dim 09 mars 2025 - 15:03

Magie, science et vérité : une quête intemporelle face au mépris moderne

De notre confrère universalfreemasonry.org – Par Henry Steel Olcott

L’origine du spiritualisme occidental se trouve-t-elle dans la magie orientale ?

Si un théurgiste de l’Antiquité – prêtre des mystères chaldéens ou adepte des sanctuaires égyptiens – pouvait fouler à nouveau la Terre au XIXe siècle, il rirait sans doute de notre incrédulité. Lui, familier des forces invisibles et des rituels sacrés, trouverait absurde qu’un esprit moderne ait besoin de courage pour affirmer l’existence des phénomènes magiques.

Pourtant, en ce siècle de fer et de vapeur, déclarer que les mythes d’autrefois reposent sur des vérités profondes, que le monde caché peut s’ouvrir aux procédés scientifiques de la magie, ou qu’il est aussi peuplé que le nôtre – avec des races d’entités soumises à des lois cosmiques, sur lesquelles l’homme exerce une domination naturelle – revient à défier les certitudes établies. Soutenir que ces forces occupent une place essentielle dans l’évolution universelle, aussi réelle et nécessaire que l’humanité elle-même, c’est s’exposer au mépris des savants positivistes, aux foudres du clergé et aux sarcasmes des esprits étroits.

J’accepte ce défi. Je choisis de braver le mépris, les anathèmes et la dérision, armé d’une parole simple et d’une quête sincère de la vérité. Car si les hommes publics osant confesser une foi en des philosophies jugées désuètes s’attirent les calomnies, je ne crains pas d’offrir aux adversaires de l’occultisme et du spiritualisme matière à réflexion. Il y a une douce ironie à savoir que, malgré les accusations de mysticisme ou de fraude, les tenants de ces savoirs oubliés peuvent affronter la controverse avec plus de force que leurs détracteurs. L’occultiste brandit une preuve irréfutable : chaque religion moderne, du christianisme aux cultes orientaux, est l’héritière directe des théogonies antiques, ces systèmes où les dieux incarnaient les forces de la nature. Le spiritualiste, lui, s’appuie sur des archives millénaires – des tablettes sumériennes aux papyrus égyptiens – pour montrer que ses phénomènes traversent l’histoire humaine. Que le clergé parade dans son autorité éphémère, que les systèmes philosophiques matérialistes s’épanouissent dans l’arrogance des « esprits forts » : ils s’évanouissent comme papillons d’été face aux monuments du Passé, qui murmurent la sagesse d’un âge d’or et nous confrontent au vide de nos prétentions modernes.

Une illusion de progrès linéaire

Nous nous illusionnons en exaltant notre supériorité sur l’Antiquité. Éduqués à comparer nos libertés et nos lumières au prétendu obscurantisme médiéval, nous imaginons l’évolution humaine comme une ascension continue, une ligne oblique des ténèbres vers la clarté. De l’âge de pierre à l’ère industrielle, on nous a enseigné que le progrès est constant, sans rupture ni recul. Cette métaphore – midi radieux de notre temps contre le crépuscule du passé, sombrant dans une nuit d’ignorance – a séduit poètes et orateurs. Les vestiges du Néolithique, les grottes du Kent, les tumulus celtiques ou les artéfacts des Ptolémées semblaient conforter cette théorie, flatteuse pour l’orgueil du siècle. Mais cette vision simpliste vacille sous le poids des découvertes.

Les fouilles en Égypte, menées par Auguste Mariette ou Karl Lepsius au milieu du XIXe siècle, révèlent une réalité troublante : bien avant les dynasties pharaoniques, des civilisations maîtrisaient des arts et des sciences que nous peinons à égaler. Les temples de Karnak et de Louxor, décrits par Jean-François Champollion comme « sublimes et grandioses », écrasent nos fiertés architecturales – le Capitole de Washington, le Louvre ou Saint-Pierre de Rome. Champollion, dans ses Monuments de France et d’Égypte (1832), écrivait : « Aucun peuple, ancien ou moderne, n’a conçu l’architecture à une échelle aussi vaste. » À Karnak, la salle hypostyle aux 140 colonnes défie l’imagination, tandis que Notre-Dame tiendrait dans un coin de ces édifices titanesques. En Asie, les ruines de Mohenjo-Daro ou les textes védiques témoignent d’une connaissance astronomique et mathématique rivalisant avec nos calculs modernes.

La vérité cyclique

Face à ces évidences, la Vérité s’impose par une loi universelle, plus forte que les railleries. Les archéologues, bravant le scepticisme, ont creusé plus loin, exhumant des preuves que la géologie confirme : le progrès humain n’est pas linéaire, mais cyclique. Les travaux de Charles Lyell (Principles of Geology, 1830-1833) et les fouilles de Henry H. Abbott en Amérique démontrent que des civilisations avancées ont précédé des âges de déclin. Les papyrus découverts par Georg Ebers en 1872, traduisant des recettes chimiques d’une précision stupéfiante, ou les sculptures de Mariette Bey, comparées par John Taylor à l’école athénienne, révèlent un savoir perdu dans les brumes du temps. Nos tunnels et canaux modernes pâlissent devant le Labyrinthe crétois ou le lac Moéris, prouvant que l’Antiquité n’était pas un âge primitif, mais un sommet que nous redécouvrons.

Une leçon maçonnique

Pour les Frères et Sœurs de la Franc-Maçonnerie, cette réalité résonne comme une planche à tracer. Le cabinet de réflexion, avec son obscurité initiale, n’est-il pas un écho de ces cycles où l’humanité sombre avant de renaître ? La pierre brute, taillée par le ciseau et le maillet, symbolise notre travail pour retrouver une Lumière enfouie sous les décombres de l’oubli. Les Anciens, adeptes d’une magie qui était science et spiritualité, nous invitent à l’humilité : notre époque n’est pas un aboutissement, mais un maillon dans une chaîne infinie. Comme l’écrivait Éliphas Lévi, figure influente de l’occultisme maçonnique, dans Dogme et Rituel de la Haute Magie (1856) : « La magie est la science des causes cachées, et son étude révèle l’unité du divin et du naturel. »

Que reste-t-il à faire ? Rejeter l’orgueil moderne et plonger dans le Passé, non pour le vénérer aveuglément, mais pour en tirer des leçons. Les temples effondrés de l’Égypte, les textes hermétiques des alchimistes, les rites des druides : autant de clés pour comprendre que la quête de la Lumière traverse les âges, défiant les cycles de l’ignorance. En Loge, nous savons que le silence précède la parole juste ; de même, l’étude des Anciens précède la maîtrise de notre propre devenir.


Sources :

  • Lévi, É., Dogme et Rituel de la Haute Magie, Paris, 1856.
  • Champollion, J.-F., Monuments de France et d’Égypte, Paris, 1832.
  • Mariette, A., Description des fouilles d’Égypte, Le Caire, 1872.
  • Lepsius, K., Denkmäler aus Ägypten und Äthiopien, Berlin, 1849-1859.
  • Lyell, C., Principles of Geology, Londres, 1830-1833.
  • Ebers, G., Papyrus Ebers, Leipzig, 1875 (traduction des textes médicaux).
  • Taylor, J., The Great Pyramid, Londres, 1859.

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Charles-Albert Delatour
Charles-Albert Delatour
Ancien consultant dans le domaine de la santé, Charles-Albert Delatour, reconnu pour sa bienveillance et son dévouement envers les autres, exerce aujourd’hui en tant que cadre de santé au sein d'un grand hôpital régional. Passionné par l'histoire des organisations secrètes, il est juriste de formation et titulaire d’un Master en droit de l'Université de Bordeaux. Il a été initié dans une grande obédience il y a plus de trente ans et maçonne aujourd'hui au Rite Français philosophique, dernier Rite Français né au Grand Orient de France.

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