Définition principale
Un maçon est dit « en activité » lorsqu’il remplit régulièrement ses obligations matérielles (paiement intégral et à jour de ses cotisations, ou « capitation ») et morales (présence assidue aux tenues, participation active aux travaux, respect des engagements pris envers la Loge et envers les Frères). L’expression complète est généralement « Frère en activité » ou « maçon en activité ».

C’est l’état normal, naturel et attendu de tout Franc-maçon après sa réception. Être en activité est la condition sine qua none pour exercer pleinement ses droits maçonniques : voter en Loge, accéder aux grades supérieurs, porter le bijou de son grade, participer aux élections, être éligible aux offices, visiter d’autres Loges, etc.Opposition avec l’état de « sommeil »
L’expression « maçon en sommeil » (ou « Frère dormant ») désigne l’état d’un maçon qui, pour des raisons personnelles (éloignement géographique, problèmes de santé, contraintes professionnelles ou familiales, difficultés financières temporaires, lassitude passagère, etc.), choisit ou se voit contraint de suspendre temporairement sa participation active sans pour autant démissionner.
Le maçon en sommeil :
- reste affilié à sa Loge,
- conserve son grade et son ancienneté,
- figure toujours sur les tableaux de la Loge,
- peut être réveillé à tout moment sur simple demande (et règlement des cotisations échues selon les Règlements particuliers),
- mais perd, pendant cette période, la quasi-totalité de ses droits (il ne vote pas, ne peut être élu, ne peut assister aux tenues sauf exception très rare et motivée, ne porte pas le cordon ou le bijou de grade en Loge, etc.).
Le sommeil est donc une sorte de « congé » maçonnique, une parenthèse, jamais une rupture définitive. Il est conçu comme une mesure de bienveillance permettant à un Frère de traverser une période difficile sans perdre son appartenance.
Origine et évolution du concept

L’opposition activité/sommeil apparaît clairement en France dès la seconde moitié du XVIIIe siècle, mais se systématise vraiment au XIXe siècle avec la multiplication des Loges et l’augmentation du nombre des membres. Avant cela, l’absence prolongée entraînait souvent la radiation pure et simple.
À partir des années 1830-1840, les grandes obédiences (Grand Orient de France, Suprême Conseil pour la France, Grande Loge de France, etc.) introduisent dans leurs Constitutions et Règlements généraux la possibilité du « sommeil » pour éviter que des Frères, temporairement empêchés, ne soient exclus définitivement et que la Loge ne perde ainsi des éléments précieux.
Aujourd’hui, toutes les obédiences françaises (GODF, GLDF, DH, GLNF, GLMU, GLTSO, LNF, etc.) et la très grande majorité des obédiences étrangères reconnaissent ces deux états, avec parfois des nuances :
- Certaines obédiences très strictes (notamment certaines Loges de tradition anglo-saxonne ou certaines Juridictions du REAA très rigoristes) limitent fortement la durée du sommeil ou exigent un vote de la Loge pour l’accorder.
- D’autres, plus souples (certaines Loges du GODF ou de la GLDF), acceptent des périodes de sommeil très longues, parfois plusieurs décennies.
Dimension symbolique et spirituelle
Au-delà de l’aspect administratif, l’activité est chargée d’une forte signification initiatique.

Le Franc-maçon est censé être un « travailleur » permanent sur la Pierre brute. Le sommeil prolongé est vu comme une stagnation, un retour partiel à l’état profane, une mise en veille de la Lumière reçue. Être en activité, c’est maintenir vivant le feu sacré, entretenir la chaîne d’union, participer à l’œuvre collective du Grand Architecte (ou, dans les Loges libérales, à l’œuvre collective d’amélioration de l’humanité).
De nombreux Vénérables Maître, dans leur « morceau d’architecture » d’installation, insistent sur ce point :
« Le sommeil est une mort apparente ; l’activité est la vie véritable de la Loge. »

Dans le Rite Écossais Rectifié particulièrement (qui est très exigeant sur ce point), l’activité est presque élevée au rang de vertu chevaleresque : le Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte doit être « en permanence au service », et le sommeil prolongé est considéré comme incompatible avec l’esprit de l’Ordre. Certaines Commanderies du RER refusent même purement et simplement l’état de sommeil et exigent la démission ou la radiation au-delà d’une ou deux années d’absence.
Conséquences pratiques actuelles (2025)
Dans la plupart des Loges françaises aujourd’hui :
- La cotisation annuelle moyenne varie entre 250 € et 600 € selon l’obédience et la Loge (les Loges parisiennes prestigieuses étant souvent les plus chères).
- Un Frère qui a trois ou quatre ans de retard de cotisation voit généralement son état basculer automatiquement en « sommeil » (parfois après vote ou simple décision du Vénérable)… ou en radiation.
- Le réveil exige le règlement des cotisations de l’année en cours + parfois une ou deux années échues (pratique variable).
- Certaines Loges, pour encourager le retour, accordent des remises exceptionnelles ou des étalements de paiement.
Citation souvent reprise en Loge
« La Franc-maçonnerie n’est pas un club de retraités où l’on vient quand on a le temps ; c’est un engagement de chaque instant. Celui qui dort volontairement s’éloigne de la Lumière et risque, un jour, de ne plus la reconnaître. » (Attribuée à Oswald Wirth, mais probablement apocryphe ; on la retrouve cependant dans de nombreux discours d’installation depuis les années 1920.)
En résumé, être « maçon en activité » n’est pas seulement un statut administratif : c’est l’expression concrète de l’engagement initiatique, la preuve que la Lumière reçue lors de l’initiation continue d’éclairer et de réchauffer le cœur du Frère au service de ses semblables et de l’idéal maçonnique. Le sommeil, toléré avec bienveillance, reste une exception ; l’activité est la règle et la vocation profonde de tout Franc-maçon véritable.


















