Écosse, réglemente les loges opératives, mais laisse déjà la porte entrouverte à des « gentlemen » ou « théoriciens ».
  • Loge de Kilwinning (1599), Mary’s Chapel à Édimbourg (1599) : les plus anciennes minutes conservées mentionnent des « gentlemen masons » ou « accepted masons » admis aux côtés des maçons de métier.
  • Loge d’Aberdeen (1670) : on y compte jusqu’à 40 % de membres non opératifs.

En Angleterre, le phénomène s’amplifie après 1600 :

  • Sir Robert Moray est initié en 1641 dans une loge écossaise sur le sol anglais.
  • Elias Ashmole, antiquaire et alchimiste, est « accepted » le 16 octobre 1646 à Warrington : c’est la première initiation documentée d’un pur spéculatif en Angleterre.

À cette époque, les loges opératives, confrontées à la raréfaction des grands chantiers gothiques, acceptent des intellectuels, nobles, pasteurs ou savants pour des raisons financières (cotisations), sociales (protection) et philosophiques (échange d’idées).

3. La grande transition : de l’Accepté à la Franc-maçonnerie spéculative

Le mot « Accepté » devient le marqueur même du passage de l’opératif au spéculatif :

  • 1717 : création de la Première Grande Loge de Londres et Westminster. Sur les quatre loges fondatrices, trois sont déjà majoritairement composées de « Accepted Masons ».
  • 1723 : les Constitutions d’Anderson consacrent officiellement cette évolution : « Les maçons sont désormais tenus de se conformer à la loi morale, sans distinction de religion ou de nation » → la porte est grande ouverte aux non-opératifs.
  • 1725 : le terme « Free and Accepted Masons » (F∴ & A∴ M∴) apparaît dans les minutes anglaises, puis devient l’appellation officielle (Freemasons).

Le mot « Free » (libre) vient du fait que le maçon opératif devait être « libre » (non serf) et travailler la « free stone » (pierre franche). Le mot « Accepted » vient s’y ajouter pour désigner ceux qui sont reçus sans appartenir au métier.

4. Les « Accepted Masons » célèbres du XVIIe et XVIIIe siècles

  • Elias Ashmole (1646)
  • Sir Robert Moray (1641)
  • Sir Christopher Wren (peut-être initié vers 1660-1680, bien que contesté)
  • John Locke (présumé)
  • Le comte de Desaguliers (Grand Maître 1719, principal rédacteur des Constitutions modernes)
  • Montesquieu (initié à Londres en 1730)
  • Voltaire (initié en 1778 à la loge des Neuf Sœurs, à 83 ans, en tant que « Accepted » célèbre)

5. Sens symbolique et philosophique du mot « Accepté »

Dans la tradition maçonnique, être « Accepté » signifie bien plus qu’une simple admission :

  • C’est l’acte d’ouverture universelle : la maçonnerie dépasse le corporatisme pour devenir une société de pensée.
  • C’est le refus du privilège de naissance ou de métier : seule la valeur morale et intellectuelle compte.
  • C’est la reconnaissance que le véritable « métier » n’est plus de tailler la pierre physique, mais de tailler l’âme humaine.

Le mot porte en lui toute la révolution des Lumières : transformer une guilde médiévale en une école de liberté, d’égalité et de fraternité.

6. Traces actuelles du mot « Accepté »

  • L’appellation officielle de la plupart des obédiences dans le monde anglo-saxon reste « Ancient Free and Accepted Masons » (A∴ F∴ & A∴ M∴).
  • En France, le GODF utilise parfois « Francs-Maçons Acceptés » dans ses textes historiques.
  • Le Rite Écossais Rectifié conserve une forte mémoire de cette période de transition et parle encore des « gentilshommes acceptés » dans certaines de ses légendes.

7. Citation emblématique

« La Franc-maçonnerie est née le jour où le premier homme qui ne savait pas tailler la pierre a été accepté parmi ceux qui la taillaient. »
(phrase attribuée à Oswald Wirth, souvent reprise dans les loges)

En résumé, le mot « Accepté » n’est pas un simple détail historique : il est l’acte de naissance de la maçonnerie spéculative moderne. Sans l’Accepté, il n’y aurait pas eu de Lumières maçonniques, pas de Constitutions d’Anderson, pas de loges ouvertes aux philosophes, aux artistes, aux révolutionnaires. Il incarne la plus belle audace de notre tradition : transformer un métier en chemin de liberté intérieure et universelle.

« J’étais étranger, et vous m’avez accepté. »
C’est en cela que le mot « Accepté » reste, aujourd’hui encore, le cœur battant de la Franc-maçonnerie.

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A comme Acacia en Franc-maçonnerie

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Acacia : le plus célèbre et le plus profond des symboles végétaux de la Franc-maçonnerie

1. Origine biblique et légende d’Hiram

L’acacia entre dans la symbolique maçonnique par la porte de la Légende d’Hiram, qui constitue le cœur du grade de Maître au Rite Écossais Ancien et Accepté, au Rite Français, au Rite Émulation, etc.

Lorsque les trois mauvais compagnons frappent Hiram Abiff et le mettent à mort, ils enterrent son corps sur une colline à l’ouest du Temple, puis plantent une branche d’acacia sur sa tombe pour marquer l’endroit.

Plus tard, les neuf Maîtres envoyés à la recherche du corps d’Hiram reconnaissent la sépulture grâce à cette branche d’acacia qui a reverdi, preuve que la vie triomphe de la mort.

Ils déterrent le corps, le saisissent par la prise du Maître (la « prise des cinq points parfaits de la maîtrise ») et l’exclament : « Mac Benac » (en hébreu : « la chair quitte les os » ou, selon d’autres interprétations : « Il est vivant dans le fils du veuf »).
Le mot de substitution « Mahabyn » ou « Mahabone » est alors donné en attendant de retrouver le Mot véritable perdu avec la mort d’Hiram.

L’acacia devient donc immédiatement :

  • le signe de reconnaissance de la tombe du Maître,
  • la preuve de la résurrection de la vie après la mort,
  • le lien entre la mort physique et la renaissance spirituelle.

2. Pourquoi l’acacia et pas un autre arbre ?

Dans la Bible (et notamment dans l’Exode), l’acacia (en hébreu שִׁטָּה / shittâh) est l’arbre dont Dieu ordonne à Moïse de se servir pour construire les éléments les plus sacrés du Tabernacle :

  • l’Arche d’Alliance (Ex 25,10),
  • la Table des pains de proposition,
  • les autels,
  • les barres de transport,
  • les colonnes du sanctuaire.

C’est un bois imputrescible, très dur, résistant aux insectes et au temps, qui pousse dans les déserts les plus arides (Sinaï, Néguev, Arabie). Il symbolise donc :

  • l’incorruptibilité,
  • la pérennité,
  • la capacité à rester vivant même dans les conditions les plus hostiles.

Les Pères de l’Église (Origène, saint Jérôme, saint Augustin) y voyaient déjà un préfigure du bois de la Croix et de la résurrection du Christ. La Franc-maçonnerie spéculative du XVIIIe siècle reprend cette double tradition biblique et chrétienne, mais la laïcise et l’universalise.

3. Significations maçonniques principales de l’acacia

A. L’Incorruptibilité du Maître
L’acacia marque que le vrai Maître reste pur même dans la mort. Le corps physique peut être frappé, mais la partie immortelle (l’âme, la conscience, la lumière intérieure) ne se corrompt pas.

B. L’Immortalité de l’âme
C’est le symbole le plus répandu : « L’acacia me fait connaître que l’âme est immortelle. »
On le retrouve dans presque tous les rituels du 3e degré et dans les discours funèbres maçonniques : on pose une branche d’acacia sur le cercueil ou dans la fosse du Frère défunt.

C. La Résurrection – Renaissance initiatique
Le Maître maçonnique « meurt » symboliquement (passage par le cabinet de réflexion, mort d’Hiram) pour renaître à une nouvelle vie. L’acacia qui reverdit sur la tombe est le signe que la vie spirituelle jaillit toujours du tombeau.

D. La Pureté et l’Innocence retrouvée
Dans plusieurs rites, on dit que l’acacia est « toujours vert », donc toujours pur. Il évoque l’état d’innocence du cœur nécessaire pour accéder aux mystères supérieurs.

E. La Timidité et la Discrétion
L’acacia est un arbre modeste, épineux, qui ne cherche pas à s’imposer. Il rappelle au Maître la nécessité de l’humilité et de la discrétion (« Je suis acacia, je me connais » est une formule que l’on entend parfois dans certaines loges).

4. L’acacia dans les rituels et les décors

  • Au 3e degré : une branchette d’acacia est souvent posée sur le tapis de loge ou sur le cercueil symbolique.
  • Dans les loges de perfection (4e au 14e degré du REAA) : on le retrouve sur les tableaux de loge.
  • Dans les cérémonies funèbres : la branche ou la couronne d’acacia est l’équivalent maçonnique du cyprès antique ou du lys chrétien.
  • Bijoux et sautoirs : de nombreux bijoux de Maître portent une petite branche ou une feuille d’acacia en argent ou en or.
  • Devise célèbre : « L’acacia me fait connaître l’innocence de mon cœur » (Rituel du Maître au Rite Français).

5. Variations selon les rites et les obédiences

  • Rite Écossais Ancien et Accepté : accent très fort sur l’immortalité de l’âme.
  • Rite Français (GODF) : insiste davantage sur l’incorruptibilité morale et la pureté.
  • Rite Émulation / rites anglo-saxons : l’acacia est parfois remplacé ou complété par le « sprig of cassia » (branche de cassier), mais le symbolisme reste identique.
  • Rites égyptiens (Misraïm, Memphis-Misraïm) : l’acacia est parfois rapproché de l’isis végétante ou du sycomore sacré de l’Égypte antique.

6. L’acacia dans la poésie et la littérature maçonnique

Oswald Wirth : « L’acacia est le buisson ardent qui ne se consume pas. »
Albert Pike (Morals and Dogma) : « The acacia, the symbol of resurrection and immortality, teaches us that the soul survives the body. »
Dans les chansons de table : « Que l’acacia nous rappelle / Que l’âme est immortelle… »

7. En 2025 : un symbole toujours vivant

Aujourd’hui encore, dans toutes les obédiences (GODF, GLDF, DH, GLMF, etc.), lorsqu’un Frère ou une Sœur décède, on dépose une branchette d’acacia sur sa tombe.
Dans certaines loges écologistes ou « vertes », on plante réellement un acacia dans les jardins maçonniques en mémoire des défunts.En résumé, l’acacia est bien plus qu’un simple végétal dans la Franc-maçonnerie : il est le témoin silencieux de la mort initiatique, le garant de l’immortalité de l’âme, le rappel de l’incorruptibilité du Maître et le signe que, même au plus profond de l’hiver spirituel, la vie reverdit toujours.

« Je suis acacia : je me connais et je connais mon immortalité. »

C’est sans doute le symbole le plus universellement reconnu et le plus émouvant du 3e degré maçonnique.

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