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29/08/24 : Conférence « Albert Schweitzer : le courage au service de la fraternité »

Les Entretiens d’Été du Collège Maçonnique ont l’honneur de vous inviter à une soirée exceptionnelle et une belle rencontre. Avec Damien Mougin, un leader humaniste au service de l’Humanité, le 29 jeudi 29 août 2024 à 19h30, via Zoom.

Sur la thématique estivale « Quelle modernité pour les Vertus ? », Damien Mougin interviendra sur « Albert Schweitzer : le courage au service de la fraternité ».

Cette rencontre sera aussi une occasion unique de découvrir le parcours inspirant de Damien Mougin et d’échanger sur les défis contemporains que rencontrent les vertus humanistes dans notre monde actuel.

Damien Mougin : un leadership inspiré au service de l’Humanité

Damien Mougin incarne l’exemple d’un engagement constant et passionné au service de causes humanistes, guidé par des valeurs profondes et un sens aigu de la solidarité. Son parcours, à la fois riche et diversifié, témoigne d’une volonté inébranlable de mettre ses compétences au service des autres, que ce soit dans le domaine de la santé, du développement touristique ou dans des missions humanitaires en Afrique.

Damien Mougin

Un parcours atypique et multi-facettes

Damien Mougin commence sa carrière dans le secteur de la gestion des entreprises hôtelières et touristiques. Rapidement, il devient consultant en développement touristique, démontrant ainsi une capacité à innover et à restructurer des entreprises avec succès. Cette première expérience le conduit à diriger une entreprise familiale, où il met en œuvre des stratégies de restructuration qui marqueront durablement la viabilité de celle-ci.

Son parcours professionnel prend un tournant décisif lorsqu’il se dirige vers le secteur de la santé. Damien Mougin devient successivement Directeur Général de cliniques appartenant au groupe CLININVEST-SUEZ, puis Président du Directoire de TONKIN Investissements à Lyon. Dans ce cadre, il supervise un ensemble de huit sociétés d’exploitation, comprenant 2500 salariés et 350 médecins. Sa gestion efficace et son leadership visionnaire permettent à ces entités de prospérer dans un environnement de plus en plus complexe.

Son engagement humanitaire et sa vision humaniste

Lambaréné au Gabon, ancien Hôpital Albert Schweitzer

Animé par des valeurs humanistes profondes, Damien Mougin se tourne vers l’Afrique pour poursuivre son engagement en tant que Directeur Général de l’Hôpital Albert Schweitzer à Lambaréné, au Gabon, tout en assurant simultanément la direction de la Fondation Albert Schweitzer. Sous sa direction, ces institutions continuent d’incarner l’héritage de Schweitzer, un modèle de fraternité et de respect de la vie.

Quelques années plus tard, Damien Mougin met son expertise au service d’une société d’économie mixte qu’il crée et pilote dans le cadre d’une délégation de services publics. Cette initiative est un nouvel exemple de son engagement à utiliser ses compétences pour le bien commun.

Aujourd’hui, il occupe le poste de directeur de transition pour des collectivités territoriales en France, tout en poursuivant des missions humanitaires en Afrique, notamment dans la lutte contre le Sida, la santé communautaire et la production d’eau potable. Ces actions témoignent de son dévouement continu à des causes humanitaires de premier ordre.

Une influence marquante et durable

Damien Mougin occupe plusieurs rôles clés dans des organisations prestigieuses. Il est vice-président de la Fondation Internationale de l’Hôpital Albert Schweitzer à Lambaréné, ancien Président de l’Association des musées d’Alsace, Président de l’Association Française des Amis d’Albert Schweitzer (AFAAS), et administrateur de Tourisme sans Frontière.

Il préside également l’Association du Musée Schweitzer de Kaysersberg, où il continue de promouvoir l’héritage de Schweitzer à travers des initiatives culturelles et éducatives.

En tant que rédacteur en chef des Cahiers Albert Schweitzer et des Études Schweitzériennes, Damien Mougin contribue à la diffusion de la pensée et de l’œuvre d’Albert Schweitzer, ajoutant une dimension intellectuelle à son engagement pratique.

Les modérateurs   

Sylvie Pierre, Maître de conférences à l’Université, Sciences de l’information et de la communication, Membre de la Loge Nationale de Recherche de la Grande Loge Féminine de France

Franco Huard, Directeur Consultant Qualité Informatique (CGI Canada) ; Directeur du Media “Sous le bandeau“, Grande Loge ANI du Canada

Les organisateurs 

Alain-Noël Dubart, Ancien Grand Maître de la Grande Loge de France 

Marie-Thérèse Besson, Ancienne Grande Maîtresse de la Grande Loge Féminine de France

Nous espérons vous retrouver nombreux pour cette soirée qui promet d’être riche en enseignements et en échanges.

Infos pratiques

Pour participer à cet événement, merci de vous inscrire.

La conférence sera enregistrée et disponible en ligne après l’événement sur le site du Collège Maçonnique.

Le miroir en Franc-maçonnerie

En Franc-maçonnerie, de Narcisse en Alice, grâce au symbole du Miroir, certains Rites et Rituels nous proposent une quête de nos profondeurs afin d’opérer en nous la promesse de l’aube proposée par la Voie de l’Art Royal. C’est en plongeant à travers sa symbolique proposée par la démarche initiatique que nous pourrons, de spirale en spirale, tenter de résoudre l’éternelle question la plus intime qui soit : qui suis-je ?

Nous nous trouvons tous, un jour ou l’autre, confrontée à notre image. La façon dont nous agissons ou réagissons face à cette image fait aussi de nous ce que nous sommes. Si, en société, notre image nous est renvoyée tronquée par notre ego et le regard de l’Autre, au cœur de notre solitude matinale c’est à une fine et fragile couche de sable chauffée, doublée d’une couche réfléchissante d’aluminium ou d’argent et d’un tain fait de plomb ou de cuivre que nous confions la responsabilité de notre image lors de nos ablutions hygiéniques journalières. Ce n’est qu’après cette première étape de l’intime que nous confions à l’Autre notre image illusoirement maîtrisée. Certains l’expose au monde par l’intercession réflexive de leur téléphone portable afin de se réaliser dans la réalité au silicium anthropocène de nos réalités augmentées. Ce reflet de Narcisse devient alors accessible à tous dans l’espérance d’une universalité que l’on voudrait pourtant unique…. Cathédrales de sable érigées sur le sable comptant les heures bleues avec la fragilité annoncée d’un verre à peine refroidit… mais… sans moi… sans l’autre… qui suis-je? En soi, avec l’autre, serions-nous “nous” tout en étant “je” ?

Le Miroir de Narcisse : Connais-toi toi-même…

Je n’ai pas de réponse définitive à ces si vastes sujets toujours en mouvement. L’image que j’ai de moi me renvoie plus au Mercure qu’au Soufre ou au Sel. De ce fait, je ne peux que partager ici les intuitions que j’ai reçues, par l’Initiation que j’ai vécue, au Rite Écossais Ancien et Accepté de la Grande Loge de France et la Connaissance que j’ai tirée de mon Chemin de vie et artistique.

En Franc-maçonnerie, le Miroir m’a présenté une première porte possible dès le Cabinet de Réflexion(s), la seconde m’est apparue dans la Chaîne d’Union. Si j’ai franchi allègrement la surface de la seconde Porte-Miroir en jouant les Alice j’avais oublié la première! Les épreuves m’ont vite fait comprendre que dans un premier temps, il serait au plan initiatique, plus question de Narcisse que d’Alice ! Il s’est opéré lors de l’ouverture de ce premier rideau initiatique une diffraction optique de l’image que j’avais de moi-même. Elle a retrouvé son unité lors de mon troisième acte. « À nos actes manqués ! » nous disent les ménestrels et les alchimistes de l’âme. Freud parlait lui d’Unheimlich.

Dans ma quête artistique, j’ai pu conter mes explorations dans un travail, présenté sur table au jury de l’École Nationale Supérieure de la Photographie d’Arles. Ce projet d’installation artistique, initiatique et surréaliste avait pour nom Unheimlich. Il m’a permis de valider le Master 2 de cette école consacrée à la photographie plasticienne. A l’origine, ce travail était une Planche s’appuyant sur l’image et la langue des oiseaux et présentée en vidéo-projection en Loge sous le nom “Le testament de Narcisse”. 

Dans cette quête des profondeurs nous invitant à explorer notre Nadir, il convient de rencontrer des nautoniers avisés. Dans son œuvre, Carl Gustav Jung prévient, des risques encourus, l’explorateur imprudent qui se laisserait griser par la narcose, tout en attestant de la qualité du minerai rencontré lors de ses plongées. C’est aux Sœurs et Frères entourant l’Apprenti de veiller, autant que faire ce peu à ce que par l’ivresse des profondeurs, il ne devienne pas lui-même la part des anges de son exploration. Cependant le juste équilibre individuel est à trouver car de ce minerai récolté dépend le Grand Œuvre de ce énième apprenti “Capitaine Nemo” parfois imprudent. Si en latin “Nemo” signifie “personne” on lui trouve d’autres sens dans d’autres langues : livre, rectangle, homme, distribuer, partager…

« Celui qui combat des monstres doit prendre garde à ne pas devenir monstre lui-même. Et si tu regardes longtemps un abîme, l’abîme regarde aussi en toi. »

Aphorisme 146 – Par delà le bien et le mal – Friedrich Nietzsche

Le Miroir au Rite Écossais Ancien et Accepté

Au Rite Écossais Ancien et Accepté de la Grande Loge de France, le Miroir fait sa première apparition dans le Cabinet de Réflexion. C’est dans ce premier reflet rencontré, dans l’intime pénombre de la lueur d’une bougie que se déroule l’épreuve de la Terre. Cette plongée dans son reflet invite le Profane à se percevoir Narcisse au bord de l’étang, plongé dans les reflets multiples de ses réflexions philosophico-testamentaires. Il pense coucher là sur le papier, ce qui compte le plus pour lui, ce qu’il a de meilleur… et c’est ce meilleur de lui-même qu’il pensait léguer à la postérité qui sera brûlé et plongé dans l’eau de l’oubli. Il ne le sait pas encore mais tout ce qu’il n’a pas écrit, ce qu’il a gardé en lui donc, deviendra ce Plomb qu’il devra transmuter.

Si le « Tout » est le Miroir et l’image s’y reflétant, ce “Tout” est aussi tout ce qui entoure l’objet de verre, d’argent et de plomb. C’est la première phase de la mise en abîme initiatique, lorsque le “un” trouve une place dans l’équation métaphysique prescrivant au cœur de l’Ouroboros : “Un, le Tout” .

Nautonier & Apprenti ©Stefan von Nemau – 2015

Il en est aussi ainsi du Miroir tendu au Néophyte par son Présentateur dans la Chaîne d’Union. Après lui avoir expliqué que l’ennemi le plus à craindre se trouve le plus souvent derrière soi, il lui est demandé de se retourner. Il se retrouve alors face à sa propre image dans le Miroir tendu devant lui par le Frère présentateur qui est le plus souvent celui qui a pris l’engagement rituel d’être son Parrain, son tout premier nautonier. C’est la seconde apparition du Miroir au R.E.A.A. Là aussi c’est l’Univers Symbolique tout entier qui est à embrasser et embraser. Ce Miroir n’est qu’une « Fenêtre sur cour » où l’initié encore prisonnier de sa Loge ne peut confronter sa vision qu’aux ombres passant devant les Fenêtres grillagées de sa caverne. C’est le second Miroir, celui permettant la mise en abîme de la démarche Initiatique.

C’est par son assiduité, son engagement au Travail, sa Fraternité sans-cesse en révélation et, au besoin, au secours de ses Frères que l’initié franchira les “étapes-reflets” uniques de son Voyage dans sa nuit, guidé par la lumière flamboyante de sa bonne étoile. Mais, à chaque étape il retournera au Miroir et dans le Secret Sacré de son Intime peut-être percevra-t-il de plus en plus le vaste Univers dont il n’est qu’une infime partie tout en en étant le Tout. Se connaître soi-même commence par visiter son royaume intérieur. C’est l’inventaire dans les “prés verts” du poète, du philosophe et de l’alchimiste.

Le ternaire Miroir-image-celui qui le tient :

Je me suis toujours naïvement demandé comment, dans le Tarot de Marseille, l’ermite pouvait aller de l’avant tout en regardant en arrière. Peut-être se sert-il d’un miroir comme un rétroviseur permet de faire une marche arrière en voiture. Dans le cas de l’ermite, ce rétroviseur lui permettrait-il de percevoir un futur possible dans la trajectoire inversée de son chemin dépassé?

Etude au crayon de l’ermite pour un prochain Objet Visuel Non Identifié ©Stefan von Nemau 2024

De plus, l’occidental que je suis, lit et écrit des de gauche à droite. Si par convention on peut dire que le Passé est symboliquement à gauche et l’Avenir symboliquement à droite, le Miroir, par l’inversion de cette latéralité, peut-il permettre de percevoir l’avenir par la supposée simple exploration du Passé? L’exploration de l’Avenir et du Passé varient-ils selon le sens de lecture et d’écriture? Sont-ils justes de simples déductions? Quid alors de la symbolique de la courbe du Temps dans les textes de la Tradition écrits en araméen, hébreux, arabe et autres langues du moyen-orient et traduits en grec, latin, français et autres langues occidentales? Et je n’ouvre pas ici le débat sur la symbolique de la verticalité/latéralité des textes d’extrême-orient!

Nous sommes notre plus grand inconnu

Le mot important ici est “inversé”. Le miroir nous propose une image de nous telle qu’elle est perçue par l’autre. Il nous propose une image où sa droite est à ma gauche et ma gauche à sa droite. De même, lorsque nous prenons un “selfie” de nous-mêmes ou que nous sommes filmés pour un “Zoom” via la caméra frontale de nos téléphones ou tablettes, nous regardons une image miroir, donc inversée, de nous-mêmes. Seul le photographe peut prendre une image justement coordonnée de nous… sauf que lorsque nous la regarderons sur le papier ou l’écran, notre gauche sera à droite et notre droite à gauche. Nous nous percevons donc toujours tel que l’autre nous perçoit lorsque nous sommes face à cet huis de vert argenté.

Petit exercice : amusez-vous à annuler l’effet “miroir” de votre caméra et rencontrez l’étrange étranger qui s’y trouve. Vous reconnaîtrez-vous comme tel?

Heureusement, la nature est bien faite et vient compenser cela. Observez-vous attentivement dans un miroir… vous ne verrez de vous qu’un seul côté. Il est impossible d’observer en même temps et nettement nos deux yeux. Nous pouvons jouer avec l’arête du nez tout au plus mais même dans ce cas le reste de notre visage est flou. Rappelez-vous l’épisode du borgne avec Louis De Funès dans La Folie des Grandeurs !

Une réponse possible à l’énigme de l’ermite et celle de l’inversion de la latéralité-polarité-temporalité (droite-gauche) de l’image, nous est donnée par le Rituel du R.E.A.A : “… Ce sont les lumières du passé que l’on dirige dans l’obscurité de l’avenir!”. Ainsi si l’image perçue n’est pas la Réalité, elle peut cependant être une lumière éclairant le Chemin qui y mène.

Pourquoi observer et questionner en conscience tout cela ?

Parce que même si “l’ennemi” vient parfois de derrière soi, le vaste monde n’est pas le Miroir. Le Miroir n’est que la fenêtre d’une image tranchante, friable et fragile comme le cristal dans lequel se reflète notre ego. Comme nous, le Miroir est partie du Tout mais il n’est pas le Tout, et comme nous dépendons aussi de celui qui tient le Miroir il convient de prendre soin de l’autre comme nous prenons soin de nous car nous ne formons qu’un à ce moment sans oublier que nous ne sommes pas que notre image ou notre reflet.

Faisant partie d’une Loge de St Jean, je vais citer son Évangile [appréhendé comme texte de la tradition], lorsque Jésus dit lors de son dernier repas: 

« Je vous donne un commandement nouveau: c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples: si vous avez de l’amour les uns pour les autres »

(Jean 13, 34-35)

Je citerai aussi Victor Hugo :

… persistons, nous qui voulions qu’on promette et non qu’on menace, nous qui voulons qu’on guérisse et non qu’on mutile, nous qui voulons qu’on vive et non qu’on meure.

Ces grandes lois d’en haut sont avec nous. Il y a un profond parallélisme entre la lumière qui nous vient du soleil et de la clémence qui nous vient de Dieu.

Il y aura une heure de pleine fraternité, comme il y a a une heure de plein midi. Ne perds pas courage, ô pitié! Quant à moi, je ne me lasserai pas, et ce que j’ai écrit dans tous mes livres, ce que j’ai attesté par tous mes actes, ce que j’ai dit à tous mes auditoires, à la tribune des pairs comme le cimetière des proscrits, à l’assemblée nationale de France comme à la fenêtre lapidée de la place des Barricades de Bruxelles, je l’attesterai, je l’écrirai, et je le dirai sans cesse : il faut s’aimer, s’aimer, s’aimer !

Victor Hugo , juin 1875

Le Miroir d’Alice : la Loge et l’univers initiatique où se tisse le fil de Soi[e] par la quête de l’Autre

Ent[r]er dans le miroir – ©Stefan von Nemau – Aquarelles & album photo 19° – O.V.N.I – 2013

Donc toute image est contenue dans un volume, lui-même rattaché à son cadre de référence. Ainsi, le Miroir initiatique, lorsqu’il est présent matériellement dans un Rite et dans un Rituel, ne peut pas être détaché de celui-ci. Pour autant, son absence matérielle ne signifie pas pour autant son absence spirituelle. Ne pourraient-on pas convenir que le Tout formé par la Loge, dans sa globalité humaine, spirituelle et matérielle est un Miroir qu’il nous faut traverser?

Dans “La traversée du miroir”, suite “d’Alice au pays des Merveilles”, écrit en 1871 par Lewis Carrol, c’est en traversant le miroir que le pion symbolisé par Alice devient Reine à l’issue des épreuves traversées, comme l’Apprenti devient Compagnon puis Maître et au-delà si la Voie Initiatique, son Travail et l’envie lui rendent cela possible. Peut-être est-ce cela la seconde partie, plus récente, de la citation : “…et tu connaîtras l’univers et les dieux!”. Le Miroir est un univers asymétrique clos, une enceinte à l’intérieur de laquelle s’écoule l’amniotique voie qui mène de soi à la Soie.

A nos symétries asynchrones – Photographie ©Bruno Vigneron – Photoplastique ©Stefan von nemau – 2024

Même si nous sommes inlassablement tentés par la symétrie, humainement elle n’est pas l’équilibre et l’image qu’elle renvoie donne naissance à des monstres. Ainsi, peut-être que l’image que nous nous faisons de la Loge est conforme à celle que nous nous faisons de nous-mêmes, de notre Chemin, de nos représentations intérieures… peut-être que la Loge est un autre Miroir contenant une image particulière à chacun, commune à tous dont nous ne percevons qu’un côté.

Le Miroir du pair : « reconnu comme tel »

Enfin, si je suis la logique du Miroir, si “mes pairs me reconnaissent comme tel” c’est que “Je” devrais me reconnaître comme « Tel », dans mes majuscules et mes minuscules. Je ne parle pas ici d’une certitude « egotique » de soi conférée par une initiation « rituellique » sans âme où “je” serait un “jeu” mais bien d’un processus lent et mystérieux où le “Je” est [l’enjeu – lent jeu – l’ange – lange] lorsque l’obscur lumineux se fragmente et devient numineux, ou lorsque les antagonismes se transcendent en oxymore.

Tel serait “l’en-je” de la traversée?

L’Initiation, dans ses injonctions Nietzschéennes nous dit “Va et deviens!”. Elle finit même par nous chasser du Temple pour nous forcer à emprunter notre seul Chemin, celui de notre confrontation au monde et sa réalité brute; non celui de notre conformation à celui-ci et ses normes de papiers, par delà nos illusions calcinées et nos incohérences mortifères. Le Chemin de l’expérience réalisée est le Chemin de la véritable reconnaissance spirituelle de soi, d’un état d’être au monde, lorsque l’initié rencontre son Feu spirituel intérieur et s’embrase en “Ignitié”.

Quel que soit notre genre humain, cette ignition est un état que nous atteignons parfois lorsque nous oublions le Miroir, l’image, les sens et leurs représentations ; lorsque nous cessons de vouloir à tout prix féconder le monde de notre empreinte revêtue du sceau d’une illusoire supériorité misogyne ou misandre. C’est en réalisant pleinement notre “Soufre solaire” et notre “Mercure Lunaire” que leur union dans la danse du “Sel vivant” traversera le verre, l’argent et le plomb du Miroir dans l’espoir assumé de l’Unité retrouvée.

Parmi les questions restées sans réponses, celles-ci me tracassent : comment sortir de l’illusion du Miroir? En brisant sa “mal-diction”, en le transcendant ou bien encore en le laissant baigner dans une lumière d’indifférence?

Vivre le symbole du Miroir c’est [perce-voir] l’unité du monde qui nous entoure et que nous traversons pour mieux y renaître. [Perce-voir] c’est quitter la persistance rétinienne laissée par le feu des ombres de la caverne qui nous enferme à l’intérieur de ce [vert] que l’on voulait [di-amant]; c’est accepter d’Être sans [ça-voir]; c’est accueillir [l’évide-danse]; c’est vivre le sable en [ça-bleu] dans lequel volent les alouettes d’un miroir oublié par la [pleine].

“Prends place, fais Silence et vis l’instant!” me murmure encore mon nautonier depuis [l’Or-Riant] [éther-né-Elle]…

A lire aussi sur 450.FM :

“Miroirs dites-moi qui je suis” de Solange Sudarskis

« La vitre et le miroir » de Franck Fouqueray

A lire aussi sur www.lesyeuxducyclope.fr :

En complément, et pour les plus téméraires, lire aussi « La complainte du miroir » dans les encadrés de l’article La [transe-en-danse] du miroir initiatique, Unheimlich et Le testament de Narcisse.

Simulacre de démocratie dans les Convents maçonniques

Chaque année, les Obédiences organisent leurs grand-messes afin de redonner une légitimité aux Officers élus, à commencer par leur chef, j’ai nommé le Grand Maître ! Tout cela s’appuie sur un principe hautement démocratique, si cher à la France, notre belle terre des Droits de l’Homme. Ainsi, notre structure maçonnique répond parfaitement à ce vieux concept post révolutionnaire du pouvoir par le peuple et pour le peuple.

Celui ou celle qui a déjà assisté à un Convent sait que chacun est muni d’une « zapette » servant à valider ou invalider les choix proposés par le Président du Convent et tout son collège d’Officiers élu démocratiquement lui aussi. Tout cela est donc conforme au principe républicain.

Pouvons-nous en conclure que la Franc-maçonnerie est une organisation démocratique ?
Le sujet est-il clos ?

Lors des Convents, une problèmatique surgit. Les représentants de loges votent des dizaines de motions, des propositions… sans en connaître vraiment les tenants et aboutissants. Tout cela finit par devenir un simple simulacre de démocratie.

Comme se plaisent à l’affirmer certains dirigeants de ma connaissance, la Loge est un « ventre mou ». Les décisions ne sont pas démocratiques, puisque le débat réel n’a pas lieu au sein des Loges tout au long de l’année. La plupart des problèmes est mis sous le tapis et tout le reste se vote à coups de zapettes entre deux autres textes de moindre importance. En résumé, la démocratie est étouffée par elle-même. Trop de démocratie tue notre démocratie maçonnique. Faire monter sur une scène durant 1 minute le défenseur d’une idée, avant de la faire voter… puis passer au second… est-il réellement un processus sain pour débattre dans une assemblée d’humains ?

Pour prendre un parallèle, chacun sait que les États-Unis représentent la plus grande démocratie du monde. Tout ou presque fait l’objet d’un vote au Sénat.

C’est ainsi que la pizza est devenue au pays de l’oncle Sam un légume en 2011.

Oui oui, vous avez bien lu, un légume ! Pourquoi la pizza est-elle devenue légume me direz-vous… car 32 millions d’enfants déjeunent à la cantine chaque midi (60% des élèves), cela représente un marché colossal. Pour le bien-être des petits estomacs américains, dans un souci d’équilibre alimentaire bien évidement, la loi oblige les cuisines des chérubins à leur servir des légumes. Ainsi, le fameux ketchup Heintz (dont le gendre de la famille n’est autre que John Kerry) a pu augmenter considérablement ses parts de marché grâce à ce tour de passe-passe. Comme la pizza est garnie de ketchup, elle devient « tout naturellement » un légume, CQFD. La démocratie a permis de faire voter par les sénateurs le changement d’affectation culinaire des pizzas, incroyable non ?

Alors, quel est le rapport entre la pizza et nos Loges ? Pour répondre, on pourrait affirmer que les deux systèmes, dits démocratiques se ressemblent beaucoup. On consulte, on discute mais au final, le groupe dirigeant reste au pouvoir et se passe le maillet de génération en génération. C’est ainsi que depuis 3 siècles, des maçons financent l’immobilier des Temples grâce à leurs capitations, sans que quiconque trouve à redire sur cette formidable accumulation de patrimoine qui ne sert en aucune manière la communauté maçonnique (ni aucune autre cause d’ailleurs). Nous pouvons aussi parler des avantages dont profitent les représentants démocratiquement élus (avions, restaurants, hôtels…). Tout cela a un coût qui rend, année après année les capitations de plus en plus onéreuses et par conséquent, de moins en moins accessibles aux classes qui peinent à boucler les fins de mois.

Alors quelle est la solution, car il en existe !

Nous avons évoqué la pseudo démocratie des USA, parlons maintenant d’une réelle démocratie avec nos voisins helvètes. La Suisse est une démocratie directe. Les citoyens disposent non seulement du droit de vote, normal en démocratie, mais aussi du droit de voter sur des questions concrètes encore nommé votation. La Suisse est gouvernée par un Conseil fédéral, un collège de 7 membres. 7 conseillers fédéraux, 26 gouvernements cantonaux, 2172 conseils communaux et 5,5 millions d’électeurs président aux destinées de la Suisse. Une confédération qui rend ce pays hautement démocratique et chacun peut aujourd’hui comparer le résultat avec la nôtre.

Alors comment réformer la démocratie maçonnique ?

Rien de plus simple, réduisons toutes les fonctions inutiles et coûteuses de nos Obédiences. Instaurons une démocratie directe avec un débat permanent chaque mois au sein des Loges sur les questions de l’Obédience. Il suffit ensuite que chaque membre transmette son vote par voie électronique depuis son téléphone, sur son accès privé. Ainsi, les décisions viendront réellement de la base. Plus de palabres en haut lieu, moins de dépenses en déplacements. Les discussions se feront dans les Loges et l’exécutif aura pour mission de mettre en œuvre le résultat des votes permanents.

Seulement, cela implique quelques changements dans les mentalités.

Changements à la tête, car vous imaginez bien que les dirigeants actuels et leurs dignes successeurs ne seront pas les promoteurs d’un tel projet. Ce serait dévaloriser la fonction du chef, si chère à notre pays (pourtant régicide) et surtout, cela réduirait les avantages de la fonction et probablement la gloire qui en résulte. Avouons-le tout net, le Français est en guerre perpétuelle contre son chef, il peste, il grogne… mais il reste un veau* bien docile. (* Comparaison de Charles de Gaulle en juin 40)

La démocratie est le plus long des processus, car il lui faut de la patience. C’est pourquoi, il faudra à la base, une certaine période d’acclimatation pour s’impliquer dans les décisions de gestion. Il suffit de voir la difficulté à gérer une simple Loge lorsque le Vénérable se transforme en Homme-orchestre. Il est évident que la démocratie n’est pas innée pour tous, il faut du courage et de l’énergie.

En conclusion, la question qui se pose ressemble à : « Quelle maçonnerie voulons-nous pour ce XXIe siècle ? »

Les Rituels et la spiritualité maçonniques s’évanouissent peu à peu de nos travaux de Loges pour laisser la place à des causeries de comptoirs de café du commerce, la défiance envers l’ordre devient de plus en plus puissante, la maçonnerie est en recherche de sens et d’utilité, car tout le monde sait qu’elle n’est plus le moteur intellectuel ni social de notre société.

Il est donc bon de s’interroger sur son devenir et l’intérêt qu’elle va représenter pour les générations futures. Une chose est certaine, il y a de quoi se réunir pour en parler. Ce sera d’ailleurs le premier pas vers la démocratie.

Le débat est ouvert…

Complotisme : « 1789 a été orchestré par des puissances occultes »

De notre confrère geo.fr – Par Olivier Rajchman

Et si c’était un coup des anglais ? Ou des philosophes ? Des protestants ? Des francs-maçons ? Le premier cas de complotisme d’ampleur semble être apparu avec la Révolution française, lorsque des esprits suspicieux ont remis en question le caractère spontané du combat contre les privilèges.

Ce qu’il faut savoir sur cette théorie du complot

  • La théorie Les événements de 1789 puis le jacobinisme, marqués par la défense des droits humains, les idées de nation et de solidarité nationale, sont l’œuvre, affirment à l’époque certains auteurs anti-révolutionnaires, des philosophes des Lumières, des protestants, des Anglais, des loges maçonniques…
  • Apparition En 1789, la Révolution provoque une telle sidération qu’aussi bien des tenants de la monarchie absolue que certains révolutionnaires ne croient pas en son origine spontanée. En 1797, les écrits de l’abbé Augustin Barruel ravivent le phénomène en pointant des coupables présumés, notamment les francs-maçons.
  • Objectifs Délégitimer un mouvement populaire et victimiser l’Ancien Régime en réduisant les événements de 1789 à un complot factieux.
  • Aujourd’hui Le complotisme antimaçonnique demeure une obsession des royalistes et de la droite extrême, qui remettent aussi en cause les Lumières, associées au cosmopolitisme et à l’athéisme.

Cinq mois – entre l’ouverture à Versailles d’états généraux présidés par un Louis XVI en majesté et le retour à Paris du même souverain et de sa famille, piteux et sous escorte – suffirent pour mettre à bas une structure politique, religieuse et sociale millénaire. Cent cinquante-quatre jours exactement, entre le 5 mai et le 6 octobre 1789, pour que s’effondre la monarchie la plus puissante d’Europe, sidérant les protagonistes eux-mêmes. Il semblait pour beaucoup inconcevable que cette année ayant accouché d’une Révolution à l’avenir incertain soit le fruit combiné d’une défiance de longue date contre l’absolutisme royal et d’une conjoncture mêlant crises économique et alimentaire. 1789 ne pouvant être rationnelle, il fallait la justifier par des facteurs souterrains !

La paranoïa ambiante suscita quantité de théories. «Il y avait, d’une part, le complotisme de l’instant, qui jetait le soupçon sur un ou des acteurs précis, vus comme responsables de ce qui venait de se produire – ce qui est naturel, les contemporains ne disposant pas de tous les tenants et les aboutissants de faits récents, remarque l’historien Edmond Dziembowski (auteur de La Main cachée, éd. Perrin, 2023). Différentes sont les tentatives d’élucidation a posteriori des origines de la Révolution, qui s’enfermaient dans des explications témoignant d’une obsession quasi monomaniaque.» L’ère du conspirationnisme venait de commencer.

Une Grande Peur dans les campagnes

Dans la première catégorie, on retrouve ceux qui réagirent de façon épidermique dès l’été 1789. «Ce qu’on appelle la Grande Peur est née de la crainte, dans les campagnes, que des bandes de brigands ne viennent semer la terreur chez les paysans, explique Edmond Dziembowski. Progressivement s’est jointe à cette croyance l’idée que les adversaires du changement, les aristocrates, feraient tout pour discréditer la Révolution. » L’information était alors rare, et les nouvelles mettaient du temps pour circuler entre Paris et la province. Celles qui arrivaient dans les campagnes, depuis la prise de la Bastille, paraissaient «invraisemblables dans l’univers mental de l’époque», pour reprendre les termes de l’historien spécialiste du XVIIIe siècle Antoine Lilti.

C’est dans ce contexte que circula la rumeur qu’une élite noble cherchait soit à affamer la population, soit à provoquer des désordres pour faire échouer la Révolution. Le bruit courait que les seigneurs conspiraient pour brûler les récoltes. Qu’ainsi privé de nourriture, le peuple n’aurait plus la force de se révolter. Que certains nobles employaient des brigands courant les campagnes pour faucher les épis. Et que, dans les régions frontalières, des aristocrates cherchaient à faciliter l’entrée de troupes étrangères qui pilleraient les greniers à blé.

Ces histoires avaient beau être infondées, elles ne cessaient de s’amplifier. Le syndrome touchait Paris, comme le montrent les discours à l’Assemblée nationale et les articles des journaux révolutionnaires. Dès le 20 juillet 1789 et jusqu’à début août, la panique poussa les paysans partout en France à s’armer, et à ravager les domaines seigneuriaux… encourageant la Constituante à voter, la nuit du 4 août, l’abolition des droits féodaux et des privilèges de classes. Ainsi, une théorie du complot à l’échelle nationale aboutit-elle, par ses conséquences, à l’une des plus importantes réformes de l’histoire de France.

La rumeur d’une main cachée britannique

Au même moment circulait l’idée que l’Angleterre, après avoir pris contact avec des agitateurs à Brest, aurait ses agents à l’Assemblée nationale et préparerait même un débarquement ! «Cette croyance au complot anglais reposait sur un fait indiscutable, rappelle Edmond Dziembowski. Louis XVI avait soutenu les Américains dans leur combat pour l’indépendance. Il était donc logique que l’Angleterre se venge, d’autant que son Premier ministre en 1789 était William Pitt, fils de Pitt l’Ancien, artisan des victoires de la guerre de Sept Ans, qui avait fait de l’Amérique du Nord un sous-continent britannique. Pitt le Jeune aurait donc vengé son père, dont l’œuvre avait été détruite par l’intervention française aux côtés des insurgents américains.» Une théorie séduisante, mais qui ne tient pas. «En réalité, en 1789, Pitt adopta une stricte neutralité vis-à-vis de la France», précise l’historien. Cela n’empêcha pas cette rumeur d’une main cachée britannique de prospérer.

Début 1793, l’Angleterre étant en guerre contre la République, les Montagnards reprirent aux aristocrates l’idée d’un complot britannique. «Ils estimaient que, dès le début, la Révolution avait été sous influence anglaise, ce qui, selon Robespierre, expliquait son caractère initialement modéré, poursuit Edmond Dziembowski. La monarchie tombée, Pitt aurait encouragé l’anarchie en France pour mieux faire triompher la contre-révolution. » C’était aussi l’opinion de Camille Desmoulins, qui voyait «des émissaires de Pitt partout». Cette théorie perdura jusqu’au Directoire, dont la propagande, pour laver la Révolution de ses excès, accabla la perfide Albion, accusée de tous les crimes commis en France – y compris ceux de la Terreur !

Et si les grands coupables étaient les penseurs des Lumières ?

Les premières accusations visant les philosophes émanaient des contre-révolutionnaires, qui dénonçaient leur lutte contre le trône et l’autel. L’abbé Royou estimait ainsi, en 1791, que «la philosophie [avait] jeté les fondements de la Révolution en rétrécissant les esprits par l’égoïsme ; en corrompant les coeurs par l’impiété et la débauche». Dans l’autre camp, le savant et sage Condorcet affirmait lui-même dans Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit humain, paru après sa mort, qu’«avant d’avoir été politique, la Révolution a été intellectuelle […], la philosophie [ayant] dirigé les principes de la Révolution ». Mais pouvait-on prêter réellement à Montesquieu et à Voltaire de telles intentions ? Dans ses Mémoires pour servir à l’histoire du jacobinisme, publiés en 1797, l’abbé Barruel, prêtre jésuite et essayiste polémiste, prétendit que les philosophes des Lumières avaient sciemment ourdi un complot visant à la destruction de la religion et de la monarchie.

Une théorie qui relève du fantasme. Même Rousseau, le plus «démocrate» de tous, n’a jamais prôné une révolution pour abattre l’ordre existant, rappelle Edmond Dziembowski. «Les philosophes, prétendus révolutionnaires, étaient en réalité des réformateurs, intégrés dans la société d’Ancien Régime, dit l’historien. Le seul qui a sans doute compris qu’un monde allait disparaître est Diderot qui, en 1780, fit une analyse lucide de la révolution américaine, prélude à ses yeux de grands changements en Europe. Mais, à aucun moment, il n’appela ses compatriotes aux armes contre une “tyrannie”. On le voit, on est très loin d’une conspiration de l’intelligentsia !»

Les protestants jugés suspects

Autres suspects de choix : les cultes en minorité dans une France catholique. Dans Les Véritables auteurs de la Révolution de France, paru en 1797, l’activiste royaliste François-Nicolas Sourdat affirmait que la Révolution était le produit de «la conjuration ancienne profondément ourdie par les calvinistes contre la religion et la monarchie». Il partageait la théorie du juriste et journaliste Galart de Montjoie qui prêtait aux protestants et à «leur secte» la même conduite que les révolutionnaires et fustigeait leur «double identité».

Mais pourquoi les protestants, qui bénéficiaient depuis 1787 d’un édit de tolérance royal leur accordant un état civil et le droit de vivre en France sans être inquiétés en raison de leur religion, auraient-ils encouragé une révolution ? Les réformés avaient beau ne s’être rebellés ni durant la Fronde, ni après la révocation de l’édit de Nantes, les soupçons les concernant étaient aussi vieux que le protestantisme ! «Déjà au XVIe siècle on les imaginait fomenter un projet républicain, observe Edmond Dziembowski. On extrapola les propositions de théologiens réformés qui, tel Duplessis-Mornay, plaidaient pour une monarchie tempérée.

Pour ceux qui leur faisaient ce procès, 1789 était l’aboutissement d’un projet de vengeance cent ans après la révocation de l’édit de Nantes. Sans compter que le principal ministre, Necker, était protestant et originaire de la république de Genève. Populaire parce que réformateur, tenant compte de l’opinion publique, il était dangereux pour les tenants de la monarchie absolue.» En 1790, dans Les Conspirateurs démasqués, le royaliste en exil Antoine Ferrand accusa Necker d’avoir provoqué la pénurie alimentaire de 1789 en ayant attiré près de 15 000 ouvriers étrangers aux portes de Paris. Ignorant l’accident météorologique de 1788 – un orage homérique qui ravagea la France le 13 juillet –, véritable responsable du saccage des récoltes et de la disette, Ferrand réécrivait l’histoire. Il jouait «sur un sentiment antiprotestant d’une partie de la population et du clergé, poursuit Dziembowski. Puis, la société se déchristianisant, cette théorie passa au second plan».

Les francs-maçons, de nouveaux Templiers ?

Restait la thèse du complot franc-maçon, élaborée en 1791-1792 par l’abbé Lefranc, suivi, cinq ans plus tard, par l’abbé Augustin Barruel. Les deux hommes diabolisèrent les Lumières et les maçons. Ces derniers, épris d’égalité, diffusaient de fait le message des philosophes. Barruel établit même une généalogie entre francs-maçons et Templiers : en préparant la Révolution, les maçons (voire les Illuminati) auraient cherché à venger le fameux ordre du Temple abattu par le pape et Philippe le Bel au XIVe siècle. «Par-delà ce folklore, les accusateurs s’appuyaient sur une “preuve” politique, observe Edmond Dziembowski. Le cousin du roi, le fameux Philippe-Égalité, duc d’Orléans, était en effet grand maître du Grand Orient de France. Frondeur et chef de l’opposition à Louis XVI, il conspirait. Politique médiocre, il fut débordé par la Révolution. Mais cela ne découragea pas Barruel, qui associait l’essor, réel, des loges maçonniques à celui des clubs jacobins.» Le prêtre jésuite partait de faits réels, exagérés pour en tirer des conclusions fausses. Les francs-maçons furent nombreux à prendre part à la Révolution, mais jamais ils n’ont prétendu l’avoir préparée en amont et en secret.

De Dumas à l’ère des «fake news»

Époque après époque, ces croyances ont perduré. Parfois pour le bonheur de la littérature du XIXe siècle : elles inspirèrent Alexandre Dumas, qui fit du complot maçonnique l’origine de la Révolution française dans son roman-fleuve Joseph Balsamo (1853). On les retrouve aussi au XXe siècle chez l’auteur monarchiste Charles Maurras, qui désignait comme ennemis les «quatre États confédérés» qu’étaient, selon lui, les protestants, les Juifs, les francs-maçons et les «métèques» (au sens grec du terme, pour désigner les étrangers vivant en France, soupçonnés de ne pas être de vrais patriotes).

Une liste à peine retouchée par le régime de Vichy, qui épargna toutefois les protestants mais y rajouta l’ennemi héréditaire : l’Angleterre. Le complotisme n’aurait-il besoin, pour justifier les malheurs du temps, que de boucs émissaires ? C’est ce qu’avait expliqué, à sa façon, le révolutionnaire modéré Jean-Joseph Mounier, dans un essai réfutant, dès 1801, ces théories alambiquées : «On a substitué à des causes très compliquées, des causes simples à la portée des esprits les plus paresseux et les plus superficiels. Toutes les explications sont devenues faciles.» Des mots qui ont toujours du sens dans un XXIe siècle livré aux rumeurs les plus folles. En désignant des coupables tout trouvés pour expliquer un événement jugé sidérant, les mille théories hasardeuses sur les causes de la Révolution portaient en elles les ingrédients du conspirationnisme, préfigurant les tourments des siècles suivants, de l’ère médiatique et des fake news.

Fraternité : Le liant essentiel pour un monde meilleur

Jean-François Guerry, dans son ouvrage La Fraternité au cœur de la Franc-Maçonnerie, livre une réflexion profonde et érudite sur un concept essentiel, mais souvent négligé : la fraternité. C’est à dire que beaucoup en parle et peu la pratique !

L’ouvrage met, ici et maintenant, les points sur le « i » et barre au « t ». Il s’agit d’un plaidoyer pour la réhabilitation de cette valeur, non seulement au sein de la franc-maçonnerie, mais aussi dans le monde moderne en général.

Claude Collin – Photo blog Jean-Laurent Turbet

Ce livre se présente comme une exploration de la genèse, des défis et de l’importance vitale de la Fraternité dans l’histoire humaine. Il est préfacé par Claude Collin, passé très puissant souverain grand commandeur du Suprême Conseil de France (SCPLF).

Dès les premières pages, Jean-François Guerry nous plonge dans l’essence même de la fraternité, qu’il décrit comme un besoin fondamental de l’humanité, un besoin de reconnaissance et d’appartenance. À travers une analyse historico-sociologique, il démontre comment la fraternité a évolué en parallèle avec la société humaine, devenant un marqueur ontologique qui distingue l’homme des autres créatures. La fraternité, selon Jean-François Guerry, n’est pas simplement une vertu ou un idéal moral ; elle est une nécessité pour la survie et l’évolution de l’humanité.

Caïn tue Abel, Peter Pau -Rubens -c.-1600.

En revisitant les textes bibliques, notamment l’histoire de Caïn et Abel, Jean-François Guerry illustre les tensions et les défis auxquels la fraternité a toujours été confrontée. Il explore comment la notion de Fraternité a été mise à l’épreuve par le droit de l’autre et l’unicité, des concepts qui sont au cœur des relations humaines depuis l’Antiquité. À travers ces récits, l’auteur montre que la fraternité n’est pas seulement une question de lien familial ou social, mais un défi spirituel et philosophique qui pousse les hommes à transcender leurs égoïsmes pour reconnaître l’autre comme un frère.

L’une des forces de l’ouvrage réside dans sa capacité à traverser les époques et les cultures pour montrer l’universalité de la fraternité. Jean-François Guerry explore les traditions orientales, notamment l’hindouisme et le bouddhisme, où la compassion et la bienveillance sont des principes centraux. Il met également en lumière les contributions des philosophes grecs comme Pythagore, Socrate, et Aristote, qui ont conceptualisé la fraternité comme un principe éthique et cosmologique. Ces incursions dans différentes cultures et philosophies montrent que la fraternité est un idéal universel, transcendant les époques et les frontières.

Mais l’analyse de Jean-François Guerry ne s’arrête pas à l’histoire ou à la philosophie. Il nous invite à réfléchir sur la place de la fraternité dans le monde moderne, un monde où elle semble avoir été reléguée au second plan. L’auteur plaide pour une renaissance de la fraternité, affirmant que seule cette valeur peut permettre aux hommes de surmonter les divisions qui les séparent. Il voit en la franc-maçonnerie une institution capable de porter cet idéal, de le vivifier et de le répandre dans le monde. Pour Jean-François Guerry, la fraternité n’est pas seulement un concept à vénérer… C’est une pratique à adopter, un engagement à vivre au quotidien !

Selon l’auteur, la franc-maçonnerie a pour mission de former des hommes meilleurs pour créer un monde meilleur. Elle cherche à apporter la lumière de l’esprit dans la matière, à élever l’homme au-dessus de ses instincts pour le rendre plus fraternel. Dans cette perspective, la fraternité devient le ciment de l’humanité, le lien invisible qui unit les hommes au-delà de leurs différences et de leurs divergences.

Jean-François Guerry insiste également sur le fait que la fraternité ne doit pas être corporatiste ou exclusive, mais universelle. Elle doit englober tous les êtres humains, quelle que soit leur origine ou leur condition. Cette fraternité universelle est un défi, une épreuve, qui pousse chaque individu à chercher le bien, le vrai, et le beau, pour atteindre l’harmonie collective.

Nous attirons l’attention du lecteur sur le fait que les droits d’auteur sont versés aux fonds de dotation de la Grande Loge de France « Fraternité & Humanisme » qui a pour but de mettre en œuvre la solidarité qui doit relier et unir tous les êtres humains, de favoriser la vie culturelle et de contribuer aux recherches scientifiques et historiques sur la franc-maçonnerie et ses valeurs humanistes.

Jean-François Guerry, , la bio

Jean-François Guerry, né en 1947 à Vanves, est un homme dont le parcours reflète une profonde passion pour la philosophie et la franc-maçonnerie. Après des études en agriculture, il débute une carrière dans l’industrie pharmaceutique avant de fonder une société de transactions pharmaceutiques. Il reçoit la lumière en 1987 au sein de la Grande Loge Nationale Française (GLNF), au Rite Écossais Ancien Accepté.

En 2013, fort de son engagement et de son parcours exemplaire au sein de la franc-maçonnerie, il fait le choix de rejoindre la Grande Loge de France (GLDF) et le Suprême Conseil de France (SCDF), deux institutions reconnues pour leur attachement au Rite Écossais Ancien Accepté (REAA), conférant à son engagement une légitimité indéniable au sein de ce rite prestigieux.

Il anime « La Franc -Maçonnerie au Cœur », un « blog d’information, de conversations sur le thème de la Franc-Maçonnerie, des textes en rapport avec la Franc-Maçonnerie, comptes rendus et conseils de lectures » et organise des conférences en Bretagne qui attirent de nombreux participants.

Jean-François Guerry est également l’auteur de Exercices spirituels antiques et Franc-maçonnerie (Académie Maçonnique Provence-Éditions Ubik, Coll. l’intégrale, 2021).

La Fraternité au cœur de la Franc-Maçonnerie

Jean-François GuerryLe Compas dans l’œil, 2024, 240 pages, 22 €

Le site de l’éditeur.

21/09/24 : Grande Loge de France – Conférence publique à l’occasion des Journées européennes du patrimoine

La Grande Loge de France (GLDF) vous invite à une conférence exceptionnelle le samedi 21 septembre 2024 à 14h, dans le 17e arrondissement de Paris. Cette conférence, animée par Brice Chatel, membre de l’obédience et portera sur le thème :

« Être Franc-Maçon en Grande Loge

de France aujourd’hui »

Brice Chatel

Brice Chatel est reconnu non seulement pour son engagement profond au sein de la GLDF, mais aussi pour son approche moderne et actuelle de la franc-maçonnerie. À travers cette conférence, il partagera son expérience et explorera ce que signifie être franc-maçon dans le contexte contemporain. Son profil jeune et dynamique est une invitation à capter l’attention d’un public plus jeune, curieux de découvrir ou de redécouvrir les valeurs et les pratiques de la franc-maçonnerie.

Logo JEP

Journées Européennes du Patrimoine 2024 (JEP 2024)

Cette conférence s’inscrit dans le cadre des JEP 2024 un événement annuel qui célèbre la richesse du patrimoine culturel européen. Les JEP offrent une occasion unique de découvrir des lieux habituellement fermés au public et de mieux comprendre les traditions qui façonnent notre société.

Le thème des JEP 2024 est axé sur deux aspects principaux : « Le patrimoine des itinéraires, des réseaux et des connexions » et « Le patrimoine maritime ». Ces thèmes mettent en lumière l’importance des chemins, des routes, et des réseaux, qu’ils soient historiques, commerciaux, ou culturels, et leur rôle dans la formation du patrimoine tel que nous le connaissons aujourd’hui. Le thème maritime, quant à lui, célèbre l’héritage lié à la mer, aux ports, et aux activités maritimes qui ont façonné les sociétés côtières.

Ces thèmes offrent aussi une opportunité unique de redécouvrir comment les échanges à travers les réseaux et les itinéraires ont influencé le développement des civilisations, en explorant des traces laissées sur les territoires par des routes anciennes, des fortifications, et d’autres infrastructures historiques. Ils invitent également à réfléchir sur l’impact durable du patrimoine maritime sur notre culture et notre histoire.

Ne manquez pas cette opportunité de plonger au cœur de la franc-maçonnerie et de rencontrer Brice Chatel, un acteur clé de cette institution prestigieuse.

Grande Loge de France (GLDF), rue Louis Puteaux, Paris 17e arr.
Grande Loge de France
Grand Temple Pierre Brossolette

Infos pratiques

Hôtel de la Grande Loge de France, Grand Temple Pierre Brossolette, 8 rue Louis Puteaux, 75017 Paris.

Grande Loge de France, le site. Inscription obligatoire sur le site de la GLDF.

Dessin de François Morel : « La joie des Tenues dématérialisées »

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Comme chacun le sait, la Franc-maçonnerie a traversé une période difficile avec la privation des Tenues en Loges. Fort heureusement, certains Ateliers ont su s’adapter et ont profité des joies de la technologie pour simuler les travaux habituels. Bon, il est vrai que tout n’a pas été parfait… la preuve.

Nicolas Penin : Un syndicaliste à la tête du GODF pour défendre l’école publique et la laïcité

Le Convent 2024 du Grand Orient de France (GODF), qui s’est tenu à Lille du 21 au 24 août 2024, a été un événement marquant pour cette obédience maçonnique, tant par ses débats profonds que par les résolutions adoptées. Cet événement annuel, central dans la vie de l’obédience, a permis de revenir sur les grands enjeux qui secouent la République française et la société internationale, tout en réaffirmant l’engagement des francs-maçons du GODF dans la défense des valeurs républicaines.

Lille Grand Palais

Introduction et ouverture du Convent

Le Convent a débuté par les propos du Président du Convent, qui ont mis en lumière la gravité de la situation politique actuelle en France. Il a souligné le besoin urgent de « réparer la République », pointant du doigt les dangers liés à la montée des extrêmes et à la brutalisation de la vie politique française. La résolution « Réparer la République » a été présentée comme une réponse nécessaire à ces défis, appelant à un sursaut des loges pour défendre les valeurs de la République et préparer les décisions à prendre lors du prochain Convent en 2025.

Les débats sur l’internationalisation du GODF

L’un des points saillants du Convent a été la discussion sur le développement international du GODF. Le débat, introduit par le Président du Convent, a révélé les défis et les opportunités liés à l’implantation des loges à l’étranger. Le GODF, qui a historiquement étendu son influence dans les anciennes colonies françaises, continue aujourd’hui de rayonner à travers le monde, notamment en Europe, en Afrique, et en Amérique Latine. Ce rayonnement est cependant accompagné de questionnements sur les coûts et les relations interobédientielles, nécessitant une stratégie claire pour le futur.

Le rapport d’activité et les défis actuels

Le discours du grand maître, Guillaume Trichard, a présenté le rapport d’activité du Conseil de l’Ordre, tout en abordant les tensions internes au GODF. Il a dénoncé les attaques diffamatoires subies par certains membres du Conseil de l’Ordre, soulignant que ces comportements allaient à l’encontre des valeurs maçonniques.

Guillaume Trichard – Photo GODF

Guillaume Trichard a ensuite détaillé les actions menées durant l’année, en particulier sur trois chantiers prioritaires : la communication et l’extériorisation de l’Obédience, son internationalisation, et son assise immobilière. Il a également mis en avant les défis économiques auxquels l’obédience fait face, exacerbés par l’inflation et l’augmentation des coûts.

La politique internationale du GODF

Le rapport sur la politique internationale a également été un temps fort du Convent. Le GODF, en tant qu’obédience libérale et adogmatique, se veut un modèle pour le développement de la franc-maçonnerie dans le monde. Cependant, ce développement n’est pas sans difficultés, notamment en ce qui concerne la diversité des situations internationales et la nécessité de clarifier les relations interobédientielles. Le GODF propose de hiérarchiser ces relations pour mieux refléter les réalités des engagements réciproques.

La SCI Cadet International

Un autre sujet important a été la création de la SCI Cadet International, une société civile immobilière destinée à faciliter la gestion des biens immobiliers pour les loges en France et à l’étranger. Cette initiative vise à répondre aux difficultés rencontrées par les loges pour trouver des lieux de réunion sécurisés et à mieux gérer les biens immobiliers en dehors de la SOGOFIM.

Nicolas Penin

Le nouveau grand maître

Nicolas Penin, Conseiller Principal d’Éducation (CPE) et ancien responsable syndical à l’UNSA, a été élu grand maître du Grand Orient de France (GODF) ce jeudi soir, succédant ainsi à Guillaume Trichard. Né en 1975, Nicolas Penin est originaire de la région Nord-Pas-de-Calais et, à 48 ans, il prend la tête de la principale obédience maçonnique française.

Auparavant Garde des Sceaux du GODF, Nicolas Penin est en troisième année de son premier mandat au Conseil de l’Ordre. Conformément au Règlement Général du GODF, il ne pourra occuper le poste de grand maître qu’un an, mais rien ne l’empêche de revenir pour un second mandat après une année de rémission, comme le fait actuellement son prédécesseur, Guillaume Trichard.

Nicolas Penin, qui a fait carrière dans l’Éducation nationale et a été secrétaire régional du syndicat Unsa-Éducation pour les Hauts-de-France, est un fervent défenseur de l’école publique et de la laïcité. Dès son élection, il a souligné l’importance de renforcer ces piliers républicains, avertissant que toute faiblesse dans ces domaines pourrait favoriser le séparatisme et la ségrégation.

Grille du GODF, salle du Conseil de l’Ordre – Photo Coll. privée

Le bureau du Conseil de l’Ordre, aux côtés de Nicolas Penin, se compose de grands maîtres adjoints Philippe Roblin, Patrice Genet, et José Moreira, ainsi que du grand orateur Christian Brebion. Les affaires intérieures seront gérées par Nadine Asuncion, grand secrétaire aux affaires intérieures (GSAI), assistée de Fabrice Millon Desvignes. Les affaires extérieures seront supervisées par Jean-Edouard Ombetta, grand secrétaire aux affaires extérieures (GSAE), avec Gloria del Carmen Guerra Villalobos comme adjointe. Pierre Bertinotti et Edouard Ramarosson prennent en charge la trésorerie, tandis que Gérard Sabater occupe le poste de Garde des Sceaux, et Jacques Martinot celui de grand hospitalier.

Avec 54 400 membres et 1395 loges, le GODF est la plus grande obédience maçonnique française. Nicolas Penin, en tant que nouveau grand maître, représente l’une des rares figures visibles de cette organisation, déterminée à défendre les valeurs républicaines et maçonniques en ces temps de défis sociaux et politiques.

Le Convent 2024 a ainsi été marqué par une prise de conscience des défis politiques, économiques, et sociaux actuels, tant en France qu’à l’international. Le GODF, fidèle à son engagement pour la République et l’humanisme, a réaffirmé sa volonté de jouer un rôle central dans la défense des valeurs démocratiques et de promouvoir une politique internationale en phase avec ses idéaux. Les débats et résolutions adoptées lors de ce Convent posent les bases des actions futures de l’obédience, tant sur le plan national qu’international.

Matthew Szramoski, Grand Surveillant Senior de Virginie, nommé nouveau directeur exécutif du G. Washington Masonic Memorial

De notre confrère freemasonsfordummies.blogspot.com – par Christopher Hodapp

La George Washington Masonic National Memorial Association d’Alexandria, en Virginie, vient d’annoncer la nomination cette semaine de Matthew Szramoski au poste de directeur exécutif, avec effet immédiat. Il remplace Karl V. Hopkins qui a été nommé suite au départ à la retraite en août dernier de George Seghers, directeur exécutif de longue date.

Frère Szramoski était récemment directeur du développement du Conseil suprême de la juridiction sud du rite écossais ancien et accepté à Washington, DC. Avant cela, il était responsable des programmes jeunesse de la National Rifle Association.

Dans le monde maçonnique, il est l’actuel Grand Surveillant Senior de la Grande Loge AF&AM de Virginie et est Past Master de trois loges de Virginie : Yorktown 205, John Blair 187 et Mount Vernon 219. Dans le rite d’York, il est un ancien commandant de la Commanderie d’Old Dominion 11, un ancien grand prêtre du chapitre 83 d’Uroy Harris des Royal Arch Masons. Il est titulaire de la Croix d’honneur de Chevalier d’York, membre des Chevaliers francs-maçons et franc-maçon de rite écossais (SJ) de 33°.

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Représenter le Jugement dernier au Moyen Âge (Par Laurent Ridel)

Du site de Laurent Ridel decoder-eglises-chateaux.fr

Selon le christianisme, le Christ jugera, à la fin des temps, les vivants et les morts pour les séparer entre élus et réprouvés. Ce moment fatidique est le sujet d’impressionnantes sculptures et peintures dans les églises.

Vous n’y échapperez pas : le thème du Jugement dernier s’affiche sur quelques églises romanes fameuses (Conques, Autun) et sur les plus belles cathédrales de France (Paris, Amiens, Bourges, Rouen…)

De toutes les images monumentales du christianisme, il est la vedette. Occupant souvent tout l’espace au-dessus de la porte, il montre un Christ revenu sur Terre pour juger les hommes. Sa figure domine une foule de personnages (une centaine parfois) dans des scènes pittoresques ou terribles.

En tant que visiteurs, vous avez donc tout intérêt à savoir les comprendre et les analyser.

Mais avant de vous donner quelques clés de lecture, savez-vous d’où vient le thème du Jugement dernier ?

L’histoire du Jugement dernier

Le christianisme n’en a pas le monopole. Les religions du croissant fertile croyaient qu’un Dieu jugerait les morts selon leurs mérites. Dans l’Ancien Testament, les juifs distillent l’idée. Ainsi le prophète Daniel annonce : « Beaucoup de ceux qui dorment au pays de la poussière se réveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour l’opprobre et l’horreur éternelle ».

Le Nouveau Testament affine le concept. Saint Jean dévoile sa vision du jugement final dans l’Apocalypse : « Puis je vis un trône blanc, et celui qui était assis dessus [comprendre Dieu] et je vis les morts, les grands et les petits, devant le trône. Des livres furent ouverts. Et un autre livre fut ouvert, celui qui est le livre de vie. Et les morts furent jugés selon leurs œuvres, d’après ce qui était écrit dans ces livres […] Quiconque ne fut pas trouvé écrit dans le livre de vie fut jeté dans l’étang de feu » (Ap. 20, 11-15).

Jugement dernier d'Albi
Chaque mort possède son livre de vie. Détail du Jugement dernier, peint dans la cathédrale d’Albi, XVe siècle.

Ce jugement interviendra au moment du retour de Jésus sur terre. Quand ce jour arrivera-t-il ? Sauf Dieu, « personne ne le sait », précise l’Évangile de Matthieu.   

À partir de ces quelques indices bibliques, les artistes sont sollicités dès le IXe siècle par le clergé et les moines pour représenter la scène sur les murs de leurs églises. Ils vont devoir faire preuve d’une capacité d’interprétation.

Les parties d’un Jugement dernier

Sa lecture commence couramment par le bas.

Tympan au Jugement dernier de la cathédrale de Bourges (XIIIe siècle).

1. Le réveil des morts.

Hommes et femmes sortent de leurs tombeaux. Vu leur long séjour en terre, on s’attendrait à tomber sur des squelettes désarticulés, mais les artistes leur ont fait recouvrer chair et jeunesse.

Jugement dernier de Rampillon
Résurrection des morts. Jugement dernier de l’église de Rampillon (Seine-et-Marne).

2. La pesée

Saint Michel sur la cathédrale Notre-Dame de Paris
Un démon essaie de perturber le résultat du pèsement par saint Michel. Portail principal de la cathédrale Notre-Dame de Paris.

Assistant le Christ, saint Michel est chargé de la psychostasie, traditionnellement appelée la pesée des âmes. En vérité, corrige l’historien Jérôme Baschet, l’archange mesure moins l’âme que le mérite de la personne. Sur un plateau sont mises les bonnes actions du défunt et sur l’autre, les mauvaises. Si le plateau penche du côté droit (du point de vue du spectateur), le ressuscité a globalement démérité ; il est bon pour l’enfer.

Pourtant, on a beau tourner les pages de la Bible, on n’y trouve aucune allusion à ce jugement à l’aide d’une balance. Les origines sont sûrement à rechercher du côté du Nil. Sur quelques papyrus de l’Égypte antique, on peut surprendre une scène où on procède au jugement d’un mort en pesant son cœur.

Livre des morts d'Ani
Dans le livre des morts du scribe Ani, le dieu à tête de chacal Anubis pèse le cœur d’Ani contre la plume de Maât. Le monstre Ammut dévorera l’âme d’Ani si le verdict juge qu’il n’est pas digne. Scène du chap. 30b du Livre des morts, vers 1400 av. J.-C., British Museum/Wikimedia commons

L’idée a sûrement infusé dans le christianisme oriental avant d’arriver en Occident.

3. Le cortège des damnés

Sanctionnée par le verdict de la balance, notre victime rejoint donc les autres condamnés. De temps en temps, l’artiste prend un malin plaisir à glisser dans la file un roi, un évêque, un noble afin de montrer que tout le monde y passe, qu’importe son rang social. On peut aussi surprendre des émotions sur les visages — l’accablement, la douleur — alors que les personnages sculptés au Moyen Âge sont habituellement impassibles, sauf les démons.

4. L’enfer

Encadré justement par ces démons, le cortège est avalé par une grande gueule, le Léviathan. Ce monstre marin, évoqué dans l’Ancien Testament (Livre de Job précisément), représente la porte de l’Enfer.

Jugement dernier de la cathédrale de Bourges
Les réprouvés sont conduits puis plongés par des démons jusque dans une marmite, marmite qui sort de la gueule du Léviathan.

Parfois le tympan et ses abords montrent véritablement l’enfer. Au milieu des flammes, les démons s’y démènent pour infliger une variété de supplices aux damnés. La créativité des sculpteurs peut s’exprimer, prête à suppléer au silence de la Bible. Couramment, les humains mijotent collectivement dans une grande marmite. Cauchemar en cuisine. Parfois, chacun reçoit un tourment approprié : la luxurieuse a les seins gobés par des crapauds ou des serpents tandis que le glouton est forcé à ingurgiter pour l’éternité…

Les textes des clercs ajoutent quelques détails sur l’enfer : l’atmosphère est pestilentielle et chaude. Il y fait toujours sombre malgré les flammes. Ce feu a l’horrible particularité de ne pas consumer si bien que la victime brûle et souffre pour l’éternité.

5. Le cortège des élus

En sens inverse (toujours à gauche, du point de vue du spectateur), les élus se dirigent vers le Royaume des Cieux. Au passage, ils ont récupéré la des vêtements qui sortent de je ne sais où. À la différence des damnés, les visages expriment le ravissement. On le comprend : le Ciel est réputé lumineux, frais et délicieux. Tous bénéficieront de la vision perpétuelle de Dieu. Dans le cortège des bienheureux, des anges jouent les guides et parfois les couronnent.

Jugement dernier de la cathédrale de Bourges.
Sur le portail central de la cathédrale de Bourges, les élus se réjouissent d’entrer au paradis. A gauche, saint Pierre est le gardien de l’entrée.

6. Le paradis

Il peut se confondre avec le cortège des élus.

Sinon, une porte, où se tient saint Pierre, en marque l’entrée. Il faut reconnaître que, pour nous visiteurs, la représentation du paradis est moins pittoresque que celle de l’enfer : le sujet inspire moins les artistes.

Parfois, Abraham tient lieu et place de paradis à lui tout seul. Le patriarche tient dans un linge les corps des élus.

Le sein d'Abraham. Portail de la cathédrale d'Arles.
Le sein d’Abraham. Portail de la cathédrale d’Arles.

7. Le Christ en gloire

Trônant, il domine par la position et par sa taille l’ensemble du Jugement dernier. Parfois il montre ses mains et ses blessures afin de témoigner son triomphe face aux supplices et à la mort. Des anges l’accompagnent. Ils peuvent porter les instruments de la Passion (couronne d’épines, clous, lance…)

Le Christ juge, tympan du portail royal de la cathédrale de Bordeaux (vers 1250)

La plupart des Jugements derniers se conforment à ce schéma en 7 scènes. Si vous êtes attentifs, vous observerez cependant quelques différences.

Variantes du Jugement dernier

Malgré le nombre de scènes à sculpter, certains tympans arrivent à intégrer saint Jean et la Vierge Marie au pied du Christ. Leur rôle est de prier pour les morts en mauvaise posture afin d’obtenir la mansuétude du Christ.

À l’inverse, certains Jugements derniers sont présentés en version abrégée. Comme si le cadre restreint contraignait à éliminer certaines scènes à représenter. Est souvent sacrifié l’enfer. Le thème perd alors son côté dramatique et effrayant.

Jugement dernier, abbaye Saint-Seurin de Bordeaux
Jugement dernier, abbaye Saint-Seurin de Bordeaux, XIIIe siècle. Pas de cortèges d’élus et de damnés et pas d’enfer. Pas contre, Marie et saint Jean, agenouillés, sont bien là.

Il m’est arrivé de me tromper sur cette absence : l’enfer se trouve parfois déporté sur les voussures qui encadrent le tympan. 

Enfer sur la cathédrale Notre-Dame de Paris.
Sur le portail principal de la cathédrale Notre-Dame de Paris, l’enfer envahit le bas des voussures : des démons malmènent les damnés.

Pour le moment, mon inventaire est partiel : vous n’avez vu que des sculptures. Or le sujet s’étend aussi sur les peintures et les vitraux. Il faut le signaler, car, sinon, on en tire la fausse conclusion qu’après le XIIIe siècle, les Jugements derniers sont passés de mode.

Pas du tout. À la fin du Moyen Âge et à la Renaissance, les peintres notamment poursuivent la tradition.

Le Jugement dernier, peint dans la cathédrale d'Albi, XVe siècle.
Le Jugement dernier, peint dans la cathédrale d’Albi, XVe siècle.
Jugement dernier de Michel-Ange
Le plus célèbre des Jugements Dernier : celui peint par Michel Ange pour la chapelle Sixtine, début XVIe siècle (Wikimedia Commons)

Des images qui fonctionnent ?

Toutes ces représentations du Jugement dernier ne sont pas gratuites. Elles s’inscrivent dans « le christianisme de la peur », défini par l’historien Jean Delumeau. Le clergé expose les perspectives effrayantes de l’après-mort pour inciter les hommes et femmes à la vertu : confessez vos fautes, écoutez les clercs, mettez-vous dans les pas du Christ et vous échapperez à l’enfer.

Tympan au Jugement dernier. Abbatiale de Conques.
Tympan au Jugement dernier (vers 1120-1130). Abbatiale de Conques.

Ce discours en image était-il entendu ? « La grande affaire des hommes et des femmes du Moyen Âge est d’assurer leur salut », rappelle l’historien Jacques Le Goff. Leur grande préoccupation « n’est pas tant la mort elle-même que leur sort après la mort ».

La vue des démons et de leurs châtiments corporels les effrayait-ils ? On ne peut malheureusement pas se mettre dans la tête des fidèles qui passaient sous ces tympans ornés du Jugement dernier.

L’historien Jérôme Baschet tente néanmoins une réponse : « En dépit de leur omniprésence, il n’est pas certain que les représentations de l’au-delà aient toujours été aussi efficaces que le souhaitaient les clercs […] « les populations médiévales n’ont pas succombé à une peur panique de l’enfer ». Difficile de croire qu’un Dieu, réputé miséricordieux, condamne définitivement ses fidèles à des peines éternelles.

Parousie du Christ, cathédrale de Coutances.
La Parousie désigne le retour du Christ sur terre pour procéder au Jugement des morts et des vivants. Vitrail XVe siècle, cathédrale de Coutances, Manche.

L’AUTEUR

Laurent Ridel

Ancien guide et historien, je vous aide à travers ce blog à décoder les églises, les châteaux forts et le Moyen Âge.

Ma recette : de la pédagogie, beaucoup d’illustrations et un brin d’humour.