Dans ce numéro 63 de notre émission 1,2,3 Soleil ! Du 29 mars 2024 sur RadioDelta, nous plongeons dans un sujet captivant : les liens entre la démarche initiatique et la démarche psychanalytique.
Nous recevons, pendant 2 heures, Michel Baron, Docteur en philosophie et psychanalyste et Jean-Claude Elalouf, psychanalyste, membre de l’APE.
Une émission préparée et animée par Philippe Benhamou et produite par Gilles Saulière, avec également, tout au long de l’émission, les chroniques de Josselin Morand, Sophie A, Alexandre T, Philor, la p’tite histoire de Mitch, bien sûr à mi-émission et les indispensables questions auditeur présentées par Gilles Alatechnik.
Il y a quelque temps, j’ai été interpellé par un article du Grand René portant sur la “Réelle Maçonnerie”. Pour tout vous dire, j’ai cherché ces derniers jours un nouveau sujet dans cette lignée qui puisse retenir votre attention et m’inspirer, une fois n’est pas coutume.
Face à un choix traditionnel et riche de sujets maçonniques, j’ai cédé à nouveau à la curiosité. Je suis allé sur la toile pour explorer ce qui s’y traitait, afin d’éviter les sujets trop récurrents ou trop ancrés dans l’actualité. Cette démarche est assez classique, mais elle comporte un inconvénient : on se retrouve rapidement dans un état d’indécision. On procrastine jusqu’à conclure que tout a déjà été traité. Vous me direz que William Shakespeare a écrit maintes fois sur l’amour avec Roméo et Juliette. Pourtant, il a réussi à en faire l’un des plus grands chefs-d’œuvre de la littérature.
J’ai donc navigué sur les réseaux. En tant qu’adepte actif de YouTube, je sais qu’il est rare d’y trouver des sujets relevant de la haute littérature. Je m’expose ainsi à la critique, mais c’est un constat.
Cependant, sur ces réseaux, de grands esprits abordent des thèmes de réflexion de haut niveau, enrichissants et propices à notre évolution. Enfin, c’est mon avis.
Revenons à mon sujet initial. J’ai découvert une multitude d’articles et un choix abondant : du style “à boire et à manger”, propre à cette boîte de Pandore.
Ce qui a particulièrement retenu mon attention, c’est un plan fixe sur un tablier maçonnique qui occupe la totalité de l’écran, accompagné d’une voix off évoquant la franc-maçonnerie. Malheureusement, mes oreilles fatiguées ou le son mal enregistré ne m’ont pas permis de retenir ces propos.
Pour ne pas rester sur ma faim, je me suis plongé dans la lecture de René Guénon, une référence sûre, qui m’a remis les idées en place en explorant la théorie polaire et en examinant ce qui se passe du côté de l’arbre séfirotique.
Quant aux vidéos sur YouTube, à qui devons-nous envoyer nos “followers” ? Au Grand Architecte de l’Univers ou à une page amie sur Facebook ?…
Nous avons l’honneur de rencontrer Pierre Lacagne, actuel Grand Maître de la Grande Loge des Cultures et de la Spiritualité (GLCS). À travers cet échange, nous découvrirons son parcours, sa vision pour la GLCS et les défis qui l’attendent.
450fm : Pouvez-vous vous présenter ?
PL : Je m’appelle Pierre Lacagne, j’ai 64 ans. Je suis marié, père de 4 enfants, et j’habite à Marseille. Ma vie profane a été riche en entrepreneuriat, et je continue d’ailleurs à m’investir dans ce domaine. J’ai œuvré dans divers secteurs à la direction de start-up principalement, mais ma carrière s’est principalement déroulée dans la direction financière. Aujourd’hui, je partage mon temps entre l’accompagnement à l’export et mon cabinet de médiation.
450fm : Vous êtes l’actuel Grand Maître de la GLCS ?
PL : En effet, j’ai été élu pour 3 ans renouvelables chaque année, lors du dernier convent d’octobre 2023 de la GLCS, l’obédience qui m’a vu naître en 2010 à Aix-en-Provence. J’ai également créé la loge Marseille Astrolabe.
450fm : Vous avez succédé aux 2 Grands Maîtres précédents, Marcel Laurent et Christine Sauvagnac, qui ont respectivement œuvré pendant 13 ans et 7 ans. Comment cela se passe pour vous après 6 mois de Grande Maîtrise dans cette « PME familiale » ?
Pierre Lacagne – Grand Maître de la GLCS
PL : Pour moi, la PME familiale est une métaphore appropriée, car elle reflète mon histoire personnelle. Contrairement aux grands groupes, où je ne me sentais pas à l’aise, j’ai toujours trouvé ma place dans les PME et du coup au sein de la GLCS. Ce qui me plaît dans cette maison, ce sont ses valeurs.
La GLCS incarne parfaitement ce que j’attendais de la Franc-maçonnerie. Je rends hommage aux fondateurs de cette obédience, qui ont su lui insuffler une essence porteuse, enracinée dans notre histoire. L’esprit de famille qui règne ici ne me gêne pas, car il s’agit avant tout de fraternité. Cette dimension familiale, est notre force. Avec nos sœurs et frères maçons, nous sommes toujours dans cet esprit de famille un lien précieux, car il nous permet d’échanger facilement. Notre hiérarchie maçonnique s’inscrit dans ce cadre, facilitant la communication. Ce fonctionnement me convient et j’y suis profondément attaché
Ce lien familial est précieux, car il nous permet d’échanger facilement et de contacter nos Frères et Sœurs . Notre hiérarchie maçonnique s’inscrit dans ce cadre, facilitant la communication. Ce fonctionnement me convient et je m’y attache profondément.
450fm : L’animation n’est-elle pas trop difficile après 20 ans d’une équipe dirigeante fondatrice ?
PL : Tout dépend de la perspective. Si l’on cherche à tout bouleverser, cela peut devenir compliqué. Pour ma part, je m’inscris dans une démarche de transmission, qui est une valeur forte pour nous. J’ai toujours privilégié le travail en groupe, en intelligence collective, que ce soit dans ma vie profane ou ma vie maçonnique.
J’écoute et je partage. La présence de nos fondateurs est précieuse, car leur expérience nous guide dans le développement de la GLCS.
450fm : Quelle est l’orientation pour 2024 et après ?
PL : L’orientation de la Grande Loge des Cultures et de la Spiritualité (GLCS) pour l’année 2024 est claire : rester fidèle à son ADN et à ses valeurs. Nous souhaitons maintenir notre engagement envers la mixité et la laïcité, des valeurs de tradition qui ont toujours été au cœur de notre démarche initiatique.
La pandémie de Covid-19 a été un épisode difficile pour nous tous, mais nous avons maintenant retrouvé notre chemin initiatique. Nous avançons avec nos valeurs, en compagnie des Sœurs et des Frères qui partagent notre vision. En résumé, notre orientation consiste à poursuivre dans la voie initiatique qui a contribué à notre succès jusqu’à présent.
450fm : Qu’en est-il des Traités d’amitié avec les Obédiences ?
PL : La reconstruction du temple est au cœur de nos préoccupations. Nous avons des traités d’amitié signés depuis de nombreuses années, et d’autres sont en discussion. Toutes ces démarches s’inscrivent dans la durée, et je suis optimiste quant à l’avenir. Notre fonctionnement est en parfaite cohérence avec les grandes maisons maçonniques. Il n’y a donc aucune raison de s’inquiéter.
450fm : Que pensez-vous des mutations de la Franc-maçonnerie ?
PL : La maçonnerie est en constante évolution. Nous avons un rôle à jouer dans cette période de changements. Mon action vise à rassembler autour d’une maçonnerie des cultures et de la spiritualité. Nous devons préparer les fondations pour demain et contribuer à donner à l’extérieur une image plus unie au paysage maçonnique national.
450fm : Quels sont les changements depuis votre arrivée ?
PL : Je n’ai pas prévu de révolution. Je maintiens la GLCS dans la continuité, en suivant les traces de mes prédécesseurs. La feuille de route que j’ai proposée a été validée par tous, et nous sommes convaincus que nous devons persévérer dans cette voie.
450fm : Des changements à venir sont-ils prévus ?
PL : D’abord, nous prévoyons une croissance avec de nouveaux membres et de nombreuses initiations au sein de nouvelles Loges. Ensuite, nous nous préparons à une succession dans deux ans pour la grande maîtrise, car le temps passe vite et il est déjà temps de penser à préparer la relève.
Le 11 avril 2024 à 19h30 à Angers (Salle Daviers – 5 boulevard Daviers) Georges Voileau, ancien Grand Maître National de la Fédération Française du Droit Humain prendra la parole lors d’une conférence publique sur le thème : « Osez la Franc-Maçonnerie du Droit Humain, une démarche initiatique, un engagement dans la société. »
Depuis des millénaires, l’arbre est une figure symbolique très forte dans de nombreuses cultures sur la planète. Sa longévité – tel l’acacia – évoque à la fois le cycle permanent des saisons (feuilles vertes l’été, feuilles mortes l’hiver) et par là, une forme d’éternité. Il est aussi l’arbre de vie, en devenant l’arbre séphirotique, représentation du processus de la création et l’arbre de la mort, que figure pour certains, la croix du Christ. Avec ses racines serpentant sous terre et, au dessus, ses branches offertes au ciel, l’arbre unit ce qui est en haut et ce qui est en bas.
En soi, l’homme lui-même est un arbre. De tous temps, il lui a été comparé. N’en présente-t-il pas les « donnés à voir » métaphoriques? Hors-sol : verticalité, tronc, branches, feuillages. En sous-sol : racines, sève circulante dans le tissu capillaire, comme le sang dans les veines . N’est-il pas dit que l’arbre est doté d’une forme d’intelligence, d’une vie intérieure, qui lui permettrait de communiquer avec ses homologues ?! A l’image de l’homme donc, où se forment et s’activent dans son « temple intérieur » ses pensées, réflexions, émotions et sentiments !
Selon la légende, le patriarche biblique Mathusalem, qui vécut 969 ans, ne consommait que du miel d’acacia. On perçoit immédiatement ici combien est importante pour son descendant, la question de sa longévité et par conséquent, sa crainte de la mort et son désir d’en repousser la venue, par tous les moyens à sa disposition, matériels et même symboliques.
Il n’est donc pas étonnant que, taraudé par le mystère de ce temps impalpable qui s’écoule, l’Homme ait très tôt intégré dans son imaginaire, l’idée que l’abeille, cet insecte venu du fond des âges – bien avant l’humanité – produise une substance dotée de pouvoirs vivifiants, prélevée sur un arbre, lui-même réputé comme l’une des premières plantes du règne végétal. Sur ce même principe de valorisation, voire de vénération de l’ancienneté des choses, la franc-maçonnerie spéculative n’a pas manqué de repérer les vertus de l’acacia, – bois estimé imputrescible qui donc traverse le temps – pour le rattacher à la légende d’Hiram.
L’étude du symbolisme de l’acacia impose d’entrée de distinguer, parmi les quelques quatre cents variétés existantes, les deux espèces auxquelles s’est attaché l’imaginaire maçonnique.
Acacia vulgaris (Robinier)
Alors que des soldats anglais et irlandais constituaient à Saint-Germain en Laye, la première loge de l’Art Royal sur notre territoire, dans les années 1660/1670 – donc bien avant la création de la Grande Loge de Londres en 1717- un botaniste français, Vespasien Robin, introduisait au Jardin des Plantes à Paris, un acacia vulgaris, rapporté d’Amérique, qui prit le nom d’acacia americana robini, puis de « robinier » dans la langage populaire. C’est un acacia à fleurs blanches ou jaunes de la famille des papilionnacées, encore appelé « faux acacia ». Cet acacia « occidental » est celui qui est entré dans la symbolique de l’Art Royal français.
Acacia Heterophyla
Illustration d’acacia avec écriture au dessous
Le véritable acacia est une légumineuse mimosée (d’où le nom de sa fleur jaune odorante disposée en grappes, le mimosa) que l’on trouve en Australie et au Moyen Orient. Il est plus ou moins abondant en Egypte, en Arabie, en Syrie, en Palestine et en Israël. En dehors de son bois résistant utilisé en ébénisterie, cet acacia dit encore « xerophyle », produit la gomme arabique et le cachou. Son feuillage, composé de petites lames pointues, nervurées et vernies, est coriace, persistant généralement toute l’année et comme son écorce, repousse les insectes. A noter que ces feuilles s’inclinent la nuit et se redressent au lever du soleil. Le symbole de mort et de renaissance, attaché à l’acacia, commence à l’évidence, avec cette caractéristique particulière. C’est bien entendu à cet acacia du Moyen-Orient que la légende d’Hiram, née au XVIIIème siècle fait allusion, sur le territoire même où elle se situe.
L’étymologie du mot « acacia » renvoie à diverses interprétations. Dérivé du mot grec « akakia », il signifie ainsi une pointe, une extrémité aigue. Quand on sait que la fleur de l’acacia représente un cercle d’où jaillissent des pointes végétales, le rapprochement est possible. La boule jaune du mimosa et lesdites pointes ne sont pas sans rappeler le soleil et ses rayons. Voire une roue et ses rayons. Nous sommes ramenés ici au cercle et centre du cercle, donc au symbole même de la maîtrise maçonnique.
Si l’on considère que le mot grec « akakia » comporte un « a » privatif, nous revenons à la racine « kakos » signifiant « le mal ». De la sorte, l’acacia serait un arbre symboliquement dépourvu de tout ce qui est opposé au bien. Il deviendrait ainsi l’arbre de l’innocence, pouvant s’opposer à l’arbre biblique du fruit défendu, transformé lui en arbre du mal, après que l’homme en eut croqué ce fruit.
Toujours sur ce plan étymologique, il est intéressant de remarquer que les rituels de la maçonnerie allemande ont choisi pour leur part l’acacia farnesiana, en tant que symbole de la maîtrise, s’inscrivant dans la légende d’Hiram. Il s’agit d’une variété d’acacia de type « cannelle », le canier en français, mot venant du grec kassia. Quand on sait que l’Egypte pharaonique utilisait cette plante pour l’embaumement des morts, leur assurant ainsi une conservation voulue éternelle, on retrouve bien l’idée de « vie prolongée dans la mort », et en quelque sorte le symbole de la renaissance, grâce à l’acacia. De son côté, l’Art Royal anglais, père du concept maçonnique, a évoqué dès 1765, le rameau de « kassia » odoriférant pour oindre les morts.
Une forme d’éternité
Branche d’acacia
Avec l’acacia, nous sommes par définition, renvoyés à la symbolique de l’arbre en général, qu’il n’est pas inutile d’aborder succinctement. L’homme est depuis toujours fasciné par l’arbre (du latin arbor, oris, se lever, se dresser, surgir) dans lequel il se reconnaît comme plante lui-même et établit des correspondances avec la nature. Il voit dans cette verticalité, un lien « terre-ciel » – ne serait-ce que par leurs échanges répondant aux lois physiques – et bien entendu, il voit aussi, à la fois la figure du pouvoir féminin originaire, comme l’image phallique par excellence.
La longévité de la plupart des arbres, en fait d’évidence, le symbole de choix d’une forme d’éternité, d’autant que leur vie est rythmée par la circularité des saisons. Le cycle des feuilles qui jaunissent l’automne, chutent l’hiver et sont remplacées par de nouvelles pousses sur des rameaux à nouveau verdoyants au printemps, pour aboutir à une floraison puis au fruit et à sa cueillette nourricière, ce cycle forme un ensemble organisé et répétitif, au bénéfice de l’homme.
Ce « mécanisme » incline à penser à un « éternel retour », l’acacia constituant précisément l’exception par sa permanence foliacée tout au long de l’année. L’arbre est aussi, à travers l’idée de la croix christique – en bois d’acacia selon les textes – mais en dehors même de toute référence religieuse, une représentation de la vie et de la mort, toujours dans le scenario mort/renaissance. Par extension, l’arbre peut être vu comme un centre, comme l’axe du monde aussi – nous l’avons évoqué – puisque pour certaines cultures, hindouistes notamment, cet axe tiendrait l’univers ! Nous voyons ici combien l’arbre peut également rendre fructueuse l’imagination poétique, et mettre en route tous les systèmes d’hypothèses, constitutifs du symbolisme, quel que soit le courant de pensées auquel il se rattache.
Cette incursion dans la grande famille des arbres et la richesse des interprétations que l’on peut tirer de cette catégorie végétale du vivant, permet de mieux appréhender le rôle de l’acacia au centre du drame hiramique. Lorsqu’après leur forfait, les trois assassins de l’architecte de Salomon l’enterrent dans un fossé aux abords du Temple, l’un d’eux pique un rameau d’acacia sur le tertre pour repérer la tombe provisoire.
Trois éléments informatifs apparaissent éventuellement ici : il y a un acacia à proximité, symbole de vie, et la branche cassée, sans racine, est un symbole de mort. La dualité est donc immédiatement présente dans la légende. Selon certains auteurs, la sépulture provisoire renvoie à l’idée d’une résurrection possible, rappelant évidement en cela, l’enterrement du Christ et la disparition de son corps ensuite. Le fait que les trois mauvais compagnons désirent revenir pour enterrer « correctement » leur victime pourrait aussi indiquer – sans aucunement les excuser – une certaine forme d’« humanité » restante de leur part. Pas sûr !
Il est bon de rappeler ici qu’il n’est pas question de résurrection pour les francs-maçons de Rite Ecossais Ancien et Accepté, mais de « re-naissance », le compagnon devenant maître-maçon « renaissant à lui-même », et permettant du même coup à l’architecte Hiram de connaître l’éternité, en revivant à travers chaque initié de par le monde. Ainsi, sa qualité de maître-maçon lui permettra de poursuivre la construction de son temple intérieur. Ainsi, il participera en même temps, à la construction du temple de l’humanité, loin d’être achevée !
L’acacia m’est connu
Nous pourrions nous étonner qu’à la question rituelle « Etes-vous maître ? » posée en loge par le Vénérable Maître lors de la cérémonie d’augmentation de salaire, la réponse du nouveau maître se limite à « L’acacia m’est connu ! ». Comme il peut paraître surprenant que dans la description de la légende d’Hiram, l’intervention de l’acacia se résume à une branche d’arbre plantée en terre, sur une tombe, qui plus est provisoire ! Le fait de savoir, selon certain rituels, que le cercueil d’iHirH Hiram est en bois d’acacia, et que, d’après la Bible, l’Arche d’Alliance, la table et l’autel des parfums dans le Saint des Saints du Temple sont composés de ce bois, sacralisé par le roi Salomon, ne constitue pas non plus une série d’informations majeures !
C’est donc bien, essentiellement, dans la symbolique de cet acacia et les métaphores correspondantes qu’il faut chercher des réponses utiles à la vie quotidienne du franc-maçon. Déclarer « l’acacia m’est connu ! », équivaut pour le maître-maçon, non seulement à ne rien ignorer du meurtre perpétré par les trois mauvais compagnons, symbolisant l’ignorance, le fanatisme et l’ambition démesurée, mais c’est « aller plus loin » dans la réflexion. Que peut-on dire au-delà de l’espoir de la survivance des âmes et de l’indestructibilité de la vie dont l’acacia est le symbole ?
Si l’on y regarde de plus près, cette modeste feuille d’arbre, dans le principe maçonnique même, nous interpelle avec pertinence ! La symbolique « mort/renaissance », attachée à l’acacia, au-delà de la relation hypothétique de l’âme avec les mystères, nous renvoie à une réflexion sur nos origines, notre finitude – et plus généralement, pendant que nous sommes vivants – au sens de la vie et de notre vie. Cette vie qui est la mienne, la vôtre !
Ce n’est pas la science ni la magie qui répondront ici, mais précisément notre interprétation personnelle de la méthode symbolique. C’est-à-dire notre capacité imaginative à produire ce sens. Dans cet esprit, l’acacia, en tant que symbole, devient dès lors un médiateur, « ici et maintenant », et non plus seulement « autrefois et ailleurs ». Il est la face visible de l’invisible, auquel il revient à chacun de nous de donner une coloration et une signification personnelles. Avec résolution et courage !
Par rapport à l’animal qui est programmé, l’homme fait évoluer son espèce, grâce à sa conscience d’être et sa créativité. Par la pensée, le langage, l’outillage, la science, l’art, la civilisation, la sexualité, etc., autant d’éléments en constants mouvements – progrès fulgurants ou reculs navrants ! – qui constituent et justifient sa « raison d’exister », de lutter. Car la vie est un combat, avant tout pour tenter sans relâche de neutraliser cette part d’ombre en nous-mêmes, qui est le mal. Et ainsi de valoriser notre côté solaire, cette grappe de mimosa intérieure en forme de cœur rayonnant, qui est le bien.
C’est une image, certes. Mais cette faculté poétique qui nous caractérise est précieuse. La poésie, c’est le symbole même. Poétiser, c’est créer un monde intermédiaire entre moi, fragile homo sapiens, et l’inconnaissable, « ce qui me dépasse », ce que mon cerveau, dans sa forme actuelle, ne peut conceptualiser que par des abstractions.
Le mythe d’Hiram et tout ce qu’exprime une simple branche d’acacia, en termes de valeurs humaines à dispenser, répondent, pour les francs-maçons, pour les franc-maçonnes, à leur besoin de héros initiateurs, sinon initiatiques !
Cette fonction symbolique consistant à mythifier, en l’occurrence un arbre décrété éternel « pour faire sens », est capitale, et même vitale. Là est notre parcelle de liberté. Et notre survie ! Chacun de nous est un arbre, chacun de nous est un acacia.
2. Le cèdre sacré
Un autre arbre porté en gloire : le cèdre du Liban. Il est vénéré dans tout l’Orient. Pourquoi ? Parce qu’ au fil des millénaires, il a été utilisé en énormes quantités par les Sumériens, Babyloniens, Assyriens, Phéniciens, Egyptiens, Grecs et Romains. Pour construire temples et palais, bateaux et barques, et contribuer ainsi à la richesse de leur pays, avec un bois extrêmement solide et qui travere le temps. Le cèdre a ainsi « blasonné » tout le bassin méditérannéen. L’ancienne Egypte, 2500 ans avec JC l’importait déjà par navires entiers et en faisait commerce.
Nabuchodonosor, roi de Babylone, prit longtemps le contrôle des forêts de cèdres libanais, avec la même destination lucrative. L’époque moderne, aux 19ème et 20ème siècles trouvera avec le cèdre une énorme utilisation industrielle, d’abord dans la fabrique des traverses de chemin de fer. Puis celle des poteaux électriques. Et enfin la menuiserie et l’ébénisterie, lui donneront et continue de lui donner une réputation de qualité et une consécration esthétique.
Il faut dire que sur pied, le cèdre, qui peuple encore quelques montagnes libanaises, est majestueux par sa très haute taille, de 20 à 60 mètres de haut pour quelque 6 à 12 mètres de diamètre ! Il a un port pyramidal au départ qui devient tabulaire après 40 ou 50 ans. Comme tous les conifères, ses feuilles – terninées en forme d’aiguilles vert foncé – durent 3 à 4 ans. Le cèdre appartient à une espèce rustique qui supporte très bien les rudesses climatiques, très froides l’hiver (-10 à -20 degrés) et très chaudes l’été. Il n’est pas étonnant qu’il ait été chanté par Alphonse de Lamartine comme l’un des monuments naturels de l’univers. Et par Antoine de Saint-Exupéry, comme métaphore de la paix, longue à grandir !
La longévité du cèdre, due à une croissance très lente est de 2000 à 3000 ans ! Malheureusement du fait de la déforestation, les cédraies se sont dramatiquement raréfiées au Liban. L’immense forêt qui recouvrait le territoire s’est réduite à quelques massifs aujourd’hui isolés (Barouk et Bcharré). Ils sont cloturés pour subsister. En revanche, la cèdre propère encore en Syrie, en Turquie et au Maroc. Il est toujours très répandu sur les pentes de l’Hymalaya.
Le cèdre a été introduit en Europe vers 1650. Le médecin et botaniste Bernard de Jussieu en a fait venir un en France en 1734. Il aurait près de 2500 ans et a été mis en terre au jardin de Plantes de Paris.
Sur le plan symbolique, le cèdre ne peut être mieux célébré, puisqu’il est l’emblème actuel du Liban. Par ailleurs, ce pays n’échappe pas à la coutume : il n’y a pas de forêt sans légende !
L’épopée de Gilgamesch
L’épopée du roi d’Uruk, le célèbre Gilgamesh qui voulait être le héros éternel de son peuple, et son exploit dans la forêt de cèdres du Liban, y est restée attachée. Avec son fidèle ami Enkidu – son double fabriqué par les dieux bienfaisants – Gilgamesh décide d’aller y tuer le géant Humbaba, gardien redouté de cette forêt. Cette expédition prend la forme d’une quête intiatique, sous la protection du dieu Shamash, roi du soleil.
Après trois jours de marche, à pas de géant, ils atteignent l’immense cédraie sur la montagne libanaise, armés de leurs haches, spécialement aiguisées. Pour s’échauffer les muscles, Gilgamesh abat un cèdre en quelques instants, ce qui déclenche une violente colère d’Humbaba, le gardien de la forêt. Il surgit à l’entrée et leur barre la route. C’est un démon épouvantable de dix mètres de haut. Il a une face de lion, des dents proéminentes de dragon, ses bras et jambes sont des corps de boa et ses mains et pieds des longues serres d’oiseau ! De plus, il émet de longs cris rauques qui résonnent dans la forêt jusqu’à figer les arbres. Paralysé par la peur face au monstre, Enkidu est incapable de lever sa hache. Gilgamesh s’avance vaillamment. Il fait tournoyer la sienne mais ne parvient qu’à érafler légèrement les jambes de Humbaba. Le combat est inégal ! Le géant ricane bruyamment et s’apprête à saisir Gilgamesh dans l’une de ses serres, lorsque le dieu Shamash intervient en lâchant les treize vents violents du Liban qui plaquent Humbaba, impuissant, au sol. Celui-ci, vaincu, promet au roi toutes les forêts du Liban pour avoir la vie sauve ! Malgré ses supplications, Gilgamesh et son ami l’égorgent et lui coupent la tête. Le vent de la terre, Enlil, furieux de cet assassinat, fera mourir Enkidu d’une longue maladie. Rentré à Uruk, Gilgamesh tente de nouvelles aventures mais au fil de son épopée, il comprend qu’il ne peut plus vivre, son double n’étant plus. Il renonce alors à l’immortalité et, en humble humain, part errer dans le désert, où, puni de sa mégalomanie par les mauvais dieux, il mourra de chagrin.
Des diverses morales tirées de l’épopée de Gilgamesh et de son double, ressort le destin de l’Homme, indépendant par nature et dépendant par nécessité. Il nous est impossible de vivre sans l’autre, cet autre Moi. Comme dit plus haut : Tu es parce que je suis, je suis parce que tu es. C’est bien ce que nous indique la disposition de nos loges, à tous les degrés du REAA. Les deux blocs de rangées de sièges, face à face, permettent à chacun, les yeux dans les yeux, d’être le miroir de l’autre. L’homme est un arbre, en l’occurrence, communicant, disais-je, il y a quelques instants !
Les fées forestières
De l’arbre, le bois. En Orient, le bois – après l’air, l’eau, le feu, la terre – est considéré comme le cinquième élément de la nature. Il y est associé au printemps et au yang, entité qui dans la philosophie chinoise représente le principe masculin, le soleil, la clarté, la chaleur, le plein, l’élan vital. Quand le yin, lui, évoque le principe féminin, la lune, l’obscurité, la fraîcheur, la disponibilité, la réceptivité.
Il peut sembler banal de rappeler l’utilisation du bois dans la vie quotidienne de l’homme. Pourtant, n’oublions pas qu’il est partie constituante de son habitat. De la charpente de la maison à ses parquets, portes et fenêtres, jusqu’à ses tables, chaises et lits. Faut-il le rappeler, il est l’âme même du foyer, en offrant encore sa flamme dansante et réchauffante dans la cheminée. Une poésie que n’apportent certes pas le charbon, le gaz et l’électricité ! Ajoutons que le bois est encore l’ami de la maîtresse du lieu, sous la forme du rouleau à pâtisserie et de la cuillère en bois, même si le plastique s’est introduit dans la batterie de cuisine !
L’énumération des emplois du bois peut encore continuer sous la forme des outils que nous connaissons bien en franc-maçonnerie, quand ils se nomment règle, équerre, compas, maillet. Et si l’arche de Noë fut construite en bois de cèdre, nombre de bateaux et de barques, sont encore fabriqués en bois aujourd’hui.
Quant aux instruments de musique, comment ne pas citer parmi eux, le violon. Dont les plus anciens, les célèbres Stradivarius et Guarnerius. Certaines légendes affirment qu’ils ont été créés avec les bois de charpentes des cathédrales. Plus sûrement, on sait que l’épicéa, l’érable sycomore, l’ébène, le palissandre et l’alissier sont les essences les plus utilisées pour la conception des violons. Ainsi le bois accompagne l’homme tout au long de sa vie, depuis l’origine. Si son berceau n’est plus en bois, son cercueil, lui, l’est toujours…
De l’arbre, la forêt. Le massif forestier, son autre nom, a suscité fantasmes multiples et émotions fortes chez nos ancêtres et il continue aujourd’hui de peupler les imaginations. Aussi bien de faits bizarres que de créatures inquiétantes ! Surtout la nuit venue sous la lune, dont la pâleur laiteuse accentue les ombres et engendre la peur! Les branches craquent, les feuilles bruissent, les animaux crient, suite ininterrompue de sons effrayants. Il n’en faut pas plus pour mettre en scène, loups et renards, chauves-souris et chouettes, mais aussi des créatures imaginaires. Et ainsi que surgissent, fées et sorcières, ogres et diables, dragons et démons !
Arbre la Roche-aux-Fées – Crédit photo Yonnel Ghernaouti
En France, pays de forêts, s’il en est, les bonnes et mauvaises fées semblent y avoir établi à jamais leurs demeures ! Les bonnes fées : La fée Viviane en forêt de Brocéliande, la fée Mélusine dans celles du Poitou et de Vendée, la fée Morgane dans les grands bois autour d’Avallon, les enchanteresses dans les futaies des Ardennes, la fée blanche au creux des chataîgneraies corréziennes ou derrière les chênes du Quercy. Les mauvaises fées : les fées noires, rouges et vertes, et celles prenant divers aspects, Dryades, Nymphes, Elfes, Vieilles Mères, Tourmentines, sous les frondaisons. Autant de créatures féminines aux pouvoirs surnaturels. Symboles de douceur et de pureté pour les fées bienfaisantes, figures de méchanceté, de cruauté même, pour les malfaisantes. Voire les meurtrières !
Une autre population imaginée hante les forêts, joyeuse celle-là : Outre Merlin l’enchanteur Celte, aux multiples métamorphoses malicieuses, Poulpiquets et Korrigans en Bretagne, Farfadets en Vendée, Lutins en Franche-Comté et Sotrés en Champagne, que de petits êtres malicieux taquinent encore les esprits contemporains. Et bien sûr, s’insèrent dans les contes qu’ils illustrent de leurs farces ! En plus de pain et d’eau pour se nourrir, l’homme et le petit d’homme modernes sont toujours appétents de contes et de fables pour s’évader. Robin des bois et la fée Carabosse ont encore de beaux jours et de belles nuits devant eux. Pour enchanter nos imaginaires. Pour nous donner le frisson, aussi !
On ne peut songer aux fictions nées dans les forêts françaises sans évidemment évoquer le sympathique bestiaire de Jean de La Fontaine qui peuple ses 243 fables ! D’abord avocat, puis longtemps ensuite Maître des eaux et forêts et Capitaine des chasses dans les années 1650, il eut tout loisir d’observer la faune et la flore de la forêt autour de Château-Thierry, où il est né. Puis sur la colline boisée du village d’Auteuil, jouxtant Paris. Il y venait souvent pour rencontrer ses amis Nicolas Boileau et Jean Racine, entre autres, à l’auberge du Mouton Blanc, qui existe toujours. Lieu de plaisirs de bouche, d’échanges mais aussi d’écritures, sans nul doute, certains des 125 animaux, héros de ses fables, y ont vu le jour ! « Je me sers d’animaux pour instruire les hommes » aimait-il répéter.
Les Bons Cousins charbonniers
Le bois et la pierre sont liés. Faisons un bond en arrière dans le temps et revenons à l’antiquité. Il existe alors, notamment chez les constructeurs romains, une fraternité dont l’histoire parle peu : la franc-maçonnerie du bois.
Or, chez les Culdéens d’abord, puis dans les guildes de « francs-métiers », les confréries, les corporations et les communautés templières, existe une organisation puissante, parallèle à celle de la pierre, regroupant les constructeurs du bois (charpentiers, menuisiers, parqueteurs, ébénistes, voûtiers, marqueteurs, tonneliers, etc). Elle connaît sa pleine gloire au Moyen-Âge, lors, entre autres, de la construction des cathédrales et des abbayes, l’édification des fortifications, des ponts et des tours. Puis ensuite avec la partie du compagnonnage qui s’est spécialisée dans l’édification des châteaux, dont ceux de la Loire. Et enfin, cette maçonnerie du bois crée un compagnonnage itinérant des fendeurs (ou bûcherons) et des charbonniers (fabricants de charbon de bois).
Image des 3 pratiquants de rite forestier
Le symbolisme n’en est pas absent avec des rites forestiers (signes et mots mystérieux de la fenderie) et différentes épreuves à subir par le récipiendaire (aspersion sur le corps d’eau de source, symbole du baptême puis de sel, représentant les vertus théologales). Pour aboutir à sa « réception » avec le titre de « guêpier », avant qu’il soit admis un peu plus tard « franc-charbonnier », homme de mœurs pures en quête de perfection.
Ces « maçons du bois » prennent le nom de « Bons Cousins Charbonniers » et pour patron Saint-Thiébault. A l’image des francs-maçons, ils trouvent un support mythologique dans sa légende (voir pages suivantes). Ils créent même l’Ordre de la Fenderie, vers 1770, une société secrète (mais en fait connue !) avec l’intention de procéder, eux aussi comme les francs-maçons, à leur mutation spéculative. Mais les divisions opposant alors les courants compagnonniques protestants et catholiques (gavots et devoirants) les en empêchent.
Ils tentent ensuite à plusieurs reprises sans succès, de s’intégrer à la maçonnerie spéculative d’Anderson et Désaguliers qui, finalement les refusent. Ils s’implantent néanmoins, après eux, dans la maçonnerie des Hauts-Grades, au degré de Chevalier de Royale Hache ou Prince du Liban.
Les Bons Cousins Charbonniers réussissent à maintenir leurs traditions jusqu’en 1835 en France et sous le nom de « Brothers-fendeurs » en Angleterre, jusqu’en 1879. Ils disparaissent malheureusement ensuite en se politisant durement (charbonnerie française et carbonaria italienne) au début du XXème siècle.
Fendre l’armure
Guerrier en combat, guerre, bataille
La hache, formée d’une lame de fer tranchant, fixée à l’extrémité d’un manche et parallèlement à celui-ci, sert à couper et surtout à fendre. En projetant avec force la lame sur l’objet à trancher. Cet instrument, connu déjà à l’époque néolithique, fut longtemps à la fois arme et outil, pour devenir principalement instrument de travail.
Qui dit bois et forêt, dit évidemment hache. De tous temps outil des bûcherons. Et encore aujourd’hui, aux côtés des diverses scies et autres tronçonneuses. Il arrive que sa lame soit rapprochée de la pierre, soit pour l’aiguiser (la pierre cubique à pointe que nous connaissons en loge bleue, aurait eu cet usage) soit pour la trancher (notamment certaines qualités de marbre). Mais sa matière préférentielle reste évidemment le bois, qu’elle peut trancher verticalement ou horizontalement.
Comme les autres outils symboliques, la hache donne lieu à plusieurs interprétations. En séparant symboliquement l’homme-arbre de ses racines, elle en permet l’élévation spirituelle, nous dit Jean-Claude Mondet dans le second tome de son livre sur les Hauts-Grades (Du Chevalier d’Orient au Chevalier Kadosch – Editions du Rocher). Mais la hache peut aussi nous faire passer de l’intellect au corporel, tragique en l’occurrence : Une représentation sexuelle est liée aux rites de mutilation, avance de son côté Jacques Brengues dans son ouvrage spécifique (La Franc-Maçonnerie du bois – Editions Véga).
hache de fendeur
Et sur la vocation d’outil de la hache plane malgré tout, une peur, voire l’ombre de la mort. L’arme est toujours là, tranchante, qui rappelle la décapitation, synonyme de séparation d’un corps en deux. Dans l’histoire, la liste est longue, notamment, des martyrs chrétiens qui ont connu ce châtiment par la hache (St Paul, St Jean Baptiste, St Paul, St Denis, Ste Cécile, entre autres), avant que n’apparaisse plus tard la guillotine, cette hache sur pied.
Rester avec la hache sur une note rassurante en même temps qu’« esthétique » me guide vers la gestuelle correspondante à l’outil. Force musculaire et adresse sont demandées au fendeur pour couper le bois : l’une et l’autre évoquent l’élan vital qui anime l’Homme. Nous retrouvons ces mêmes énergie et dextérité, nécessaires dans le maniement de l’épée, présente en loge. Une vision pacifique de cette épée nous renvoie à l’escrime (de l’allemand skremen, art de se défendre). En ce sens, hache et épée, par la beauté et l’élégance du geste qu’elles entraînent, sont, ainsi considérées, des symboles de vie !
Enfin, par métaphore, ne pouvons-nous parer la hache de noblesse à partir de l’expression « fendre l’armure » ? L’image évoque bien une ouverture provoquée par la force vive d’un outil, en l’occurrence la hache de la volonté. Passer du symbole à l’acte veut dire ici briser ma carapace, mon apparence, pour révéler l’homme que je suis réellement. C’est bien l’invitation de la franc-maçonnerie : Faire en somme de la hache un ouvre-boîte ! Dit autrement, briser en loge mon scaphandre social, sortir de cette protection artificielle imposée par la cité, qui est en même temps ma prison. Et exposer à « cœur ouvert », sans enjeu, en toute liberté retrouvée, à moi- même et aux autres : ma vraie dimension humaine !
Pour un Art royal écologique
Au moment où :
Petit arbre qui pousse entre les mains
– Les nations sont en train d’acquérir une conscience écologique, devant les dégâts provoqués par l’homme et notamment le réchauffement climatique,
– la planète, qui, comme l’homme est sacrée, subit à la fois une pollution et une déforestation massives, alors même que les arbres – dont l’acacia et le cèdre – constituent son système pulmonaire….
….il serait souhaitable que naisse ou renaisse une « franc-maçonnerie verte », qu’elle soit issue de celle de la pierre ou du bois, des deux réunies ou encore du Compagnonnage, toujours fleuron de l’artisanat français ! Elle pourrait parfaitement être partie constituante de cette nouvelle génération maçonnique qui est en train de prendre place dans les loges.
Vous êtes certainement ému (e) comme moi par les images télévisuelles qui nous sont données à voir au quotidien, qu’il s’agisse de tsunamis, d’inondations, de cyclones, de tornades, de tempêtes, de séismes, d’incendies de forêts. Les misères humaines qu’elles entraînent nous laissent tout à la fois une impression d’impuissance, de fatalité et aussi, il faut bien le dire, un sentiment de culpabilité, même si ces phénomènes « naturels » ne nous sont pas, bien entendu, tous imputables !
Plante qui pousse grâce à des gouttes d’eau
A l’évidence, l’eau, la terre, l’air, le feu, les forces de la nature, constituantes de la vie – et dans lesquelles, précisément, les philosophes et les poètes ont toujours vu la métaphore de nos émotions fondamentales même, de la tristesse à la colère, de la joie à la peur – sont en train de déclencher une révolution inquiétante. Et certainement signifiante avec le « réchauffement climatique ».
Les turbulences nouvelles de ces quatre éléments nous donnent à réfléchir, comme à tout citoyen responsable, acteur du monde. La question n’est plus de savoir si franc-maçonnerie est encore utile aujourd’hui, elle l’a prouvé et le prouve …mais si elle saura encore montrer demain son efficacité, à travers ses membres ?
Si, chacun – avec ses moyens (civisme, générosité, technicité, responsabilité, créativité, etc) le décide – pour participer au sauvetage de notre fragile boule de porcelaine qui tourne avec nous dans l’espace – et par là-même celui de l’humanité – la réponse est OUI !
Le plus beau mot de la langue française !
Saint-Thiebault, une légende verte
Dans la ville thermale d’Iguvium, au XIIIème siècle (aujourd’hui Gubbio), en Italie du sud, demeure un très vieil évêque vertueux, Théobald – sanctifié plus tard sous le nom de Saint Thiebault – qui a consacré sa vie aux pauvres et leur donne tout ce qu’il possède. Au moment de sa mort, sur un grabat, assisté de son dévoué serviteur Arcan, il se rend compte qu’il ne lui a jamais donné aucun salaire, sans d’ailleurs que celui-ci se plaigne. Il lui demande de s’approcher et lui chuchote à l’oreille :
– Je ne possède qu’un seul bien, cet anneau d’or à mon doigt. Après ma mort, retire-le et fais-en profit pour vivre une retraite convenable.
Après son décès, le fidèle serviteur suit les instructions de l’évêque et prend l’anneau d’or. Mais il est saisi d’effroi lorsqu’en tirant sur le bijou, la phalange du mort vient avec, pointée vers l’Alsace ! Il contient sa peur en pensant que c’est un signe particulier de Dieu lui indiquant qu’il doit partir et rentrer chez lui, au plus vite, précisément, dans sa région d’origine. La relique précieusement enveloppée dans la poignée de sa canne, Arcan commence sa longue route dès le lendemain matin, avec son baluchon sur l’épaule.
Il franchit péniblement les Alpes sous le soleil de juin puis, après des jours de marche, il atteint un beau soir la fraîche plaine d’Alsace. Mais, à la sortie de Thann, en lisière de la forêt verdoyante, terrassé par la fatigue, il plante sa canne à l’ombre d’un grand sapin, s’y adosse, glisse, s’assoit et s’endort profondément. Réveillé soudain par les cris d’une chouette en pleine nuit, Arcan se lève d’un bond pour continuer sa route. Mais, il est stupéfait de voir que sa canne a pris racine au pied du sapin et que trois lumières en forme de triangle, scintillent en haut de l’arbre.
Cette lueur vive attire l’attention du comte Engelhard, à la fenêtre de son château tout proche. Il se rend sur place, suivi par les villageois, qui sortent de chez eux, un à un, intrigués eux aussi par cette lumière éblouissante. Terrorisé, Arcan raconte son aventure au comte et à la foule. Engelhard comprend qu’il s’agit d’un miracle et prend la décision sur le champ de faire construire près du sapin, une petite chapelle, à la gloire de Saint Thiebault. Au XIVème siècle, elle fut remplacée par une collégiale gothique qui existe toujours, et abrite un reliquaire. Tous les ans depuis, le 30 juin au soir, a lieu la veillée Saint Thiebault devant l’édifice. En souvenir des trois lumières apparues, trois sapins sont d’abord, abattus, fendus de la racine à la crête puis trois personnes y mettent le feu, le curé, un militaire d’une caserne proche et un habitant du village. Les fidèles rassemblés, sont invités ensuite à ramasser le charbon de bois, censé posséder des pouvoirs miraculeux.
Depuis cette construction religieuse, la forêt a été défrichée et est régulièrement entretenue par les services compétents. Thann est devenu un lieu de pèlerinage.
Dans le contexte de la Franc-Maçonnerie et d’autres traditions initiatiques, l’expression du profane au Sacré décrit le processus d’initiation et de transformation intérieure que l’individu expérimente en progressant à travers différents degrés ou étapes de connaissance et de pratique. C’est un cheminement de l’éveil, où les symboles, les rituels et les enseignements servent à guider l’initié vers une compréhension plus profonde de soi-même et de l’univers, transcendant ainsi les limites de la perception profane pour embrasser les vérités spirituelles et sacrées.
Ce voyage symbolique du profane au Sacré implique souvent une quête de sagesse, un désir de purification et une aspiration à vivre selon des principes éthiques et moraux plus élevés, reflétant la transformation de l’être dans son intégralité.
C’est exactement ce que Jean-Claude Mondet explore. Maçonnant au Rite Écossais Ancien et Accepté (REAA), ayant été fondateur de plusieurs loges et vénérable maître à de nombreuses reprises, l’auteur se positionne comme un « éveilleur » au sein de la communauté maçonnique, cherchant à unir les membres au-delà des différences rituelles ou d’obédiences, qu’il considère comme profanes.
Pour mémoire, La Genèse-Volume de la connaissance sacrée (Numérilivre, 2017) est couronnée par un prix littéraire de l’Institut Maçonnique de France (IMF) en 2018, catégorie « Symbolisme ». Son œuvre s’attache à décrypter les enseignements ésotériques et les symboles contenus dans le livre de la Genèse, proposant une interprétation qui relie ces anciens textes à la quête spirituelle et à la connaissance sacrée au cœur de la pratique maçonnique. En faisant le pont entre les écritures sacrées et les principes maçonniques, Mondet cherche à éclairer les initiés sur les origines cosmiques et spirituelles de l’existence, ainsi que sur le rôle de l’homme dans l’univers.
La reconnaissance par l’IMF souligne non seulement la contribution significative de Mondet au corpus littéraire maçonnique mais aussi son dévouement à la transmission de la sagesse et des connaissances initiatiques. Son travail illustre la capacité de la franc-maçonnerie à se nourrir de diverses traditions spirituelles pour enrichir la compréhension et la pratique de ses membres.
Ici et maintenant, dans Du profane au Sacré-Tome 2 – Le Compagnon et le Maitre en Franc maçonnerie en franc-maçonnerie écossaise, Jean-Claude Mondet offre une exploration profonde des deuxième et troisième degrés du Rite Écossais Ancien et Accepté, tel qu’il est pratiqué à la Grande Loge de France.
Rappelons qu’elle est la plus ancienne et la plus importante dans la pratique de la franc-maçonnerie traditionnelle, initiatique et spiritualiste. Continuatrice des premières Loges parisiennes de 1728, et de la première Grande Loge constituée à Paris en 1738, elle a été structurée en sa forme actuelle à Paris le 7 novembre 1894 par la réunification des divers courants de la maçonnerie dite « écossaise », par référence au rite qu’elle pratique de manière quasi-exclusive, le Rite Écossais Ancien et Accepté, rite maçonnique le plus pratiqué au monde dans ses hauts grades. Il faut relever que sa popularité croissante dans la pratique des trois premiers degrés, dits symboliques (Apprenti, Compagnon, et Maître), s’explique par plusieurs facteurs. Le REAA est apprécié pour sa riche symbolique et son enseignement ésotérique profond. Les rituels et symboles utilisés dans les trois premiers degrés offrent une base solide pour la réflexion personnelle et la croissance spirituelle, ce qui attire les chercheurs de sens.
De plus, la structure cohérente du REAA, offrant un parcours initiatique clair depuis les degrés symboliques jusqu’aux hauts grades, séduit de nombreux francs-maçons. Cette continuité permet une progression logique et profonde dans l’étude des principes maçonniques et philosophiques. Il est aussi pratiqué dans de nombreuses juridictions à travers le monde, ce qui facilite une certaine uniformité d’expérience pour les frères et sœurs. Cette universalité contribue à renforcer le sentiment d’appartenance à une communauté mondiale.
C’est pourquoi cet ouvrage, très intrusif et pédagogique, s’ancre dans la continuité de la collection « La première lettre » du même auteur, fournissant une analyse minutieuse et respectueuse des traditions et des rituels de la franc-maçonnerie, en se focalisant sur la version proche de celle initialement révélée en 1804, elle-même inspirée du Rite des Anciens de 1760.
Le livre est structuré en trois parties principales. La première est consacrée aux rituels d’ouverture, de fermeture et d’initiation au deuxième degré. Étudiant des thèmes centraux tels que liberté, ferveur et joie. Mais aussi les outils, le tableau, les mots et les voyages. Soulignant ainsi la richesse et la beauté de ce grade.
Les rituels du troisième degré, considérés comme l’apogée de la franc-maçonnerie symbolique et le seuil vers des niveaux plus élevés du rite font l’objet de la deuxième partie. Sont abordés les différentes phases de la cérémonie – entrée, épreuves, communication du mot, ouverture et fermeture ainsi que des points particuliers propres au troisième degré.
L’arbre de vie avec le nom des 10 Sephiroth et les 22 chemins en hébreu, d’après Le Portique du questionneur d’Azriel de Gérone.
Page de couverture du Zohar, première édition imprimé à Mantoue en 1558.
La troisième et dernière partie est un focus. Il s’agit d’une exploration approfondie de divers thèmes importants où seul le premier gros plan « Jephté, Juge en Israël » est accessible aux compagnons. Jean-Claude Mondet nous transporte à travers la tradition de Toubal-Caïn à Noé, en couvrant un très large spectre – le Déluge, les Anciens Devoirs, Pythagore, Alexandrie et sa grande bibliothèque, Hermès Trismégiste, etc. Il nous entretient aussi du maître du feu, des secrets perdus, des mots connus du maître maçon, du serment maçonnique et de la parole donnée et fait aussi un large « Retour sur la Cabbale » nous parlant de l’hébreu langue sacrée, de la Cabbale en franc-maçonnerie, de Cabbale chrétienne, mais surtout de la place à lui accorder dans l’art royal ? Tout ceci invitant à une réflexion plus poussée.
J.-C. Mondet
Cet ouvrage n’est pas seulement une suite au premier tome Du profane au sacré, l’Initiation écossaise, mais aussi une extension de la méthodologie appliquée dans l’étude du premier degré, fournissant aux lecteurs une compréhension plus intégrale et intuitive des enseignements maçonniques.
Ce tome, ainsi que son prédécesseur, vise à offrir aux frères et sœurs maçons de tous grades et rites des éléments de réflexion substantiels, en s’éloignant des futiles pour s’attacher aux essentielles afin de favoriser une approche plus unifiée et profonde de la franc-maçonnerie.
Du profane au Sacré-Tome 2 – Le Compagnon et le Maitre en Franc maçonnerie en franc-maçonnerie écossaise
Comment s’y retrouver entre obédiences, ordres, rites, philosophie, symbolique…
Les francs-maçons, quel que soit l’horizon, sont portés par le même idéal, le même esprit de sollicitude fraternelle, la même persévérance dans le travail sans relâche et le même regard vers la lumière.
Profane, lorsque l’on frappe à la porte du temple, avec une vague idée de ce qu’est cette franc-maçonnerie, chemin faisant et même après, il n’est pas chose aisée de se repérer. Même si nous sommes persuadés que l’on travaillera loin des dogmes et que notre progression se fera à l’école de la juste et libre pensée, ce ne sera pourtant pas à l’école de la simplicité…
« Le chemin le plus court d’un point à un autre est la ligne droite, à condition que les deux points soient bien en face l’un de l’autre ». Pierre DAC
Pas de médecine moderne sans molécules pour agir contre les maladies. On oublie parfois à quel point la médecine occidentale est dépendante de la chimie. Mais comment sommes-nous passés de l’alchimie à la chimie ?
Avec :
François Pépin Professeur de philosophie en classes préparatoires à Paris. Il est spécialiste de la philosophie des Lumières, ainsi que d’histoire et de philosophie de la chimie
Cristina Viano Directrice de recherche au CNRS, spécialiste d’Aristote, de l’alchimie gréco-alexandrine et de ses rapports avec la philosophie grecque, elle travaille au Centre de recherches sur la pensée antique “Léon Robin” (CNRS-Sorbonne-Université)
Didier Kahn Directeur de recherche au CNRS (laboratoire CELLF)
« Avec Philosophie » s’interroge cette semaine sur le lien entre philosophie et médecine. Dans ce quatrième épisode, Géraldine Muhlmann et ses invités s’intéressent aux alchimistes et aux chimistes.
Les principes de l’alchimie gréco-alexandrine
Comment surgit la théorie alchimique ? On trouve des racines au moment de l’alchimie gréco-alexandrine. “On peut considérer qu’il y a trois phases dans l’alchimie alexandrine” explique Cristina Viano : “les premières sont des recettes de teinture, de fabrication de choses artificielles, de pierres précieuses, ensuite il y a cette idée d’une teinture tellement profonde, qui transmute, qui crée une nouvelle substance, c’est-à-dire qui obtient cette substance”. Ainsi, c’est “à ce moment-là, il commence à y avoir une réflexion philosophique, parce qu’il faut trouver les principes de cette techné, de cette discipline nouvelle, révolutionnaire, parce que ça va contre tout ce qu’on avait dit et a été dit après”. L’idée de transmutation est donc révolutionnaire.
Paracelse et le 15è siècle
Paracelse est une figure centrale de l’alchimie. “Son objectif numéro un, c’est d’accorder la théologie et la médecine parce que pour lui, le plus grand médecin, c’est le Christ, qui a soigné des paralytiques, rendu la vue à des aveugles, etc”. D’ailleurs, “on l’a appelé le Luther de la médecine” explique Didier Kahn*. “Paracelse reprend la théorie héritée de l’alchimie arabe selon laquelle les métaux sont faits de soufre et de mercure*”, mais “il y ajoute le sel”. En effet, “puisque Dieu est trinitaire, ce qu’il crée ne peut être que de nature trinitaire, de nature triple”.
Le 17è siècle, la condamnation des alchimistes ?
Le 17è siècle correspond à l’âge classique selon Foucault, période durant laquelle toutes les excentricités de la Renaissance sont peu à peu effacées. Pour François Pépin, “une première image serait de dire qu’avec une modernité qui gravite autour de Descartes et en physique des modèles corpusculaires, la chimie trouve difficilement sa place ou alors il faut qu’elle utilise des concepts qui sont des concepts corpusculaires, qu’on remplace les principes par des pointes, par des ports, par quelque chose de géométriquement imaginable ”. Or, “ de fait, il existe à l’Académie royale des sciences de Paris, qui est fondée en 1666, une certaine tradition qu’on peut appeler de chimie, disons, mécaniste” . Il ajoute “on a aussi des pratiques de laboratoire et on a une classe de chimie à l’Académie parisienne qui comprend des alchimistes”.
Pour en parler
Cristina Viano, directrice de recherche au CNRS, spécialiste d’Aristote, de l’alchimie gréco-alexandrine et de ses rapports avec la philosophie grecque, elle travaille au Centre de recherches sur la pensée antique “Léon Robin” (CNRS-Sorbonne-Université). Parmi ses publications, on trouve :
(éd. par C. Viano) L’alchimie et ses racines philosophiques. La tradition grecque et la tradition arabe, Vrin, coll. « Histoire des Idées et des Doctrines », 2005.
La matière des choses. Le livre IV des Météorologiques d’Aristote, et son interprétation par Olympiodore, avec le texte grec révisé et une traduction inédite de son Commentaire au Livre IV, Vrin, coll. « Tradition de la pensée classique », 2006.
Article : « Aristote et l’alchimie grecque. La transmutation et le modèle aristotélicien entre théorie et pratique », dans la Revue d’histoire des sciences, tome 49, 1996.
Didier Kahn, directeur de recherche au CNRS (laboratoire CELLF). Il a notamment écrit :
Le Fixe et le volatil : chimie et alchimie, de Paracelse à Lavoisier, CNRS Éditions, 2016.
Alchimie et paracelsisme en France à la fin de la Renaissance (1567-1625), Droz, 2007.
Il travaille aussi à éditer les Œuvres complètes de Diderot.
François Pépin, professeur de philosophie en classes préparatoires à Paris. Il est spécialiste de la philosophie des Lumières, ainsi que d’histoire et de philosophie de la chimie. Il a notamment écrit :
Diderot, philosophe des sciences, Classiques Garnier, 2023.
Diderot, l’humain et la science, dir. F. Pépin et G. Lecointre, Éditions Matériologiques, 2017.
Les matérialismes et la chimie, dir. F. Pépin, Éditions Matériologiques, 2012.
Références sonores
Extrait du film Harry Potter à l’école des Sorciers, réalisé par Chris Columbus, 2001.
Lecture par Riyad Cairat d’un extrait de Pseudo-Nicolas Flamel, Le Livre des figures hiéroglyphiques de Nicolas Flamel écrivain (1612).
Lecture par Antoine Ravon de Zosime, alchimiste grec, IIIe-IVe s. apr. J.-C., dans Mémoires authentiques, X , 7-8, 137-148 (Mertens) ; CAAG, 112-113, trad. 121.
Lecture par Antoine Ravon de Paracelse, Philosophie de la génération et des fruits des quatre éléments (1527), traduction/adaptation par Didier Kahn.
Lecture par Antoine Ravon d’Isaac Newton, Optiks, 1704 (première édition), Traité d’Optique sur les réflexions, réfractions, inflexions, et les couleurs, de la lumière, trad. Coste (de la seconde édition anglaise de 1717), Paris, chez Montalant, 1722 (seconde édition), Question XXXI (31), p. 560.
Chanson en fin d’émission : Recette pour un cake d’amour composée par Michel Legrand, interprétée par Anne Germain, Bande originale du film Peau d’Âne, réalisé par Jacques Demy (1970).
La Loge Nationale de Recherche Jean Scot Érigène n° 1000 de la Grande Loge de France (GLDF), se consacre à l’étude et à l’exploration approfondie des aspects historiques, symboliques et philosophiques de la franc-maçonnerie. Elle tire son nom du philosophe médiéval Jean Scot Érigène, auteur de l’ambitieux traité de métaphysique Sur la division de la nature qui tente de synthétiser la pensée chrétienne avec les éléments néoplatoniciens.
Explorant aussi les connaissances ésotériques, la Loge Jean Scot Érigène – la plus ancienne et la plus connue des loges de recherche au sein de la GLDF – a été créée dans le but d’approfondir l’étude de l’histoire de la franc-maçonnerie, du Rite Écossais Ancien et Accepté (REAA), ainsi que de la symbolique maçonnique.
Depuis de nombreuses années, Jean Scot Érigène délivre et publie des travaux de qualité, portant sur des sujets variés souvent méconnus du grand public.
En janvier 2022, la Loge Jean Scot Érigène a relancé la publication de ses Cahiers annuels dans une nouvelle série numérotée à partir du n° 1. Ces Cahiers sont désormais édités et diffusés par Numérilivre, continuant ainsi d’enrichir la réflexion maçonnique. Si vous êtes passionné par l’ésotérisme, l’initiation et la spiritualité, nous ne pouvons que vous encourager à explorer les travaux de cette loge et à plonger dans les mystères qu’elle explore !
Le premier numéro de cette nouvelle série des Cahiers Jean Scot Érigéne, intitulé « Rassembler ce qui est épars-Des traditions à la Tradition ? » abordait des sujets variés, allant de la symbolique à la philosophie, à l’intersection entre psychanalyse et tradition, tout en passant par l’analyse d’œuvres littéraires sous un prisme initiatique, illustrait une quête de compréhension et d’unification des diverses voies de la spiritualité et de la connaissance.
L’année suivante, le deuxième numéro traitant de « Une Franc-maçonnerie ? Ou des franc-maçonneries ? » posait les bases d’une réflexion sur la multiplicité des approches et des pratiques maçonniques, tandis que l’entretien avec Didier Convard soulevait la question de la spiritualité et de la quête de sens au sein de la franc-maçonnerie, suggérant une vision de celle-ci comme une « religion de l’homme ».
Avec ce dernier opus des Cahiers Jean Scot Érigène (N° 3 Nouvelle série – Février 2024) est posée la question de savoir « À quoi sert le degré de Maître ? ».
Pour le maçon d’aujourd’hui, cette question évoque une exploration profonde des dimensions les plus élevées de l’initiation et de la transformation personnelle au sein des traditions ésotériques et initiatiques, telles que la franc-maçonnerie en général et en Grande Loge de France au Rite Écossais Ancien et Accepté, en particulier. Cela suggère une quête de compréhension non seulement des rituels et des symboles associés à ce degré, mais aussi de leur signification intrinsèque et de leur impact sur le parcours spirituel de l’individu. La question souligne également l’importance de la transmission du savoir et de l’expérience accumulée, où le Maître se voit confier la responsabilité d’éduquer et de guider les Apprentis et les Compagnons, perpétuant ainsi les enseignements et les valeurs de la franc-maçonnerie. Elle met en lumière le rôle essentiel du degré de Maître dans la perpétuation de la connaissance et dans l’accomplissement de la mission éducative et spirituelle de l’ordre.
Johannes Scottus Eriugena
Ce numéro 3 aborde de manière profonde et sous plusieurs angles, le troisième degré de la franc-maçonnerie. Ce volume, riche de contributions diverses, explore les dimensions initiatiques, symboliques, et pratiques de ce degré, qui marque une étape cruciale dans le parcours maçonnique.
Frédéric Lenoir, conférence au Salon du Livre de Genève 2013, détail – Wikimedia Commons
Christophe Bourseiller, passé vénérable maître de la terre loge nationale de recherche, dans son éditorial, ainsi que le mot du vénérable maître Thierry Lesage, posent le cadre de réflexion autour de la transformation intérieure que symbolise le passage du degré de compagnon à celui de maître, soulignant le passage de la peur à l’amour et de l’inconscience à la conscience, thème développé dans l’entretien avec Frédéric Lenoir, cepenseur éminent et auteur prolifique s’intéressant particulièrement à la manière dont les croyances et les pratiques spirituelles peuvent influencer la quête de sens et contribuer au bien-être individuel et collectif.
Pierre Darrort met en lumière le degré de maître comme premier des hauts grades du Rite Écossais Ancien et Accepté, marquant le début d’un chemin encore plus profondément initiatique. Les contributions de Josselin Morand sur la violence et le troisième degré, ainsi que celle de Christophe Picot sur la nécessité de « tuer les trois mauvais Compagnons« , explorent les aspects plus sombres et les épreuves symboliques associées à ce degré.
Tablette de Ninnion : Déméter et Perséphone accueillant une procession des mystères
La dimension mystique et ésotérique est approfondie à travers les mystères d’Eleusis discutés par Pierre Chanel et Serge Iglesias, et la réflexion sur les plantes sacrées et les états modifiés de conscience, offrant une perspective sur les anciens rites de passage et leur signification pour le maître maçon.
Les « Méditations dans la Chambre du Milieu » par Christophe Bourseiller et les réflexions sur la traduction et les « Mots Substitués » par Thierry Lesage invitent à une contemplation sur la transmission du savoir et la recherche de la vérité au cœur de la pratique maçonnique.
Voyage en Orient, T 1, édité par Charpentier, 1869
Marc Szperling et Lorenzo Soccavo, avec leurs études sur « Les Secrets véritables du Maître Maçon » et « Les voyages en Orient d’un Maître Maçon ». Lorenzo Soccavo, par ailleurs auteur d’un récent essai Terres de fiction : de quel côté du miroir sommes-nous ? (éditions Bozon2X, 2024), nous offre un aperçu de ces œuvres littéraires qui explorent les mystères et les richesses de l’Orient. Notamment avec De Voyage en Orient de Gérard de Nerval, une œuvre majeure du romantisme français reflétant la vision personnelle, poétique et la fascination de l’auteur pour le mysticisme oriental et son influence sur la quête personnelle de sens, à La Montagne magique de Thomas Mann qui explore les thèmes ésotériques et philosophiques, la montagne devenant un lieu de transformation, de réflexion et d’exploration intérieure, en passant par Le Mont analogue de René Daumal, roman mystique et allégorique, toutefois inachevé, racontant l’ascension d’une montagne mythique où il mêle symbolisme, alchimie et quête spirituelle, offrant une vision unique de l’Orient intérieur.
Arbre de Vie
Sans oublier les approches de la Kabbale et de l’alchimie par Bernard Nisse, enrichissent la compréhension de la complexité et de la profondeur des enseignements du troisième degré.
Nous lui devons aussi, à la suite de son article paru dans le précédent Cahiers et intitulé
« Les Véritables Arcana Arcanorum Alchimiques du Rite de Misraïm identifiés », un « Arcana Arcanorum, Instructions alchimiques pour les grades hermético-cabalistiques de la franc-maçonnerie égyptienne de Misraïm » qui s’inscrit dans la lignée des œuvres explorant les aspects les plus ésotériques et mystiques de la franc-maçonnerie. Rappelons que les Arcana Arcanorum, ou les secrets des secrets, représentent un ensemble de connaissances et de rituels au cœur de certains systèmes initiatiques, considérés comme la quintessence de la sagesse ésotérique transmise aux niveaux les plus élevés d’initiation.
Cet enseignement propose un chemin de perfectionnement spirituel profond, où l’alchimie spirituelle et la kabbale jouent un rôle central dans le processus de transformation personnelle du franc-maçon, l’aidant à réaliser son propre potentiel divin. Bernard Nisse, à travers son travail, offre un regard approfondi sur ces enseignements traditionnellement réservés, présentant les principes et les pratiques alchimiques et cabalistiques comme des outils pour l’éveil spirituel et la réalisation intérieure.
Ce volume, par son exploration de thèmes variés tels que « La légende de Zelda » ou l’héritage maudit de « La race à venir », démontre la capacité de la franc-maçonnerie à intégrer des influences culturelles diverses dans sa quête de sagesse et d’illumination.
La légende de Zelda a eu un impact profond non seulement sur l’industrie du jeu vidéo, mais aussi sur la culture populaire, inspirant une multitude d’œuvres dans différents médias, y compris la musique, la littérature et le cinéma. La série est louée pour sa capacité à réinventer elle-même à chaque nouvel opus tout en restant fidèle à l’essence de l’aventure et de la découverte qui a fait son succès.
« À quoi sert le degré de Maître ? » s’affirme ainsi comme une lecture essentielle pour tout franc-maçon ou encore pour les amateurs de spiritualité en quête de comprendre les enjeux et les promesses du troisième degré, ainsi que pour tout chercheur intéressé par les dimensions ésotériques et initiatiques de la tradition maçonnique.
Cahiers Jean Scot Érigène – N° 3 Nouvelle série – Février 2024
A quoi sert le degré de Maître ? – Numérilivre 2024, 186 pages, 20 €
Un ouvrage qui explore la symbolique maçonnique du premier Ordre du Rite Français, à partir de recherche alchimique et de psychologie des profondeurs. La première partie contextualise le Rite codifié au XVIIIe siècle. La seconde partie aborde les concepts d’alchimie intérieure avec de nombreuses clés de recherche personnelle. L’objectif de l’auteur est de permettre aux maçons de Rite Français de reconsidérer leur démarche dans sa pratique dite moderne tandis que les messages véhiculés portent une véritable dimension spirituelle.
L’Auteur
Chimiste et biochimiste, Alain Mucchielli est également médecin généraliste puis spécialiste de la réduction des risques pour les usagers de drogues intraveineuses. Il a reçu, en 1997, le National Rolleston Award , prix décerné chaque année pour reconnaître les contributions exceptionnelles de groupes ou d’individus sur le terrain pour leur approche ouverte, alternative, pragmatique et humaine aux problèmes de drogues. Des approches ouvertes, alternatives pragmatiques et humaines aux problèmes de drogues. Symboliquement, il s’est intéressé aux œuvres de Carl Gustav Jung. Membre du Grand Orient de France, il contribué à la refondation du Rite Français au sein du Grand Collège des Rites. Il participe à son grand Chapitre Général du G.O.D.F