jeu 03 octobre 2024 - 19:10

GLCS : Fin de la « start-up family » – Le TRGM Christine Sauvagnac accorde une dernière interview

Fin de mandat le mois prochain pour le Grand Maître de l’Obédience.

La GLCS vient de fêter sa vingtième année. Il aura fallu tout ce temps pour permettre aux fondateurs de poser les bases d’une petite Obédience « qui a tout d’une grande ». Durant les quatorze premières années, c’est le fondateur, Marcel Laurent qui a dirigé la maison. Puis les sept années suivantes, ce fut au tour de Christine Sauvagnac, de prendre le relai. Si certains commentateurs du paysage maçonnique reprochent à cette Obédience d’être une petite entreprise familiale, le couple s’en défend et pour couper court à tout débat, s’apprête à transmettre la charge à un membre élu, libre de ses gestes et de ses pensées.

Sylvain ZEGHNI Grand Maître national du DH (nouvellement élu) et Christine SAUVAGNAC TRGM de la GLCS.

La rédaction a rencontré Christine Sauvagnac dans le cadre de sa dernière interview avant sa descente de charge le mois prochain, afin de vous livrer, sans filtre ses réflexions et ses états d’âmes. Pour ceux qui affirmaient que la maison était pilotée par le patriarche fondateur, ils vont devoir reconsidérer leur jugement.

450fm : « Bonjour Grand Maître, devons-nous vous appeler TRGM ou simplement Christine ? »

Christine Sauvagnac : Appelez-moi simplement Christine, nous ne sommes pas en Tenue et ce sera plus simple pour tout le monde.

450fm : Vous êtes Franc-maçon depuis quand ?

Christine SAUVAGNAC, TRGM de la GLCS

CS : Je suis Franc-maçon depuis 2004, j’ai été initiée à la GLCS par Marcel Laurent dans la Loge Thomas Moore, la Loge n° 1. J’étais la deuxième Sœur initiée de l’Obédience. A cette époque, il y avait une vingtaine de membres. Nous fonctionnions grâce au renfort des Frères visiteurs. Comme les fondateurs avaient quitté la GLNF, l’énergie était donc essentiellement masculine. En 2001 Thomas Moore s’est créée, puis assez rapidement, deux ans plus tard, avec la constitution de trois Loges, l’Obédience a pu naître.

450fm : Pourquoi le Fondateur a-t-il quitté la GLNF ?

CS : Une dizaine d’années avant le grand choc de 2010, qui a conduit à la scission de la GLNF, Marcel Laurent qui était un haut dignitaire de l’Obédience, a souhaité se désolidariser de la gestion qui ne répondait plus à son éthique et à ses attentes. Lors d’une manifestation devant plus de 1200 Frères au CNIT de la Défense, il s’est levé, a déposé ses décors et il a démissionné. Puis plus tard, des Frères l’ont suivi et ensemble, ils ont décidé de bâtir une Obédience nouvelle. Voilà comment est née l’idée de la GLCS, avec des valeurs qui correspondaient à leur éthique. L’objectif premier était de retrouver la fraternité qui leur manquait… sans y retrouver les déviances polluantes laissées derrière.

450fm : Qu’est-ce qui vous a donné envie de rejoindre la GLCS ?

Daniel Keller (GODF) et Marcel Laurent (GLCS).

CS : Mon père était membre de la GLDF depuis des années. Selon lui, la seule Obédience dans laquelle il voulait m’encourager à rentrer était la GLFF. C’était un puriste, et seule la GLFF était digne de m’accueillir selon lui. Il ne comprenait pas encore le projet de la GLCS. Je n’ai donc pas eu ses encouragements au départ. Heureusement, j’ai un caractère bien trempé et je ne laisse personne choisir pour moi. J’ai donc décidé de participer au projet GLCS. Ma volonté allait indiscutablement vers une Obédience mixte, même si j’ai une profonde affection pour mes Sœurs de la GLFF. Il est important de souligner que j’avais participé comme secrétaire à la frappe des Rituels. C’était un peu comme mon projet, je m’étais attachée à cette aventure naissante. Je ne me voyais pas abandonner ce navire qui allait prendre la mer pour un beau voyage. De plus, j’avais appris à connaitre personnellement tous ces Frères, transfuges de la GLNF, car ils venaient à la maison presque tous les jours. Je m’occupais d’eux et je les écoutais. Je ne me voyais donc pas aller ailleurs.

450fm : Il y a sept ans, vous avez été élue à la charge de Grand Maître pour remplacer Marcel Laurent, vous avez été une sorte de tandem.

CS : Non pas tout à fait, je n’aime pas ce mot de tandem. Je n’ai pas remplacé Marcel, j’ai assuré une continuité, tout comme mon successeur assurera à son tour cette continuité. C’est un passage de flambeau de main en main, mais certainement pas un remplacement de porteur, sinon on s’enferme dans une logique d’identification à la personne ou à la charge.

Par conséquent, avec ma personnalité, j’ai conduit la GLCS sur des rails différents afin d’assurer cette continuité. On ne compare pas nos actions, car la période d’activité de Marcel Laurent est différente de celle qui a été la mienne et ainsi de suite. C’est cela qui permet à la Franc-maçonnerie de perdurer des siècles plus tard.

450fm : Mais alors qu’est-ce qui a été différent entre les 14 premières années et vos 7 années à vous ?

Christine Sauvagnac TRGM de la GLCS et les membres du Conseil de l’ordre

CS : Tout d’abord, ce qu’a fait le fondateur, j’en aurais été bien incapable. Il a été un visionnaire pour démarrer un tel projet et établir tous les traités entre les plus grandes Obédiences, afin de nous faire reconnaitre. Il a fait naître – éclore et connecter, c’est merveilleux et j’en suis admirative et reconnaissante. Sans lui, mon action n’avait plus de raison d’être. Il a posé les bases de notre essence. Si aujourd’hui, nous pouvons procéder à cette transmission aussi sainement, c’est justement grâce à la pureté du terreau de base.

Précisément grâce à ces traités, nous avons pu ouvrir l’Afrique, le Pacifique, puis nous implanter à Tahiti. C’est là que mon action a pu se concrétiser. J’ai continué  le travail commencé et surtout, j’ai assuré ma mission pendant la période difficile da la COVID, qui a mise à mal de nombreuses Obédiences. Nous à la GLCS, on peut dire que nous nous en sortons plutôt très bien, presque renforcés. Pour conclure sur nos différences, on peut dire que j’ai orienté l’ordre vers le collectif, car je suis encore en activité professionnelle. Par conséquent, je suis encore assez proche du monde actif. J’en ai fait profiter la GLCS afin de préparer la transition future. J’ai gardé à l’esprit et œuvré dans le sens qu’un jour, nous ne serons plus là. La maison devra continuer à vivre, à se développer.

450fm : Votre mandat se termine dans quelques semaines connaissez-vous votre successeur ?

Christine Sauvagnac – Grand Maître de la GLCS.

CS : Oui mon successeur a été désigné dans le principe, par voie démocratique lors du dernier convent de 2022, mais non encore élu. Il a déjà constitué son collège et s’est préparé tout au long de l’année grâce à une transmission régulière. L’agenda sera le suivant : lors du prochain conseil de l’ordre du 9 septembre, sa candidature sera officielle et elle sera ensuite entérinée par un vote au convent du 14 octobre de cette année. Je deviendrai alors Passé Grand Maître.

Selon le règlement de la GLCS, le Grand Maître peut se représenter une fois, ce que j’ai fait, faute de successeur. Il faut rappeler que le Frère qui devait prendre ma suite a rejoint l’Orient Éternel juste quelques mois avant. Suite à l’épidémie, les membres m’ont demandé de faire une année supplémentaire pour préparer la transition, mais tout se passe actuellement conformément aux règlements de la GLCS. Nous communiquerons donc son identité le 14 octobre, lorsque tout sera devenu officiel.

450fm : Parlons un instant de votre vision du paysage maçonnique. Quelle relation entretenez-vous avec les autres Obédiences ?

CS : Très bonne avec presque toutes les Obédiences françaises. Je dis presque, car à ce jour, une seule s’est distanciée il y quelques années sur la décision du Grand Maître de l’époque, pour des raisons totalement personnelles. Tout cela est un malentendu et mon successeur se chargera probablement de rétablir le lien distendu. Vous savez, nous faisons partie du paysage maçonnique français depuis bientôt un quart de siècle. Cela est très court dans l’histoire maçonnique, nous sommes là pour durer au-delà de nos propres existences et il n’y a aucune raison de gaspiller notre énergie dans des querelles stériles. De plus, ce n’est surtout pas ma vision de la Franc-maçonnerie qui est avant tout un lien pour cultiver la fraternité. 

450fm : Comment ressentez-vous cette future descente de charge le mois prochain ?

CS : Je ressens une profonde fierté du travail accompli. La volonté que tout se passe bien pour la suite. Comme nous entrons dans la période de Coupe du monde de rugby, je dirais que je vais tout faire pour transformer l’essai ! Il nous revient la responsabilité de tout mettre en œuvre pour que la GLCS s’inscrive durablement dans le paysage maçonnique. L’Obédience ne nous appartient pas. Nous ne sommes pas propriétaires de la Franc-maçonnerie non plus. Il faut donc faire de sorte qu’elle profite à tous par nos actions.

450fm : Voyez-vous des choses à rajouter pour nos lecteurs 

CS : Mon parcours au sein de la GLCS ne fut pas de tout repos. J’ai fait au mieux et je n’ai pas à rougir de la progression de notre Obédience pendant la durée de mon mandat et de l’harmonie qui a régné tout au long de celui-ci. J’ai vécu toutes les expériences possibles, de la meilleure à la pire. Aujourd’hui, je suis debout avec le flambeau à la main. Cette image nous rapproche cette fois des Jeux olympiques. Le but pour la suite sera de digérer cette expérience en prenant du recul, car j’ai conscience que toute cette épreuve n’entraine pas une transformation, mais plutôt une transmutation personnelle. Pour ma part, avec un peu de distance, je continuerai à nourrir ma maison maçonnique de ce que je serai devenue grâce à la Franc-maçonnerie.

450fm : Chère Christine, merci pour votre temps, merci aussi pour votre franchise et bon vent pour la suite.

7 Commentaires

  1. @ P. CAMUS,
    Mon très cher frère, j’aime eaucoup la phrase que tu reprends ” … les actes de bienfaisance d’un Franc-maçon ne doivent jamais être des actes d’ostentation ni de vanité, propres à enorgueillir celui qui donne, comme à humilier celui qui reçoit….”
    Issue du rituel d’initiation au premier degré symbolique du reaa et plus spécifiquement d ecelui employé aus ein de la Grande Loge de France, j’atourerai simplement celle qui suit, soit : “Ils doivent être uniquement l’accomplissement d’un Devoir et rester ensevelis dans le secret.”
    Dans ce cas, peux-tu expliquer au lecteurs pourquoi la GLNF s’emploie sur les réseaux à étaler tout ce qu’elle donne. Par exemple sur leur FB, sur une partie de 2023, le 22 août, le 8 juillet, le 9 juin, le 8 juin, le 10 mai, le 24 avril, le 9 avril, le 8 mars, etc., j’en passe et des meilleurs !
    Je me permets donc, à ceux qui se prétendent “régulier” et qui croît en un GADLU et en sa volonté révélée, ce que les Saintes Ecritures nous enseignent. Matthieu 6:3-4 : ” Mais quand ta main droite donne quelque chose à un pauvre, ta main gauche elle-même ne doit pas le savoir. Ainsi, il faut que ce don reste secret; et Dieu, ton Père, qui voit ce que tu fais en secret, te récompensera.”
    J’ai dit.

  2. Indépendamment du fond des propos du GM de la GLCS, je suis sidéré qu’une obédience soit sous direction d’un couple depuis 20 ans.
    Je ne connais pas de précédents dans l’histoire maçonnique.
    Le fait de parler de “start-up family” devrait alarmer chacun d’entre nous.
    Personnellement, ce simple fait me crispe.
    Quant à savoir si c’est la fin de l’entreprise familiale, je n’en sais rien. On le verra avec le successeur en espérant que ce ne soit pas un parent.
    Et puis Marcel Laurent s’est-il retiré de ses responsabilités au niveau des hauts gradés ?

  3. Merci Grand Maître de nous avoir ainsi éclairé sur « Pourquoi le Fondateur a-t-il quitté la GLNF ? »
    Décidemment, de cette obédience GLNF nous ne retenons que les « affaires »…
    Bref, tous les dix ans, elle fait parler d’elle…
    Les années 2000 avec les frères de la côte, les années 2010 et son grand maître Stifani avec son appartement avenue de Wagram…
    Mais que retenir des années 2020 ? Les frères Alexandre Benalla et Vincent Crase, de sinistre mémoire…
    Quelle belle notion de la tradition et de la régularité !

    • Beaucoup de FF ont claqué la porte de la G.N.L.F. lorsqu’il y eut des dérives. Ce qui démontre qu’au sein de cette obédience, il n’est pas possible de faire tout et n’importe quoi, sans qu’il y ait des protestations. On ne retient que les “affaires” et pas le reste mais il est vrai que la G.N.L.F. n’expose pas au grand jour les actions de bienfaisance qu’elle mêne : Les actes de bienveillance ne doivent jamais être des actes d’ostentation, ni de vanité, propres à enorgueillir celui qui donne, comme à humilier celui qui reçoit. Quant à ceux qui sont nommés par vous, je vous invite à vous renseigner sur leur devenir au sein de la G.N.L.F. Je pense qu’en cherchant un peu, vous trouverez sans doute dans d’autre obédiences des FF qui n’ont pas eu ou qui n’ont pas un comportement exemplaire. Il n’est pas utile de les citer ici. Enfin, sachez que de nombreux FF qui ont rejoint d’autres obédiences lors des “affaires” sont revenus dans le giron de la G.N.L.F., une fois celle-ci assainie, car n’ayant pas vraiment trouvé leur place ailleurs.

  4. Merci Madame de vos propos.
    Si je comprends bien, nous pourrions alors imaginer paraphraser ce grand humoriste qu’est Patrick Timsit concernant ce très goûteux crustacé…

    • En réponse à certains commentaires, je dirais que ce sont ceux qui connaissent le moins la G.N.L.F. qui en parlent le mieux. Je pensais qu’être Franc-Maçon, c’est ne pas être dans le jugement mais au contraire c’est être dans la bienveillance. C’est du moins ce qu’on enseigne dans ma R.L., à la G.N.L.F. Chaque obédience a sa place et la pluralité permet à chacun de trouver celle qui correspond le mieux à sa sensibilité. Patrice Timsit a été poursuivi pour ses propos et il a eu l’intelligence de s’en excuser auprès de ceux qu’il a blessés, même si somme toute il n’a fait que son métier d’humoriste (On peut rire de tout mais pas avec n’importe qui. Pierre Desproges). Bien évidemment, je ne condamnerai pas Profanum (pourquoi prendre un pseudonyme, d’ailleurs ?), je préfère le plaindre, lui qui croyant faire un bon mot n’a fait que flatter son égo.

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