Un parallèle troublant peut être établi entre le plaisir, parfois nommé salaire, qu’éprouvent les francs-maçon(ne)s et celui qu’éprouvent les sapiosexuels. Explications.
Oui, cette fois-ci, allons-y pour nous jeter quelques fleurs. Y a pas d’mal à se faire du bien. Vous comme moi, j’en suis sûr, avez vu votre besoin de culture exploser après votre initiation. Vous avez aussi connu ces moments de pure extase intellectuelle à l’écoute d’une sublime planche ou des brillantes pierres ajoutées lors de la circulation de la parole.
D’où c’est-y que ça vient, cette insatiable envie d’en savoir plus, de comprendre toujours plus profondément ?
Thierry Ripoll, dans son dernier opus « Pourquoi je prends ma douche trois minutes de trop », nous le rappelle. Nous avons certes développé sciences et technologies nous rendant maîtres du vivant sur terre, mais nous restons équipés d’un bagage génétique datant du paléolithique. Comme chez toutes les espèces vivantes à reproduction sexuée, une compétition sélective se produit chez l’homme avant la formation des couples. L’évolution inscrit dans les comportements, via le circuit de la récompense, des critères favorisant la survie de l’espèce…et des gènes de ceux qui sont admis à se reproduire. Les mieux adaptés à l’environnement ont plus de chances de se qualifier.
Dans un environnement hostile tel qu’il était du temps des chasseurs-cueilleurs, la force physique était un atout incontestable. Mais voilà que nous vivons dans des métropoles, au sein de sociétés très organisées. Les relations sont structurées par plusieurs hiérarchies et codes. Le plus fort, dans ce nouveau contexte, se reconnaît à son aisance. Assurance et aisance financière, aisance de mouvement , mais aussi d’expression verbale ou écrite, appuyée sur une solide culture.
Nos traditions maçonniques privilégient l’oralité.
Et tiens, Marguerite Duras indiquait que « les femmes jouissent d’abord par l’oreille », et Fabrice Lucchini en avait un temps fait son expression favorite. Perso, j’adore découvrir d’abord l’intelligence d’un regard, puis la conversation présentant des points de vue personnels et fondés sur des faits, de la raison, de l’imagination, de la poésie, etc. Nous obtenons ainsi notre « salaire ». Vous aussi vous éprouvez alors une certaine excitation ? Si vous en êtes là ; eh bien je vous le dis : vous êtes devenu, au moins à un certain degré, sapiosexuel.
Sapiosexualité : voilà le terme utilisé pour désigner ces personnes qui considèrent l’intelligence comme principal facteur d’attraction sexuelle. L’origine du mot provient de “sapiens”, qui signifie sage ou savant. Votre esprit en est maintenant convaincu : le cerveau est le premier organe sexuel . Une personne du sexe que vous aimez, brillante comme indiqué ci-dessus, vous la trouverez attirante, même sexuellement.
Notons néanmoins que d’autres critères comme la beauté peuvent continuer à jouer en parallèle.
Cette notion, née dans les années 1990, et depuis bien creusée par les psychologues et les sociologues, date en fait de bien plus longtemps. A témoin, cette citation du père Platon : “L’amour est comme une échelle de gradation qui commence avec la beauté du corps pour ensuite s’approcher des idées et des gens qui bénéficient d’une intelligence privilégiée.” On y retrouve bien sûr la dualité qui va du matériel vers l’idéal , du monde sensible au monde intelligible, ce dernier ayant toutes les faveurs de Platon.
Nos chercheurs contemporains ont déterminé que les sapiosexuels réagissent émotionnellement face à des stimuli novateurs. Ils prêtent peu d’attention à tout ce qui est répétitif, et présentent souvent un trait de caractère nommé « ouverture à l’expérience ». Ça nous ressemble, non ? Nous sommes en effet particulièrement attirés par les discussions qui ouvrent l’esprit. Cette activation, d’abord seulement mentale, finit par s’étendre à d’autres niveaux comme le niveau physique, le niveau affectif et finalement, éventuellement, le niveau érotique.
Le phénomène, nous disent les psys, touche les deux genres. Cependant, il est plus souvent détecté chez les femmes. En effet, les stimulations visuelles leur suffisent moins souvent que les hommes. Le goût pour l’inattendu et l’effet de surprise alimente ce qu’on nomme l’intelligence érotique. C’est là qu’un risque peut naître : un effet de domination, par celui des partenaires qui a l’esprit le plus rapide, peut intervenir. Aussi il faut se poser les questions : « Et si ce n’était que de l’admiration, qui pourrait n’être que passagère ? » Et « Me sens-je inférieur ? »
Autre trait intéressant chez nos sapiosexuels : ils recherchent systématiquement la profondeur…qu’ils utilisent ou non la perpendiculaire.
A ce stade, j’espère que vous serez comme moi convaincus de l’existence d’un recouvrement partiel des populations maçonnes et sapiosexuelles.
Cela nous éclaire sur les racines darwiniennes du plaisir que nous obtenons en tenue.
Attention, chers frères et sœurs des loges mono-genre, ne vous emballez pas ! N’allez pas vous imaginer que l’on saute comme des animaux sauvages sur la première personne qui fait un brillant exposé ! Tout cela est largement inconscient, et la partie action sera sous le contrôle du filtre du surmoi et du moi conscient .
Je vous souhaite de nombreux petits éclairs de plaisir à l’écoute des riches et originales planches de nos rites continentaux !