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Comment voir la Lumière maçonnique quand on a plus ses yeux ?

Dans un monde où les apparences dominent, où les images saturent nos écrans et nos esprits, que signifie réellement « voir » ? Cette question, à la fois simple et profonde, nous invite à explorer non seulement la perception visuelle, mais aussi la manière dont nous appréhendons l’essence des êtres et du monde qui nous entoure. À travers une réflexion inspirée par la philosophie, la science et une approche symbolique de la vie, cet article propose une exploration de ce que voir signifie, et comment une quête de « lumière intérieure » peut transformer notre compréhension de nous-mêmes et des autres.

Chapitre 1 : Voir au-delà des yeux

La vision est souvent perçue comme le sens dominant, celui qui guide nos interactions avec le monde. Pourtant, la science nous enseigne que la vision physique n’est qu’une infime partie de ce que signifie percevoir. Selon des études en neurosciences, environ 80 % des informations que nous recevons passent par nos yeux, mais ce que nous « voyons » est largement filtré par notre cerveau, qui interprète les signaux lumineux en fonction de nos expériences, de nos émotions et de nos attentes.

Ce processus, bien que fascinant, peut nous limiter. Plus notre acuité visuelle est fine, moins nous nous appuyons sur nos autres sens ou sur notre intuition. Prenons l’exemple des personnes non-voyantes. Des recherches menées par des institutions comme l’Institut de la Vision à Paris montrent que la perte de la vue entraîne une réorganisation cérébrale, où les zones normalement dédiées à la vision sont réaffectées à d’autres sens, comme le toucher ou l’audition. Cette plasticité cérébrale permet aux non-voyants de développer une sensibilité accrue aux vibrations, aux sons, et même aux énergies subtiles de leur environnement.

le 3e oeil

En d’autres termes, la cécité physique peut paradoxalement ouvrir une porte vers une perception plus profonde, une sorte de « vision intérieure » qui transcende les apparences. Cette idée nous pousse à questionner notre propre rapport à la vision. Combien d’entre nous, bien-voyants, passent à côté de l’essence des choses ou des personnes, trop occupés à regarder sans vraiment voir ? Comme le disait le philosophe grec Socrate, repris par tant d’autres après lui : « Connais-toi toi-même. » Mais comment se connaître si l’on ne voit pas au-delà des apparences superficielles ?

Chapitre 2 : La lumière de l’identité

Qu’est-ce qui fait de nous ce que nous sommes ? Cette question, au cœur de la philosophie depuis des millénaires, a été abordée avec une clarté particulière par le philosophe français Michel Serres, décédé en 2019.

Michel Serres

Dans ses écrits, notamment dans Le Tiers-Instruit, Serres affirmait que l’identité ne se réduit ni à un nom, ni à une profession, ni à une appartenance religieuse ou nationale. Un nom comme « Michel » ou un patronyme comme « Serres » (dérivé de sierra, massif montagneux) est partagé par des milliers de personnes. De même, être avocat, agriculteur ou artiste ne définit pas l’essence d’un individu, car changer de métier ne change pas ce que nous sommes fondamentalement. Serres proposait une vision de l’identité comme une vibration unique, une sorte de signature énergétique propre à chaque être. Cette idée trouve un écho dans les sciences modernes : notre ADN, notre voix, notre odeur, et même la manière dont nous interagissons avec autrui constituent une empreinte inimitable.

Jung

En psychologie, des concepts comme l’individuation, développé par Carl Jung, soulignent que devenir soi-même est un processus actif, une quête de toute une vie pour révéler cette « lumière intérieure » qui nous distingue. Pourtant, dans nos sociétés modernes, nous sommes souvent distraits par le besoin de « faire » – produire, consommer, se faire reconnaître – au détriment de l’ »être« . Comme l’écrivent les slameurs contemporains, ces poètes urbains qui capturent l’âme de notre époque : « Nous vivons dans des cités en cécité, avec la nécessité de cesser, mais quand allons-nous commencer à nous regarder ? » Cette cécité métaphorique, celle du cœur, nous empêche de voir l’autre dans sa singularité, et souvent, de nous voir nous-mêmes.

Chapitre 3 : La géométrie sacrée de l’existence

illustration suite de fibonacci dans la nature fleur
fleur d’après la suite de Fibonacci

Pour dépasser cette cécité du cœur, il est utile de se tourner vers des disciplines qui invitent à structurer notre perception du monde. L’une d’elles, issue de traditions anciennes, est l’étude de la géométrie sacrée. Ce concept, utilisé depuis l’Antiquité par des civilisations comme les Égyptiens ou les Grecs, repose sur l’idée que les formes géométriques – cercles, carrés, triangles – reflètent des lois universelles qui régissent l’univers. La suite de Fibonacci, par exemple, illustre comment des proportions mathématiques se retrouvent dans la nature, des coquillages aux galaxies. La géométrie sacrée n’est pas seulement une science de la mesure ; elle est aussi une métaphore de l’harmonie. En architecture, des monuments comme la cathédrale de Chartres ou les pyramides de Gizeh incarnent ces principes, où chaque pierre, chaque angle, est pensé pour refléter une vérité plus grande. Appliquée à l’individu, cette géométrie devient un outil pour aligner son être intérieur avec les lois universelles – la gravité, la lumière, l’impermanence. Dans ce cadre, des outils symboliques comme l’équerre, le compas ou le fil à plomb, souvent associés à des traditions initiatiques, servent à « mesurer » et à construire un « temple intérieur ». Ce processus invite à équilibrer le vertical (la quête spirituelle) et l’horizontal (l’ancrage dans le monde matériel), pour aboutir à une vision en trois dimensions, unissant le visible et l’invisible.

Chapitre 4 : La lumière universelle

La « lumière » dont il est question ici n’est pas celle que perçoivent nos yeux. Selon les théories de la physique quantique, tout dans l’univers – des atomes aux étoiles – vibre à une certaine fréquence. Cette vibration, invisible à l’œil nu, est ce qui anime la matière et la vie. Les traditions spirituelles, de l’hindouisme au soufisme, parlent de cette énergie comme d’une force universelle qui relie tous les êtres. Pour percevoir cette lumière, il ne s’agit pas de regarder, mais de ressentir. Comme l’écrivait Confucius : « Écoute, tu oublies ; vois, tu te souviens ; fais, tu comprends. » C’est dans l’action, dans l’expérience vécue, que l’on accède à une compréhension profonde. Les neurosciences confirment cette idée : les pratiques méditatives ou contemplatives, qui impliquent de se connecter à ses sensations internes, activent des zones du cerveau liées à l’empathie et à l’introspection, nous permettant de « voir » avec le cœur.

Chapitre 5 : Une pensée pour les aveugles du cœur

Si la cécité physique peut, paradoxalement, ouvrir des portes vers une perception plus profonde, la cécité du cœur – celle qui nous rend indifférents à l’autre, à sa singularité – est un handicap bien plus lourd. Dans nos sociétés marquées par l’individualisme et la compétition, nombreux sont ceux qui souffrent de cette incapacité à voir au-delà des apparences. Ce handicap s’accompagne parfois d’un ego surdimensionné, qui crée des tensions et des divisions, même dans les cercles les plus bienveillants. Pour surmonter cette cécité, il est essentiel de cultiver l’unité et l’empathie. Les traditions spirituelles et philosophiques nous rappellent que nous faisons tous partie d’une même humanité, animée par la même vibration universelle. En apprenant à écouter, à ressentir et à agir avec cœur, nous pouvons redonner à nos yeux – ceux de l’âme – leur capacité à voir véritablement.

En guise de conclusion

La quête de la lumière intérieure est une invitation à dépasser les limites de la vision physique pour embrasser une perception plus profonde, celle qui révèle l’essence des êtres et du monde. En explorant notre identité unique, en nous alignant sur les lois universelles et en cultivant l’empathie, nous pouvons transformer notre manière de voir – et d’être. Comme le suggèrent les slameurs, il est temps de cesser de « regarder » pour commencer à « voir« .

Car, en fin de compte, la véritable lumière ne se trouve pas à l’extérieur, mais dans le cœur de chacun, là où vibre l’unique partition de notre existence.

Les Illuminati, le « nouvel ordre mondial » venu de Bavière qui a jeté les bases du complotisme

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De notre confrère la RTBF

Stars de la complosphère, élite de l’ombre infiltrée dans toutes les sphères du pouvoir, phénomène de société incontournable, les Illuminati sont omniprésents dans notre culture. Dans cet épisode du podcast « Le Bureau des Complots », Peeters et Jacobs reviennent sur les racines de la conspiration des Illuminati et relatent comment cette théorie est parvenue à agglutiner tous les fantasmes en recyclant et fusionnant mythes contemporains et événements marquants de notre histoire.

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L’œil de la providence affiché sur une pyramide qui nous observe. Depuis plusieurs siècles, ce signe symbolise presque à lui seul le complotisme : il justifierait l’existence d’un pouvoir occulte infiltré dans toutes les sphères de décisions et d’influences qui dans l’ombre, tire les ficelles. Stars de la chanson ou du cinéma, politiques : tous les puissants feraient partie de cette secte secrète des Illuminati. 

Illuminati
Homme fou avec lumière sur la tête jouant avec un triangle. Illuminati, complot

Issu de l’Antiquité égyptienne ou grecque, cet œil de la providence figure au fronton de pas mal d’édifices religieux, mais aussi dans la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 ou sur le billet de un dollar américain. Ce symbole religieux ou ésotérique serait, selon cette théorie du complot, la preuve de la mainmise des Illuminati sur notre civilisation. Mais ce qui donne du grain à moudre aux conspirationnistes, c’est que le mythe Illuminati possède des racines historiques incontestables : il est né d’un ordre secret dans l’Allemagne des Lumières au 18e siècle, l’Ordre des Illuminés de Bavière.

L’ordre des illuminés de Bavière fondé par Adam Weishaupt

Adam Weishaupt, l’homme à l’origine du mythe Illuminati, est né en Bavière en 1748 dans une famille juive. Tout jeune, il perd ses parents et il est recueilli par un professeur de Droit à l’Université, un ancien collègue de son défunt père. Diplômé en Droit en 1768, il quitte la religion juive pour le protestantisme, condition obligatoire pour obtenir un poste de professeur… dans l’université dirigée par son tuteur.

Weishaupt défie les règles de son époque, il rêve d’en finir avec l’obscurantisme. En quête d’idéal, il décide de rejoindre les rangs des Francs Maçons. Il intègre les loges en 1775, mais rapidement la tiédeur des débats sur la question religieuse le dérange. Il souhaiterait substituer à l’emprise de l’Église assez forte à cette époque sur les Francs-Maçons : connaissance de soi, développement personnel et cet esprit critique qui lui est cher. Car il s’agit bien de cela avant tout : combattre sans merci et à la racine les anti-Lumières, représentés par les religieux, et en premier lieu sur le terrain de l’éducation quitte à utiliser des moyens radicaux. Weishaupt qui a une véritable passion pour l’occulte, reproche également aux Francs-Maçons leur manque de discrétion : ils ne se cachent pas forcément leur appartenance à ce mouvement.

Lui, rêve plutôt d’un groupe qui cultiverait le mystère. C’est pour cette raison qu’en 1776, à 28 ans, entouré d’une dizaine de disciples, il fonde ce qu’il appelle l’Ordre Secret des Illuminés de Bavière. Se faisant surnommer Spartacus, il voit les choses en grand : il commence par construire de toutes pièces, une généalogie mythique avec d’anciennes sociétés secrètes de l’Antiquité. Il copie aussi certains rituels initiatiques grecs et romains et conçoit hiérarchie et grade des illuminés. Une manière de donner l’impression d’être le dépositaire de secrets millénaires.

La chasse aux Illuminati, la société secrète qui dérange les autres

Weishaupt cherche à faire entendre ses idées ultra-radicales pour l’époque : les Illuminés déclarent vouloir entreprendre des réformes globales pour remettre à plat l’ordre et la hiérarchie sociales afin de favoriser l’émergence d’une nouvelle élite progressiste qui remplacerait à terme l’aristocratie existante. Pourquoi cette idée radicale ? Dans l’Europe de la seconde moitié du 18e siècle, des sociétés secrètes où se mélangent philosophie des Lumières, ésotérisme et pseudo-science poussent comme des champignons.  Les Illuminés de Bavière ne sont qu’un groupe parmi d’autres et pourtant, par leur radicalisme, ils vont parvenir à se faire pas mal d’ennemis… dont les Francs-maçons.

Les Illuminés de Bavière apparaissent de plus en plus comme LE groupe concurrent à abattre surtout lorsque des responsables maçonniques découvrent que des membres Illuminés – avec en premier lieu, Adam Weishaupt – se sont infiltrés parmi eux en secret, sous de fausse identité, au sein de plusieurs loges allemandes. Cette stratégie d’infiltration est une idée de celui que Weishaupt a pris comme bras droit : Adolph Von Knigge. C’est un jeune noble qui va mettre à contribution son réseau pour permettre aux Illuminés de recruter dans les Loges maçonniques. Ils atteignent 3000 membres en 1782, six ans après la création de l’ordre. Leur nombre commence à faire peur. Et ce d’autant plus que leurs idées radicales infusent parmi la bonne société bavaroise, mais aussi ailleurs, en Allemagne, en Autriche et en Suisse.

Cartes de crédit avec la pyramide du dollar US
Cartes de crédit avec la pyramide du dollar US

Repliés en Bavière, les illuminés apparaissent de plus en plus maintenant comme les ennemis publics numéro un. Les rumeurs vont bon train, ce sont les fake-news avant l’heure presque : les Illuminés sont par exemple accusés de fomenter un coup d’État. La réaction du Gouvernement Bavarois est immédiate. L’Ordre est purement interdit en 1785. Les Illuminés sont alors considérés comme des criminels. Ils sont punis par des peines très lourdes, plus particulièrement les recruteurs.

Le disciple qui présage un complot trois ans avant la Révolution française

Jusqu’à la fin de sa vie, Weishaupt continue de défendre l’expérience des Illuminés. Mais jamais il ne laisse penser ou insinue dans ses ouvrages ou ses paroles que l’Ordre des illuminés de Bavière a survécu à la répression. Pourtant, les fantasmes qui déjà accompagnaient l’existence de cette confrérie secrète, ne vont pas cesser quand elle disparait. Selon certain, l’ordre aurait même survécu dans l’ombre.

Le premier à émettre cette idée est un certain Ernst August Von Göchhausen, au moment même où on est supposé avoir perdu toute trace de la confrérie. C’est à dire cette même année 1786, avec son livre Révélations sur le système politique cosmopolite. Göchhausen est un peu le père du conspirationnisme. C’est un fonctionnaire d’État, ancien officier prussien et franc-maçon, comme il est presque de coutume à cette époque. Pour lui, c’est très clair, les Illuminés de Bavière ont infiltrés les rangs de ses frères francs-Maçons dans toute l’Europe et le plus grave, c’est que tous les espions n’ont pas été démasqués. Pour lui, un complot maçonnique sera à l’origine dit-il « d’inévitables révolutions mondiales« , renversant la noblesse et l’autorité de l’Église..  Et derrière ce complot, ce sont  les Illuminés qui seront à l’œuvre. Göchhausen écrit ainsi « un complot est en cours et son avancement est tel que ni la Monarchie, ni l’Eglise ne pourront en réchapper« . Des écrits publiés… trois ans avant la Révolution Française.

Peinture historique romantique. Commémore les Trois Glorieuses (la Révolution de Juillet) le 28 juillet 1830.

L’ouvrage de cet homme est fondateur, il jette vraiment les premières lignes du complotisme. Circulent désormais toutes les rumeurs les plus folles : paradoxalement, avec leur disparition, les Illuminés sont encore plus dangereux et suspects. De ce point de vue, leur supposé passage à la clandestinité n’est pas un signe d’affaiblissement, c’est tout le contraire. Selon les conspirationnistes de l’époque, être invisible, cela fait partie du plan.

Qui ont été les relais suivant de ce grand complot ? Quels récits se sont propagés jusqu’à aujourd’hui ?

Le Serpent Vert : Une Odyssée Symbolique et Alchimique de Goethe

Le Serpent Vert (Das Märchen), conte symbolique de Johann Wolfgang von Goethe, est bien plus qu’une simple fable. Publié en 1795 dans la revue Les Heures de Schiller, ce récit hermétique, à la croisée de la poésie, du théâtre, de la philosophie et de l’alchimie, invite le lecteur à un voyage introspectif. À travers ses personnages fantastiques, ses décors énigmatiques et ses transformations multiples, Goethe tisse une œuvre où chaque élément semble chargé de sens cachés. Comme l’écrivait Novalis, contemporain de Goethe, ce conte est un « opéra en prose », une fresque où se mêlent l’imaginaire, la spiritualité et la quête de la lumière.

Johann Wolfgan Von-Goethe

Pour appréhender pleinement la richesse du Serpent Vert, il est indispensable de se plonger dans le langage de l’alchimie, discipline ésotérique à laquelle Goethe, initié franc-maçon et membre des Illuminés de Bavière, était profondément lié. Ce conte n’est pas seulement une histoire ; c’est une méditation sur la transformation intérieure, une exploration des mystères de l’existence et une célébration de l’amour comme force ultime de transmutation.

À travers cet article, nous plongerons dans l’univers du Serpent Vert, en explorant son auteur, sa structure, ses thèmes, ses personnages et ses significations profondes. L’Auteur, Johann Wolfgang von Goethe, le Sage de WeimarJohann Wolfgang von Goethe (1749-1832) est une figure centrale des Lumières allemandes, un génie polyvalent dont l’œuvre embrasse la poésie, le théâtre, la science, la philosophie et la politique. Né à Francfort dans une famille aisée, Goethe bénéficie d’une éducation soignée qui le conduit à devenir docteur en droit à 23 ans, puis avocat et magistrat. À 26 ans, il entre au service du duc Charles-Auguste de Weimar, où il gravit les échelons jusqu’à occuper des fonctions de premier plan, notamment à la direction des finances de l’État. Anobli, il devient une figure influente de la cour de Weimar.

Son initiation maçonnique en 1780 dans la loge Amalia marque un tournant dans sa vie intellectuelle et spirituelle.

Johann Wolfgan Von-Goethe

Rapidement élevé au grade de maître, puis au quatrième degré du rite de la Stricte Observance, Goethe s’engage également dans les Illuminés de Bavière, une société secrète fondée en 1776, qui prône un idéal de perfectionnement moral et intellectuel. Ces expériences ésotériques imprègnent profondément son œuvre, et Le Serpent Vert en est un exemple éclatant. Goethe était également un esprit curieux, passionné par les sciences (botanique, géologie, optique) et les arts (poésie, théâtre, dessin). Son amitié avec Schiller, rencontré en 1788, enrichit son œuvre, notamment à travers leur collaboration dans Les Heures, où paraît Le Serpent Vert. Décoré de la Légion d’Honneur par Napoléon en 1808, Goethe s’éteint à Weimar en 1832, laissant derrière lui un legs intellectuel et artistique immense, qui lui vaut le surnom de « Sage de Weimar ».

Le Contexte du Conte :

Une Réception MitigéePublié en 1795 dans le cadre des Entretiens d’émigrés allemands, Le Serpent Vert surprend à sa sortie par son caractère énigmatique. Schiller, qui souhaitait un récit symbolique mais accessible, est déçu par la complexité et l’opacité du texte. Les lecteurs, eux, peinent à en saisir le sens. Pourtant, c’est précisément cette profondeur hermétique qui fait la force du conte. Loin des récits didactiques traditionnels, Goethe transporte son public dans un univers extraordinaire, où le merveilleux côtoie la réflexion philosophique. Comme le souligne Novalis, ce conte est une œuvre multidimensionnelle, mêlant poésie, théâtre, science et ésotérisme.

Structure et Thèmes :

Une Alchimie Narrative : Le Serpent Vert se déploie en six actes, sur une durée narrative de deux jours et demi, culminant à l’aube du troisième jour dans une apothéose finale. Le récit s’articule autour d’un fleuve majestueux, symbole du cours de la vie, séparant deux rives : celle du monde réel, avec ses « fruits de la terre », et celle du mystère, abritant un sanctuaire souterrain, une crevasse où réside le Serpent Vert, et des figures énigmatiques comme le Vieux à la Lampe et la belle Lilia.

Le Thème Central : La Grande Mutation

Le thème principal du conte est la préparation et l’accomplissement d’une grande mutation, un moment où « les temps sont révolus ». Cette transformation cosmique et individuelle, orchestrée par le Serpent Vert et le Vieux à la Lampe, vise à réunir les deux rives du fleuve, symbolisant l’union des opposés – le matériel et le spirituel, l’ordinaire et l’extraordinaire. À travers cette quête, Goethe explore l’idée d’une société idéale où chaque être trouve sa place, guidé par l’amour et la lumière.

L’Histoire : Une Quête d’Unité

L’histoire raconte l’amour impossible entre un jeune prince et la belle Lilia, dont le contact est fatal à tout être vivant. Séparés par le fleuve, ils incarnent deux mondes irréconciliables. La mort du prince, qui tente d’enlacer Lilia, marque le point de départ d’une série de transformations orchestrées par une galerie de personnages : le Serpent Vert, deux Feux Follets, le Passeur, le Vieux à la Lampe et son épouse, ainsi que quatre Rois endormis dans un temple souterrain. Ces figures, par leurs interactions et leurs sacrifices, permettent la résurrection du prince, sa transformation en roi, et l’union des deux rives par un pont formé des restes du Serpent Vert. Cette apothéose finale célèbre l’avènement d’un monde nouveau, uni sous la lumière et l’amour.

Les Personnages : Une Allégorie des États de l’Être

Chaque personnage du Serpent Vert incarne une facette de la psyché humaine ou un principe alchimique, participant à la grande œuvre de transformation.

Le Fleuve : Le Flux de la Vie

Le fleuve, élément central du décor, symbolise le cours de la vie, avec ses vagues et ses tourbillons. Il refuse l’or, qui crée des perturbations, et exige en paiement des « fruits de la terre » (trois choux, trois artichauts, trois oignons). Dans le langage alchimique, ces fruits évoquent la triade Corps, Âme et Esprit, nécessaires pour atteindre l’immobilité et la lumière. Le fleuve représente l’élément Eau, associé à la matière, par opposition aux éléments supérieurs, l’Air et le Feu, liés à l’esprit.

Le Passeur : Le Guide des Âmes

Le Passeur, figure charonienne, maîtrise le fleuve et ses tourments. Sa cabane, sa rame et sa barque, toutes de bois, symbolisent peut-être les connaissances profanes. En demandant des légumes sphériques aux multiples enveloppes, il évoque la quête de la connaissance cachée, guidant les âmes vers l’autre rive.

Les Feux Follets : Les Âmes en Quête

Les deux Feux Follets, agités et volubiles, portent un or impur qui se dissout dans le fleuve. Leur impatience et leur mépris des fruits de la terre suggèrent des âmes en quête de lumière véritable, mais encore prisonnières de l’illusion. Leur or, jeté dans la crevasse du Serpent Vert, déclenche la transformation de ce dernier.

Le Serpent Vert : L’Initiateur et le Sacrifié

Le Serpent Vert, personnage éponyme, est au cœur du processus alchimique. En absorbant l’or des Feux Follets, il devient lumineux, révélant les secrets de la crypte souterraine. Sa couleur verte, associée à l’espoir, à la régénération et au VITRIOL alchimique, symbolise la décomposition et la purification de la matière. En formant un cercle protecteur autour du prince mort, il évoque l’Ouroboros, symbole d’éternité et de renouveau. Son sacrifice final, transformé en pierres précieuses formant un pont, unit les deux rives, incarnant l’acte ultime de transmutation.

Les Quatre Rois : Les Piliers de la Sagesse

Les quatre Rois, endormis dans le temple souterrain, représentent les principes fondamentaux de l’existence. Le Roi d’Or incarne la Sagesse, le Roi d’Argent les Apparences, le Roi d’Airain la Force, et le Roi composite la matière chaotique. Leur réveil par le Serpent Vert et l’intervention du Vieux à la Lampe marquent l’accomplissement des « temps révolus ».

Le Vieux à la Lampe : L’Alchimiste et l’Ermite

Le Vieux à la Lampe, figure de l’Ermite du Tarot, porte la lumière dans les ténèbres. Sa lampe transforme la pierre en or, le bois en argent et les animaux morts en pierres précieuses, mais détruit les métaux impurs. Il incarne l’alchimiste, le guide spirituel qui orchestre la grande œuvre, révélant les trois secrets et recevant le quatrième du Serpent Vert : « Les temps sont révolus ».

Le Jeune Prince : L’Initié en Quête

Le prince, déchu et vêtu de pourpre, symbolise l’initié en quête de lumière et d’amour. Son parcours, de la mort à la résurrection, reflète les étapes alchimiques : l’œuvre au noir (décomposition), l’œuvre au blanc (purification) et l’œuvre au rouge (illumination). Sa quête de Lilia, incarnation de la beauté et du mercure philosophique, représente l’aspiration à l’union divine.

Lilia : La Beauté et la Pureté

Lilia, le lys blanc, symbolise la pureté et le mercure philosophique. Sa beauté froide, incapable de porter des fruits, incarne une perfection abstraite. Son amour pour le prince, rendu possible par sa résurrection, annonce l’harmonie nouvelle.

Une Lecture Alchimique : La Transmutation Intérieure

Le Serpent Vert peut être lu comme une allégorie alchimique, où chaque personnage et événement représente une étape du Grand Œuvre. Le fleuve symbolise la matière première, soumise aux tourments du temps. Le Serpent Vert, par sa transformation en lumière, incarne le VITRIOL, agent de purification. Les quatre Rois évoquent les quatre éléments ou les piliers de la loge maçonnique, tandis que le Vieux à la Lampe guide l’initié vers la révélation. Le prince, en mourant et ressuscitant, accomplit la transmutation ultime, passant de la matière brute à la lumière divine grâce à l’amour.Cette lecture ésotérique est renforcée par les références maçonniques et hermétiques disséminées dans le texte. Les trois secrets du Vieux à la Lampe, le quatrième secret du Serpent Vert, et la transformation finale en un pont reliant les deux rives évoquent les rituels d’initiation et l’idéal d’unité de la franc-maçonnerie.

Conclusion : L’Amour comme Clé de la Transmutation

Le Serpent Vert est une œuvre d’une richesse infinie, un miroir où se reflètent les aspirations humaines à la lumière, à la vérité et à l’amour. Chaque personnage, du Passeur au Vieux à la Lampe, incarne un aspect de notre être, mobilisé dans une quête de transformation. Le fleuve, avec ses deux rives, symbolise la dualité de notre existence, tandis que le prince représente l’initié en quête d’unité.Comme le souligne la formule alchimique, « Lis, lis, relis, prie et travaille », la compréhension du conte exige patience et introspection. Mais au cœur de cette quête se trouve une vérité universelle : l’amour, incarné par Lilia, est la force ultime qui permet la réunion des opposés et l’avènement d’un monde nouveau. Dans l’apothéose finale, Goethe nous rappelle que « l’individu isolé reste impuissant, mais le secours s’obtient par la réunion en nombre à l’heure favorable ». Ainsi, Le Serpent Vert est une ode à la fraternité, à la lumière et à l’amour, invitant chacun à poursuivre sa propre transmutation intérieure pour un monde plus harmonieux.

Références

  • Études alchimiques et maçonniques sur les symboles du conte.
  • Goethe, Johann Wolfgang von. Le Serpent Vert (Das Märchen), in Les Heures, 1795.
  • Novalis, cité dans les commentaires sur Das Märchen.

Sous le Bandeau #88 – L’intelligence artificielle va-t-elle transformer la Franc-maçonnerie ?

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L’arrivée de l’intelligence artificielle en Franc-maçonnerie suscite autant d’enthousiasme que d’inquiétude. Révolution technologique ou menace pour la tradition initiatique ? Cette question fondamentale était au cœur d’une discussion passionnante dans le podcast Sous le Bandeau, où Franco recevait dans les studios de Montréal l’auteur Franck Fouqueray, pionnier sur le sujet avec le premier livre sur ce thème : « L’intelligence artificielle va-t-elle transformer la franc-maçonnerie ? »


Ensemble, ils ont exploré les opportunités, les dangers et les prédictions pour le futur de nos loges.

L’automatisation : la fin des corvées administratives en loge

L’une des transformations les plus immédiates et bénéfiques de l’IA concerne la gestion de la loge maçonnique. Franck Fouqueray le rappelle avec une image forte : nos ancêtres s’éclairaient à la bougie et recevaient leurs convocations des mois à l’avance. Aujourd’hui, l’électricité et internet sont devenus la norme. L’intelligence artificielle est simplement la prochaine étape de cette évolution technologique.

Imaginez une loge où la gestion des finances, l’envoi des convocations ou même l’organisation des votes sur les règlements intérieurs sont entièrement automatisés. C’est un gain de temps considérable pour le Vénérable Maître, le Secrétaire et le Trésorier, qui peuvent ainsi se libérer des tâches répétitives et sans valeur symbolique. Ce temps précieux peut être réinvesti dans ce qui fait l’essence de la maçonnerie : l’instruction, le travail sur soi et les échanges fraternels. L’automatisation n’est pas une fin en soi, mais un moyen de recentrer la loge sur son cœur initiatique.

 Le danger pour la maçonnerie « sociétale »

Si l’IA promet de fluidifier l’administratif, elle représente un danger existentiel pour un certain type de franc-maçonnerie. Franck Fouqueray distingue clairement la maçonnerie initiatique et symbolique de la maçonnerie « sociétale » ou de « causerie ». Cette dernière, centrée sur des débats d’idées ou des sujets de société, risque de devenir obsolète.

Pourquoi se déplacer en loge pour écouter des interventions moins riches et pertinentes que celles qu’une IA peut générer en quelques secondes sur son téléphone ? La technologie offre désormais un accès illimité à la connaissance. Les loges qui se contentent d’être des clubs de discussion ou des “cafés philo” perdront leur raison d’être. La maçonnerie survivra et prospérera en se concentrant sur ce que l’IA ne pourra jamais remplacer : l’expérience vécue, le rituel partagé, l’émotion d’une chaîne d’union et la transformation intérieure.

Le fléau des planches maçonniques rédigées par l’IA

Un symptôme concret de cette nouvelle ère technologique est déjà visible dans nos ateliers : l’utilisation de l’IA pour rédiger des planches maçonniques. Pour Franco comme pour Franck Fouqueray, c’est un véritable fléau. Une planche n’est pas un simple devoir scolaire, mais le fruit d’une recherche personnelle, d’une introspection. Utiliser ChatGPT ou un autre outil pour la générer revient à court-circuiter le processus initiatique lui-même.

Comment contrer ce phénomène ? La solution est simple et radicale : exiger que le travail soit présenté et non plus lu. En demandant à un frère ou à une sœur de partager de mémoire ce qu’il ou elle a compris et ressenti, on s’assure que le travail a été intégré. La culture, comme le dit l’adage, c’est ce qui reste quand on a tout oublié. Cette évolution forcera un retour à l’authenticité et à la véritable appropriation du savoir.

Quelle vision pour la franc-maçonnerie en 2050 ?

À quoi ressemblera le futur de la maçonnerie dans un monde saturé par l’intelligence artificielle ? Selon Franck Fouqueray, le fossé entre la maçonnerie initiatique et la maçonnerie sociétale va se creuser davantage. La seconde luttera pour sa survie, tandis que la première deviendra plus essentielle que jamais.

Dans une société où la distraction est constante et où la technologie peut nous diviser, la loge deviendra un sanctuaire pour se recentrer, pour se reconnecter à soi-même et aux autres. Le travail sur le symbole, la quête de la connaissance de soi (“Connais-toi toi-même”) et la recherche d’une juste mesure (“Rien de trop”) offriront un contrepoids vital au matérialisme ambiant.

L’intelligence artificielle n’est donc pas l’ennemie de la franc-maçonnerie. Elle est un puissant révélateur qui nous force à nous interroger sur ce qui est truly important. Elle nous pousse à abandonner les aspects superficiels pour nous concentrer sur notre quête spirituelle et humaine, le véritable art royal.

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Notre Frère Laurent Kupferman est passé à l’Orient Éternel

C’est avec une profonde tristesse que nous apprenons par le quotidien Le Parisien le décès brutal de notre Frère Laurent Kupferman, survenu le 2 juillet 2025 à Fontainebleau, dans des circonstances qui restent à établir. Né le 19 janvier 1966 à Paris, Laurent était un essayiste, chroniqueur littéraire et franc-maçon engagé au sein du Grand Orient de France. Il a marqué son époque par son érudition, son humanisme et son dévouement aux idéaux républicains.

De G. à D., Philippe Liénard, Franck Fouqueray, Laurent Kupferman et Philippe Benhamou au Salon Masonica de Bruxelles

Fils de l’historien Fred Kupferman (1934-1988), spécialiste reconnu de l’histoire contemporaine, notamment de l’Occupation, et de l’auteure Sigrid Kupferman (1939), dont les écrits littéraires se distinguaient par leur sensibilité, Laurent a grandi dans un milieu où la culture et la réflexion intellectuelle étaient des piliers. Cet environnement a façonné son parcours, mêlant rigueur académique et passion pour les arts, les lettres et les valeurs humanistes. Diplômé en droit privé de l’Université Paris-Panthéon-Assas, il a orienté sa carrière vers la culture, fondant l’Orchestre Symphonique d’Europe en 1988, conseillant le ministre de la Culture Philippe Douste-Blazy, et collaborant avec l’UNESCO, notamment sur un film de sensibilisation contre le VIH au Nigeria. Ses chroniques à Marianne et sur France Culture ont enrichi le débat public, tandis que son engagement maçonnique a trouvé un écho dans son œuvre littéraire prolifique.

Élevé au rang de Membre d’Honneur des Imaginales Maçonniques & Ésotériques (IM&E) par leurs coprésidents, Jacques Orefice et Patrice Lhote, il en fut, à deux reprises, l’un des invités les plus lumineux et inspirants.

En 2019, il avait su, avec intelligence et chaleur, faire résonner la formule initiatique « Rassembler ce qui est épars » dans une magistrale méditation sur l’humanisme contemporain.

En 2022, c’est avec une émotion communicative qu’il avait évoqué, devant un auditoire recueilli, la panthéonisation de notre très chère Sœur Joséphine Baker, à laquelle il contribua activement aux côtés du comédien et écrivain Brian Bouillon-Baker, révélant combien la mémoire pouvait être acte de justice et d’espérance.

Laurent Kupferman laisse derrière lui une œuvre littéraire riche, principalement consacrée à la franc-maçonnerie et aux valeurs républicaines, qu’il a su rendre accessibles à un large public grâce à un style clair, pédagogique et engagé. Voici un aperçu détaillé de ses principaux ouvrages :

– 2009 : Le Paris des Francs-Maçons (co-écrit avec Emmanuel Pierrat) 

  Premier ouvrage d’une série fructueuse avec l’avocat et écrivain Emmanuel Pierrat, ce livre explore les lieux emblématiques de la franc-maçonnerie à Paris. À travers une approche historique et culturelle, il dévoile l’influence discrète mais profonde de la franc-maçonnerie sur la capitale, des monuments aux institutions, offrant une promenade initiatique dans la ville lumière.

– 2011 : Les grands textes de la Franc-Maçonnerie décryptés (co-écrit avec Emmanuel Pierrat) 

  Cet ouvrage ambitieux propose une analyse approfondie des textes fondateurs de la franc-maçonnerie. Laurent Kupferman et Emmanuel Pierrat y décodent les symboles, rituels et philosophies maçonniques, rendant accessibles des documents souvent complexes. Ce livre s’adresse autant aux initiés qu’aux curieux, offrant une porte d’entrée vers la compréhension des idéaux maçonniques.

– 2012 : Ce que la France doit aux francs-maçons (co-écrit avec Emmanuel Pierrat) 

  Dans cet essai, les auteurs explorent l’impact historique et sociétal de la franc-maçonnerie sur la France, de la Révolution française à la construction de la République. Ils mettent en lumière le rôle des francs-maçons dans la promotion des idéaux de liberté, d’égalité et de laïcité, tout en démystifiant certains clichés entourant l’ordre.

– 2015 : Les aventuriers de la République : Ces francs-maçons qui ont fait notre histoire (coécrit avec Jacques Ravenne) 

  Coécrit avec le romancier et franc-maçon Jacques Ravenne, cet ouvrage retrace les parcours de figures maçonniques emblématiques ayant façonné l’histoire de France. De la Révolution à la Résistance, il met en avant des personnalités audacieuses dont l’engagement a marqué la nation, mêlant récits historiques et anecdotes captivantes.

– 2016 : 3 minutes pour comprendre les 50 principes fondamentaux de la franc-maçonnerie 

  Dans un format pédagogique et synthétique, Laurent Kupferman propose une introduction claire aux principes essentiels de la franc-maçonnerie. Cet ouvrage, destiné à un large public, explique en 50 points clés les fondements philosophiques, symboliques et éthiques de l’ordre, rendant accessible une tradition souvent perçue comme mystérieuse.

– 2017 : 3 minutes pour comprendre l’histoire, les fondements et les principes de la République française (coécrit avec Jean-Louis Debré) 

  En collaboration avec Jean-Louis Debré, ancien président du Conseil constitutionnel, cet ouvrage explore les racines et les principes de la République française. Il met en lumière le rôle de la franc-maçonnerie dans la genèse des valeurs républicaines, tout en offrant une réflexion sur leur pertinence dans le monde contemporain.

– 2017 : Le Temple Secret : Découvrez le monde de la Franc-Maçonnerie en plus de 200 questions (coécrit avec Jacques Ravenne) 

  Sous forme de questions-réponses, cet ouvrage didactique répond aux interrogations les plus courantes sur la franc-maçonnerie. Couvrant l’histoire, les rituels, les symboles et les valeurs, il s’adresse autant aux néophytes qu’aux initiés, offrant une vision à la fois érudite et accessible.

– 2021 : Rassembler – La Franc-Maçonnerie : un chemin vers soi et vers les autres 

  Dans ce livre, Laurent Kupferman explore la dimension spirituelle et humaniste de la franc-maçonnerie. Il présente l’ordre comme un cheminement personnel et collectif, invitant à la réflexion sur soi et à l’engagement pour une société plus fraternelle, dans un style introspectif et inspirant.

– 2021 : Ce que la République doit aux Francs-Maçons (coécrit avec Emmanuel Pierrat) 

  Cette nouvelle édition, revisitée près d’une décennie après la première, approfondit l’influence des francs-maçons sur la République française. Elle met en avant leur rôle dans la défense de la laïcité et des droits humains, tout en s’interrogeant sur les défis contemporains auxquels ces valeurs sont confrontées.

En parallèle de son œuvre littéraire, Laurent Kupferman a joué un rôle déterminant dans la panthéonisation de Joséphine Baker en 2021, grâce à une pétition ayant recueilli 40 000 signatures. Ce combat, soutenu par des personnalités comme Jean-Marie Périer, Laurent Voulzy, Line Renaud, Stéphane Bern et Jack Lang, illustre son engagement pour la reconnaissance des figures incarnant les valeurs républicaines. Il a également contribué au documentaire « Joséphine Baker, une destinée française » (2023), réalisé par Dominique Eloudys-Lenys.

Nommé officier de l’Ordre des Arts et des Lettres et lauréat du « prix spécial droits de l’homme » du Prix Laïcité France en 2022, Laurent Kupferman laisse un legs intellectuel et humaniste d’une richesse exceptionnelle. Ses écrits, ancrés dans une volonté de transmission et de dialogue, continueront d’éclairer les esprits et d’inspirer les générations futures. Nos pensées vont à sa mère, sa famille, ses proches et à tous ceux touchés par sa disparition.

Le Sacré : Voie de Lumière pour l’Initié

Le Sacré, Essence de l’Initiation

Le concept de sacré, tel qu’il s’exprime depuis les origines de l’humanité, constitue une pierre angulaire dans la démarche initiatique du Franc-Maçon. Il ne s’agit pas d’un simple ornement spirituel, ni d’une notion vague : le sacré est la vibration qui relie l’homme à ce qui le dépasse, l’élan qui l’appelle à s’extraire de sa condition profane pour s’orienter vers la Lumière.

Dans le Temple, le sacré n’est pas imposé par des dogmes ou des croyances figées : il est perçu, ressenti, vécu dans le silence des rituels, dans les symboles vivants, dans le regard du Frère. Il est présent dans chaque pierre posée sur l’autel de l’Œuvre, dans chaque mot transmis entre les colonnes, dans chaque pas que fait l’Initié sur le Pavé Mosaïque.

Le sacré est le souffle invisible qui élève l’homme du silence profane vers la Lumière.

Le Sacré des Origines : Une Alliance Primordiale

Depuis les temps préhistoriques, les hommes ont perçu la présence d’une force invisible dans les éléments : la foudre, les montagnes, les cycles lunaires, les saisons… Le sacré était alors l’empreinte du mystère sur le monde visible, une alliance entre le terrestre et le transcendant.

Dans les grandes civilisations antiques, cette présence se structure. L’homme nomme les dieux, érige des temples, trace des axes sacrés reliant la terre au ciel. Chaque rituel, chaque architecture, chaque acte social intègre la référence à un ordre supérieur.

Le Franc-Maçon reconnaît dans cette évolution l’esquisse de sa propre Quête : reconstituer dans sa vie le Temple de l’Harmonie, manifester l’ordre dans le chaos, être un pont entre les plans.

Le sacré est l’empreinte du Mystère sur la matière, l’alliance oubliée entre ciel et terre que l’Initié s’efforce de reconstruire en lui.

Le Grand Architecte de l’Univers : Symbole du Sacré

Le Grand Architecte de l’Univers incarne le principe du sacré dans sa dimension la plus universelle. Il ne s’agit pas d’une divinité figée, mais d’un archétype vivant, réconciliant toutes les conceptions de la transcendance. Il est l’Ordre, la Loi, la Source, la Lumière qui illumine l’initié dans les ténèbres.

En reconnaissant cette présence, le Maçon ne se soumet pas à une foi imposée, mais il affirme son engagement envers un idéal supérieur. Il choisit d’orienter sa conscience vers le haut, de s’harmoniser à une Architecture plus vaste que lui.

Le Grand Architecte de l’Univers est la Lumière silencieuse qui ordonne le chaos et guide l’Initié vers l’harmonie du Tout.

Le Danger d’un Sacré Dilapidé

Dans notre époque moderne, le sacré a souvent été vidé de sa substance, dissous dans le spectacle, le confort ou le relativisme. Le désir de spiritualité persiste, mais il se perd dans des voies à la carte, dans des syncrétismes sans fondement, dans une consommation de l’extraordinaire.

Le Franc-Maçon, en tant qu’Initié, est appelé à dénoncer cette superficialité, non pas par dogmatisme, mais par exigence. Il sait que le sacré exige discipline, patience, humilité. Il sait que la Lumière se conquiert, qu’elle ne s’achète pas.

Le sacré ne se consomme pas : il se mérite, dans le silence, l’humilité et l’effort de l’Initié en quête de Lumière.

Le Temple, Espace du Sacré

Le Temple maçonnique est le miroir du cosmos. Chaque outil, chaque décor, chaque orientation a sa fonction dans l’Œuvre initiatique. Là, le temps devient cyclique, le silence devient langage, et l’homme profane est invité à renaître.

Mais le Temple véritable est aussi intérieur. Il est bâti en secret, à travers les efforts constants, les prises de conscience, les actes justes. Le Maçon qui marche vers ce Temple intérieur fait de sa vie un acte sacralisé, une œuvre vivante.

Le Temple est le reflet du cosmos, mais c’est en son cœur que l’Initié bâtit, en silence, le sanctuaire vivant de l’Œuvre.

Le Temps Sacré : Le Rythme de l’Œuvre

Le travail maçonnique se déploie selon un rythme cyclique. Le temps du profane est linéaire, dévoré par la fuite en avant. Le temps de l’Initié est spiralé : à chaque tour, il revient plus haut, plus profond. Chaque tenue, chaque solstice, chaque passage de degré marque une régénérescence.

Ainsi, le Maçon apprend à honorer le temps comme une respiration cosmique, un dialogue entre l’éphémère et l’éternel.

Le temps sacré est une spirale d’éveil où chaque cycle élève l’Initié vers l’éternel, au rythme secret de l’Univers.

Le Sacré au Quotidien : Le Geste Juste

Comme le disait le Sage : « Ce ne sont pas les grands pouvoirs qui tiennent le mal en échec, mais les actes simples de bonté. » Le Maçon apprend à sanctifier le quotidien. Un mot véritable, un regard de fraternité, un acte de justice deviennent les pierres vivantes de son Temple.

Chaque jour est une tenue silencieuse. Chaque relation est un miroir. Chaque épreuve est un travail d’ajustement. Le sacré n’est pas un lieu, mais une présence. Il est là où l’on se tient debout, conscient, aimant.

Le sacré habite chaque geste juste ; il naît dans la présence aimante, là où l’Initié fait de la vie une tenue silencieuse.

Le Langage du Sacré : Ça Crée et Se Crée

Le langage symbolique, aussi appelé langage des oiseaux pour sa nature volatile, nous enseigne une dernière vérité. Le « sacré », c’est « ça crée » : principe actif, force d’émanation, d’ordre et de manifestation. Le « secret », c’est « se crée » : principe passif, matrice d’accueil, de gestation, de mystère.

Entre ces deux polarités se joue la Danse cosmique. Le compas et l’équerre, le feu et l’eau, le visible et l’invisible. C’est en unissant ces principes en lui que l’Initié devient véritablement créateur, co-participant de l’Œuvre divine.

Le sacré crée, le secret se crée : en leur union, l’Initié devient l’artisan vivant de l’Œuvre.

Vers la Redécouverte du Sacré

Le monde moderne a détruit bien des temples extérieurs. Mais le Maçon sait que le Temple intérieur demeure. Il ne tient qu’à nous de le reconstruire, pierre après pierre, en nous engageant sur la voie du Sacré.

Non pour fuir le monde, mais pour l’habiter pleinement, en porteurs de Lumière. Non pour nous séparer des autres, mais pour leur tendre la main avec force, justice et beauté. Non pour adorer des formes mortes, mais pour faire vivre la flamme éternelle.

Car au fond, ce n’est pas nous qui trouvons le Sacré. C’est lui qui nous appelle, et qui se révèle à ceux qui, dans le silence du cœur, s’y sont rendus dignes.

Le sacré est la mémoire d’une Alliance oubliée, la Présence voilée qui murmure à l’Initié de devenir Temple, pour que chaque souffle, chaque pensée, chaque geste, révèle en silence la splendeur de l’Invisible.

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Ouverture à l’ésotérisme

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Ce livre est une porte d’entrée privilégiée pour les initiés et chercheurs en quête de spiritualité par la Franc-Maçonnerie. Avec un langage accessible, il décrypte les symboles et rituels du 1er degré du Rite Écossais Ancien et Accepté, permettant au lecteur de comprendre la portée initiatique des gestes, mots et symboles.

L’objectif est double : d’abord, offrir une compréhension ouverte et non dogmatique du Rituel, aidant à répondre aux grandes questions humaines –  » Qui suis-je ? « ,  » D’où viens-je ? « ,  » Où vais-je ?  » – ; ensuite, permettre au lecteur de vivre ces valeurs dans la société moderne sans perdre l’authenticité de son être intérieur. En somme, « La Pratique Journalière du Rite Écossais Ancien et Accepté » est un guide vers l’épanouissement personnel et spirituel, accessible à tous ceux qui souhaitent transformer leur vie quotidienne en un parcours initiatique.

AUTEUR

Responsable dans les arts graphiques Kodak, François Lorre est conférencier symboliste, Grande Loge de France et Rotary. Ancien Vénérable Maître. A gravi les échelons du Rite Ecossais Ancien et Accepté jusqu’au degré 30.Humaniste ayant une approche ésotérique de haut niveau en symbolisme sous différentes formes. Il est marié à une Vietnanienne et est particulièrement versé dans la culture, l’art et la spiritualité extême-orientale

Nouvelle Calédonie : Les francs-maçons dans le camp des conservateurs ?

Rappel historique :

  • Un fait historique humiliant : le 24 septembre 1853, l’Amiral Febvrier-Despointes prend possession de la Nouvelle-Calédonie au nom de Napoléon III Empereur des français ; depuis cette date, les différentes formes juridiques de l’Etat français ont avalisé cette conquête contraire aux Droits de l’Homme et du Citoyen et aux relations internationales pacifiques prônées par l’ONU !
  • Depuis le 24 septembre 1853, l’histoire de la Nouvelle-Calédonie est entachée du crime contre l’humanité commis par la France avec le processus de la colonisation !
  • Depuis le 24 septembre 1853 les populations canaques ne cessent de réclamer leur juste droit pour recouvrer l’exercice de leur autodétermination  !
  • Le 5 mai 1998, suite à un mouvement de rébellion kanake réprimé par l’armée française, la République française, avec Michel Rocard, a accepté de mettre en œuvre un processus de décolonisation. Ce processus a été avalisé par les représentants canaques dans une démarche volontaire et pacifique accompagnée d’une concession majeure d’accepter un élargissement du corps électoral à des non-canaques.
  • Les accords de Nouméa prévoyaient une stratégie d’entente entre les signataires pour réaliser la décolonisation ; en réalité cette stratégie d’entente n’a pas eu lieu : les partis politiques dits loyalistes refusant même la dynamique de la décolonisation. Des Accords de Nouméa il n’est resté que le transfert de compétences non-régaliennes vers les institutions calédoniennes et les rendez-vous référendaires que les kanaks ont boudé.
  • En mai 2024, la tentation du ministre de l’intérieur de l’époque, Gérald Darmanin, d’institutionnaliser un corps électoral favorable aux « loyalistes » a déclenché le feu aux poudres et une nouvelle révolte du peuple Kanak !
  • Aujourd’hui c’est à nouveau le refus loyaliste et Manuel Valls, Ministre des Outre-Mer, qui souhaitait reprendre la méthode Rocard se retrouve contesté !

Aujourd’hui

A l’heure où le président Macron essaie de trouver une solution consensuelle au problème des revendications indépendantistes des représentants du peuple kanak, il est clair que l’influence maçonnique en Nouvelle Calédonie se retrouve plutôt chez les « jusqu’au-boutiste » qui cherchent à scinder la Nouvelle Calédonie en deux entités pour garder « leur » Sud riche et prospère  !

On est loin du temps où un Grand-Maître du Grand Orient de France (Roger Leray) n’hésitait pas à dire les quatre vérités aux loges calédoniennes !

Des questions !

Comment les obédiences maçonniques françaises ont-elles pu laisser filer le rôle de conciliation que les loges maçonniques auraient pu avoir ?

Comment des francs-maçons osent ils remettre en question la primauté du « peuple ancien » qui habite sur cette terre depuis des millénaires ?

Et pourtant la Paix est possible !

Michel Rocard, Roger Leray et d’autres avaient su impulser un vent nouveau !

Malheureusement leurs successeurs n’ont pas eu la même bienveillance et la logique des bras cassés en faveur de la recherche d’intérêts à court terme a prévalu !

Mais le peuple Kanak ce n’est pas rien ! Il a des siècles de résistance dans ses racines ! C’est un peuple magnifique avec des valeurs ! L’entente est possible pour peu qu’on accepte de le respecter et de ne pas le tromper !

Aujourd’hui la France avec la Nouvelle Calédonie se disqualifie tous les jours dans le concert des Nations ! Elle est devenue symbole d’oppression !

Vouloir refuser l’inéluctable indépendance c’est poursuivre dans l’impasse !

L’indépendance ne signifie pas l’impossibilité pour les calédoniens non kanaks de rester sur le « caillou » ! Tout est négociable pour bâtir le destin commun !

Les Rites Égyptiens et les Arcana Arcanorum : Une Exploration Historique et Ésotérique

Les rites maçonniques égyptiens, en particulier ceux de Memphis et de Misraïm, occupent une place à part dans l’histoire de la Franc-maçonnerie. Leur aura de mystère, alimentée par des références à des enseignements ésotériques comme les Arcana Arcanorum, fascine autant qu’elle divise. Ces rites, souvent associés à une quête spirituelle et alchimique, sont entourés d’un voile d’incertitude historique et de spéculations sur la transmission de leurs secrets les plus profonds. Cet article propose une plongée dans l’histoire, les origines, et les controverses entourant les rites de Memphis et de Misraïm, avec un focus particulier sur les Arcana Arcanorum, en s’appuyant sur le document Arcana Arcanorum fourni.

Les Origines des Rites Égyptiens : Memphis et Misraïm

Les rites de Memphis et de Misraïm, bien que souvent regroupés sous l’appellation commune de Memphis-Misraïm, ont des origines distinctes et des trajectoires historiques complexes. Leur développement est marqué par des figures charismatiques, des conflits internes, et une quête incessante de légitimité.

Le Rite de Misraïm : Une Origine ÉnigmatiqueLe rite de Misraïm, considéré comme antérieur d’environ trente ans au rite de Memphis, aurait vu le jour autour de 1740, probablement à Naples, sous l’influence du prince Raimondo di Sangro, une figure mystérieuse adepte des voies alchimiques et des pratiques ésotériques. Di Sangro, connu pour ses travaux à la chapelle Sansevero, où sont exposées des « machines anatomiques » – des squelettes humains conservés par une méthode alchimique – aurait joué un rôle clé dans la genèse de ce rite. La chapelle elle-même, bâtie sur les fondations d’un temple dédié à Isis, incarne le lien symbolique avec l’Égypte ancienne, un thème central du rite.

Robert Ambelain – Crédit photo Claude Vigourou

Selon Robert Ambelain, le rite de Misraïm aurait été formalisé en 1788 à Venise par un groupe de sociniens, avec une patente de constitution attribuée à Cagliostro, bien que cette hypothèse reste débattue. En France, le rite s’implante entre 1814 et 1815 grâce aux frères Bédarride, qui établissent une loge à Paris. Cependant, dès ses débuts, le rite souffre d’une opacité structurelle : les postulants n’avaient accès qu’aux 87 premiers degrés, les trois derniers étant réservés à des « supérieurs inconnus ». Cette organisation hiérarchique, où les secrets des Arcana Arcanorum étaient supposément transmis, alimente les spéculations sur leur nature et leur existence réelle.

Le Rite de Memphis : Une Création ModerneLe rite de Memphis, créé en 1838 par Jacques-Étienne Marconis de Nègre, est plus récent et découle directement de l’exclusion de ce dernier du rite de Misraïm. Marconis, s’inspirant des initiations qu’il avait reçues, élabore un système comportant initialement 91 degrés, puis 92, et enfin 99, dans une tentative d’enrichir et de légitimer son rite. Contrairement à Misraïm, le rite de Memphis n’a aucun lien direct avec les Arcana Arcanorum, ce qui le rend distinct dans son approche et son contenu. Marconis tenta de justifier l’origine de son rite par une filiation égyptienne, prétendument héritée de son père, mais cette revendication est largement considérée comme une invention visant à conférer une aura mystique à son système.

Les Arcana Arcanorum : Mythe ou Réalité ?

Les Arcana Arcanorum, ou « secrets des secrets », sont souvent présentés comme l’apogée des enseignements des rites égyptiens, en particulier du rite de Misraïm. Ces pratiques, décrites comme une combinaison de théurgie chaldéo-égyptienne et d’alchimie interne, viseraient à séparer les différents corps de l’adepte pour Ascendant pour atteindre un état de « résurrection lunaire » et, ultimement, de « résurrection solaire », créant un « corps de lumière ». Cependant, l’histoire et la transmission de ces enseignements suscitent de nombreuses interrogations.Une Transmission Perdue ?

Le document Arcana Arcanorum soutient que la transmission des Arcana Arcanorum au sein de la maçonnerie égyptienne a probablement disparu dès les débuts du rite en France, vers 1816. Les frères Bédarride, qui ont introduit le rite de Misraïm, semblent avoir ignoré ces enseignements, se concentrant sur des degrés « administratifs » plutôt que sur les secrets ésotériques. Un autre frère, Joly, aurait reçu une transmission des Arcana Arcanorum de Naples en 1813, mais aucune preuve tangible ne confirme qu’il en ait véritablement été détenteur. Selon G. Galtier, les derniers degrés (87 à 90) du rite de Misraïm, supposés contenir les Arcana Arcanorum, étaient souvent inconnus des membres eux-mêmes, remplacés par des grades administratifs sous la juridiction d’Osselin (1876-1902).

Serge Caillet

Serge Caillet, expert de la maçonnerie égyptienne, note que les Arcana Arcanorum disparaissent des discours maçonniques après Ragon (1816) jusqu’à leur réapparition en 1900 par Fernand Rombaux, qui s’appuie sur des textes douteux, notamment Le Kybalion (1917), un ouvrage accessible au grand public. Les rituels adoptés en 1934 au convent belge de la FUDOSI, sous l’égide de Rombaux, sont jugés décevants par Caillet, qui les considère comme des inventions tardives plutôt qu’une transmission authentique.

Une Tradition Ésotérique Plus LargeLe document suggère que les Arcana Arcanorum ne se limitent pas aux rites maçonniques. Ils pourraient être liés à des traditions alchimiques et théurgiques plus anciennes, présentes dans d’autres contextes, comme les enseignements de Gurdjieff sur la « quatrième voie » ou ceux d’Aleister Crowley dans l’Ordo Templi Orientis. Des références à des pratiques similaires, comme le « petit arcane naturel » ou l’« alchimie du feu de serpent », apparaissent dans divers courants ésotériques, mais leur lien avec la maçonnerie égyptienne reste flou. Le document évoque également des documents confidentiels du Grand Sanctuaire Adriatique, qui contiendraient des allusions hermétiques à ces enseignements, mais sans preuve concrète de leur authenticité.

La Fusion Memphis-Misraïm et ses Controverses

En 1881, Giuseppe Garibaldi est nommé Grand Hiérophante des deux rites, mais sa mort rapide et les conflits internes fragilisent la tentative d’unification. John Yarker, qui s’autoproclame Grand Hiérophante après Ferdinando Francesco degli Oddi, introduit une filiation douteuse, basée sur un rite de Memphis en 33 degrés créé par Seymour, distinct du Memphis originel et encore plus éloigné du Misraïm. Cette filiation, dite « Yarker », devient la base du rite Memphis-Misraïm en France, mais elle est critiquée pour son manque de légitimité. Constant Chevillon, souvent invoqué comme garant d’une transmission authentique, hérite de cette lignée, mais les experts s’accordent à dire qu’elle s’écarte des rites originaux.

En 1919, Jean Bricaud, successeur de Theodor Reuss, formalise le rite Memphis-Misraïm en France, mais les rituels qu’il utilise n’ont plus rien de commun avec les Arcana Arcanorum. En 1934, Armand Rombaux, en Belgique, tente de réintroduire l’échelle de Naples, mais ses rituels, qualifiés d’inventions par certains, ne convainquent pas.

La branche française, sous Robert Ambelain à partir de 1960, reste fidèle à l’échelle des Bédarride, sans référence aux Arcana Arcanorum.Une Crise de LégitimitéAujourd’hui, la maçonnerie égyptienne est fragmentée en près de trente branches en France, chacune revendiquant une légitimité basée sur les Arcana Arcanorum ou la filiation Yarker-Chevillon.

Cette dispersion, combinée à l’absence de transmission vérifiable des Arcana Arcanorum, affaiblit la crédibilité des rites égyptiens. Le document déplore les « agitateurs de boîtes vides », ces dignitaires qui entretiennent le mystère pour asseoir leur pouvoir, et appelle à une unification des branches pour restaurer la valeur du rite Memphis-Misraïm. Une Quête Spirituelle Toujours Vivante ?

Malgré les doutes sur la transmission maçonnique des Arcana Arcanorum, le document insiste sur leur existence dans d’autres traditions ésotériques, sous des formes variées. Il évoque des pratiques comme celle d’Abramelin le Mage ou les instructions de Gurdjieff, qui pourraient offrir des pistes pour les chercheurs sincères. Ces enseignements, loin d’être accessibles à tous, nécessitent un long travail intérieur, symbolisé par l’expression « être en chambre du milieu ». Le texte conclut que les Arcana Arcanorum se transmettent toujours, mais probablement hors des cadres maçonniques, dans des cercles confidentiels et sous d’autres appellations.

Conclusion : Un Appel à la Transparence.

L’histoire des rites égyptiens et des Arcana Arcanorum est celle d’une quête spirituelle entravée par des luttes de pouvoir et des revendications de légitimité. Le courage de la Grande Loge Universelle de Corse, qui reconnaît publiquement son ignorance des Arcana Arcanorum, est salué comme un pas vers l’honnêteté. Pour l’auteur du document, l’avenir du rite Memphis-Misraïm dépend de l’unité et de la sincérité des chercheurs, qui doivent dépasser les rivalités pour redonner au rite sa valeur spirituelle. Les Arcana Arcanorum, s’ils existent, restent un mystère à redécouvrir, non pas dans les grades maçonniques, mais dans une démarche intérieure et ésotérique exigeante.

Sources :

  • Jean-Pierre Giudicelli de Cressac Bachelerie, Pour la Rose Rouge et la Croix d’or
  • G. Galtier, Maçonnerie égyptienne, rose-croix et néo-chevalerie
  • Robert Ambelain, La Franc-maçonnerie oubliée
  • Serge Caillet, Arcanes et Rituels de la Maçonnerie Égyptienne

Henri Sandillon, toujours Grand Officier du Conseil de l’Ordre au GODF

VERS Un scandale éthique majeur ?

Le Grand Orient de France (GODF), une obédience maçonnique française de premier plan, traverse une crise qui semble s’approfondir chaque jour davantage. Au centre de cette tempête se trouve le Dr Henri Sandillon, Grand Officier du Conseil de l’Ordre, délégué à des thématiques aussi sensibles que la fin de vie, les droits des femmes et des enfants, et membre de la Loge d’Études et de Recherche « Les Fils et Filles d’Ariane », dédiée à la lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants. Cette crise, révélée notamment par un article du Canard Enchaîné du 25 juin 2025, intitulé « Le Scouarnec anesthésie le Grand Orient de France », met en lumière des manquements éthiques graves et soulève des questions profondes sur la gouvernance et les valeurs de l’équipe dirigeante du GODF qui semble continuer à protéger l’un des siens comme l’intéressé l’avait fait pour lui-même dans la sinistre affaire en cause !

Une lettre de retrait sans conséquence immédiate

Nicolas Penin Grand Maître du GODF

Le 19 mai 2025, le Dr Henri Sandillon adresse une lettre au Grand Maître Nicolas Pénin, dans laquelle il annonce son souhait de se mettre en retrait, après l’audience houleuse de la Cour Criminelle du Morbihan du 16 mai 2025 où il témoignait dans la sinistre affaire du chirurgien pédocriminel Le Scoarnec.

Au cours de cette audience, il avait été convaincu de faux témoignage par la présidente de la cour et l’avocat général l’avait averti qu’il encourrait 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende. Nous reviendrons sur la gravité de cette absence de courage et de dignité, devant une juridiction aussi solennelle jugeant un homme pour des faits abominables.

A la suite de cette audience largement reprise et commentée dans la presse française, le Dr Sandillon avait adressé le 19 mai 25 au Grand Maître Nicolas Penin le courrier suivant :

« Mon très cher frère Nicolas, Grand Maître ; Comme tu le sais je suis actuellement dans une situation délicate à la suite de ma déposition, vendredi 16 mai, au tribunal de Vannes. Cet interrogatoire et ensuite et surtout le déchaînement de calomnies que je lis dans les journaux à mon égard m’ont profondément ébranlé. Je souhaiterais prendre du recul, faire silence, ce qui sera aussi une façon de protéger le GODF et tout le Conseil de l’Ordre. Si par malheur je devais être l’objet de poursuites judiciaires je souhaiterais que le Conseil de l’ordre m’applique l’article 93. Je suis profondément désolé de m’être mis dans cette situation et de ses conséquences éventuelles. Je te remercie de ta compréhension. Recevez tous mes très chers Frères et Sœurs, mes salutations les plus fraternelles. Henri Sandillon »

Ce courrier, rédigé trois jours après son audition au tribunal de Vannes dans l’affaire du chirurgien pédocriminel Joël Le Scouarnec, révèle une situation délicate. Sandillon y confesse avoir été profondément ébranlé par un interrogatoire et par le « déchaînement de calomnies » dans la presse à son encontre. Il évoque la possibilité de poursuites judiciaires à son encontre et demande, si des poursuites avaient lieu, l’application de l’article 93 du règlement du GODF, qui permettrait sa suspension. Cette lettre, d’un ton presque anodin, n’a entraîné aucune mesure immédiate de la part du Grand Maître. Selon Pénin, ce retrait volontaire suffirait à « tenir » jusqu’au Convent annuel, évitant ainsi une prise de position ferme ayant pour conséquence de relayer d’une autre manière la scandaleuse attitude du frère Sandillon 

Joël Le Scouarnec : l’ombre d’un prédateur – (Crédit : TF1)

Pourtant, les faits reprochés à Sandillon sont d’une indiscutable gravité. Lors de son audition du 16 mai 2025 devant la cour criminelle du Morbihan, il est établi que Sandillon a produit un faux témoignage dans l’affaire Le Scouarnec, un chirurgien condamné pour des actes pédocriminels. Cette révélation, loin d’être anecdotique, met en lumière une complicité passive dans une affaire touchant à la protection des enfants, un domaine où Sandillon était censé incarner les valeurs du GODF. Face à la cour, Sandillon a nié avoir eu connaissance de la condamnation de Le Scouarnec pour consultation d’images pédopornographiques avant son embauche, contredisant ses propres déclarations aux gendarmes en 2017, où il avait admis l’inverse. Ces « déclarations malheureuses », comme il les qualifie, à huit ans d’écart, mettent en lumière un double manquement grave à l’honneur et au devoir : lourde défaillance d’un frère, d’une part, qui aurait dû savoir mieux que quiconque la valeur d’un serment (il témoignait sous serment dans une enceinte où pesaient de très graves accusations et il s’y devait d’autant plus à la vérité or il s’y est montré on ne peut plus lâche !), mensonge éhonté d’un médecin, d’autre part, dont la priorité, selon ses dires, n’était pas de vérifier les antécédents judiciaires des candidats (nous y reviendrons, mais le fait d’éclairer d’un avis, fût-il consultatif, une autorité décisionnelle ne diminue en rien la responsabilité de son auteur qui doit l’instruire au mieux de ses connaissances et ne pas, au non d’inavouables motifs économiques, passer sous silence des faits graves déjà sanctionnés par la justice !).

Une connaissance ancienne des faits

Selon le blog Hiram.be du 27/06 relayant les propos de H. Sandillon, ce dernier aurait pris conscience de la gravité des faits reprochés à Le Scouarnec – la détention de milliers d’images pédopornographiques, dont l’achat via carte bancaire sur des sites russes détecté par le FBI – dès 2007, quelques mois après l’arrivée de ce dernier au Centre hospitalier de Jonzac. Cette information, si elle est avérée, n’est pas moins accablante : Sandillon, président de la Commission Médicale d’Établissement, savait et n’a rien fait pour protéger les enfants victimes du pédocriminel qui a pu sévir jusqu’en 2017, Sandillon étant toujours président de la Commission Médicale d’Etablissement, lui qui, dans son Obédience, ne manquait pas de s’affirmer comme le protecteur des droits des enfants ! De qui se moque-t-on ? Dans un petit hôpital comme celui de Jonzac, où « tout se sait à tous les étages », il est difficile de croire que Sandillon ait pu ignorer les agissements de Le Scouarnec et, en particulier, son alcoolisme impénitent et sa saleté repoussante, d’autant qu’ils fréquentaient en tant que chirurgiens le même bloc opératoire. Il faut croire que le Dr Sandillon était tellement terrorisant pour les équipes médicales qu’aucun de leur membre ne se serait enhardi à la moindre confidence…Allons, donc !

Cette inaction prolongée, visant, de l’aveu même de l’intéressé, à ne pas compromettre le fragile équilibre d’un « petit hôpital de province » mais à un prix qui, au bout du bout du banc… ou du ban d’infâmie, s’est avéré stricto sensu « inavouable », cette inaction prolongée n’en constitue pas moins un manquement éthique majeur caractérisé qui a laissé tous les observateurs d’autant plus sidérés qu’ils ont appris qu’il s’agissait d’un Conseiller de l’Ordre délégué aux droits des enfants au sein du GODF, une circonstance pour le moins aggravante, sauf s’il faut considérer les titulatures comme superficielles et frelatées.

Une position institutionnelle contestée

Le statut de Sandillon au sein du GODF n’est pas celui d’un simple membre. En tant que Grand Officier et délégué à des questions aussi fondamentales que les droits des enfants, il occupait une position de responsabilité et de représentation. Sa présence dans la Loge « Les Fils et Filles d’Ariane », aux côtés de figures éminentes comme le Garde des Sceaux Gérard Sabater, lui donnait un rôle majeur dans la défense des victimes de violences, défense à laquelle l’Obédience a cru devoir, depuis longtemps, manifester un légitime attachement… mais avec quelques inconséquences, comme on le voit aujourd’hui, puisqu’aucune mesure immédiate n’a été prise pour le démettre de ses fonctions, inaction du Conseil de l’Ordre qui contraste avec la rapidité avec laquelle d’autres affaires, moins graves, ont été traitées par le passé.

Guillaume Trichard ex Grand Maître du Grand Orient

En 2024 par exemple, le Grand Maître Guillaume Trichard avait informé les 52 000 membres du GODF, en seulement trois jours, de la mise en examen de Daniel Keller sur instruction de l’affaire par son Garde des Sceaux Nicolas Pénin pour suspicion de collusion avec l’extrême-droite. Cette comparaison, soulignée par les opposants à l’actuelle direction, met en évidence une troublante hiérarchie des valeurs : une vague suspicion de collusion politique avec l’extrême droite rapportée dans un seul journal a déchaîné les foudres du couple Pénin-Trichard en 2024, alors qu’une complicité passive, assortie d’un faux témoignage avéré en justice dans une affaire retentissante de pédocriminalité, dûment constaté par toute la presse (une quarante de publications), a laissé de marbre ou de glace le Bureau du Conseil de l’Ordre de l’actuel Grand Maître Pénin au futur Grand Maître Bertinotti, en passant par le Garde des Sceaux Sabater. On a l’impression que les petits jeux politiques internes l’emportent aisément devant la pseudo justice maçonnique (qui n’est en France qu’un pouvoir disciplinaire, la République ne reconnaissant aucun ordre de justice privé) sur la vérité concernant la « peau des enfants », dans une enceinte judiciaire publique. Triste tropisme !

Une gouvernance sous pression

Philippe Guglielmi

Le 26 juin 2025, ce n’est que sous la pression de Philippe Guglielmi, Très Sage et Parfait Grand Vénérable, qui lui a adressé une lettre comminatoire la veille à la suite de la publication du Canard Enchaîné, que Nicolas Pénin finit par agir. Sandillon est traduit devant la Section Permanente du GODF à l’unanimité des Conseillers, dans un silence pesant. Cette décision, bien que nécessaire, est jugée insuffisante par de nombreux membres. En effet, aucune mesure forte n’a été prise, comme le retrait de la délégation de Sandillon ou une communication claire réaffirmant les valeurs éthiques de l’obédience. L’article 7 du Règlement Intérieur du Conseil de l’Ordre, qui permet de démettre un membre du Bureau par au moins 25 voix, n’a pas été actionnée. De même, le Garde des Sceaux Gérard Sabater, informé des faits dès le 19 mai, n’a pas engagé de procédure disciplinaire avant que la presse, notamment 450.fm et Le Canard enchaîné, ne rende l’affaire publique.

Cette inertie institutionnelle contraste avec les attentes des membres, qui exigent des mesures exemplaires : l’éviction immédiate de Sandillon de son office, sa traduction devant la justice maçonnique pour atteinte aux intérêts généraux de l’Ordre et actes contraires à l’honneur (article 93, alinéas 2 et 3) et une déclaration publique forte condamnant les violences faites aux enfants et présentant des excuses aux victimes, déclarations publiques dont la rue Cadet ne s’est guère montrée avare en bien des circonstances… À ce jour, seule la traduction devant la Section Permanente a été actée, laissant Sandillon, en droit, toujours Grand Officier délégué aux droits des enfants – une situation jugée « inacceptable » par d’anciens Grands Maîtres, d’anciens Conseillers de l’Ordre ou de la Justice maçonnique.

Quelques soutiens controversés

Cécile Révauger

Malgré la gravité des faits, le Frère Sandillon bénéficie encore du soutien de certains membres influents du GODF. Parmi eux, Cécile Révauger, Professeure émérite de l’université Bordeaux-Montaigne – initiée en 1982 à la GLFF, elle rejoint le GODF en 2013 et est membre du Ve Ordre du Grand Chapitre Général-Rite Français du GODF (ordres de Sagesse) –, qui avait activement soutenu son élection au Conseil de l’Ordre en Aquitaine en 2023. Dans un commentaire sur le blog Hiram.be, la Sœur Révauger exprime son appui au Frère Sandillon, minimisant implicitement les accusations, sans mesurer que son soutien manque quelque peu de base légale ou éthique et que l’amitié ne saurait primer sur tout.

Rappelons, en effet, qu’il n’est pas nécessaire de faire l’objet de poursuites pour se voir appliquer l’article 93 : les actes contraires à l’honneur et à la probité, les atteintes aux intérêts généraux de l’Ordre, suffisent et Sandillon, traînant à sa suite une quarantaine d’articles relatant des faits attestés, coche toutes les cases pour être suspendu.

Pierre Mollier

De même, Pierre Mollier, récent glorieux retraité du musée de la franc-maçonnerie du « 16 Cadet », s’est exprimé en des termes jugés « incompréhensibles et indécents » par de nombreux Frères et Sœurs, notamment les parents d’enfants, sensibles à la gravité des faits reprochés. Impeccable historien, Pierre Mollier redonne vie, avec la Sœur Révauger, au mot fameux d’un vieil et célèbre moraliste français, Joseph Joubert : « Quand mes amis sont borgnes, je les regarde de profil. » Un peu court, tout de même ! Le propos, mais pas la corde… soit dit, en l’espèce, avec un brin d’ironie, puisqu’à tout prendre, il s’agit pour Sandillon d’être suspendu mais pas pendu ! Nous aimerions bien justement qu’en cette affaire, l’Obédience garde la tête sur les épaules, sans trop la rentrer dans le col, en faisant face avec droiture à ses responsabilités.

Ces quelques puissants soutiens, perçus comme niant la gravité des accusations, alimentent la colère des membres et renforcent le sentiment d’une crise de gouvernance d’autant qu’ils figurent sur un site tenu par un frère du GODF connu pour son appui constant aux directives de son obédience.

Géplu, dans son blog Hiram.be, tente également de défendre Sandillon en relayant ses explications : Sandillon affirme s’être battu pour maintenir le service de chirurgie à Jonzac, et le recrutement de Le Scouarnec aurait été motivé par ses qualifications, les signaux d’alerte étant, selon lui, « peu clairs » à l’époque. Cependant, cette défense est jugée irrecevable par beaucoup, étant donné que Sandillon savait, dès 2007, par ses propres conversations avec Le Scouarnec, la gravité des faits reprochés à ce dernier, le faux témoignage en justice de Sandillon semblant peu importer à Géplu…

Un passé trouble au Centre Hospitalier de Jonzac

L’affaire Sandillon ne se limite pas à son faux témoignage dans l’affaire Le Scouarnec. Le Dr Sandillon, récidiviste dans sa gestion douteuse des questions de pédocriminalité, était président de la Commission Médicale d’Établissement du Centre hospitalier de Jonzac lorsque le Dr Jean-André Cuot, condamné en 2008 pour détention d’images pédopornographiques, y fut embauché comme anesthésiste. Pendant des années, le bloc opératoire de Jonzac a ainsi été sous la responsabilité de deux individus impliqués dans des affaires de pédocriminalité, Cuot et Le Scouarnec. Cette situation, qui n’a pris fin qu’en 2020 avec la suspension de Cuot à la suite du déclenchement du scandale de l’affaire Le Scouarnec, soulève de multiples questions sur la vigilance de Sandillon, en tant que président de la commission médicale d’établissement, et tout simplement en tant que praticien hospitalier ainsi que sur les procédures de prévention des EIG (événements indisérables graves) au sein de l’hôpital. Le tableau semble, pour le moins, s’assombrir pour le Dr Sandillon, ne croyez-vous pas ?

Une justice maçonnique sous contrainte de temps

La plainte contre Sandillon, si elle est jugée recevable par le président de la Chambre Suprême de Justice Maçonnique (CSJM), devra être transmise à la Section Permanente dans un délai de trente jours. Les parties disposeront ensuite de quinze jours pour produire leurs mémoires avant l’audience. Avec le Convent approchant, il est peu probable que la justice maçonnique puisse rendre un verdict avant cet événement clé, ce qui renforce l’urgence d’une prise de position claire de la part des responsables du GODF qui aurait dû intervenir dès le moi de mai.

Une crise éthique et un appel à l’action

Cette affaire, au-delà du cas personnel de Sandillon, interroge la capacité du Grand Orient de France à incarner les valeurs qu’il proclame. Avant de chercher à réparer la République, ne serait-il pas urgent d’envisager la possibilité de réparer les victimes en les respectant par un acte marquant ? L’absence de mesures immédiates et fortes, comme le retrait de la délégation de Sandillon ou une communication publique présentant des excuses aux victimes, alimente un sentiment de défiance parmi les membres. D’anciens Grands Maîtres, Conseillers de l’Ordre ou de la Justice Maçonnique s’interrogent sur l’impasse éthique du Conseil de l’Ordre actuel et sur le sort qui sera réservé au rapport moral qu remonte au 30 avril 2025 dans sa version définitive. Tout se qui s’est passé depuis le 30 avril en mai, juin et juillet n’y figurera pas.

En conclusion, le GODF se trouve à un tournant. La gestion de cette crise risque d’écorner gravement la crédibilité de ses instances dirigeantes, mais aussi sa capacité à rester fidèle à son engagement humaniste. Les délégués au Convent, par leur droit d’interpellation, ont désormais la responsabilité d’agir en faveur de réformes et de sanctions à la hauteur des enjeux. Sans cela, l’obédience risque de voir son image passablement ternie, tant en interne qu’auprès du grand public. Le silence du Conseil de l’Ordre jusqu’au 26 juin 2025, son absence d’excuses publiques aux victimes, etc., rappellent à certains la complicité reprochée à d’autres institutions face à des scandales similaires. En attendant, l’affaire Sandillon reste un symbole douloureux des tensions entre éthique proclamée et inaction institutionnelle, un défi que le Grand Orient de France devrait relever avec courage et détermination, fût-ce au prix de quelques vielles amitiés fraternelles. C’est peut-être cela conjuguer à haut niveau éthique de conviction et éthique de responsabilité.

Les Conseillers de l’Ordre actuels et surtout le Grand Maître Pénin et son bureau devraient commencer à s’inquièter d’un possible vote de défiance de leur rapport moral par le Convent

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