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Un imposteur peut-il produire une œuvre positivement et moralement recevable ?

Le sujet de cet article paraît quelque peu provocateur pour nous maçons qui œuvrons pour tenter de parfaire notre société et donc par là-même nous trouver dans une démarche opposée de celle d’un usurpateur. Si je me hasarde à répondre à cette interrogation, « l’œuvre d’un imposteur est elle moralement recevable »  Il me semble naturel de répondre : « non en aucun cas et d’aucune façon », car un avis positif irait à l’encontre de l’objectif éthique que nous suivons en franc maçonnerie.

« Ici tout est symbole » nous est-il dit, donc ce sujet n’est pas anodin et cache sous-jacent une réalité humaine inscrite au plus loin de sa condition. En fait, cette réflexion soulève de nombreuses interrogations quant aux comportements et aux objectifs des hommes à l’origine de projets, de religions, de doctrines, de livres etc. Le plus complexe est de dévoiler l’imposteur et ses impostures, de vérifier et d’avoir les preuves car, en règle générale il s’agit de quelqu’un d’extrêmement rusé qui maquille, travestit ses actes et projets et en fait une apparente réalité. Les supercheries et impostures ont émaillées l’histoire humaine. L’Épopée de Gilgamesh par exemple, est le plus ancien récit mythique découvert à ce jour qui, à l’évidence a inspiré l’Iliade, l’Odyssée et la Bible, alors que ces textes ont été écrits 2000 ans plus tard. 

Qu’y a-t-il d’historique dans les évangiles ? Toute la Bible n’a-t-elle pas été reconstruite ? Le nouveau testament semble avoir été entièrement fabriqué au fur et à mesure des années au seul intérêt de servir le prosélytisme de l’église. La plupart des écrits du nouveau testament, attribués aux apôtres, étant par essence même des faux, sachant bien que la plupart des disciples de Jésus étaient illettrés et donc incapables de rédiger un quelconque texte. Ce sont les Patriarches, les moines et les Prêtres qui tout au long des années ont construit une multitude d’histoires et de mythes au service de l’église.

Copier, coller, tordre le réel n’est-ce pas une méthode de faire du neuf avec de l’ancien ? Une méthode pour s’imposer, pour se substituer à la légitimité, pour détourner la raison. L’œuvre produite par ces usurpateurs est-elle positivement recevable ? On peut discuter sur le caractère éducatif, éthique et moral du contenu de ces écrits, mais oui, me semble-t-il dès lors que l’œuvre va dans l’intérêt des êtres, régule ou améliore leur condition, éduque, elle est semble-t-il recevable.

En Franc-maçonnerie.

Il me faut maintenant faire le lien avec notre démarche maçonnique, car comme je l’ai indiqué au début, le sujet n’est pas anodin et participe certainement à parfaire la construction de mon temple intérieur. Dès le 1er degré, l’orientation est de donner une dimension morale à notre engagement maçonnique : « C’est une alliance universelle d’hommes éclairés, réunis pour travailler en commun au perfectionnement spirituel, moral, matériel et intellectuel de l’humanité ».  « Vous devez être un homme libre et de bonnes mœurs »

Les premiers pare-feu au profane « usurpateur » passent par les enquêtes, le parrainage, un extrait vierge du casier judiciaire qui vient compléter le dispositif de précaution qui est mis en œuvre pour toute demande d’initiation et surtout le passage sous le bandeau, véritable mise à nu de l’impétrant.

Toutefois, nombreux sont ceux qui esquivent ces obstacles et poursuivent le chemin.

Plus tard, tuilage, mots de semestre et mots de passe comme « Schibboleth », mot légendaire qui fut un moyen de distinguer un ami d’un ennemi, viennent s’ajouter au principe de précaution qui sous entend que nous pouvons être infiltrés à tout moment par un ou des imposteurs.

Ainsi donc, le cadre pour lequel nous œuvrons semble incompatible avec l’acceptation, ou le cautionnement d’un usurpateur et de son œuvre.

 « Monsieur, cette épée que vous sentez sur votre poitrine est toujours levée pour punir le parjure. Elle est le symbole du remords qui déchirerait votre cœur si vous deveniez traître à la Fraternité dans laquelle vous avez demandé à être admis. »

Dès le jour de notre initiation, les mises en garde sont claires, parjure, ignorance et superstition doivent être bannie et on nous indique les sanctions qui peuvent éventuellement s’abattre sur nous.

« Le bandeau qui couvre vos yeux est le symbole de l’aveuglement dans lequel se trouve l’homme dominé par ses passions et plongé dans l’ignorance et la superstition. »

La sincérité doit prévaloir sur la fourberie, la fraternité sur l’individualisme, le curieux ou l’imposteur est invité à changer de chemin.

En revisitant notre rituel, on se rend compte pourtant que l’imposture volontaire est clairement identifiée avec le projet des trois mauvais compagnons. En effet, ceux-ci souhaitent obtenir les secrets de construction du temple pour prendre rang auprès des Maîtres. Le succès de cette opération aurait aboutit à une parfaite imposture car ils n’avaient encore, ni le savoir ni les compétences, pour être élevés à ce degré, et se substituer dignement à Hiram.

image en provenance de la page legende-hiram.blogspot.com/2017/10/1949-les-armes-outils-du-meurtre-dhiram.html

Toutefois, cette tentative d’imposture avortée a vu la mort prématurée de Maître Hiram et a donc eu des répercussions collatérales puisqu’elle a servi de base à l’élaboration du rituel d’élévation du futur Maître et à la renaissance d’Hiram par substitution à travers le nouveau Maître tout comme Osiris, Horus, Dionysos, Mithra, Orphée, dans d’autres traditions. Les trois mauvais compagnons sont donc indispensables à l’élaboration du mythe, tout comme Judas auprès de Jésus.

La pire imposture est sans doute l’involontaire, car la « bonne foi » et l’angélisme de son auteur la rend crédible. Tout un tas de fausses affirmations se transmettent de cette façon. La Franc-maçonnerie n’est pas exempte d’abriter des imposteurs- gourous du savoir qui marquent de leur empreintes des générations d’apprentis qui boivent avidement les inepties de leur instructeur ou sont orientés dogmatiquement vers des chemins de pensée hasardeux.

Les degrés de perfection nous font endosser des costumes différents mais complémentaires. Le cycle des substitutions entamé avec la mort d’Hiram continue avec  Johaben, Stolkin, Guibulum, mais aussi Salomon, et me donne le sentiment d’acquérir au fil du temps un peu de sagesse et de compréhension.

Tous ces degrés ont un fil conducteur, la construction du soi, de l’Homme vrai. Epouser un personnage alors que soi-même on n’est pas en conformité avec son propre discours, est une forme d’usurpation du rôle, une tromperie de Soi, mais aussi du collectif. L’imposteur n’existe que parce que les autres le cautionne, se taisent ou en jouent. Pour passer il doit se justifier, tout comme au passage au 3ème degré, lorsque l’on doit démontrer que nos mains et notre tablier ne sont pas souillées du sang du Maitre. Toutefois, il arrive à tromper ses frères, à acquérir mots de passe et mots secrets pour travailler au grade auquel il prétend appartenir.

On voit bien que la Franc-maçonnerie identifie bien dans son rituel du Rite Ecossais Ancien et Accepté ce que peut être un personnage qui pratique l’imposture et les sanctions qu’il encourt mais n’est en aucun cas un paravent étanche. Dans le récit mythique du 9ème degré, l’imposteur peut être cet « inconnu » qui informe Salomon de l’emplacement des meurtriers du Maître. Symboliquement « l’inconnu » signifie révélateur de quelque chose que l’on ne connaît pas. L’inconnu vient à nous pour nous révéler un secret. C’est ce qui est inconnu de nous, qui nous fait sortir de l’ignorance, même si cet inconnu fait peur. Salomon montre dans ce récit mythique qu’il faut savoir accueillir parmi nous, en nous donc l’inconnu. Savoir faire confiance.

En clair, c’est l’inconnu qui guide les pas des neuf élus et de Jhaoben vers la caverne… c’est ce qui est inconnu de nous et en nous qui doit nous guider. (Les yeux bandés, l’inconnu nous guide lors de notre initiation et nous lui faisons confiance !) Ce grade punit le compagnon imposteur et meurtrier,  lequel malgré tout s’estime injustement tué en criant NEKAM (vengeance). Il nous enseigne que l’imposture et la trahison ne resteront pas impunies en franc-maçonnerie.

L’instruction des 13ème et 14ème degrés repose sur la légende d’Enoch et des trois mages.

Selon sa vision suggérée par le Grand Architecte de l’Univers, Enoch creusa, avant le déluge, sous le Temple, 9 voûtes et plaça une plaque d’or gravée des lettres du nom ineffable IOD – Hé – Vav – Hé. (Je suis celui qui est) puis scella son accès de façon que personne ne puisse y pénétrer.

C’est sur son emplacement que Salomon fit construire le temple de Jérusalem bien plus tard. Salomon plongea dans la luxure, incapable d’être fidèle à son alliance avec Dieu il déchaîna la colère divine et provoqua la partition d’Israël. Grandeur et décadence, devenu un imposteur, un faux sage en disgrâce avec Dieu il est à l’origine de la destruction du Temple de Jérusalem par Nabuchodonosor.

Pourtant, dans le Rite Ecossais Ancien et Accepté, le roi Salomon est par essence l’incarnation même de la sagesse. Cette vertu qui lui est attribuée est-elle une imposture ou bien la légende fait-elle un arrangement qui convient à la Franc-maçonnerie en s’en servant de support à notre rituel ?

Salomon est-t-il donc l’exemple à suivre ou bien encore une fois, une imposture peut-elle devenir positive dès lors qu’elle guide sur le bon chemin des générations de maçons ? Qu’elle met en évidence  notre propre imposture, nous qui épousons son personnage à divers degrés.

Revisitons les rituels d’instruction du 13ème et 14ème degré et voyons ce qu’ils nous enseignent sur notre propre démarche.

Longtemps après la mort d’Hiram et de Salomon, après que le royaume de Juda fut détruit, rasé Jérusalem, renversé le Temple, des Mages originaires de Babylone, découvrirent une excavation sur les ruines. On était au milieu du jour, le Soleil brillait au zénith (Ouverture des travaux au 1er degré« Il est midi, les travaux commencent et la pleine lumière nous permet de découvrir le trésor caché. »)

colonnes

Ils firent une corde faite des trois ceintures et la fixère sur une pierre plate existant auprès du puits et sur laquelle on lisait encore le mot « Jakin ». Ils roulèrent dessus un fût de colonne où l’on voyait le mot « Boaz », (les piliers du temple au 1er degré) ils s’enfoncèrent, sous la conduite de leur chef dans le couloir menant à la porte de bronze et virent dans le milieu, l’existence d’un ornement en relief ayant la forme d’une couronne royale, autour de laquelle était un cercle composé de points au nombre de vingt-deux (les 22 lettres de l’alphabet hébraïque). Les mots prononcés pour ouvrir les portes successives furent les dix sephirot de la Kabbale : Malkuth, Yesod, Hod, Netsah, Tiphereth, Gueburah, Khesed, Binah, Hochmah et Kether, qui nous ouvrent les portes vers la tradition hébraïque.

Quand enfin ils entrèrent sous la neuvième arche, les Mages s’arrêtèrent surpris, elle n’était pas plongée dans l’obscurité. Elle était, au contraire, brillamment éclairée. Au milieu étaient placés trois lampadaires d’une hauteur de onze coudées (les trois piliers du tableau de loge, les trois grandes lumières) ayant chacun trois branches. Les lampes brûlaient depuis des siècles et même l’écroulement du Temple n’avait pas entraîné l’extinction. (La lumière éternelle sur le bureau du V\M\)

A la base du triangle formé par les lampadaires, se trouvait un autel de marbre blanc cubique de deux coudées de haut. Sur la face supérieure de l’autel, étaient gravés à l’or pur, les outils de la Maçonnerie : la Règle, le Compas, l’Equerre, le Niveau, la Truelle, le Maillet. Sur la face latérale gauche, on voyait les figures géométriques : le Triangle, le Carré, l’Etoile à cinq branches, le Cube (2ème degré). Sur la face latérale droite, on lisait les nombres : 27, 125, 343, 729, 1331. Enfin, sur la face arrière, était représenté l’Acacia symbolique (3ème degré). Sur l’autel était posée une pierre d’agate de trois palmes de côté sur laquelle était incrusté le triangle d’or gravé des lettres IEVE. Les disciples épelèrent les lettres lod, Hé, Vau, Hé sans le prononcer.

Maha Imaha Rabach s’exclament les Grands Elus Parfaits et Sublimes Maçons prononçant ainsi le mot de passe des fidèles gardiens du trésor. Nous abordons avec la communication de ces lettres l’interprétation Kabbalistique qui nous indique qu’IEVE est un nom de lumière. Ce nom qui signifie en fait le verbe. Il ne s’agit pas d’un simple verbe symbolique, mais d’un verbe au sens originel du terme, qui représente réellement la parole divine qui a crée le monde et que l’initiation à ce degré communique pour conduire l’adepte vers la connaissance et la conception Suprême, le « Centre de l’idée ».

(L’endroit où par l’introspection et la méditation on découvre comment se forge la conception de l’idée, le vaste domaine de la pensée et de l’action s’ouvre pour le Franc-maçon – rituel)

Bloqués sous la neuvième arche nos trois mages se prirent par la main  (« Seul sans le secours de vos frères vous courrez à une chute inexorable » rituel d’initiation) et ainsi se retrouvèrent au pied d’un escalier de vingt-quatre marches. (L’outil de l’apprenti, la règle à 24 divisions)  Ils le gravirent en comptant 9, 7, 5 et 3 (batterie du 14ème degré). Il était minuit. (L’heure de fermer les travaux 1er degré)

Cette légende nous enseigne que nous sommes à la fin d’un cycle et que cette descente au fond du puits est en fait un retour au premier jour de notre initiation. 

Le mot VITRIOL (Visite l’intérieur de la terre et en rectifiant tu trouveras la pierre cachée.) affiché dans le cabinet de réflexion prend toute sa signification et nous fait toucher du doigt que c’est par l’introspection et par la compréhension de son « moi » que nous pouvons assurer les fondations de notre temple intérieur.

Les symboles de l’apprenti, du compagnon et du maître sont bien identifiés lors de cette légende. Ces deux degrés nous font revisiter tout notre parcours maçonnique. Ils nous permettent de faire le bilan et de vérifier si nous ne faisons pas partis de la classe des imposteurs qui souhaitent accéder à un degré auquel ils prétendent indument accéder, tout comme les trois mauvais compagnons.

Suis-je digne d’appartenir à la classe des Grands Elus Parfaits et Sublimes Maçons ? « J’ai travaillé à me perfectionner. »

L’égo a-t-il cédé la place à l’humilité ?

Le postulant du cabinet de réflexion qui subissait l’épreuve de la terre est-il devenu un être vertueux ? Suis-je digne de cet anneau d’or qui me lie aux hommes vertueux ? VIRTUS JUNXIT, MORS NON SEPARABIT (ce que la vertu a uni, la mort ne pourra séparer)

Je ne peux répondre qu’une chose, « mes frères me reconnaissent comme tel » A ce stade, la pratique de la vertu ne supporte pas la dissimulation et l’imposture. Bref, notre démarche initiatique n’a-t-elle pas pour but de nous éclairer, de nous ôter le voile trompeur qui nous empêche de voir la réalité des choses ?

Sujet complexe, mais ô combien révélateur de la comédie humaine. A un moment ou un autre, sommes-nous tous des imposteurs par rapport à une situation donnée par rapport à un projet, un désir ? La descente au centre de la terre représente également la prise de conscience de soi, qui suis-je en fait ? Le passage de porte en porte marque la progression jusqu’à l’essentiel de son être. Le maître est transformé lorsqu’il sort du puits. Il a beaucoup appris sur lui-même, sur la nécessité de la perte de l’ego qui, mal maîtrisé nous relaie au rang des imposteurs.

Entre la pression de l’ego d’une part et le caractère naturellement relatif et partiel de nos affirmations d’autre part, il n’est pas possible d’exprimer la « Vérité absolue » ;  Cependant, si on en est lucide, avec de l’humilité et de la sincérité, l’œuvre de notre vie peut être positivement et moralement recevable.

Jean Verdun
Jean Verdun – Photo© Jean-Laurent Turbet

« Les impostures existent en loge comme ailleurs » écrit Jean Verdun passé grand maître de la GLDF, « tout groupement humain recèle des imposteurs, mais en loge, petite unité jamais soumise à des autorités régularisatrices, les imposteurs sont encore plus nocifs qu’ailleurs. Ils paralysent le système nerveux de la loge qu’ils parviennent à séduire et à dominer,  poursuit- il et je pense que l’on peut faire confiance en son analyse. 

Bien entendu, l’imposture est plus apparente chez les autres que sur nous-mêmes. L’observation des imposteurs que nous pouvons identifier peut nous aider à rectifier nos propres impostures…Ne fait pas à autrui ce que tu ne veux pas qu’il te fut fait à toi-même !

Je pense que l’homme « vrai » est celui qui est en quête de sens, en recherche de vérité et non pas dans l’exercice du factice, du fabriqué et du contourné.

« C’est en réglant ainsi ses inclinations et ses mœurs que l’on parvient à donner à son âme ce juste équilibre qui constitue la Sagesse, c’est-à-dire l’Art de la Vie. »

Visite l’intérieur de la terre et en rectifiant tu trouveras la pierre cachée.

L’authentique Maçon est celui qui respecte les divers serments qu’il a prêté et que bien trop souvent il met entre parenthèse au fil des ans. Alors, Salomon, Hiram, Hénoch, Guibulum, quel que soit le modèle ce qui est important c’est l’apport des diverses qualités qu’ils nous ont léguées, justice, courage, sagesse et courage.

« Fais ce que tu dois, advienne que pourra ».

Quelle que soit notre démarche, je crois que c’est l’intention qui prévaut sur le résultat. Cette petite clochette intérieure qui nous fait savoir que notre action, nos desseins ne sont pas sains, et que poursuivre lucidement et sans état d’âme dans l’imposture nous place au statut des mauvais compagnons.

L’influence maçonnique dans la chute d’Alfonz XIII

De notre confrère hongrois mult-kor.hu

La chute de XIII Alfonz de Bourbon, dernier roi d’Espagne avant l’établissement de la Seconde République espagnole en 1931, reste un sujet fascinant, mêlant histoire politique, tensions sociales et spéculations sur des forces occultes. Parmi ces dernières, l’influence présumée de la Franc-Maçonnerie occupe une place centrale dans les récits, notamment dans l’article publié le 15 juin 2025 sur le site Múlt-kor, intitulé « XIII.

Alfonz bukása, mítoszok, és szabadkőművesek » (La chute de Alfonz XIII, mythes et francs-maçons). Cet article explore les causes historiques de cette transition, en s’appuyant sur les données disponibles, tout en enrichissant la perspective historique de l’influence maçonnique à travers un examen approfondi des contextes européens et espagnols. Écrit à 12:27 AM CEST le 16 juin 2025, ce texte vise à démêler les faits des légendes, tout en offrant une analyse nuancée de ce moment charnière.

Contexte Historique : La Chute de XIII Alfonz

La fin du règne de XIII Alfonz, marquée par son exil le 14 avril 1931, suit de près les élections municipales du 12 avril, où les forces républicaines l’emportent dans les grandes villes comme Madrid et Barcelone, malgré une majorité nationale pour les monarchistes. Dans une lettre ouverte publiée dans El ABC, le roi reconnaît avoir perdu l’amour de son peuple, déclarant : « Les élections de dimanche m’ont clairement montré que je ne jouis plus aujourd’hui de l’affection de mon peuple. » Cette abdication volontaire, bien que précipitée par la pression populaire, s’inscrit dans un contexte de crise économique post-1929, de polarisation politique et de montée des mouvements sociaux – étudiants, ouvriers et femmes – réclamant modernité et justice sociale.

L’article de Múlt-kor souligne que la Monarchie, perçue comme archaïque, était affaiblie par son alliance avec l’Église catholique, dont les privilèges irritaient une partie croissante de la société. La crise économique, aggravée par la stagnation agricole et l’industrialisation lente, a amplifié le mécontentement, rendant la promesse républicaine de progrès irrésistible. Cependant, l’historiographie traditionnelle ne suffit pas à expliquer pleinement cette chute soudaine, ouvrant la porte à des théories conspirationnistes, dont l’implication présumée des francs-maçons.

L’Influence Maçonnique : Une Perspective Historique Élargie

L’idée d’une influence maçonnique dans la chute de XIII Alfonz s’ancre dans une longue tradition de soupçons envers les loges, datant du XVIIIe siècle. La Franc-Maçonnerie, née en Angleterre en 1717 avec la fondation de la Grande Loge de Londres, s’est rapidement répandue en Europe, y compris en Espagne et en France, où elle a été associée aux idéaux des Lumières – liberté, égalité, fraternité – qui ont alimenté la Révolution française (1789). Augustin Barruel, ex-jésuite et auteur d’un essai en 1797, a été l’un des premiers à accuser les francs-maçons d’avoir orchestré ce bouleversement, une théorie reprise par les cercles conservateurs et catholiques pour discréditer les réformes progressistes.

Les Neuf Souverains à Windsor pour les funérailles du roi Édouard VII, photographié le 20 mai 1910. Debout, de gauche à droite : Haakon VII de Norvège, Ferdinand Ier de Bulgarie, Manuel II de Portugal, Guillaume II d’Allemagne, Georges Ier de Grèce et Albert Ier de Belgique. Assis, de gauche à droite : Alphonse XIII d’Espagne, George V du Royaume-Uni et Frédéric VIII de Danemark.

En Espagne, la Maçonnerie s’implante au XVIIIe siècle, malgré les persécutions de l’Inquisition. Sous le règne de Charles III (1759-1788), des loges influencent des réformes administratives, mais elles restent marginales jusqu’au XIXe siècle, où elles gagnent en visibilité sous la pression des idées libérales. À l’époque de XIII Alfonz, les loges espagnoles, souvent affiliées à des réseaux internationaux (notamment français et britanniques), attirent des intellectuels, des militaires et des politiciens républicains. L’article de Múlt-kor évoque des théories selon lesquelles ces réseaux auraient joué un rôle dans la déstabilisation de la Monarchie, une idée renforcée par l’hostilité de l’Église catholique, qui voyait dans la Maçonnerie une menace contre son autorité.

Historiquement, les preuves directes d’une conspiration maçonnique restent fragiles. Cependant, les loges espagnoles, comme la Gran Oriente Español, fondée en 1889, ont soutenu des mouvements anticléricaux et républicains, notamment à travers des figures comme Manuel Azaña, futur président de la République. L’article note que la victoire républicaine à Madrid et Barcelone pourrait avoir été amplifiée par des réseaux maçonniques locaux, qui auraient mobilisé des élites urbaines contre la Monarchie. Cette influence, bien que probablement exagérée par les rumeurs, s’inscrit dans un contexte où la Maçonnerie était perçue comme un « pouvoir occulte », alimentant les récits conspirationnistes.

Mythes et Réalités : Le Rôle des Francs-Maçons

L’article de Múlt-kor met en lumière les ambiguïtés entourant ce rôle. D’un côté, les conservateurs espagnols ont accusé les francs-maçons de manipuler les élections de 1931, suggérant une coordination avec des loges étrangères pour renverser XIII Alfonz. Ces allégations s’appuient sur l’idée d’une Maçonnerie internationale, un thème récurrent dans les théories du complot, notamment après la Révolution française. De l’autre côté, les historiens modernes, comme ceux cités dans Múlt-kor, soulignent que la chute du roi est avant tout le résultat de facteurs internes : crise économique, mécontentement social et échec politique.

Photographie prise quelques instants après la tentative d’assassinat d’Alfonso et Victoria Eugénie le jour de leur mariage

Pour enrichir cette perspective, examinons l’histoire européenne. En France, la Maçonnerie a joué un rôle dans la Révolution de 1789, bien que son influence ait été surestimée par Barruel. En Italie, les loges carbonari ont contribué aux mouvements unificateurs du XIXe siècle. En Espagne, bien que moins documentée, la Maçonnerie a soutenu la Première République (1873-1874) et les réformes libérales, ce qui en fait une cible naturelle pour les monarchistes sous XIII Alfonz. L’article suggère que les mouvements étudiants et ouvriers, actifs dans les années 1930, pourraient avoir été influencés par des idéaux maçonniques, mais sans preuves concrètes, cela reste spéculatif.

Implications Symboliques et Maçonniques

Au-delà de l’histoire factuelle, la chute de XIII Alfonz offre une réflexion symbolique pour les francs-maçons. Dans les loges, le sacrifice et la transformation – thèmes centraux du mythe d’Hiram – peuvent être lus comme une métaphore de la transition d’une ère monarchique à une ère républicaine. La Maçonnerie, avec son idéal d’égalité, aurait pu voir dans cette chute une victoire de ses principes, même si son rôle réel reste débattu. L’article de Múlt-kor invite à se demander si les mythes autour des francs-maçons ne reflètent pas une peur collective face au changement, un thème que la Maçonnerie elle-même explore dans ses rituels.

Entre Histoire et Légende

Alphonse XIII en visite Verdun en 1919

La chute de XIII Alfonz reste un sujet où l’histoire se mêle aux mythes. L’influence maçonnique, bien que plausible dans un contexte de réseaux progressistes, manque de preuves solides pour être confirmée comme un facteur décisif. L’article de Múlt-kor offre une base précieuse, soulignant les tensions sociales et les spéculations autour des loges. En enrichissant cette analyse avec l’historique européen, on comprend mieux comment la Maçonnerie, perçue comme un agent de transformation, a pu être scapegoatisée. Pour les maçons d’aujourd’hui, cette période invite à une vigilance : préserver l’esprit critique face aux légendes, tout en honorant l’héritage d’une quête de lumière et d’harmonie.

La Quête de l’Ibis Vert : Le Voyage de l’Apprenti

Après avoir suivi les courants de l’Avent, exploré la carte et le territoire, ressenti les rythmes possibles de la transhumance initiatique, il est enfin temps de partir pour le Premier Voyage de la Quête de l’Ibis vert. Par le souffle des arcanes rencontrées les symboles murmurent une autre histoire où glyphes, couleurs, mots sont autant de Portes d’où chacun peut partir à la rencontre de sa propre intuition dans ce voyage où le mental peut se perdre dans les sens laissant ainsi peut-être la place à l’essence dans l’espoir de l’Ignition dans le « Cœur-Creuset » du troisième Voyage avec l’espoir de la Rencontre avec l’Ibis Vert…

I – Le bateleur

La Quête de l'Ibis Vert - Le bateleur - Page 11 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – Le bateleur – Page 11 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

Ainsi parlait la [Voie • x] intérieure du myste : « Entends-tu le cri du Serpent connaissant l’amas tiers? Entends-tu l’appel du Coq fendant la Nuit dans sa quête sisyphéenne du Jour? Ressens-tu les vibrations des ailes de l’Ibis d’émeraude annonçant les crues du Nil?

Que feras-tu de tes croyances abandonnées sous le limon fertile après le grand retrait des Eaux séparées?

Quand l’incarné sort de terre debout il prend chair dans la boue du passé, ignorance révélées de ses heures de Gloire!

Immole le Jour à la Nuit, la nuit à la solitude, la solitude au vide par la quête de l’Ibis vert. Ainsi résonnera du Néant l’écho de la Vie féconde du [Né • en].

Ainsi le Monde, à travers l’Arcane recouvrera son Unicité. »

III – L’impératrice

La Quête de l'Ibis Vert - L'impératrice - Page 12 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – L’impératrice – Page 12 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

« C’est en pénétrant en Antremonde que s’ouvrent les portes de l’origine du Monde. Trouve le Kaïros et les Portes s’ouvriront car l’Impératrice est le lieu du monde imaginal.

De son reflet d’argent naît sub-rosa le Nadir, direction primordiale à la gravité du sel qui se consume en pâmoison arrimé à son fil d’Or.

L’impératrice à l’accorde Arianne relie les trois mondes par la verticalité du sublime dans l’horizontalité de sa chute.

L’envol est le choix de l’Absence à la dualité du monde dans l’espoir de la présence au Monde. »

IIII – L’empereur

La Quête de l'Ibis Vert - L'empereur - Page 13 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – L’empereur – Page 13 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

« L’Empereur dans le kaïros l’emporte.

Par le feu immanent du Globe Monde, le forgeron élu des sept transmute l’archée procaryote1.

Par le souffle alchimique il défixe les sels agglomérés aux couleurs opaques car la mâle agissante ferveur seule est stérile et c’est dans l’arène que l’immaculée faconde féconde est ignitiée. »

VI – L’amoureux

La Quête de l'Ibis Vert - L'amoureux - Page 14 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – L’amoureux – Page 14 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

« La Voie de l’Un ne se gagne pas en repoussant la matière et le chérubin réunis dans le cercle originel.

Mais l’Amoureux rencontre le trait immolé de l’Arc en jeu. »

VII – Le chariot

La Quête de l'Ibis Vert - Le chariot - Page 15 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – Le chariot – Page 15 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

« L’Aimé rode, il part, chemine vers l’émeraude à son rythme.

Les rideaux rouges voilent le myste errant sous le set étoilé du septemtriones.

Sur le chemin l’infini dais d’azur veille en propitiatoire aux sagesses vernaculaires. Le nautonier guide la nef des fous, la fantasia des merveilleuses aux abysses outremer de vin aigre. »

VIIII – L’ermite

La Quête de l'Ibis Vert - L'ermite - Page 16 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – L’ermite – Page 16 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

La [Voie • x] lui dit : « L’ermite marche dehors au dedans. Au mutos l’inspir, au logos l’expire »

Et la [Voie • x] de traduire : « Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut »

Avant de continuer doctement : « Dans la caverne aux illusions, le vieil anachorète triomphe silencieux »

« Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas pour faire le miracle d’une seule chose » traduisit la [voie • x] avant de poursuivre : « L’émeraude Lumière serre les pans de la cape absidienne »2

Puis : « pour vivre [l’Aur • riant] aller vers [l’Oxyde • dans], dans l’Intérieur est la [Voie • x] de l’ex-terreur. »

X – La roue de fortune

La Quête de l'Ibis Vert - La roue de fortune - Page 17 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – La roue de fortune – Page 17 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

La [Voie • x] des profondeurs continua. Elle venait de si profondément que le myste avait du mal à en saisir les murmures : « Dans l’Aïon des trois Parques…enfants de la tente…Saturne insatiable de sa faim chronophage…du rouet au ciseau se tissent les vingt quatre heures… »

Le myste l’écouta avec intention:

XII – Le pendu

La Quête de l'Ibis Vert - Le pendu 1 - Page 18 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – Le pendu 1 – Page 18 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

La [Voie • x] repris :« Ici le Kaïros s’étend des augures célestes au Grand Retournement. C’est le choix de l’initié. La Voie sèche et intellectuelle ou celle, humide, poétique et mystique. Le séparé est mort sure. »

Et dans un grand retournement, le [pend • dans] devint [pans • dus].

La Quête de l'Ibis Vert - Le pendu 2 - Page 18 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – Le pendu 2 – Page 18 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

XIII

La Quête de l'Ibis Vert - Le Diable - Page 20 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – Le Diable – Page 20 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

C’est éclairé par l’Alpha désigné par l’Ursæ Minor que la faux de Treize sépara le sceau de ses croyances… Au delà des apparences le testament était un [teste • amant].

Et la [Voie • x] dit : « Comme on ne quitte pas la terre sans sacrifier le corps, on ne quitte pas le taire sans le sacrifice du sol. Descendre en fa pour retrouver l’étole d’émeraude et au chant du coq reprendre lutte »

Le myste entendit aussi, venu de la chaire de sa terre une parole étrange à la totalité insaisissable : « …Puis dans l’ombre du Minotaure remonter l’ancre de la ligne des entrailles avides. »

Qui parlait? Ce mantra restera un mystère.

XV – Le diable

La Quête de l'Ibis Vert - Le Diable - Page 20 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – Le Diable – Page 20 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

Alors qu’il espérait sortir de la montagne le Diable lui apparut dans une synchronicité Numineuse dont Il a le secret. Il enroula sa queue autour de son corps vert de terre. Ce corps transmuté révéla la Pierre originelle qui l’animait.

Dans l’ombre ambivalente de l’Acacia méconnu il fit taire les mots en étreignant sa gorge de sa queue de sirène où les cadavres des cyclopes succombants flottaient dans leur errance vers l’éternel Ether.

Il fit Œuvre de Chaire en proposant la Pomme aux dix cordes à son souffle renaissant.

La [Voie • x] alors projeta dans son regard de cyclope la pendaison de Judas donnant son seul né aux enfers en disant:

« Par le Cube passent et trépassent les tentations du vieil homme ! »

XVI – La maison Dieu

La Quête de l’Ibis Vert – La Maison Dieu – Page 21 – ©Stéphane Chauvet & Stefan von Nemau – 2025

C’est ainsi que le souffle écroula la Maison de ses certitudes… La colonne vertébrale de ses croyances antédiluviennes brisée, à sa table à tracé, depuis le cœur de la taire, au milieu du charnier des cyclopes qui lui avaient précédés, le myste Lui fit appel par le point et le trait.

XVIII – La lune

La Quête de l'Ibis Vert - La lune - Page 22 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – La lune – Page 22 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

Sous les reflets mercuriens de la Lune, le Lycanthrope et la Salamandre lui apparurent alors. Ils parlaient en énigmes du plus profond de leur irrationalité.

XVIIII – Le soleil

La Quête de l'Ibis Vert - Le Bateleur - Page 23 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – Le Bateleur – Page 23 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

« Igne Natura Renovatur Integra » avaient été gravé à la pierre d’émeraude par Arianne sur les murs du labyrinthe du père, Dédale. Si la nature se renouvelle dans son intégrité par le feu, cela ne peut se faire que par l’épreuve de l’Aïon consacré. Dans ce Temple au Soleil invaincu, Astérios règne en Maître absolu du Feu, de l’Œuvre et de la Pierre Sacrée dont le sang d’émeraude circule dans ses veines.

XXI – Le Monde

La Quête de l'Ibis Vert - Le Bateleur - Page 24 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – Le Bateleur – Page 24 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025

« IN GIRUMINUS NOCTE ESSE CONSUMIMUR IGNI »… « Nous partons en promenade la nuit et sommes consumés par le Feu » nous averti la Mandorle du Monde. Mais de quel Feu s’agît-il? Celui qui brûle, éclaire, brille, réchauffe, glace, le Feu acide de la chenille au Creux de sa chrysalide en chemin vers son altérité qui la fera changer d’Eve? Si seul le Creux connait alors seul le creusé sait… évidée évidence…

A ces questions le Pentagramme, rayonnant de l’invisible à l’invisible par les sept couleurs de [l’Arc • en • Je], répond:

Le myste par les trois marches de chair, asséché par le cycle de l’Air, entre dans l’Œuvre au blanc entouré par ses pairs.

La porte de l’Œuf sacré ainsi franchie, ce sont d’autres aventures qui l’attendent dans sa quête de l’Ibis vert. Par la mort sure de la murène il tisse la chrysalide de sa mue reine.

C’est dans l’Alpha et l’Oméga du cycle de l’Eau que le « Bat te leurre ».

Souviens-toi Ô myste… Erre !!!

Liberté est renoncement!!!

La Quête de l'Ibis Vert - Le Bateleur - Page 25 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau - 2025
La Quête de l’Ibis Vert – Le Bateleur – Page 25 ©Stéphane Chauvet et Stefan von Nemau – 2025
  1. Archéo-bactéries ↩︎
  2. « Mot étrange » greffon d’abside: Extrémité en demi-cercle d’une église, derrière le chœur (chevet) et d’obsidienne:Roche éruptive de couleur foncée. ↩︎
  3. Le pharmakós (en grec ancien φαρμακός, « celui qu’on immole en expiation des fautes d’un autre ») est la victime expiatoire dans un rite de purification ↩︎

Le maçon errant… de Loge en Loge

De notre confrère expartibus.it – Par Rosamunda Christian

Le phénomène du « Franc-maçon errant » est de plus en plus répandu, les Frères migrant d’une Obédience à l’autre à la recherche d’un idéal qui semble leur échapper. Cette instabilité reflète une crise profonde, où les certitudes qui ont guidé la franc-maçonnerie pendant des siècles vacillent. Les Obédiences, autrefois piliers de stabilité, apparaissent aujourd’hui fragmentées. Les divisions, les conflits internes et les divergences idéologiques ont miné la confiance de leurs membres.

Alchimie laboratoire
Alchimie laboratoire

Le Franc-maçon errant, dans ce contexte, incarne la figure de quelqu’un qui, bien qu’animé par de nobles intentions, se retrouve perdu, incapable de trouver un lieu où les principes maçonniques sont authentiquement vécus. Pour endiguer ce problème, un retour à l’essentiel est nécessaire. Les Ordres initiatiques doivent cesser de rivaliser comme « récipients » et redevenir des laboratoires de pensée, des temples du silence laborieux, des forges de véritable initiation.

Rejoindre une Obédience doit être un choix conscient et profond, non dicté par des déceptions ou des stratégies personnelles.

Il faut travailler sur plusieurs fronts : offrir une formation initiatique sérieuse et constante, créer de véritables espaces de discussion fraternelle, valoriser les mérites au lieu de cultiver des clientèles, décourager le prosélytisme exaspéré et renforcer le sentiment d’appartenance par des rituels soignés et des moments communautaires sincères.

Autrefois, le cas du Franc-Maçon errant était rare et était contenu avec fermeté, mais aussi avec sagesse. L’entrée en Loge était précédée de longues périodes d’observation et de réflexion ; l’initiation n’était pas une ligne d’arrivée, mais le début d’un véritable voyage transformateur. Les Frères aînés, gardiens du savoir, veillaient sur les nouveaux adeptes avec un esprit paternel et sévère, les guidant par l’exemple et non seulement par les paroles.

Une expression latine qui décrit parfaitement ce phénomène est :

Errat homo qui ubique habitat, nulli domus est

c’est-à-dire

L’homme qui vit partout se trompe, aucune maison n’appartient à personne.

Elle exprime parfaitement la confusion de ceux qui passent d’une Obédience à une autre sans prendre racine, dans la recherche continue de quelque chose qui n’est peut-être pas à l’extérieur, mais à l’intérieur d’eux-mêmes.

Astronaute dans l'espace
Astronaute dans l’espace

C’est seulement ainsi que le Franc-Maçon errant pourra cesser d’errer et trouver enfin le chemin vers la Lumière stable d’un Temple qui est le miroir de son propre esprit.

Cette expression latine résume l’essence du franc-maçon errant : celui qui erre sans s’arrêter, sans trouver un « lieu initiatique » stable, finit par perdre le sens même de son voyage. C’est un avertissement : il faut trouver le centre, travailler sur sa propre pierre avant de chercher de nouveaux temples.

L’avenir du Franc-Maçon errant dépendra de la capacité des Ordres à redécouvrir l’essence la plus authentique du chemin initiatique. L’errance, qui apparaît aujourd’hui comme une fuite continue d’un Temple à l’autre, naît souvent d’un vide intérieur, d’une déception face à des formes désormais vidées de leur contenu ou de la recherche de quelque chose que l’on ne sait plus nommer.

Pour enrayer ce phénomène, il est nécessaire de reconstruire un sentiment profond d’appartenance, de proposer de véritables parcours de formation, centrés sur l’individu, sur l’éthique, sur la réflexion symbolique. Ce n’est qu’avec des rituels soignés, des rencontres authentiques et un véritable esprit fraternel que nous pouvons redonner au Maçon le désir de rester, de construire, d’appartenir.

Autrefois, ce risque était limité par une entrée sélective, une longue période d’apprentissage et un sens aigu du sacré. Aujourd’hui, nous devons retrouver cet esprit : ralentir, écouter, travailler. Car le Franc-Maçon qui erre n’est pas perdu s’il trouve en chemin une Lumière qui n’éblouit pas, mais réchauffe.

Errat sed quaerit. Il se trompe, mais il cherche.

Et c’est en cherchant consciemment que l’on peut retrouver le chemin.

Ce n’est pas un hasard si la célèbre expression « le pouvoir use ceux qui ne l’ont pas » trouve un terrain fertile jusque dans les colonnes du Temple. Souvent, plutôt qu’une course à l’ascension, on assiste à une course au titre, à la position, à l’influence. Mais lorsque le pouvoir devient une fin, plutôt qu’un moyen de servir, la franc-maçonnerie perd son sens spirituel et se vide de son sens.

Peut-être est-il temps de nous demander : sommes-nous encore là pour construire le Temple… ou simplement pour le dominer ?

Le passage du premier au deuxième degré en Franc-maçonnerie

Accrochez-vous, car on va évoquer un moment « charnière » avec un clin d’œil et beaucoup de second degré (sans mauvais jeu de mots… ou presque !). Alors, qu’est-ce qui se passe quand on décide que notre cher Apprenti va monter en grade ?

Eh bien, les textes nous le disent : ce n’est PAS juste une petite étape de plus. Non, non, non ! C’est un « saut qualitatif » ! Imaginez Super Mario, mais au lieu de sauter sur un Goomba, il fait un changement de logique. Fini le mode silencieux où il observait les poussières s’accumuler. Notre initié sort de sa réserve, se met à construire activement son savoir. En gros, il a enfin le droit de parler un peu plus fort et commence à avoir un « impact social de sa démarche » (attention, il ne va pas encore diriger le monde, hein, juste peut-être donner son avis sur la couleur des rideaux du Temple).

Adieu l’observation un peu « passive de l’apprenti » ! Le Compagnon, lui, est un activiste ! Il se « met en route activement ». Et comment se met-il en route ? Avec « cinq voyages » ! Mais attention, ce ne sont plus des « épreuves » où on transpire et on tremble. Ce sont des « étapes de la connaissance », des « étapes actives d’exploration ». Un peu comme une chasse au trésor mystique, mais sans la carte (ou alors la carte, c’est l’univers lui-même, un « cryptogramme » géant!).
Ah, les voyages du Compagnon  Imaginez l’apprenti, frais comme un gardon, qui se lance dans cinq voyages pour passer au grade supérieur. Ce ne sont pas vraiment des « épreuves » au sens classique, plutôt une sorte de grand trip initiatique. L’idée, c’est d’explorer le monde de la connaissance, en passant par les Sens, les Arts et les Sciences, un peu comme un programme de développement personnel intensif version XVIIe siècle (ou plus tard, vu les variations !).
À chaque étape de ce périple un peu déjanté, on lui montre des « cartouches ». Pensez-y comme des pancartes sur le bord de la route de la connaissance. Sur ces pancartes, des listes : les arts libéraux, les ordres d’architecture, les sens, ou même la liste des grands initiés. Le problème ? Ces listes sont comme la météo en Écosse : elles changent tout le temps ! Apparemment, elles reflètent plus « l’esprit et les modes d’une époque » que ce qu’un ancêtre barbu aurait vraiment laissé. Donc, aujourd’hui c’est peut-être « Menuiserie, Doric, Ouïe, Einstein », et demain « Origami, Corinthien, Goût, Zinedine Zidane », qui sait ?
Et ce n’est pas tout ! Pendant qu’il déambule, notre apprenti (futur compagnon) est chargé d’outils. On lui en file généralement deux à la fois. Et là encore, mystère ! La séquence et le type d’outils sont incroyablement variables. C’est comme un tirage au sort à chaque voyage : « Félicitations, vous avez gagné… une truelle et un niveau ! Ah non, cette fois c’est un compas et un maillet. Rendez-vous au prochain voyage pour voir ce que la commission des rituels aura décidé ! ».

Le clou du spectacle, ce sont les directions. Parfois, on part vers le Nord et on revient par le Midi. D’autres fois, c’est l’inverse. Pourquoi ? Ne posez pas trop de questions, c’est symbolique ! Ça doit avoir un rapport avec l’orientation morale ou quelque chose comme ça.
En gros, ces cinq voyages sont censés lui apprendre le « métier » de constructeur (que ce soit pour de vrai ou dans sa tête), lui donner une boussole morale, et l’inviter « à explorer tous les domaines de la connaissance ». C’est un pack indivisible, « un tout dont on ne peut rien retrancher ». C’est le grand final du cycle de l’apprenti, après avoir perfectionné sa méthode et acquis des connaissances. Un vrai parcours du combattant… de la sagesse !

Et on vous apprend à marcher !Vous faites un petit pas de côté. Pas n’importe lequel, hein ? Un pas vers le sud, parce qu’apparemment, c’est là qu’il y a plus de lumière. C’est une sorte de petite incursion, un peu comme si vous vous lanciez dans une confrontation de votre super pensée avec celle des autres. Mais bon, c’est cool, parce que ça vous donne l’occasion, avec la parole, de papoter avec un copain pour vraiment bétonner votre manière personnelle de voir les choses. La dualité du dialogue est « obvie » (apparemment, c’est le mot branché pour « évidente »), mais quand vous êtes face à l’étoile et que vous touchez virtuellement (attention, virtuellement !) sa pointe basse droite, qui correspond à Vénus, la compréhension… eh bien, elle passe toujours par les sens. Faut croire que même les étoiles ont un côté terre-à-terre !

En gardant votre équilibre précaire sur le pied gauche, votre écart n’est pas non plus un saut de l’ange ; il ne dépasse pas la taille de votre corps. Et c’est là que ça devient intéressant : c’est du pied droit que Vénus est touchée. Oui, oui, du pied droit ! C’est une sorte de rencontre bizarre, un face-à-face de pied droit contre pied gauche avec… tadaaa ! l’homme primordial ! Il est là, inscrit dans l’étoile flamboyante, vous faisant face comme une image en miroir. Un peu comme si vous jouiez aux pieds avec votre reflet cosmique.

Bon, tout ça, c’est de la métaphore pour dire que vous explorez des trucs, un peu comme lors du quatrième voyage si vous suivez (celui des « Grands initiés », apparemment). Mais après avoir fait le zouave à toucher des étoiles avec les pieds, il devient impératif de se replier sur soi-même. Plus vous êtes allés loin dans votre « écart », plus cette envie de rester sous la couette de votre âme est forte. Heureusement, l’étoile vous ramène. Avec le 5ème pas (comptez bien !), vous revenez pile dans l’axe de son sommet, face à Jupiter (le siège de l’esprit, rien que ça !), et surtout, face au Delta lumineux. Ah, le Delta lumineux ! C’est le but ultime de toute cette mascarade initiatique.

Et pour couronner le tout, n’oubliez pas la géométrie sacrée ! Quand vous passez de la perpendiculaire au niveau, il faut absolument, toujours, éternellement, pouvoir retrouver l’équerre. C’est la règle, ne demandez pas pourquoi, mais essayer de comprendre. Enfin, pour finir votre voyage, sachez que du nord au midi, ça vous conduit… non pas au sud, mais à l’orient !

Et puis, roulement de tambour, vers 1737, arrive une « ajout important » : l’« étoile flamboyante » ! Ah, ce « pentagramme avec la lettre G au milieu » ! C’est le G qui a tout, mes amis ! C’est un G « très riche ». Ça ouvre de « nouvelles voies ». Le G, c’est pour la Géométrie (parce qu’il faut bien calculer son coup), c’est pour la Gnose (parce qu’on cherche la connaissance secrète), c’est pour la Génération (parce qu’on se réinvente), et c’est même pour l’Hermétisme et l’« art de la parole » (ouf, après tout ce silence, on a le droit de placer un mot !).

Ce mélange est « assez fascinant » ! On nous dit que ça articule « deux types de pensée » : l’« analytique » et l’« analogique ». La pensée analytique, c’est celle qui lit une carte « étape par étape, de manière logique, séquentielle ». C’est le GPS qui vous dit de tourner à droite dans 100 mètres. La pensée analogique, elle, cherche les « liens, les correspondances », voit le « paysage global », les « échos entre différents niveaux de sens ». C’est un peu comme si elle planait au-dessus de la carte et disait : « Mais oui ! Tout est connecté ! Le boulevard de la Sagesse mène à l’avenue de la Vérité ! ». C’est une pensée « plus verticale », j’imagine pour éviter de se prendre les pieds dans le tapis des préjugés. La Franc-maçonnerie, elle, « valorise cette capacité à jongler avec les deux ». Genre : « Soyez logique, mais voyez grand ! ».

Et ce grade de Compagnon est « plus opératif » ! Attention au piège ! Ce n’est pas « plus pratique, plus manuel » comme monter une commode suédoise. « Opératif », ici, ça renvoie à la « réalisation initiatique ». C’est le « travail sur soi qui devient central ». L’initié devient « son propre matériau à façonner ». Oui, vous avez bien lu. Vous êtes le chantier ! C’est « moins apprendre des choses que se transformer ». Comme le disait Oscar Wilde (un franc-maçon, apparemment) : le travail intellectuel bien fait, c’est presque aussi bien que le travail manuel. On parle même d’« œuvres », comme en alchimie ! Vous êtes votre propre Grand Œuvre !

Ce travail, cette « œuvre », ça implique de faire quelque chose de radical : « abandonner le vieil homme » ! Concrètement ? C’est jeter l’ego, les conditionnements, les préjugés… tout ce qui « nous enferme un peu ». Faut « se délester » ! C’est le grand vide-grenier de l’âme ! Faire de la « place pour penser plus librement », « remonter aux principes par soi-même ». C’est le « solve et coagula » des alchimistes : on dissout l’ancien, on le fige (symboliquement, hein, pas de panique), pour « reconstruire quelque chose de neuf, de plus authentique ». La « mort symbolique qu’on vit dans les rituels, vise justement cela ». Faire taire sa « volonté propre pour pouvoir renaître symboliquement » comme un bébé sage, prêt à apprendre.

Tout ce chemin est pavé de symboles « très présents » : les colonnes J et B (toujours là pour vous rappeler la dualité), l’équerre (pour être droit dans ses bottes), la pierre cubique à tailler (parce qu’on est encore un peu brut de décoffrage). On a l’impression d’entrer dans un « langage codé » ! C’est exactement ça ! Les symboles sont les « clés de ce langage ». Ce sont des « outils pour penser », pour comprendre le monde et où on fiche les pieds.

Mais la bonne nouvelle, c’est qu’on n’est « pas seul » à essayer de déchiffrer tout ça ! La « fraternité est vue comme essentielle » ! C’est la « pierre de fondation sur laquelle tout ce travail intérieur repose » (ouf !). Elle « soutient » ce cheminement.

Donc, pour résumer en riant un peu : le passage au grade de Compagnon, ce n’est « moins une accumulation de savoir qu’une vraie métamorphose intérieure ». On n’est pas à « Qui veut gagner des millions version ésotérique », non ! C’est un « cheminement vers une compréhension plus profonde de soi-même » (et peut-être de l’univers, si on a de la chance). Le but ? Atteindre une « forme de clarté », découvrir des « lumières insoupçonnées au cœur de l’énigme de l’existence » (genre : « Ah, c’était donc ça le sens de la vie ? Fallait le dire plus tôt ! »), .

Et la méthode dans tout ça ? Le rituel, les symboles qu’on répète ? C’est ça l’école ! C’est le « processus lui-même qui enseigne » ! Donc, même si on a l’air un peu bizarre à faire des trucs codifiés, apparemment, ça travaille en profondeur. Magique, non ?

Principe symbolique du sacrifice en Franc-maçonnerie à la lumière de la pensée de René Girard

La Franc-Maçonnerie, avec ses rituels riches en symboles et ses enseignements initiatiques, offre un terrain fertile pour explorer des concepts universels tels que le sacrifice. Ce principe, profondément ancré dans les traditions spirituelles et philosophiques, prend une dimension particulière lorsqu’on l’examine à travers le prisme de la pensée de René Girard, anthropologue et philosophe français dont les travaux sur le désir mimétique, la violence et le mécanisme sacrificiel ont révolutionné la compréhension des dynamiques humaines.

Nous vous proposons une analyse longue et détaillée du symbole du sacrifice en Franc-maçonnerie, en s’inspirant des théories de Girard pour éclairer ses implications morales, psychologiques et spirituelles. Nous explorerons les origines du sacrifice dans les rituels maçonniques, son lien avec le mythe d’Hiram, les parallèles avec les idées girardiennes, et enfin son rôle dans la quête de transformation intérieure du maçon.

Les Fondements du Sacrifice dans la Franc-Maçonnerie

Meurtre d’Hiram

Le sacrifice, en tant que symbole, occupe une place centrale dans l’imaginaire maçonnique, notamment à travers le mythe d’Hiram, architecte du Temple de Salomon, dont l’assassinat par trois compagnons jaloux constitue un récit clé du troisième degré, celui de Maître. Ce récit, bien qu’allégorique, illustre un acte sacrificiel où la mort d’un individu – Hiram – devient le catalyseur d’une renaissance spirituelle pour la communauté. Le sacrifice n’est pas ici une fin en soi, mais un moyen de transcender la violence et de restaurer l’harmonie perdue.

Dans les loges, le sacrifice se manifeste également à travers les symboles matériels et les rituels. L’équerre et le compas, par exemple, évoquent une géométrie sacrée où chaque angle ou intersection peut être interprété comme un abandon de l’ego au profit d’une vérité supérieure. Le tablier, porté par les maçons, symbolise une offrande de soi, une purification par le travail sur la « pierre brute » – métaphore de l’âme imparfaite à polir. Ces éléments suggèrent que le sacrifice maçonnique est avant tout intérieur : un renoncement aux passions profanes pour accéder à une lumière spirituelle.

René Girard et le Mécanisme Sacrificiel

René Girard

Pour comprendre pleinement cette dimension, il est essentiel de se tourner vers la pensée de René Girard, qui a développé une théorie révolutionnaire sur le sacrifice comme réponse à la violence mimétique. Selon Girard, les sociétés humaines sont marquées par un désir mimétique : les individus imitent les désirs des autres, ce qui engendre rivalités et conflits. Cette tension atteint un point de crise où la communauté risque de s’autodétruire, à moins qu’un mécanisme sacrificiel ne vienne canaliser cette violence. Le bouc émissaire – une victime désignée – est alors sacrifié, unifiant temporairement la communauté par son expulsion ou sa mort.

La Violence et le Sacré

Dans son ouvrage La Violence et le Sacré (1972), Girard soutient que les mythes et les rituels religieux, y compris ceux des sociétés anciennes, reflètent ce mécanisme. Le sacrifice n’est pas une simple offrande à une divinité, mais une stratégie sociale pour expurger la violence interne. Avec Des Choses Cachées Depuis la Fondation du Monde (1978), il approfondit cette idée en analysant comment les religions monothéistes, notamment le christianisme, ont renversé ce schéma en révélant l’innocence de la victime – Jésus-Christ – et en dénonçant le lynchage collectif.

Assassinat d’Hiram

Appliquée à la Franc-Maçonnerie, cette perspective éclaire le mythe d’Hiram. Les trois compagnons, mus par un désir mimétique de gloire et de savoir, trahissent et tuent Hiram, qui incarne l’idéal de vertu et de compétence. Ce meurtre sacrificiel, bien que tragique, devient le fondement d’une renaissance symbolique : le Temple, inachevé à sa mort, est complété spirituellement par la transmission de son héritage. Ainsi, le sacrifice d’Hiram peut être lu comme une critique implicite du mécanisme girardien : loin de glorifier la violence, la maçonnerie en fait un enseignement sur la nécessité de surmonter les rivalités pour atteindre l’unité fraternelle.

Le Sacrifice comme Transformation Intérieure

René Girard (La Libre) ©DR
René Girard (La Libre) ©DR

Dans la pensée girardienne, le sacrifice évolue avec le temps. Dans les sociétés primitives, il est littéral – un animal ou un humain est offert. Dans les traditions monothéistes, il devient symbolique, culminant avec le sacrifice du Christ, qui substitue l’amour à la vengeance. En Franc-Maçonnerie, ce processus atteint une dimension introspective. Le sacrifice n’implique plus une victime extérieure, mais un renoncement personnel : aux illusions, aux désirs égoïstes, aux passions qui entravent la progression initiatique.

Cette idée résonne avec les travaux du maçon sur sa pierre brute. Chaque coup de maillet, chaque effort pour polir ses imperfections, est un acte sacrificiel où l’ego cède la place à une conscience élargie. Girard, dans sa réflexion sur la rédemption, souligne que la reconnaissance de la victime innocente ouvre la voie à la réconciliation. De même, en loge, le maçon est appelé à reconnaître ses propres « victimes » – ses préjugés, ses colères – et à les sacrifier sur l’autel de la fraternité.

Cabinet de réflexion maçonnique
Cabinet de réflexion maçonnique

Le rituel de la « chambre de réflexion », pratiqué dans certains rites, illustre cette idée. Isolés avec des symboles tels que le crâne ou l’ampoule d’eau, les candidats sont invités à méditer sur leur mortalité et leur imperfection. Ce moment de solitude est un sacrifice symbolique : abandonner les certitudes profanes pour naître à une nouvelle compréhension. Girard y verrait une rupture avec le cycle de la violence mimétique, où l’individu, loin de se comparer ou de rivaliser, se tourne vers une introspection rédemptrice.

Le Mythe d’Hiram et la Critique de la Violence

Le récit d’Hiram offre une occasion unique d’appliquer les théories de Girard. Les trois compagnons, incapables de percer le secret de la parole perdue, agissent par jalousie, un désir mimétique classique. Leur acte violent vise à éliminer la figure d’Hiram, perçu comme un obstacle à leur ambition. Ce meurtre, cependant, ne résout rien : il plonge la loge dans le chaos jusqu’à ce que l’ordre soit restauré par la découverte et l’enterrement digne de la victime.

Girard argue que les sociétés anciennes masquaient la culpabilité collective derrière des mythes où la victime était dépeinte comme coupable. En contraste, la maçonnerie réhabilite Hiram comme une figure sacrée, un martyr dont la mort enseigne la valeur de l’intégrité. Cette relecture s’aligne avec la vision girardienne de l’évangile, où la révélation de l’innocence de la victime brise le cycle sacrificiel. En ce sens, le mythe d’Hiram peut être vu comme une parabole maçonnique : un appel à dépasser les rivalités pour construire un temple spirituel basé sur la justice et la solidarité.

Le Sacrifice et la Fraternité Maçonnique

Je vois Satan tomber comme l’éclair (René Girard)

La fraternité, pilier de la Franc-maçonnerie, trouve sa force dans ce principe sacrificiel. Girard note que la paix sociale, après un sacrifice, repose sur une unité temporaire obtenue au prix d’une exclusion. En loge, cependant, le sacrifice vise une inclusion universelle. Le maçon est invité à sacrifier son individualisme – ses désirs personnels, ses rancunes – pour le bien collectif. Ce renoncement n’est pas une soumission, mais une transmutation : l’ego se dissout dans une conscience fraternelle, reflétant l’idéal d’une humanité unie.

Cette dynamique se manifeste dans les rituels collectifs, comme la chaîne d’union, où chaque maçon offre symboliquement une partie de lui-même pour renforcer le lien fraternel. Girard, dans Je vois Satan tomber comme l’éclair (1999), explore comment la révélation chrétienne remplace le sacrifice par l’amour du prochain. La maçonnerie, avec son héritage déiste, adopte une approche similaire : le sacrifice devient un acte d’amour, un don de soi qui élève l’ensemble de la communauté.

Implications Spirituelles et Morales

Sur le plan spirituel, le sacrifice maçonnique, lu à travers Girard, invite à une métamorphose profonde. Il ne s’agit pas de se punir ou de se priver, mais de purifier l’âme en abandonnant ce qui la sépare de la lumière divine. Cette lumière, souvent associée au Grand Architecte de l’Univers, n’est pas une récompense extérieure, mais une réalisation intérieure, fruit d’un travail sacrificiel constant.

Moralement, ce principe engage le maçon à une éthique active. Reconnaître la violence mimétique dans ses interactions – qu’il s’agisse de jalousie envers un Frère ou de compétition pour un grade – est le premier pas. Le sacrifice consiste alors à désamorcer ces tensions par le dialogue, la compréhension et, ultimement, l’amour. Girard, dans ses derniers écrits, insiste sur la nécessité d’une conversion personnelle pour échapper au cycle de la vengeance. La maçonnerie, avec son emphasis sur l’introspection, offre un cadre pour cette conversion.

Limites et Enjeux Contemporains

Le viol de Lucrèce…

Cependant, cette interprétation n’est pas sans défis. Dans un monde moderne marqué par l’individualisme et la sécularisation, le sacrifice peut être mal compris, perçu comme une perte plutôt qu’un gain. Certains maçons pourraient résister à l’idée de renoncer à leurs désirs, préférant une approche utilitariste de la loge. De plus, la diversité des rites – Écossais, Égyptien, Français – peut modifier la perception du sacrifice, rendant son application inégale.

Girard lui-même reconnaîtrait ces tensions. Il note que les sociétés postchrétiennes, ayant rejeté les mythes sacrificiels traditionnels, peinent à trouver de nouveaux mécanismes de cohésion. La Franc-maçonnerie, en tant qu’institution laïque mais spirituelle, doit réinventer le sacrifice comme un acte volontaire et conscient, loin des violences archaïques. Cela exige une éducation continue des membres, un retour aux symboles fondamentaux et une vigilance contre les dérives mimétiques au sein des obédiences.

Une Synthèse Initiatique

Le principe symbolique du sacrifice en Franc-maçonnerie, éclairé par la pensée de René Girard, transcende les rituels pour devenir une métaphore de la transformation humaine. Du mythe d’Hiram à la polisse de la pierre brute, du renoncement personnel à la fraternité universelle, il incarne un chemin vers la paix intérieure et collective. Girard nous apprend que le sacrifice, lorsqu’il est compris comme un acte d’amour et non de violence, brise les chaînes du désir mimétique pour ouvrir la voie à une harmonie nouvelle.

Pour le maçon d’aujourd’hui, ce principe est une invitation à méditer sur sa propre capacité à sacrifier – non pas sa vie, mais ses illusions, ses rancunes, ses ambitions égoïstes – au service d’une lumière plus grande. À l’aube du XXIe siècle, alors que les tensions sociales s’intensifient, la maçonnerie peut, avec Girard comme guide intellectuel, réaffirmer son rôle de sentinelle de la paix, un temple vivant bâti sur le sacrifice volontaire et l’amour fraternel.

Ce voyage initiatique, riche de symboles et de significations, reste une quête intemporelle, où chaque coup de maillet résonne comme un acte de renaissance.

La tyrannie de la minorité en Franc-maçonnerie

Dans un monde où les dynamiques sociales évoluent rapidement, le phénomène de la « tyrannie de la minorité » émerge comme une force influente, capable de façonner les discours et les décisions, même au sein d’institutions aussi réfléchies que la Franc-maçonnerie. Ce concept, où une petite faction impose sa volonté sur la majorité, trouve ses racines dans plusieurs mécanismes psychologiques et sociaux : l’influence sociale, la pression sociale et la peur du débat, l’illusion du consensus, ainsi que l’effet boule de neige amplifié par les médias de niche.

Appliqué aux loges et obédiences maçonniques, ce phénomène révèle des défis subtils mais réels, menaçant l’harmonie fraternelle et l’esprit initiatique. Cet article explore ces causes, leurs manifestations dans la Franc-Maçonnerie, et propose une réflexion pour y remédier.

Les Causes de la Tyrannie de la Minorité

L’influence sociale joue un rôle clé : les individus, même dans un cadre aussi symbolique que la loge, tendent à se conformer aux opinions dominantes, surtout si elles sont exprimées avec assurance par une minorité vocale. Cette dynamique s’amplifie avec la pression sociale et la peur du débat, où les Frères et Sœurs hésitent à contredire une voix forte, de crainte de briser l’unité ou d’être perçus comme dissidents. L’illusion du consensus s’installe alors, donnant l’impression que la majorité soutient tacitement cette minorité, alors qu’en réalité, beaucoup se taisent par commodité ou intimidation.

L’effet boule de neige, alimenté par les médias de niche – forums maçonniques en ligne, publications spécialisées ou groupes WhatsApp –, renforce ce phénomène. Une idée marginale, relayée par quelques membres influents, gagne en visibilité et en crédibilité, créant une spirale où l’intolérance de cette minorité devient la norme imposée. Cette tyrannie, loin d’être une dictature explicite, s’exerce par une domination douce mais implacable des esprits.

Application à la Franc-Maçonnerie : Loges et Obédiences

Dans le contexte maçonnique, ce phénomène peut se manifester à différents niveaux. Dans les loges, une minorité active – souvent des Maîtres expérimentés ou des officiers charismatiques – peut imposer ses vues sur les travaux, les thèmes des planches ou les décisions administratives. Par exemple, un petit groupe d’initiés pourrait privilégier des sujets ésotériques complexes, décourageant les Apprentis et Compagnons moins familiers, qui se retirent par peur de ne pas suivre. Cette pression sociale étouffe le débat, transformant la loge en un espace où seule la voix de la minorité résonne, au détriment de la diversité d’opinions.

À l’échelle des obédiences, la tyrannie de la minorité peut se nicher dans les instances dirigeantes. Une faction minoritaire, disposant d’un accès privilégié aux canaux de communication (bulletins internes, réseaux sociaux maçonniques), peut orienter les politiques générales – choix des rites, relations inter-obédientielles ou réformes statutaires – en créant l’illusion d’un consensus. Les médias de niche, comme les blogs ou groupes privés, amplifient cet effet, faisant d’une opinion marginale une tendance incontournable. Par exemple, une obédience pourrait adopter une ligne idéologique radicale sous la pression d’une poignée de membres influents, marginalisant les loges modérées qui n’osent pas s’opposer.

Un cas concret pourrait être observé dans les tensions entre obédiences sur des questions de mixité ou de laïcité. Une minorité intolérante au dialogue inter-obédientiel peut imposer une rupture, relayée par des publications spécialisées, tandis que la majorité, par peur du conflit, accepte tacitement cette fracture. Cette dynamique fragilise l’unité maçonnique, un principe pourtant fondamental.

Conséquences et Défis pour l’Harmonie Fraternelle

L’intolérance issue de cette tyrannie de la minorité menace les valeurs maçonniques de tolérance, de recherche de la vérité et de fraternité. Les Apprentis et Compagnons, souvent les premières victimes, peuvent se sentir exclus, leur progression initiatique entravée par un climat où la critique est perçue comme une trahison. Les loges risquent de devenir des arènes de pouvoir plutôt que des espaces de réflexion, tandis que les obédiences perdent leur rôle de guide spirituel pour se muer en champs de bataille idéologiques.

À long terme, cette dynamique pourrait éloigner les nouvelles générations de maçons, attirées par un idéal d’ouverture, mais rebutées par des luttes intestines. La Franc-maçonnerie, en tant que miroir de la société, reflète ici un risque universel : lorsque la minorité impose sa voix, elle étouffe la diversité qui fait la richesse de l’humanité.

Vers une Réponse Maçonnique

Face à ce défi, les loges et obédiences peuvent s’inspirer de leurs propres outils symboliques pour restaurer l’équilibre. La chaîne d’union, par exemple, symbolise une solidarité où chaque voix compte, invitant à encourager le débat constructif. Les Vénérables Maîtres pourraient instaurer des espaces dédiés à l’expression libre, protégeant les moins audacieux de la pression sociale. Les obédiences, quant à elles, pourraient promouvoir une transparence accrue dans leurs décisions, limitant l’influence des médias de niche par une communication officielle équilibrée.

Enfin, un retour aux principes initiatiques – l’introspection, le travail sur soi – pourrait désamorcer l’intolérance. Comme le suggère le rituel, la lumière jaillit de l’harmonie des différences, non de l’uniformité imposée. En ce 15 juin 2025, alors que le soleil décline sur Paris, il est temps pour la Franc-Maçonnerie de reprendre les rênes de son destin, en brisant la tyrannie de la minorité pour faire renaître la véritable fraternité.

Penser l’autre au-delà du miroir : pour une éthique du pardon entre Individuation et Altérité

Le pardon est souvent perçu comme un chemin intérieur, une guérison de soi par soi. Mais je m’interroge :
Qu’en est-il de l’autre dans ce processus ?
Peut-on vraiment pardonner sans le reconnaître dans sa pleine altérité, au-delà du miroir qu’il nous tend ?
N’aurions-nous pas oublié quelque chose d’essentiel dans cette démonstration : le risque de rester en soi, pour soi, enfermés dans un repli égotique ?

Dans ce texte, je questionne une dérive des discours spirituels actuels – celle qui réduit l’autre à un simple reflet. Je plaide pour un pardon relationnel, éthique, incarné. Un pardon qui ne sauve pas seulement le soi, mais ouvre un espace de rencontre avec l’autre, dans sa complexité, sa faute, son mystère.

Pardon, altérité et individuation

Psychanalyse et Franc-maçonnerie

Il m’a été dit récemment qu’on n’éprouve plus le besoin de pardonner l’autre lorsqu’on s’est pardonné à soi-même. Dans cette perspective, le pardon se voit alors réduit à une affaire intérieure, intime où la dynamique relationnelle disparaît au profit d’un recentrage total sur le Moi. Le pardon devient une mécanique, un geste fermé sur soi, coupé du monde.

N’est-ce pas là une dérive vers une forme de narcissisme spirituel ?

Cette perspective, aussi séduisante et pragmatique puisse-t-elle paraître, pose problème : elle tend à réduire l’autre à un simple miroir de Soi, niant ainsi son altérité propre.

L’essence de l’autre est dissoute, diluée dans une vision autocentrée où il n’est plus qu’un reflet de notre propre essence. Ce raccourci évacue une vérité essentielle : l’autre n’est pas un simple reflet de nous-même, mais une présence irréductible, un sujet à part entière.

On franchit ici une ligne de crête fragile, entre individuation et reconnaissance de l’altérité, où le Moi devient toute-puissance et la quête du Soi semble s’être arrêtée aux portes de l’altérité.

Où est passé l’autre, en tant qu’autre ?

Individuation et altérité : une ligne de crête fragile

Carl Gustave Jung

En confondant individuation (ce processus d’autonomisation et d’affirmation de soi) et développement spirituel par le miroir de l’autre, nous glissons subtilement vers un solipsisme masqué.  L’erreur de perspective survient lorsqu’on ne voit l’autre que comme une surface projective – un outil, un tremplin, un écho – au lieu de le rencontrer dans sa radicale différence.

Dès lors, le monde relationnel devient alors pauvre : privé de sa richesse transactionnelle, de ses frottements, de ses silences, de ses confrontations fécondes.

Peut-on vraiment pardonner sans l’autre, sans cette reconnaissance de ce qui en lui nous échappe ?

Pardonner ne peut se réduire à une opération intérieure. Il engage le dehors, le dialogue, la reconnaissance.

Aussi, ne pourrions-nous pas penser que cette démonstration est une forme de repli sur soi ?

Un repli qui confond la découverte de son individualité dans le reflet de l’autre et une individuation véritable, qui, elle, reconnaît le monde comme lieu d’échange, de réciprocité, de transcendance possible ?

Pardonner à soi-même : une nécessité, mais non une finalité

Se pardonner, oui.

Mais se pardonner de manière inconditionnelle, sans ancrage éthique, n’est-ce pas courir le risque de justifier tout acte, jusqu’aux plus graves ?

Un tel pardon pourrait devenir un outil de déresponsabilisation, de dédouanement de Soi et par extension  de la société.

Se pardonner, certes, mais jusqu’à quel point ?
Car la quête de soi ne saurait faire l’économie d’un cadre moral et éthique.

De plus, se pardonner à soi de manière inconditionnelle, n’est-ce pas aussi la porte ouverte à la fin de toute exigence envers soi-même ? La fin d’une quête de perfectionnement de notre être, quête qui, par essence, est infinie ?

Et ce pardon n’est-il pas parfois confondu avec l’acceptation pure et simple, un renoncement à toute forme de dépassement de soi ?

Où se situe la juste limite entre soi et l’autre ?

L’autre : miroir ou mystère ?

invitaion à entrer, miroir, passage, chemins

La proposition relayée que nous ne voyons chez l’autre que ce qui fait écho en nous est séduisante, mais elle reste enfermante lorsqu’elle est poussée à l’extrême.  L’autre n’est pas seulement le révélateur de nos ombres et de nos lumières ; il est un monde en soi. À trop vouloir faire de l’autre un miroir, on oublie sa radicale altérité. On nie sa singularité, on le ramène à soi.

L’autre n’est-il pas bien plus qu’un miroir ? N’est-il pas un mystère, une énigme, un monde entier qui nous échappe — même dans la proximité la plus grande ?

Un pardon relationnel : condition de l’éthique et de la transformation

Or, le véritable pardon surgit peut-être lorsque nous accueillons l’autre non pour ce qu’il nous renvoie, mais pour ce qu’il est, dans sa différence irréductible. C’est à ce point précis que s’ancre une individuation véritable – non pas dans le repli égotique, mais dans la rencontre. Non pas dans la fusion, mais dans la reconnaissance de la séparation.

Pardonner l’autre, ce n’est pas se sauver soi-même.
C’est ouvrir un espace.
C’est choisir, en conscience, de ne pas enfermer l’autre dans l’acte qu’il a commis.
C’est peut-être cela, le pardon : un acte de reconnaissance radicale de l’humanité de l’autre, au-delà de la faute.

Car le pardon, alors, devient une reconnaissance pleine : celle d’un autre qui a existé en dehors de nous, qui nous a peut-être blessés, et que nous choisissons, en toute conscience, de ne pas enfermer dans cette blessure.

Alors peut-on vraiment pardonner l’autre sans tomber dans une vision autocentrée du pardon ?

Oui – à condition de sortir du paradigme du miroir pour entrer dans celui de la rencontre éthique.Pardonner, ce n’est pas fermer une blessure pour retrouver la paix intérieure.

C’est oser rester en présence de cette blessure, sans effacer celui qui l’a causée.

Pardonner ne veut pas dire se sauver soi-même. Cela peut aussi être un acte de reconnaissance radicale de l’autre, dans sa vérité, sa complexité, ses fautes — et peut-être sa propre quête de pardon.

Si pardonner l’autre ne peut être confondu avec se pardonner à soi, nous sommes alors devant une exigence nouvelle : celle d’un vrai pardon. Un processus lent, conscient, qui exige du temps, du silence, de l’écoute. Et une capacité à accueillir véritablement l’autre, dans toute son humanité – blessante et blessée.

C’est ce pardon qui convoque l’Âme. Non celui de Soi, qui ne fait que l’effleurer.

Elodie Herbert

Le Dessin de Jissey : « Le prix des capitation est-il trop élevé ? »

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Ah, mes chers Frères et Sœurs, si Jacques Carletto, alias Jissey, maître es-blagues et roi de l’ironie pince-sans-rire, posait son regard malicieux sur les capitations maçonniques, il nous sortirait un truc du genre : « Alors, vous avez payé votre cotisation ? Parce que là, on dirait que le Grand Architecte a sous-traité la trésorerie à un percepteur romain ! Entre le maillet et l’équerre, on devrait ajouter une calculette, histoire de jongler avec les zéros sur la facture ! »

Franchement, ces cotisations, c’est un peu comme une planche mal taillée : on s’attend à polir notre pierre brute, et on se retrouve à polir le compte en banque de l’obédience ! Jissey nous dirait : « À ce prix-là, je m’attends à ce que le Vénérable Maître me serve du caviar à la chaîne d’union, ou au moins un tablier en or massif ! » Entre les frais d’entrée, les cotisations annuelles et les extras pour les dîners rituels, on finit par se demander si la lumière qu’on cherche, c’est pas celle du néon de l’huissier !

Alors, mes amis, avant de signer un nouveau chèque, demandez-vous : est-ce que Hiram aurait payé ça rubis sur l’ongle ? Jissey, lui, conclurait avec un clin d’œil : « Moi, je propose une loge low-cost : cotisation en nature, genre un bon mot et une poignée de main bien placée ! » Allez, passons l’escarcelle… mais sans se ruiner, hein !

Le Suprême Conseil de France remet son Prix de Thèse : « De la lumière des archives à celle du Temple »

Il est des moments où la rigueur de la recherche universitaire rejoint la ferveur silencieuse des ateliers. Des instants rares, presque solsticiaux, où les savoirs profanes dialoguent avec les mystères du Temple. Le 11 juin 2025, en l’Hôtel de la Grande Loge de France (GLDF), au 8 rue Louis Puteaux, à Paris dans le 17e arrondissement, le Suprême Conseil de France (SCDF) et plusieurs organisations écossaises amies ont remis leur Prix de Thèse annuel, célébrant la lumière née de la réflexion, de l’étude et de la fidélité aux valeurs du Rite Écossais Ancien et Accepté.

Un prix pour relier les mondes

Thierry Zaveroni Grand Maître de la Grande Loge de France

Depuis 2017, cette cérémonie réunit les puissances maçonniques les plus engagées dans la transmission de la tradition écossaise : Grande Loge de France, Suprême Conseil Féminin de France, Institut Maçonnique de France, Suprême Conseil des Cultures et de la Spiritualité, Suprême Conseil de Belgique, Suprême Conseil du Bénin, mais aussi le Grand Collège des Rites du Grand Orient de France ou encore le Suprême Conseil de la Fédération française du Droit Humain.

Le Prix de Thèse n’a rien d’une simple récompense académique. Il est une reconnaissance initiatique, une manière d’honorer celles et ceux qui, par leurs recherches, réveillent les symboles endormis, ravivent les formes anciennes de la pensée, et questionnent la transmission des valeurs humanistes et spirituelles.

Dans un monde désuni par la perte de sens, ce prix est un fil d’or tendu entre la connaissance et l’engagement, entre la mémoire des rituels et les défis contemporains de la pensée.

Le lauréat 2025 : une rose entre les siècles

Piero Latino (Crédit Baglis TV)

Le Prix de Thèse 2025 a été attribué à Piero Latino, pour son étude magistrale en littérature comparée intitulée « La Rose initiatique. Des Fidèles d’Amour à la littérature européenne des XIXe et XXe siècles »(Sorbonne Université – University of Westminster, 2023).

La thèse de Piero Latino explore les liens subtils entre littérature européenne et courants ésotériques, à travers une étude approfondie du symbole de la rose, figure centrale de l’amour mystique et de la transformation initiatique. Son travail, d’une grande richesse interdisciplinaire, retrace la survivance d’un héritage poétique initiatique depuis le Moyen Âge jusqu’aux modernités littéraires.

Marcel Laurent Souverain Grand Commandeur de la GLCS

S’inspirant de Il Mistero dell’Amor Platonico nel Medioevo de Gabriele Rossetti, père du poète préraphaélite Dante Gabriele Rossetti, l’auteur révèle comment les Fidèles d’Amour – ces poètes médiévaux dont Dante fut le phare – véhiculaient une doctrine secrète de l’amour comme voie spirituelle. Cette tradition, portée par les troubadours, trouvères, scaldes et poètes mystiques, se prolonge jusqu’à Nerval, Balzac, Péladan, Yeats ou Ezra Pound.

La rose devient ainsi clef de voûte d’un imaginaire initiatique, à la croisée du mysticisme et des Ordres ésotériques. Ce symbole fragile et souverain ouvre un horizon dans lequel l’amour, loin d’être un simple thème littéraire, devient chemin d’éveil et miroir de l’âme.

Autour de ce lauréat central, neuf accessits ont été remis à des chercheurs dont les thèses, toutes remarquables, interrogent la spiritualité, les savoirs anciens, le rapport à l’écoute sacrée, à l’image, à l’adoubement, ou encore à la théologie d’Origène et à l’iconographie de la statuaire religieuse.

Un panorama érudit, tissé de langues mortes et de signes vivants, où l’architecture écologique dialogue avec la voie soufie iranienne, où les statuts médiévaux croisent le contemptus mundi, et où chaque travail semble appeler à une seule chose : la réconciliation de l’âme et de la science.

Les Accessits 2025 : un héritage vivant

Autour de Piero Latino, lauréat du Prix de Thèse 2025, neuf accessits ont été remis à des doctorants dont les travaux dessinent une véritable cartographie savante des voies initiatiques, spirituelles, esthétiques et sociales du monde occidental… et au-delà. Chaque thèse récompensée explore, avec précision et profondeur, une facette de la transmission humaine, entre verticalité du sens et ancrage dans la matière.

Voici les lauréats et leurs œuvres :

Marie Groult (Université de Rouen-Normandie, 2022)
« Et vous avons esleu d’estre au nombre de ladite Compagnie ». Les ordres de chevalerie au sein des cours françaises au XIVe siècle et l’édition de leurs statuts
➤ Une œuvre de transmission et de mémoire, distinguée par la Grande Loge de France, qui met en lumière l’éthique et les fondements structurels des ordres chevaleresques médiévaux, en résonance avec les loges d’aujourd’hui.

Marie Achet-Haushalter (Sorbonne Université, 2024)
DULCEDO MEA SANCTA. Penser, expérimenter, communiquer la douceur dans le christianisme antique
➤ Une étude sensible et philosophique de la douceur comme modalité spirituelle, entre langage, expérience intérieure et geste pastoral dans l’Antiquité chrétienne.

Marta Battisti (Université Grenoble-Alpes, 2022)
Peindre l’écoute. Figures et significations de l’audition sacrée en Italie du XIVe au XVIIe siècle
➤ Une enquête passionnante sur l’iconographie de l’audition dans l’art italien, à la croisée de la théologie, de l’histoire des sensibilités et de la mystique sonore.

Vincent Cousquer (Université de Strasbourg, 2023)
Philippe Grass (1801–1876), statuaire spiritualiste du XIXe siècle. Sa vie, son œuvre, ses restaurations des statues de la cathédrale de Strasbourg et la fusion des principes opposés
➤ Une plongée dans l’univers d’un artiste mystique, où l’art devient médiation entre formes et forces, matière et spiritualité.

Sylvie Le Pelletier-Beaufond (Université Paris Sciences et Lettres / EPHE, 2023)
La Fotovvat, la Voie des « compagnons-chevaliers ». Mystique et solidarité dans le monde iranien. Avec la traduction et l’annotation de quarante-trois « Traités de Javanmardi » (Fotovvat Name) et autres textes
➤ Une œuvre magistrale d’anthropologie spirituelle et de traduction savante, dévoilant les arcanes d’une chevalerie mystique persane méconnue.

Georges El Hage (Sorbonne Université et Facultés jésuites de Paris, 2022)
De la Terre promise au règne de Dieu. La pensée politique d’Origène
➤ Une relecture essentielle du théologien Origène à travers le prisme de la promesse et du pouvoir, entre eschatologie, théologie politique et utopie chrétienne.

Clémentine Laborderie (Université de Toulouse-2 et ENSAT, 2023)
Faire une place aux savoir-faire artisanaux dans l’enseignement de l’architecture pour aller vers des pratiques constructives plus écologiques, enjeux techniques et mésologiques
➤ Un plaidoyer éclairé pour une architecture éthique, enracinée dans la matière, la main et le territoire, en dialogue avec les traditions constructives vernaculaires.

Alain-Cyril Barioz (Sorbonne Université, 2024)
Un arbre en ce monde. Théodore de Bèze, moraliste du contemptus mundi
➤ Une étude sur le renoncement comme acte moral, à travers la figure du réformateur Théodore de Bèze, et sur la tension entre l’ancrage terrestre et l’appel spirituel.

Arnaud Montreuil (Université d’Ottawa et Paris-1 Panthéon-Sorbonne, 2022)
Écrire, décrire, saisir l’adoubement chevaleresque : une histoire de l’hippotogenèse dans l’Europe du Nord-Ouest, le Midi de la France et l’Italie centro-septentrionale (v.1175 – v.1300)
➤ Une exploration fine et symbolique des rites de passage chevaleresques, où le corps du chevalier, l’animal et l’écrit s’entrelacent dans un geste de reconnaissance sociale et initiatique.

L’Accessit 2025 de la Grande Loge de France : Marie Groult, passeuse d’idéal

Thierry Zaveroni Grand Maître de la Grande Loge de France et la lauréate

Dans ce paysage savant, la Grande Loge de France a choisi d’honorer Madame Marie Groult, docteure en histoire médiévale, pour sa thèse : « Et vous avons esleu d’estre au nombre de ladite Compagnie ». Les ordres de chevalerie au sein des cours françaises au XIVe siècle et l’édition de leurs statuts (Université de Rouen-Normandie, 2022).

Devant l’assemblée réunie à l’Hôtel de la Grande Loge de France, le Très Respectable Frère Thierry Zaveroni, Grand Maître, a prononcé un discours d’une haute tenue symbolique, saluant avec ferveur l’érudition et la portée initiatique de ce travail.

« En éditant les statuts de ces ordres de chevalerie, vous révélez ce que nous pourrions appeler leurs constitutions spirituelles. Vous faites œuvre de passeuse entre le silence des archives et la lumière du savoir. »

Par cette parole forte, le Grand Maître a souligné la fonction presque sacerdotale de la chercheuse : non seulement restituer une époque, mais en traduire l’esprit. Son étude éclaire les analogies profondes entre les compagnies chevaleresques du XIVe siècle et les ordres initiatiques contemporains. Serment, reconnaissance, règles, transmission – autant de thèmes qui résonnent puissamment en loge comme dans les manuscrits médiévaux.

Le discours du Grand Maître, d’une beauté sobre, a insisté sur la noblesse intérieure que portaient ces compagnies : un idéal d’engagement avant le privilège, de fidélité avant l’ostentation.

« À la Grande Loge de France, nous cultivons la mémoire des chevaleries de l’esprit. Non pas pour rêver à des gloires passées, mais pour mieux comprendre ce que veut dire s’engager dans un ordre de pensée et de dépassement de soi. »

Madame Groult, par cette thèse, offre ainsi un miroir tendu à la démarche maçonnique : comprendre l’histoire des ordres, c’est aussi mieux saisir ce qui, en nous, aspire encore à une éthique du service, à une souveraineté de l’âme.

Un prix entre ombre et lumière

Dans le silence des bibliothèques, les doctorants fouillent les textes oubliés. Mais lorsqu’un Prix comme celui-ci les met à l’honneur, ce n’est pas seulement la reconnaissance académique qui parle, c’est une forme de lumière partagée, une fidélité au travail intérieur, à la transformation de soi par la connaissance.

Le Prix de Thèse du Suprême Conseil de France rappelle que la recherche, quand elle est nourrie par une quête de sens, participe pleinement à l’œuvre maçonnique : réunir ce qui est épars, éclairer ce qui est voilé, honorer ce qui est noble.

Que ce prix dure longtemps. Et qu’il continue d’éveiller, en chacun, l’appel à la recherche du vrai, du juste, et du spirituellement fécond.