sam 20 décembre 2025 - 08:12
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La loge maçonnique : l’exemple de la tolérance !

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C’est un sujet dont on parle peu tant il pourrait être explosif dans le contexte actuel où les religieux de toutes origines sont tentés d’imposer leurs dogmes. Si la franc-maçonnerie était à l’origine religieuse, grâce à nos frères du Grand orient de Belgique, la liberté de conscience a fait son apparition au 19ème siècle et certains rituels ont été modifiés pour autoriser les non-croyants et les athées à participer à la démarche maçonnique.

La franc-maçonnerie était comme une vieille personne qui se trouvait obligée de changer les habitudes qu’elle avait apprises dans sa jeunesse ! Le résultat fut la scission et seule une minorité d’obédiences acceptèrent de ne plus exiger la croyance en Dieu ! C’est ce qu’on appelle la franc-maçonnerie libérale !

Aujourd’hui, il est clair que s’il fallait nommer un lieu où la tolérance religieuse s’exerce de façon pacifique, ce serait sans hésitation la loge maçonnique !

Nos rituels, dont la cohérence provenait de leur mysticisme, sont aujourd’hui réinterprétés par des non-croyants grâce au concept de la spiritualité qui permet à chacun d’exprimer librement en son for intérieur sa conscience !

En définissant la spiritualité comme une pensée qui se rapporte au monde des esprits, on y englobe la pensée religieuse et tout l’imaginaire immatériel.

Lune et soleil sur fond noir
Lune et soleil sur fond noir

Rappelons tout d’abord que les humains ont, dès leur socialisation, été confrontés à des interrogations pour lesquelles ils n’avaient aucune réponse : pourquoi le jour et la nuit, pourquoi le soleil, pourquoi la lune, pourquoi les étoiles, etc. ?

Les réponses ont été trouvées en faisant intervenir notre capacité à conceptualiser l’imaginaire ; c’est ainsi que l’explication des inconnues qu’ils rencontraient fut trouvée par une intervention de forces invisibles. Selon les avancées des connaissances, les cultures locales et les différentes époques, tout un monde de l’imaginaire avec des mythes et des légendes s’est constitué. L’animisme, le polythéisme et le monothéisme font partie des croyances auxquelles les êtres humains se référaient et auxquelles des populations se réfèrent encore aujourd’hui.

La franc-maçonnerie libérale accepte de facto plusieurs lectures et que l’on soit spiritualiste ou pas, religieux ou non croyant, cela ne nous empêche pas de nous rencontrer, de partager et aussi de fraterniser !

​L’apport fondamental de la pensée maçonnique n’est-il pas de permettre la tolérance entre les différentes approches des mystères ?

Nulle part ailleurs, cette tolérance n’est possible dans un cercle de réflexion !

N’est-ce pas à l’honneur de cette franc-maçonnerie libérale de pouvoir revendiquer cette originalité ?

Lorsqu’on entend les bonimenteurs patentés revendiquer les « valeurs » et en même temps s’engager dans des actions violentes, dans les loges, les francs-maçonnes et les francs-maçons pratiquent la bienveillance et la tolérance !

sept mains en étoile
deux doigts pour chacune des sept mains

Malgré tous les non-dits et les ambiguïtés, l’originalité de la vie des loges provient de la grande tolérance qui permet une coexistence pacifique et un respect mutuel quels que soient les imaginaires de chacun. Dans un contexte mondial où les guerres inter-religieuses font florès, il est un espace social où le respect mutuel existe et permet de vivre ensemble.

Les athées n’ont pas besoin de faire du prosélytisme car, au total ce n’est pas très important d’avoir des croyances diverses et variées dans le domaine du surnaturel à condition que les esprits acceptent de respecter celles et ceux qui n’y trouvent aucun intérêt particulier.

Dans ce XXIème siècle qui se caractérise par une recrudescence des guerres religieuses, la pertinence de la démarche maçonnique dans son essentiel , à savoir la recherche du centre de l’union, est plus que jamais d’actualité.

En enrichissant la démarche maçonnique, l’athéisme apporte une plus grande dimension à l’exigence de tolérance et de laïcité , pour préparer un monde de paix pour croyants et incroyants.

L’énigme des Maîtres – Les mains de l’éternité 

Alors allons plus loin, car L’énigme des Maîtres – Les mains de l’éternité appelle à un décryptage où le récit romanesque se métamorphose en miroir initiatique.
La main en est le signe central, non comme un organe utilitaire, mais comme un langage sacré. Dans la tradition maçonnique, elle est vecteur de reconnaissance, sceau du serment, outil de transformation. Ouvrir la main, c’est manifester la lumière ; fermer le poing, c’est retenir la force.

Dans ce roman, la main se fait indice, énigme et symbole, écho des gestes qui dans nos rituels deviennent langage de l’âme, mais aussi avertissement que tout signe peut être détourné, falsifié ou enfermé dans un simulacre.

L'énigme des Maîtres – Les mains de l'éternité
L’énigme des Maîtres – Les mains de l’éternité

La fresque de la chapelle Sixtine, dans les Musées du Vatican à Rome,surgit en filigrane. Ce chef-d’œuvre de Michel-Ange, peint entre 1508 et 1512 et inauguré par Jules II le 31 octobre 1512, commence par « La Séparation de la lumière et des ténèbres » et culmine dans la célèbre « Création d’Adam ». Tout le cheminement est déjà là : l’acte premier qui dissipe les ombres pour faire naître la clarté, puis le geste suspendu où le doigt de Dieu s’approche de celui de l’homme sans le toucher, laissant vibrer dans l’espace infime qui les sépare l’étincelle de la vie.

Dans cet interstice se tient le mystère… distance infranchissable et promesse d’union, souffle de l’éternité traversant la finitude humaine. C’est ce passage de l’ombre à la lumière, de l’inertie à la conscience, que le roman nous invite à méditer à travers le langage de la main. Les auteurs s’inscrivent dans ce sillage : leurs personnages scrutent des portraits où la main trahit un détail étrange, mais c’est en réalité la question plus vaste qui s’impose – comment, dans l’immobilité d’un geste pictural, se cache le mouvement même de la vie et de l’esprit.

Portrait d’Isaac Newton âgé de 46 ans par Godfrey Kneller (1689).
Portrait d’Isaac Newton âgé de 46 ans par Godfrey Kneller (1689).

Le roman met ainsi en scène une chaîne d’universalité où se croisent savants, peintres et chercheurs de vérité. Comme dans nos rituels, où la chaîne d’union relie chaque frère dans une ronde invisible, un signe cryptique relie Isaac Newton (1642-1727) – mathématicien, physicien, philosophe, alchimiste, astronome et théologien – à d’autres figures savantes, unissant les générations par une main inscrite dans la toile. Nous sommes renvoyés à la conviction maçonnique qu’il existe un langage caché, universel, qui traverse les civilisations et s’offre seulement à celui qui a appris à regarder avec l’œil intérieur.

Ce langage de la main n’est pas seulement biblique ou artistique, il est aussi alchimique. L’annulaire, doigt solaire, celui de l’alliance et de l’éternité, et le majeur, doigt de Saturne, gardien du temps, s’unissent dans une tension entre matière et esprit, temporalité et infinitude. Le geste devient sceau hermétique, rappel que l’initiation consiste à unir les contraires sans les confondre.

Dans la dramaturgie initiatique de l’ouvrage, les flammes qui consument le portrait de John Toland rejouent nos méditations sur le feu purificateur. Détruire une toile est à la fois barbarie et rituel pervers de purification. Cette scène reflète le mythe du bûcher des hérétiques mais aussi le Cabinet de Réflexion où nous méditons sur la mort et la dissolution. L’assemblée cagoulée qui célèbre cette destruction apparaît comme une parodie diabolique de la Loge : mêmes codes, mêmes gestes, mais détournés vers la haine plutôt que vers la fraternité. Là se trouve la leçon : discerner le vrai rituel du simulacre, la main qui bénit de la main qui détruit.

L'énigme des Maîtres – Les mains de l'éternité
L’énigme des Maîtres – Les mains de l’éternité

La figure d’Isaac Newton, omniprésente, prend une dimension initiatique. Savant universel, mais aussi passionné d’alchimie, de cabale et de prophéties bibliques, il incarne le lien entre science et sagesse. Derrière le Newton académique se profile le Newton hermétiste, cherchant dans la géométrie des temples et dans la proportion des astres une clé de salut. Ainsi le roman rejoint l’intuition maçonnique : la science véritable n’est pas accumulation mais voie, passage entre les nombres et l’esprit. Chaque portrait de Newton, chaque main tendue ou posée, devient une station sur ce cheminement.

Lords, conservateurs, enquêteurs, galeristes gravitent autour de ce mystère comme nous autour de l’Orient de nos temples. Chacun incarne un aspect de la quête : mémoire, vigilance, curiosité, transmission. Mais le lecteur est convié à devenir l’interprète ultime. C’est à nous de transformer ces indices en lumière, de faire de ce roman un miroir de notre propre itinéraire initiatique.

Il faut rappeler que ce récit naquit dans le rythme envoûtant du feuilleton, publié sur 450.fm tout au long du premier semestre 2025. Le premier épisode, « Les portraits énigmatiques », parut le 12 janvier ; l’épilogue, le 29 juin, vint clore cette fresque en fragments, dans l’attente et la ferveur des lecteurs. Comme au XIXe siècle avec les Mystères de Paris ou le Comte de Monte-Cristo, le roman sut tenir en haleine par la lente révélation de son mystère. La réunion de ces épisodes en volume prolonge cette tradition et incarne un geste initiatique : du fragment à l’unité, de l’attente à la révélation.

Solange Sudarskis
Solange Sudarskis

La force de l’œuvre tient aussi à l’alliance féconde de ses deux auteurs. Solange Sudarskis, plume familière des lecteurs de 450.fm, a signé plus de deux cents chroniques, poursuivant inlassablement son œuvre de transmission maçonnique et spirituelle. Maître de conférences honoraire, chevalier des Palmes académiques, initiée au Droit Humain en 1977 et membre fondatrice de la loge « L’Arbre de Liberté », elle fut récompensée par le Prix littéraire de l’Institut Maçonnique de France (IMF) en 2017 pour son Dictionnaire vagabond de la pensée maçonnique (Dervy, 2017).

Frédéric Béatrix
Frédéric BÉATRIX, photo © Emmanuelle Marty

À ses côtés, Frédéric Béatrix, architecte diplômé de l’INSA de Strasbourg et fondateur de BLUE architecture, poursuit une recherche passionnée sur la géométrie antique et la philosophie pythagoricienne, publiant dans Parabola à Sydney. Son ouvrage Le tracé primordial ou La géométrie secrète des bâtisseurs (Dervy, 2024) atteste combien la géométrie est pour lui un langage de l’âme.

Leur rencontre donne à ce roman une résonance singulière : le tracé y devient quête, et la main, loin d’être immobile, se fait sceau vibrant, messagère silencieuse d’un langage intemporel.
Ainsi, la lecture de L’énigme des Maîtres ne se réduit pas à une intrigue haletante : elle nous initie à une méditation sur le signe, le geste et la main. Elle nous rappelle que la véritable énigme des Maîtres n’est pas tant dans les toiles volées que dans notre capacité à reconnaître, à travers les siècles, la main invisible qui nous conduit. Et cette main, qu’elle surgisse de la Sixtine ou des portraits de Newton, n’est autre que celle de l’éternité, nous invitant à unir en nous-mêmes le temps et l’esprit, la matière et la lumière.

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L’énigme des Maîtres – Les mains de l’éternité 

Solange Sudarskis – Frédéric Beatrix

Éditions L.O.L., 2025, 254 pages, 18,50 €

Éditions L.O.L., le site

Avec l’ouverture du « Cercle Thierry Marx », la GLDF met les petits plats dans les grands !

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Le restaurant de l’hôtel de la Grande Loge de France, situé rue Louis-Puteaux à Paris (XVIIe arr.), renaît avec une nouvelle saveur. Ce jeudi 4 septembre 2025 au soir, porté par une énergie nouvelle et un souffle d’innovation. Sous un nouveau nom – « Le Cercle par Thierry Marx » – cet espace emblématique dévoile une métamorphose complète : un menu revisité, une équipe culinaire revitalisée, un esprit modernisé et une collaboration prestigieuse avec l’illustre chef Thierry Marx.

Préparez-vous à une expérience culinaire et humaine qui promet de marquer les esprits ! Une Alliance avec un Maître de la Gastronomie et de l’Inclusion.

La Grande Loge de France s’associe avec fierté à Thierry Marx, une figure incontournable de la cuisine française dont le talent et la renommée rayonnent à l’international. Mais ce partenariat dépasse la simple expertise gastronomique : le chef Marx incarne un engagement profond envers la société. Grâce à une politique audacieuse d’inclusion par la formation et l’insertion professionnelle, il transforme des vies et ouvre des horizons. Ce projet commun avec la Grande Loge de France s’inscrit dans cette vision humaniste, alliant excellence culinaire et valeurs fraternelles. Thierry Marx avait déjà assuré le remarquable service traiteur lors de l’inauguration du nouveau musée de la GLDF, le 27 mars dernier, et ce n’était donc qu’un avant-goût d’une collaboration beaucoup plus profonde entre l’Obédience et le chef multiétoilé : des pourparlers puis des négociations ont été engagés, grâce aux bons offices de Jean-Paul O’Meny, sous la Grande Maîtrise de Thierry Zaveroni ; cependant, le contrat a été conclu par le nouveau Grand Maître, Jean-Raphaël Notton qui, l’ayant revêtu de sa signature, assume donc pleinement, désormais, la responsabilité de son exécution.

Un espace repensé pour un accueil chaleureux

Après d’importants travaux réalisés tout l’été, « Le Cercle par Thierry Marx » dévoile un cadre entièrement renouvelé. Mise aux normes, entretien minutieux et décoration raffinée transforment cet espace en un lieu plus accueillant, chaleureux et lumineux. Il faut en remercier grandement l’équipe du CERP pour son dévouement exceptionnel, qui a rendu cette renaissance possible. Dès l’ouverture, les visiteurs plongeront dans une atmosphère où se mêlent élégance et convivialité, un écrin parfait pour savourer cette nouvelle aventure.

Une carte alléchante à prix doux

Table,Set,Restaurant
Banquette et Salle de restaurant avec couverts dressés, table de repas

La carte du « Cercle » a été pensée avec soin pour offrir une qualité irréprochable à un excellent rapport qualité-prix, répondant aux attentes des membres de la Grande Loge de France, tout en restant accessible. Parmi les délices proposés : des entrées oscillant entre 4 et 9 €, un plat du jour à 15 €, et des desserts entre 6 et 8 €. Chaque plat, élaboré sous la direction de Thierry Marx, promet de régaler les papilles, tout en respectant un budget raisonnable. Une invitation à déguster sans se priver !

Ouverture prochaine au public : un pont vers la cité

Grande Loge de France (GLDF), rue Louis Puteaux, Paris 17e arr.
Grande Loge de France (GLDF), rue Louis Puteaux, Paris 17e arr.

Dans la lignée de l’ouverture récente de son nouveau musée, la Grande Loge de France ouvrira bientôt « Le Cercle par Thierry Marx » à tout public pour les déjeuners, du lundi au vendredi, avec un accès dédié. Cet accès aux « profanes » est prévu dans le courant du mois de septembre. Nous ne manquerons pas vous donner alors tous les détails avec des menus et de premières photos des lieux. Bien entendu, pour la Grande Loge de France, cette initiative affirme encore davantage l’ancrage de l’institution dans la vie citoyenne, brisant les barrières entre initiés et profanes. L’effet de curiosité suscité par la notoriété de Thierry Marx, combiné à l’attractivité du musée, invite de nouveaux visiteurs à pousser les portes de cette maison maçonnique, ouvrant ainsi un dialogue inédit avec la société.

Une invitation fraternelle

intérieur de restaurant
intérieur de restaurant vide

Dans sa communication, la Grande Loge de France souligne cette ambition :

« Chers frères et sœurs, ce nouveau lieu s’offre à vous comme un espace de partage et de découverte. Nous vous encourageons vivement à venir vivre cette expérience et à nous faire part de vos impressions. Que ce soit pour un repas entre initiés ou une rencontre avec des curieux attirés par l’aura de Thierry Marx, Le Cercle promet de devenir un lieu de cœur au sein de la Grande Loge de France. »

Le premier service aura lieu le jeudi 4 septembre 2025, pour le dîner, et sera donc exclusivement réservé aux Frères pendant quelques brèves semaines, sachant que, dans un très proche avenir, les profanes pourront eux aussi apprécier la renaissance culinaire de cette crypte désormais dédiée aux réjouissances du palais.

En parodiant une formule chère au nouveau Grand Maître de l’Obédience, Jean-Raphaël Notton, on pourrait dire : « Osez pousser les portes… du Cercle ! » (chacun à son heure)

La parabole du Maître

En mourant, un vieux maître-maçon lègue à ses frères et sœurs un cadeau insolite et captivant. Dans un fragment de parchemin jauni, orné de dessins énigmatiques mais dépourvu de mots, repose un trousseau de clés : celles de sa maison, de tous les bureaux et des cachettes secrètes nichées dans cette modeste demeure. Tremblants d’émotion et d’une curiosité débordante, ses compagnons ouvrent la porte, avides de percer le mystère que leur cher ami a voulu leur transmettre.

Le premier frère interprète ce legs comme une invitation à revisiter un lieu chargé d’histoire, là où il est né, a grandi et s’est épanoui en tant qu’homme, guidant des générations de francs-maçons. Ce sanctuaire abrite les origines des grands travaux écrits, les premiers rituels célébrés, et les soirées d’agapes où résonnaient des conversations chaleureuses et détendues. Sur la table de la grande salle trônent un cordon et un bouton en cuir d’agneau, minutieusement brodés par son épouse adorée, ainsi qu’un maillet en bois gravé de symboles entrelacés, œuvre d’artisans talentueux. Plus loin, dans le bureau, s’entassent des documents fascinants : brevets, concordats, certificats honorifiques, statuts et constitutions. À côté, une boîte de velours renferme des médailles et des récompenses, témoins de ses bonnes actions, de son dévouement maçonnique et de son ancienneté. Chacun de ces objets semble vibrer d’une énergie intacte, comme si les mains de ce maître, parti vers l’Orient Éternel, y avaient laissé une chaleur persistante. Même les braises de la cheminée, allumées depuis deux décennies, paraissent encore rougeoyer d’une lueur vivante.

Le deuxième frère voit dans cet héritage un trésor enfoui dans les livres, anciens comme modernes. Il revoit ces jours mémorables où les conférences enflammaient les débats, où chaque œuvre architecturale donnait lieu à des heures de discussions, tantôt légères, tantôt profondes, mais toujours fraternelles. Avec le temps, ces architectures se sont cousues dans d’épais cahiers, puis publiées sous forme de livres richement illustrés de croquis originaux, dessins humoristiques et photographies. Ces réunions évoquent presque un conclave d’intellectuels ou d’artistes, nourries d’une pensée vive et créative. Aujourd’hui, plonger dans ce granit de la science – cette pierre précieuse léguée par une sagesse intemporelle – exige une vie entière, tant l’enseignement s’avère inépuisable.

La troisième sœur se remémore l’harmonie qui régnait dans cette maison. Comme autrefois, la salle des travaux se prépare avec soin, baignée d’une atmosphère paisible et accueillante, où chaque mérite trouve sa place. Les moments simples côtoient les défis : le Cercle de la Veuve se reforme rapidement avant de se dissoudre aussi vite ; les débats ou votes s’animent parfois, mais la liberté de chaque opinion reste sacrée au sein de la loge. De l’extérieur, la discipline et la légalité interne semblent peser lourdement sur les rituels et les relations, mais c’est une illusion !

Un mécanisme subtil désamorce les tensions, laissant s’épanouir les cordes secrètes de l’âme et révélant la beauté de l’Art Royal sur le chemin de la vie.

Dans cette loge, aucun mépris ne frappe les femmes ni ceux issus d’autres obédiences.

Regard maçonnique sur l’accueil des étrangers

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I – Une réalité incontrôlable, témoin du désordre du Monde !

Les migrations humaines existent depuis les premiers temps de l’émergence de l’espèce humaine sur notre planète. L’origine exclusivement africaine des premiers ancêtres de l’espèce Homo explique que les premières migrations (que l’on date d’environ 1,8 millions d’années avant JC) aient participé au peuplement de la Terre.

Dès nos origines, les migrations apparaissent comme la conséquence de pulsions existentielles : apporter plus de nourritures aux groupes humains, rechercher des ressources nouvelles pouvant être des monnaies d’échanges, investir des territoires plus protecteurs.

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Le caractère pulsionnel des migrations explique l’importante motivation qui pousse des personnes de toutes conditions à affronter les pires difficultés pour réussir leur projet. Il est impossible d’empêcher un mouvement migratoire ! Tout au plus peut-on espérer le dissuader puis l’accompagner ! Faire croire qu’une action policière de retour dans le pays d’origine est possible est une absurdité !

Il est parfois étonnant de voir les Européens aborder ce sujet comme s’il s’agissait d’une problématique ponctuelle et passagère.

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La démographie mondiale galopante, le vieillissement de la population européenne, la multiplication des conflits régionaux inter-ethniques, les conséquences du changement climatique en cours et la corruption endémique dans un contexte de sous-développement, sont les principales causes des migrations contemporaines.

Ces causes témoignent du désordre du Monde ; c’est un désordre durable, en espérant qu’il puisse être amendable, que les communautés humaines se doivent d’intégrer dans les projections qu’elles peuvent faire sur « le Monde d’Après » !

II – Une nécessité : Soutenir les étrangers !

Les francs-maçons, conscients des causes profondes des migrations et de la souffrance humaine que celles-ci peuvent entraîner, ne peuvent rester indifférents aux mensonges qui sont diffusés pour culpabiliser les populations étrangères et les traiter de façon indigne.

La sectorisation des territoires en états et nations a indéniablement accentué les obstacles aux migrations d’une part en interdisant certains trajets, d’autre part en faisant apparaître des zones à moindre risque où les migrants peuvent espérer soit faire une pause dans leurs pérégrinations soit en faire un but à atteindre.

Parce que l’Europe a été incapable d’agir pour améliorer les conditions de vie des étrangers dans leurs pays d’origine afin de leur faciliter le maintien au pays et malgré les difficultés de toutes sortes que les états européens ont érigées pour les dissuader de venir, l’Occident, parce qu’elle est encore globalement une zone de paix, est devenue une destination migratoire recherchée.

Cette immigration est utilisée par les partis xénophobes et démagogues pour susciter
des mouvements de rejet argumentés de façon outrancière et mensongère. Aujourd’hui encore, toute une frange de la population européenne est sensible à la diabolisation des migrants et à leur mise en cause dans les différentes problématiques des vécus des peuples de l’Europe.

Tout cela explique la permanence dans l’actualité d’images de détresse montrant combien ces populations sinistrées doivent supporter des sacrifices pour permettre aux plus chanceux ou aux plus résistants d’espérer un accueil et un peu de tranquillité pour se reconstruire.

Les francs-maçons, imprégnés par leur vocation à plus de fraternité et à plus d’universalité, sont naturellement amenés à comprendre le drame que vivent les migrants et le devoir qu’ils ressentent à déconstruire les argumentations fallacieuses qui les condamnent.

Homme âgé pensif

Les obédiences maçonniques se préoccupent essentiellement d’Ethique ; elles nous expliquent que ce n’est pas dans leurs domaines de compétence de trouver des solutions aux différentes problématiques que connaissent les migrants.

Pour porter assistance et expliquer la problématique il ne reste que l’engagement individuel et l’action publique des loges. Chaque loge peut aussi favoriser un engagement concret à travers un soutien au milieu associatif caritatif.

III – Conclusion

Le drame vécu par des milliers d’étrangers pourrait être au centre d’une action de sensibilisation des francs-maçons européens afin de faire partager deux évidences :

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– d’une part, les étrangers qui arrivent en Europe ne sont pas responsables ; le départ de leurs pays a été motivé par une incapacité à subvenir, dans leurs pays, à leurs existences et à celle de leurs familles. L’urgence voudrait que la communauté internationale prenne à bras le corps le règlement de cette problématique en facilitant le maintien au pays.

– D’autre part, une fois sur place, dans les pays de destinations, ils ont droit au respect de leur dignité d’êtres humains. Tout doit être fait pour faciliter leur intégration en attendant le retour volontaire dans leurs pays lorsque les conditions de vie le leur permettront.

Les loges maçonniques peuvent très bien prendre des initiatives pour réaliser des actions de sensibilisation au soutien des étrangers. Ce serait à l’honneur des loges de montrer que nous ne sommes pas des privilégiés qui ne seraient préoccupés que par des préoccupations personnelles et que nous sommes capables de nous engager au service des personnes en souffrance.

Les étrangers en situation irrégulière sont d’abord des victimes qui n’ont pas d’autre choix que de fuir les zones de guerre, les zones de détresse alimentaire et les zones devenues inhabitables du fait du bouleversement climatique.

Nous ne pouvons que déplorer les conditions de vie que ces personnes affrontent du fait du refus des autorités gouvernementales des différents pays à prendre en charge les obligations sociales sous leurs responsabilités.

Comment rester silencieux devant la désinformation, diffusée par les mouvements d’extrême droite, qui les accuse d’être des facteurs de troubles sociaux et qui menace de les expulser.

Nous nous devons d’affirmer que la solidarité et la fraternité sont des valeurs universelles, facteurs de paix, qui méritent d’être mises en pratique.

Nous sommes convaincus que cette action valoriserait la perception de la démarche maçonnique par l’opinion publique.

La dimension maçonnique de la Tour Eiffel

Il est des monuments qui, au-delà de leur fonction utilitaire ou de leur beauté profane, prennent valeur de symbole et deviennent support de méditation initiatique. La Tour Eiffel, dressée au cœur de Paris depuis 1889, est de ceux-là. Conçue comme prouesse technique, elle est devenue, pour qui sait la regarder avec les yeux de l’initié, un temple moderne, un livre de fer et de lumière où se lit la vocation de l’homme à s’élever vers le ciel.

I. Le temple de fer : la matière transfigurée

La Tour Eiffel n’est pas bâtie en pierre, comme les cathédrales ou les temples antiques, mais en fer puddlé, ce métal arraché à la terre, purifié par le feu et façonné par la main de l’homme.

Ainsi, elle incarne l’image même du travail maçonnique : la transformation de la pierre brute en pierre taillée, de la matière lourde en matière lumineuse.

Terre dont la moitié est en feu, elle brûle. Planète

De la mine de Neuves-Maisons, propriété et dirigée par le comte Victor Chebrou de Lespinats, jusqu’aux ateliers de Pompey, le fer a subi toutes les épreuves du feu, du marteau et du bras de l’ouvrier. Comme l’initié, il a été travaillé, poli, éprouvé, pour devenir apte à soutenir un édifice qui défie le temps.

La Tour nous rappelle que toute matière, même la plus opaque, peut devenir élévation. De la pesanteur du fer naît la légèreté d’une flèche. De la contrainte naît la liberté. C’est la grande loi de l’initiation : le poids de l’épreuve se transforme en élan vers la lumière.

II. Le langage des formes : une grammaire initiatique

Au-delà de la matière, la Tour Eiffel parle par ses formes et ses proportions.

  • Sa silhouette triangulaire évoque le delta lumineux, premier signe de toute initiation. Oswald Wirth écrivait : « Le triangle est le signe de toute élévation spirituelle. »
  • Ses trois plateformes rappellent les trois grades symboliques : Apprenti, Compagnon, Maître. Monter dans la Tour, c’est gravir une échelle initiatique.
  • La lumière, dès son inauguration, en fit un phare : de jour, elle reflète le soleil ; de nuit, elle s’embrase de mille feux. Victor Hugo disait : « La lumière est dans le livre. » La Tour Eiffel est un livre de lumière écrit dans le ciel.
  • Enfin, sa base arquée dessine l’image d’un compas géant ouvert sur la terre, comme si le Maître Architecte avait tracé, au cœur de Paris, le cercle de la fraternité universelle.

Ainsi, la Tour Eiffel, dans son langage muet, exprime l’essentiel de notre démarche : triangle, compas, lumière, élévation par degrés.

III. Lecture ésotérique : colonne, centre et temple invisible

René Guénon, photographie de 1925 (à 38 ans)
René Guénon, photographie de 1925 (à 38 ans)

La Tour Eiffel n’est pas seulement un monument, elle est un axe du monde. Dressée comme une colonne unique, elle relie symboliquement la terre au ciel. Guénon rappelait que le centre est le lieu où se rencontrent le haut et le bas. La Tour, plantée au Champ-de-Mars, est ce centre moderne, un omphalos (nombril) de fer autour duquel s’organise la cité.

Elle est aussi un temple invisible : pas de murs, pas de toit, seulement un espace ouvert au ciel et aux vents. Elle enseigne que le véritable temple n’est pas clos mais intérieur. Jung écrivait : « Celui qui regarde à l’extérieur rêve ; celui qui regarde à l’intérieur s’éveille. » La Tour Eiffel est un rêve de fer pour le profane, mais un éveil de lumière pour l’initié.

Enfin, elle incarne la modernité initiatique : à l’époque où la science et l’industrie triomphaient, elle rappelait que le progrès pouvait être aussi une ascension spirituelle. Teilhard de Chardin affirmait : « Tout ce qui monte converge. » La Tour Eiffel, par son élévation, manifeste cette convergence : science, art et spiritualité réunis dans une œuvre unique.

IV. Les signes visibles et invisibles

  • Visibles : verticalité, triangle, compas, lumière, trois degrés.
  • Invisibles : chemin initiatique, nombre sacré, fonction de centre, transfiguration de la matière, temple intérieur, universalité.

Ces éléments font de la Tour un livre ouvert pour l’initié, où le fer et la lumière se font langage symbolique.

Conclusion et enseignement

La Tour Eiffel n’a pas été conçue comme une œuvre maçonnique, mais elle parle le langage de la Maçonnerie. Elle est colonne dressée dans la cité, pyramide moderne, compas de lumière. Elle enseigne à l’initié que l’élévation est toujours possible, que la lumière doit rayonner, et que le temple véritable n’a pas besoin de murs : il se bâtit dans l’âme.

Pour nous, Francs-Maçons, contempler la Tour Eiffel peut devenir méditation silencieuse:

  • comme l’Apprenti, nous partons de la base lourde et opaque ;
  • comme le Compagnon, nous franchissons les degrés de l’élévation ;
  • comme le Maître, nous atteignons le sommet, non pour dominer, mais pour embrasser le monde d’un regard universel.
Vue aérienne de la Tour Eiffel et Champs de Mars
Vue aérienne de la Tour Eiffel et Champs de Mars

Ainsi, la Tour Eiffel se révèle temple moderne, phare de fraternité et axe de lumière. Elle nous murmure cette parole initiatique : « Élève-toi. Deviens colonne. Rayonne. »

Les origines du christianisme -1

Je vous propose à la lecture 10 articles qui paraîtront, à partir d’aujourd’hui et tous les jours suivants à 12h, retraçant l’origine du christianisme. Ils reprennent, documentent et résument les interventions de nombreux théologiens et spécialistes chrétiens et juifs enregistrées par Arte en 2022.

Contexte historique et question centrale : Jésus a-t-il fondé le christianisme ou l’Église ?

Vers l’an 30 de notre ère, Jésus est crucifié par les Romains sous l’accusation d’être le « roi des Juifs ». Trois siècles plus tard, l’empereur Constantin se convertit au christianisme, qui devient rapidement la religion officielle de l’Empire romain. Aujourd’hui, le Vatican est le siège de l’Église catholique apostolique et romaine, supplantant Jérusalem comme centre spirituel. Cela pose la question fondamentale : Jésus est-il à l’origine du christianisme ? A-t-il fondé l’Église ?

Jésus a vécu à l’intérieur d’Israël, a pensé sa théologie – son image de Dieu – au sein du judaïsme et pour Israël ; même s’il a fallu attendre le Concile Vatican II pour que l’Église lui rende sa judaïté (paragraphe 4 de Nostra Aetate): « Elle rappelle aussi que les Apôtres, fondements et colonnes de l’Église, sont nés du peuple juif, ainsi qu’un grand nombre des premiers disciples qui annoncèrent au monde l’Évangile du Christ.»

Jésus n’est pas un fondateur de schisme. Jésus n’a pas fondé l’Église au sens institutionnel. Il n’a pas mis en place un dispositif organisationnel qui servirait de base à ce que l’Église est devenue.

Dans le judaïsme palestinien du Ier siècle, extraordinairement diversifié avant la destruction du Temple en 70, Jésus représente, comme Jean le Baptiste, une forme particulière de croyance, mais totalement intégrée au judaïsme. Il est un fils d’Israël, juif, et propose une relecture de la tradition juive, avec une image de Dieu miséricordieux et quelques signes d’ouverture vers les païens (représentés par les publicains et les pécheurs), bien que cela soit amplifié après la résurrection.

Se demander si Jésus a fondé une Église est anachronique et dépourvu de sens. Jésus visait le renouveau d’Israël, un Israël renouvelé et eschatologique (lié à la fin des temps), inclusif et prêt à accueillir ceux que d’autres partis juifs réprouvaient. Il n’y a pas de « christianisme » du vivant de Jésus ; son but était de rassembler un Israël véritable.

Une conscience chrétienne naît plus tard, relativement rapidement, vers la fin du Ier siècle, lorsque le mouvement se positionne de manière autonome. Le terme « christianisme » est donc anachronique pour le Ier siècle ; on parle plutôt de groupes de fidèles de Jésus, et ce n’est qu’au IVe siècle que la religion se distingue et s’institutionnalise.

La propagation du christianisme : mystères et lacunes documentaires

On ignore en grande partie comment le christianisme s’est propagé.

Par exemple, on apprend l’existence d’une communauté chrétienne déjà développée en Égypte, à Alexandrie, mais le Nouveau Testament ne dit rien sur comment l’Évangile est passé de Jérusalem à Alexandrie. Le développement du mouvement à l’intérieur de la Judée et jusqu’au bassin méditerranéen est mal documenté. Ce qu’on peut dire c’est que là où il y avait des synagogues, des communautés chrétiennes émergent, parfois non juives, mais c’est extrêmement difficile à reconstruire à partir des récits du Nouveau Testament.

Les historiens soulignent une absence de documentation précise sur les mois et années suivant la mort de Jésus. Les points fixes proviennent du Nouveau Testament : la sortie de Jérusalem, la formation d’une communauté à Antioche (décisive pour le développement ultérieur).

Au début, on parle de « juifs messianiques » ou « juifs chrétiens », adoptant la foi en Jésus comme Messie. Il faut attendre des dizaines d’années pour parler d’un christianisme autonome. L’expression « chrétiens » est utilisée par simplification pour désigner ceux qui croient en Jésus-Christ comme agent eschatologique envoyé par Dieu pour le salut de l’humanité, mais au départ, ce sont des juifs professant que Jésus est le Christ, mort et ressuscité, le Sauveur. Ces catégories (Messie, Christ) sont purement juives, incompréhensibles pour les païens ; « Christ » signifie « oint » en hébreu (messie), un rôle particulier, sans la connotation dogmatique accumulée sur vingt siècles.

L’invention du christianisme commence par voir en Jésus le Christ ressuscité.

Cette confession de foi donne naissance à l’Église, mais à l’origine, l’Église n’est pas une institution structurée. C’est un ensemble de communautés unies par la même foi, sans organisation centralisée. On parle de petits groupes de fidèles se retrouvant dans des maisons (30-40 personnes), très différent du christianisme comme religion mondiale.

Au Ier siècle, le mot « ecclesia » (église) signifie simplement « assemblée », au sens politique ou synagogal, sans connotation institutionnelle.
C’est seulement au chapitre 5,11 des Actes des Apôtres que ce mot désigne la communauté : «  Une grande crainte saisit toute l’Église et tous ceux qui apprenaient cette nouvelle ».  Auparavant, on parle de « communion » ou « disciples ». Influencé par la tradition juive (ecclesia pour l’assemblée d’Israël dans la Bible grecque) et le monde grec (assemblée des hommes libres), le terme s’impose progressivement. Paul, dans ses lettres, l’utilise pour des communautés locales (ex. : l’église des Corinthiens, ou celle chez Priscille et Aquilas).

La distance entre le Royaume annoncé par Jésus et l’Église : le rôle de Paul

Selon une formule célèbre, Jésus a annoncé le Royaume, et c’est l’Église qui est venue. Cette distance sépare-t-elle Jésus de Paul, vu comme l’inventeur de la nouvelle religion ?

Le Royaume annoncé par Jésus est très différent de l’Église naissante. Après la mort de Jésus, l’Église s’éloigne du judaïsme originel. Si Jésus revenait, il ne reconnaîtrait probablement pas la religion développée par Paul.

Cependant, il n’y a pas de « blanc » entre la crucifixion/résurrection et Paul.

Les écrits de Paul aident des communautés païennes à vivre le christianisme. Son apport est fondamental pour façonner le christianisme actuel, mais pas comme inventeur radical.

Avec vingt siècles de recul et peu de sources, Paul ressort énormément car on a ses épîtres (le plus de renseignements). Son succès vient du christianisme qu’il propose, séducteur : un homme (Jésus) a prêché le salut, est mort et ressuscité. Paul est le grand apôtre des Gentils (non-Juifs), qui deviennent majoritaires, le rendant central.

Le christianisme qui émerge est paulinien : il réfute la Loi juive, critique la circoncision, refuse le casher et les fêtes juives. Jésus s’est transformé en Jésus-Christ, personnalité divine, éloignée du prophète messianique juif. Au fil du temps, on s’éloigne du Jésus terrestre, juif, pour un Jésus spiritualisé, fils de Dieu dès l’origine (au lieu de fils de David, messie d’Israël). Les Évangiles montrent ce doublement : Jésus humain (marchant sur l’eau, calmant la tempête comme Dieu). Le nœud est là : Jésus devient homme et Dieu, Verbe incarné.

Jésus évolue dans le judaïsme, même s’il peut être vu comme un grand hérésiarque. Le christianisme se forme quand on professe « Jésus est Dieu », nouveauté absolue. Les conciles des IVe-Ve siècles débattent de cela : Jésus est-il totalement homme, totalement Dieu, ou les deux ? On accepte la double nature.

La crucifixion et la résurrection : fondement de la foi

L’exécution de Jésus sur la croix marque la ruine des espoirs de ses disciples. La croyance en sa résurrection permet de surmonter cela. La crucifixion prend les disciples au dépourvu ; ils attendaient une ère triomphale. Dans Luc, ils changent leurs espérances via des apparitions ou un processus intime. Les premières confessions de foi : « Il est mort et ressuscité » – une mort infamante (croix pour esclaves, abominable pour Juifs et païens).
C’est un scandale pour les Juifs (messie crucifié introuvable dans les Écritures), une folie pour les Grecs. Les Évangiles montrent un désarroi : trahison (Judas), reniement (Pierre), fuite des disciples ; seules des femmes regardent de loin. Le groupe se reconstitue car Jésus se manifeste. Quelque chose s’est passé : résurrection pour les croyants, expérience religieuse pour d’autres.  

Les apparitions en Galilée ou Jérusalem, correspondant à des groupes : Paul (vers 50) dit que le corps ressuscité n’est pas de chair ; les Évangiles (80-100) insistent sur le corporel (toucher, manger du poisson). Il y a donc des divergences dès les traditions anciennes

Les croyances en immortels existaient déjà (ex. : Platon sur Socrate enlevé aux cieux), mais elles ne sont pas universelles. Dans «Matthieu, certains doutent même face au ressuscité. Paul liste les témoins : Pierre d’abord, puis les Douze, 500 frères, Jacques, apôtres, et lui-même (comme avorton). C’est une tradition des années 30, un credo liturgique.
L’historien ne juge pas la vérité, mais constate les effets : cet événement fonde le christianisme.

Le rôle de Pierre : une figure complexe

Pierre est le premier à voir le ressuscité, cela l’introduirait-il comme successeur ? Dans «Matthieu 16:18 (« Tu es Pierre, sur cette pierre je bâtirai mon église ») , cela pourrait remonter à la communauté primitive de Jérusalem, où Pierre en était le représentant. Mais Marc et Luc l’omettent, et cela est impensable si c’est historique.
Cela réfère à une symbolique juive : la pierre cosmique du Temple (jonction ciel-terre). Pierre reçoit les clés du Royaume, mais son portrait est ambivalent : fonceur, gaffeur, impulsif, douteur, reniant trois fois Jésus (récupéré dans Jean 21 par triple affirmation d’amour).

Pierre est porte-parole des Douze, mais mal comprenant (paroles, passion). la Tradition ne l’idéalise pas ; il illustre le croyant faillible par de multiples portraits : impulsif, inconstant, reconnaissant Jésus comme Christ, mais remettant en cause sa mort.

D’autres figures comme Pierre, Paul, Jacques (frère de Jésus) sont emblématiques, variant selon les textes. Pierre symbolise plus qu’il n’exerce un pouvoir ; proche de Jésus, continuant en Palestine, puis ailleurs (Corinthe, Rome ?). Cependant, il n’est pas désigné chef unique par Jésus ; dans Matthieu,16, le pouvoir est, certes, donné à Pierre, il l’est aussi aux autres (Matthieu. 18,4).

Ce contre-sens historique a influé sur l’Église catholique.

À Jérusalem (années 30-40), la communauté lutte pour survivre. La famille de Jésus, menée par Jacques le frère du Seigneur (ainsi nommé par Hégésippe, Épiphane de Salamine, Eusèbe de Césarée et même par Paul de Tarse), s’oppose au groupe des disciples mené par Pierre.
Jacques le Juste, est appelé frère du Seigneur par Paul et frère de Jésus par Flavius Josèphe. La question de son identité historique ne rencontre pas un accord unanime chez les historiens. Traditionnellement identifié à un frère de l’Apôtre Jude, on voit en lui non point l’un des Douze, mais un parent de Jésus.

Alors, « Jésus avait-il un frère ? »comme l’écrit aussi Matthieu en 13,55 :  « N’est-ce pas le fils du charpentier? n’est-ce pas Marie qui est sa mère? Jacques, Joseph, Simon et Jude, ne sont-ils pas ses frères? »

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La Franc-maçonnerie dans le monde séfarade (suite) : un héritage vivant et symbolique

Du site enlacejudio.com – Par Maria José Arevalo Gutierrez

(Suite de l’article n°1 sur le même thème)

Dans la continuité de notre exploration de la franc-maçonnerie dans le monde séfarade, cette troisième partie s’attarde sur l’empreinte durable de cet ordre initiatique dans les communautés séfarades, non seulement à travers les loges, mais aussi dans les symboles, les cimetières et les traditions culturelles qui transcendent les frontières géographiques et temporelles. De l’introduction du Rite Écossais dans le Nouveau Monde à l’héritage architectural et funéraire, la franc-maçonnerie séfarade illustre une quête d’universalité et de fraternité, marquée par une riche interaction entre identités culturelles et spirituelles.

L’Expansion du Rite Écossais et les « Sociétés de Pensée »

Yucatan - Mexique
Yucatan – Mexique

Dès le XVIIIe siècle, la franc-maçonnerie s’est implantée en France et en Espagne, portée par des idéaux de liberté et d’égalité. Le Rite Écossais, introduit dans le Nouveau Monde par Morín, voyagea de France aux Antilles, puis se diffusa progressivement en Amérique latine, notamment au Mexique. Les origines de la franc-maçonnerie mexicaine remontent à des « Sociétés de Pensée », fondées à la fin du XVIIIe siècle en Espagne et dans ses colonies. Ces cercles intellectuels, précurseurs de l’ordre maçonnique, attiraient des esprits éclairés, dont certains deviendraient plus tard francs-maçons. La première trace documentée d’une loge au Mexique remonte au 24 juin 1791, établie par des résidents français récemment arrivés, marquant le début d’une présence maçonnique durable dans la région.

Dans le monde séfarade, ces loges ont souvent servi de refuge pour des communautés en quête d’intégration. À Thessalonique, par exemple, la première loge, fondée en 1904 sous le patronage du Grand Orient de France, fut initiée par des dirigeants juifs. Rapidement, des Grecs, des Arméniens et des musulmans rejoignirent l’initiative, bien que les Juifs séfarades restèrent majoritaires. Cette diversité reflète l’universalité de la franc-maçonnerie, qui transcendait les clivages religieux et ethniques, tout en s’appuyant sur des liens linguistiques et culturels forts, notamment l’usage du ladino dans les loges hispanophones.

Une fraternité forgée dans l’adversité

Les loges séfarades étaient souvent composées de réfugiés ou d’immigrants ayant fui des persécutions, comme les Cubains luttant contre le régime espagnol au XIXe siècle. Ces loges, unies par la langue et des idéaux communs, offraient un espace de solidarité face aux oppressions, qu’elles soient religieuses ou politiques. Manuel Creso, directeur d’une loge séfarade, soulignait cette fraternité en déclarant :

« Parce que leurs ancêtres ont fondé de vastes colonies en Espagne au XIe siècle, ou ont épousé des femmes indigènes, ils pourraient être considérés comme nos frères de sang, fiers d’être appelés Espagnols, et nous sommes heureux de les appeler frères. »

Synagogue of Bayonne (France) – Inside.

Ce sentiment d’appartenance, renforcé par une langue commune, a permis aux Juifs séfarades d’Orient de s’intégrer dans des loges hispanophones, malgré les persécutions historiques subies par les francs-maçons de la part de l’Église catholique et de certains gouvernements.

Cependant, la franc-maçonnerie séfarade ne se limitait pas aux travaux des loges. Les traditions extra-logiales, comme les coutumes alimentaires, ont parfois souffert d’un relâchement, conduisant à des conséquences dramatiques. En Galice, par exemple, la consommation excessive de maïs, presque exclusif dans l’alimentation, a provoqué des épidémies de pellagre, ou « mal de rosa », au XIXe siècle. Ce laxisme dans la transmission des pratiques culturelles montre comment l’oubli des principes fondamentaux peut avoir des répercussions sociales profondes, un enseignement que les francs-maçons, attachés à la mémoire et à la symbolique, s’efforcent de préserver.

Un héritage gravé dans la pierre : les cimetières séfarades

L’influence maçonnique dans le monde séfarade ne s’éteint pas avec la mort. Les cimetières juifs, comme celui de Coro au Venezuela, témoignent de cette pérennité. Fondé en 1832 par Joseph Curiel et Débora Levy Maduro, ce cimetière, considéré comme le plus ancien d’Amérique utilisé sans interruption, abrite 182 tumulus, dont 16 portent des symboles maçonniques tels que le sablier, l’ouroboros, les fleurs, les griffes de lion ou le pavé à damier. La tombe d’Abraham de Meza Myerston, ornée d’une colonne commémorative, concentre plusieurs de ces symboles, illustrant l’importance de l’appartenance maçonnique, même dans l’au-delà.

Ce phénomène n’est pas unique au Venezuela. À Guadalajara, au Mexique, comme dans de nombreux cimetières à travers le monde, les pierres tombales révèlent des symboles maçonniques, non seulement comme marque d’appartenance, mais aussi comme témoignage de l’importance accordée à la fraternité. En Espagne, ces traces se retrouvent dans l’architecture quotidienne : sur les façades des maisons, les balcons, les linteaux ou les vitraux, voire dans les plans polygonaux d’églises flanquées de colonnes, rappelant les temples maçonniques. Ces détails, souvent discrets, invitent à une lecture attentive du paysage, où l’héritage maçonnique dialogue avec l’histoire séfarade.

Une symbiose culturelle et spirituelle

La franc-maçonnerie séfarade incarne une symbiose unique entre identité culturelle et quête spirituelle. Les Juifs séfarades, en rejoignant les loges, ont non seulement trouvé un espace d’intégration, mais ont également enrichi l’ordre maçonnique de leur héritage kabbalistique et de leur langue. Le ladino, langue des Séfarades d’Orient, a joué un rôle clé dans la cohésion des loges hispanophones, renforçant les liens entre membres d’origines diverses. Cette fraternité linguistique et culturelle a permis à la franc-maçonnerie de prospérer dans des contextes parfois hostiles, où les Juifs et les maçons étaient stigmatisés comme des menaces par les autorités religieuses et politiques.

Pourtant, cet héritage n’est pas sans défis. La transmission orale des traditions maçonniques, qu’il s’agisse des rituels ou des coutumes, a parfois conduit à leur oubli, comme dans le cas des pratiques alimentaires.

Un héritage vivant

La franc-maçonnerie dans le monde séfarade, du XVIIIe siècle à nos jours, illustre une histoire de résilience, de fraternité et de dialogue interculturel. Des premières loges fondées par des réfugiés aux symboles gravés dans les cimetières, cet ordre initiatique a offert aux communautés séfarades un espace de liberté et d’émancipation, tout en laissant une empreinte durable dans l’architecture, les traditions et les mémoires collectives.

Relire le volet de cette série de 2 articles

Les entretiens d’été 2025 : clôture en beauté avec « Du profane à l’initié »

Les amateurs de réflexion et de dialogue initiatique sont invités à marquer leur calendrier pour le dernier volet des Entretiens d’Été 2025, organisé par le Collège Maçonnique. Ce jeudi 4 septembre 2025 à 19h30 (CEST), l’événement intitulé Migrations… Odyssées du Vivant s’achèvera sur une note profonde avec la conférence Du Profane à l’Initié, animée par deux figures emblématiques de la pensée maçonnique : Catherine Quentin et Jean Dumonteil.

Cette session, accessible gratuitement via Zoom, promet d’explorer les voyages symboliques qui jalonnent le chemin initiatique, une thématique qui résonne avec les mutations contemporaines et les quêtes de sens.

L’inscription est obligatoire sur https://us06web.zoom.us/webinar/register/WN_VVSVEmjERd-YrFf8QdKxyQ.

Une exploration des migrations et des voyages initiatiques

Catherine Quentin

Depuis le début de l’année, les Entretiens d’Été 2025 ont offert un voyage intellectuel à travers les notions de migrations, d’évolutions et de transformations, examinées sous divers angles : les avancées médicales, l’intelligence artificielle, les mutations sociétales et l’évolution de l’éthique. Ce cycle s’est enrichi d’une dimension maçonnique en s’intéressant aux « voyages » symboliques proposés aux francs-maçons, une errance intérieure qui invite à un changement de perspective et de manière d’être. Ces voyages, bien que qualifiés d’imaginaires, soulèvent une question essentielle : ne sont-ils pas plutôt une quête inlassable de sens, une exploration d’une réalité plus profonde que le quotidien ?

Jean Dumonteil

Catherine Quentin et Jean Dumonteil, experts reconnus dans leurs domaines respectifs, apporteront leur éclairage sur cette transition du profane à l’initié. Leur conférence promet de dépasser la simple métaphore pour interroger la profondeur de cette démarche, un thème central dans la tradition maçonnique qui invite à repenser l’existence à travers l’initiation.

Les intervenants : une alliance de savoir et d’engagement

Catherine Quentin, issue d’une formation classique et philosophique, a débuté sa carrière comme enseignante d’allemand avant de se tourner vers la communication stratégique. Après avoir collaboré avec des figures comme Michel Baroin et dirigé la communication de structures telles que la CAPEB, l’ANCV et PRO-BTP, elle a rejoint la Grande Loge Féminine de France. Actuellement Grand Commandeur du Suprême Conseil Féminin de France, elle est une voix respectée, enrichissant les travaux maçonniques par ses planches et articles.

Jean Dumonteil, quant à lui, apporte une perspective complémentaire avec ses études en théologie morale et exégèse biblique, suivies d’une carrière en journalisme et développement social. Membre de la Grande Loge de l’Alliance Maçonnique Française, il a été Vénérable Maître de la loge nationale de recherche et promeut une spiritualité active à travers des ouvrages comme Éloge du local (Éditions de l’Aube, 2023) et Au Centre de la Loge, les symboles maçonniques restitués (Numérilivre, 2025).

Une clôture inspirante avec Christian Roblin

Christian Roblin
Christian Roblin

La soirée du 4 septembre s’achèvera par les conclusions de ce cycle 2025, prononcées par Christian Roblin, Président du Collège Maçonnique. Sous la médiation d’Alain-Noël Dubart (Ancien Grand Maître de la Grande Loge de France) et Marie-Thérèse Besson (Ancienne Grande Maîtresse de la Grande Loge Féminine de France), cette session offrira un moment de synthèse et de prospective, fidèle à l’esprit ouvert et fraternel des Entretiens d’Été.

Un accès universel et gratuit

Conformes à leur vocation inclusive, toutes les conférences des Entretiens d’Été sont gratuites, ouvertes à tous, enregistrées et disponibles en replay sur le site du Collège Maçonnique www.collegemaconnique.fr ou via https://collegemaconnique.fr/entretiens-dete/videos-des-conferences-entretiens-dete/. Cette accessibilité permet à chacun, profane ou initié, de s’immerger dans ces réflexions profondes, prolongeant ainsi le dialogue au-delà de la soirée.

Une invitation à la réflexion

À l’aube de cette nouvelle étape des Entretiens d’Été, le 4 septembre 2025 à 19h30, Catherine Quentin et Jean Dumonteil nous invitent à embarquer dans une odyssée intérieure, où les migrations du vivant rencontrent les voyages symboliques de l’initiation. Que vous soyez novice ou familier de la pensée maçonnique, cette conférence promet d’ouvrir des perspectives nouvelles sur la quête de sens dans un monde en mutation. Inscrivez-vous dès aujourd’hui pour ne pas manquer ce moment de partage et de lumière.

Inscription :

https://us06web.zoom.us/webinar/register/WN_VVSVEmjERd-YrFf8QdKxyQ

Certitude ou Vérité (suite) : Le chemin de l’humilité et du doute initiatique

De notre confrère elnacional.com – Par Mario Múnera Muñoz

« Le problème du monde, c’est que les gens stupides sont certains de tout, et les gens intelligents sont pleins de doutes. »

Ces mots de Bertrand Russell résonnent comme une mise en garde intemporelle contre les pièges de la certitude absolue. Dans la continuité de notre réflexion sur la quête de vérité, cet article explore la tension entre certitude et doute, et leur rôle dans le chemin initiatique, en s’appuyant sur des perspectives philosophiques, historiques et spirituelles. À l’heure où le dogmatisme et le fanatisme continuent de marquer nos sociétés, comment la franc-maçonnerie, en particulier au sein de l’Ordre maçonnique mixte international Le Droit Humain, peut-elle nous guider vers une sagesse équilibrée, mêlant humilité et discernement ?

Suite de l’article d’hier que vous trouverez sur ce lien

L’illusion de la certitude : un obstacle à la fraternité

La certitude, lorsqu’elle devient inflexible, peut se transformer en un frein à l’épanouissement individuel et collectif. Comme l’illustre Russell, l’arrogance de croire « j’ai toujours raison » est l’apanage des dictateurs, non des leaders. Un véritable leader maçonnique, incarne une approche différente : il propose, écoute et analyse en équipe, favorisant le dialogue et la collaboration. La certitude, lorsqu’elle est érigée en dogme, devient l’ennemie du travail d’équipe, essentiel à la démarche maçonnique qui prône l’union pour le bien commun.

Le dogmatisme et le fanatisme, souvent nés d’une quête de sécurité psychologique, prospèrent sur des certitudes absolues. L’histoire en témoigne tragiquement : de la Sainte Inquisition, qui brûlait les hérétiques au nom de vérités religieuses, aux régimes totalitaires du XXe siècle – Hitler, Mussolini, Staline – qui ont semé la guerre et la souffrance pour imposer leurs idéaux, la certitude mal placée a causé des ravages. Ces exemples montrent que le problème n’est pas la certitude en soi, mais son maintien aveugle, dépourvu d’humilité et de remise en question.

L’humilité épistémologique : une arme contre le dogmatisme

L’humilité épistémologique, qui consiste à reconnaître les limites de notre savoir, est une discipline essentielle pour distinguer une connaissance valide d’une croyance infondée. Comme l’écrivait Thomas Hobbes dans Leviathan (1651), les êtres humains sont mus par un désir incessant de pouvoir, et la certitude devient souvent une arme pour asseoir ce pouvoir. Karl Popper, défenseur de la société ouverte, affirmait quant à lui que le dogmatisme étouffe la pensée critique, annihilant toute possibilité de progrès. Le danger réside non dans la croyance, mais dans l’étroitesse d’esprit, comme le soulignait Protagoras :

« La pire forme d’ignorance est d’être certain de ce que l’on ignore. »

Un bol tibétain, pour faire du son méditatif
Un bol tibétain, pour faire du son méditatif

Dans le bouddhisme, l’attachement aux opinions est considéré comme une source de souffrance. Cette idée trouve un écho dans le chemin initiatique maçonnique, où le doute est sacré. La vérité ne s’impose pas comme une révélation figée ; elle se découvre à travers une quête dynamique, faite d’exploration et de questionnement. Georges Ivanovitch Gurdjieff, mystique et créateur de la Quatrième Voie, allait jusqu’à dire que « le rêve des certitudes est le plus grand ennemi de l’éveil ». Pour le maçon, abandonner le besoin de certitudes absolues revient à retirer des feuilles sèches d’un étang, laissant place à la clarté de l’introspection.

La justice : entre certitude des principes et doute dans l’application

La justice humaine illustre parfaitement cette tension entre certitude et doute. Le Code d’Hammourabi, avec son principe d’« œil pour œil », était considéré comme juste en son temps, mais apparaît aujourd’hui comme une rigidité excessive. Comme l’expliquait Aristote, « l’équité corrige la rigidité des lois », tandis que John Rawls, dans sa théorie de la justice comme impartialité, soulignait que la justice ne repose pas sur une vérité absolue, mais sur une approximation raisonnée. Une justice humaine, imparfaite par nature, exige des principes clairs – comme l’égalité devant la loi – mais aussi une humilité dans leur application, prenant en compte les circonstances et les nuances.

Dans le cadre maçonnique, cette réflexion s’applique à la manière dont les loges abordent les questions éthiques et sociétales.

Le doute initiatique : une voie vers la sagesse

Sur le chemin initiatique, la certitude absolue est un obstacle, car elle ferme les portes du discernement. Le maçon, en quête de lumière, apprend à embrasser le doute comme un outil sacré. Comme le suggère l’adage hermétique

« Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas »

la vérité n’est pas une loi immuable, mais une invitation à explorer les correspondances entre le microcosme et le macrocosme. Croire « je sais déjà » équivaut à stagner spirituellement, car, comme le souligne Gurdjieff, l’égo spirituel est un frein à l’éveil.

Le véritable initié ne craint pas le doute ; il redoute l’arrogance de penser qu’il n’y a plus rien à découvrir. Avant chaque méditation, le maçon est invité à se défaire de son besoin de certitudes, répétant mentalement :

« Je ne cherche pas des réponses, mais de la profondeur dans les questions. »

Cette démarche, empreinte d’humilité, permet de cultiver un équilibre entre certitude et doute, où la première donne du sens à l’action et le second garantit l’ouverture d’esprit.

Vers une sagesse dynamique

Fil a plomb au dessus du Pavé moisaïque

La certitude, lorsqu’elle est dénuée d’humilité, est un piège qui enferme l’esprit dans l’illusion de la vérité absolue. Le doute, loin d’être une faiblesse, est une force qui ouvre les portes de la découverte et de la fraternité. En franc-maçonnerie, cette dialectique entre certitude et doute est au cœur de la quête initiatique. Comme le souligne Protagoras, l’ignorance véritable réside dans la certitude aveugle.

En cultivant l’humilité et en embrassant le doute, le maçon s’engage sur un chemin dynamique, où la vérité ne s’impose pas, mais se révèle à travers la patience, le dialogue et la quête incessante de lumière.

Relire le volet n° 1 de cet article