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Que pensent les protestants français de la Franc-maçonnerie ?

Du site officiel du museeprotestant.org

La relation entre les protestants français et la franc-maçonnerie constitue un chapitre fascinant de l’histoire religieuse et sociale de la France, marqué par des convergences idéologiques, des tensions historiques et une évolution au fil des siècles. Depuis l’émergence de la franc-maçonnerie au XVIIIe siècle, les protestants, en particulier ceux issus de l’Église réformée, ont joué un rôle significatif dans son développement, contribuant à façonner son caractère humaniste et ses valeurs de liberté.

Cet article explore les origines de cette connexion, les influences réciproques, les défis rencontrés et la situation actuelle de cette alliance spirituelle et philosophique.

Des racines communes dans les idéaux des lumières

L’histoire de la franc-maçonnerie en France prend forme à une époque où les idées des Lumières commencent à transformer la société européenne, au début du XVIIIe siècle. Cette période coïncide avec un regain d’intérêt pour la tolérance religieuse et la raison, des principes qui résonnent profondément avec les protestants français. Persécutés sous l’Ancien Régime après la révocation de l’Édit de Nantes en 1685, beaucoup d’entre eux avaient fui vers des pays comme la Suisse, les Pays-Bas ou l’Angleterre, où la franc-maçonnerie avait déjà pris racine. Ces exilés, souvent des intellectuels et des artisans, ont été parmi les premiers à intégrer les loges maçonniques, attirés par leur promesse d’un espace de réflexion libre, débarrassé des dogmes imposés par l’Église catholique dominante.

La franc-maçonnerie, avec ses rituels symboliques et sa quête de perfectionnement personnel, offrait un cadre qui s’alignait sur les valeurs protestantes d’interprétation personnelle des Écritures et de responsabilité individuelle. Dès les années 1730, des figures protestantes comme Jean-Théophile Desaguliers, un pasteur et scientifique d’origine française établi en Angleterre, ont contribué à structurer les premières loges. En France, malgré les persécutions, des protestants ont discrètement rejoint ces cercles, voyant dans la maçonnerie un refuge intellectuel et un lieu de fraternité au-delà des divisions confessionnelles.

Une influence mutuelle dans la lutte pour la liberté

Marquis A.F. de Jaucourt © S.H.P.F.

Au cours des XVIIIe et XIXe siècles, la franc-maçonnerie et les protestants français ont partagé un combat commun pour la liberté religieuse et civile. Après la Révolution française de 1789, qui a aboli les discriminations contre les non-catholiques, les protestants ont vu leur situation s’améliorer, et beaucoup ont renforcé leur présence dans les loges. Ces dernières, souvent perçues comme des foyers de pensée libérale, ont accueilli des pasteurs, des médecins et des enseignants réformés qui y trouvaient un espace pour débattre des droits de l’homme, de l’éducation et de la laïcité.

Cette période a également vu des échanges intellectuels fructueux. Les loges maçonniques, avec leur accent sur la morale universelle et l’éthique, ont influencé les communautés protestantes en les encourageant à adopter une vision plus inclusive de la spiritualité. En retour, les protestants ont apporté à la maçonnerie une rigueur théologique et une sensibilité à la justice sociale, notamment dans les luttes contre l’esclavage et pour l’égalité des sexes, des causes qui ont trouvé un écho dans certaines loges progressistes.

Des tensions avec l’église catholique et des défis internes

Tablier de maçon © Collection Château de Coppet

Malgré ces affinités, la relation entre protestants et franc-maçonnerie n’a pas été exempte de tensions, en particulier en raison de l’hostilité de l’Église catholique. Cette dernière, qui dominait la sphère religieuse en France jusqu’au XXe siècle, a souvent dénoncé la maçonnerie comme une organisation anticléricale, une accusation qui a parfois éclaboussé les protestants membres des loges. Au XIXe siècle, le Vatican a publié des encycliques, comme Humanum Genus en 1884, condamnant la franc-maçonnerie et, par extension, ceux qui y étaient associés, y compris les protestants. Cette opposition a créé un climat de méfiance, obligeant les loges à rester discrètes et renforçant leur image de société secrète.

À l’intérieur même de la communauté protestante, des divergences sont apparues. Certains pasteurs et fidèles conservateurs voyaient d’un mauvais œil l’adhésion à la maçonnerie, la considérant comme une déviation spirituelle ou une concurrence avec la foi chrétienne. D’autres, plus libéraux, y voyaient au contraire une extension naturelle de leur quête de vérité et de fraternité. Ces débats internes ont parfois fracturé les Églises réformées, notamment au moment de la séparation de l’Église et de l’État en 1905, où la laïcité, soutenue par de nombreux francs-maçons protestants, a été un enjeu majeur.

Une présence contemporaine et un dialogue renouvelé

Jean Théophile Desaguliers © S.H.P.F.

Aujourd’hui, la franc-maçonnerie en France compte encore un nombre significatif de membres protestants, bien que leur proportion exacte reste difficile à établir en raison de la discrétion des loges. Les Églises réformées, réunies au sein de l’Église protestante unie de France depuis 2013, adoptent une attitude généralement ouverte envers la maçonnerie, reconnaissant sa contribution à la laïcité et aux droits humains. Des pasteurs continuent de participer à des loges, souvent celles d’obédiences comme le Grand Orient de France ou la Grande Loge de France, qui privilégient une approche philosophique plutôt que religieuse.

Cette coexistence s’accompagne d’un dialogue interconfessionnel enrichi. Des initiatives comme les rencontres entre loges et communautés religieuses cherchent à démystifier les préjugés et à promouvoir une compréhension mutuelle. Par exemple, des conférences organisées conjointement explorent des thèmes communs tels que la justice sociale, l’éthique environnementale et la liberté de conscience, montrant que les valeurs partagées peuvent transcender les différences doctrinales.

Une réflexion sur un héritage vivant

La connexion entre les protestants français et la franc-maçonnerie illustre une histoire d’adaptabilité et de résistance face aux défis imposés par une société souvent hostile. Elle reflète également une quête commune de sens dans un monde marqué par la diversité des croyances. Si les stéréotypes persistent – images de complots ou de rituels obscurs –, les témoignages comme ceux de Vilaseca en Bolivie ou les analyses historiques en France rappellent que la maçonnerie, du moins pour ses membres protestants, est avant tout un espace de réflexion et de fraternité.

Dans un contexte où la laïcité française continue d’évoluer, cette relation pourrait inspirer de nouvelles formes de dialogue entre spiritualité et sécularisme. Que cette alliance perdure comme un vestige historique ou qu’elle se réinvente pour répondre aux enjeux modernes, elle demeure un témoignage de la capacité de l’humanité à chercher la lumière, qu’elle soit religieuse, philosophique ou simplement humaine.

La Franc-maçonnerie argentine propose de supprimer la mention de l’église catholique dans la nouvelle constitution de Santa Fe

De notre confrère argentin diariolasamericas.com

À Santa Fe, en Argentine, un débat constitutionnel d’envergure est en cours, et la franc-maçonnerie s’est positionnée au cœur de la controverse. Selon les discussions récentes, cette organisation propose d’éliminer la référence explicite à l’Église catholique dans la nouvelle Constitution provinciale, un changement qui pourrait redéfinir les relations entre l’État et les institutions religieuses dans la région. Cette initiative s’inscrit dans un contexte plus large de réforme constitutionnelle, où les questions de laïcité, de liberté religieuse et d’identité culturelle occupent une place centrale.

Un projet de réforme controversé

La Constitution actuelle de Santa Fe, datant de 1962, stipule dans son article 3 que la religion de la province est « catholique, apostolique et romaine », tout en garantissant la liberté religieuse pour ses habitants. Cette clause reflète un héritage historique où l’Église catholique a joué un rôle dominant dans la société argentine. Cependant, la franc-maçonnerie, connue pour son engagement en faveur de la laïcité et de la séparation entre l’État et les religions, milite pour une révision de ce texte. L’objectif serait de promouvoir un État neutre, reconnaissant la pluralité des croyances sans accorder de statut privilégié à une confession particulière.

Cette proposition intervient alors que d’autres acteurs, y compris l’Église catholique elle-même, se prononcent sur la réforme. Paradoxalement, certains représentants ecclésiastiques, comme l’archevêque Sergio Fenoy, ont récemment suggéré une approche intermédiaire, plaidant pour une « laïcité positive » qui reconnaît l’héritage historique de l’Église tout en évitant les privilèges confessionnels. Cette position contraste avec l’idée maçonnique d’une suppression totale de la mention catholique, ce qui alimente un débat animé sur l’équilibre entre tradition et modernité.

Des tensions entre héritage et modernité

Le projet maçonnique soulève des questions fondamentales sur l’identité de Santa Fe. Pour certains, l’Église catholique reste un pilier culturel et historique, ayant influencé la construction sociale et morale de la province pendant des siècles. Supprimer sa mention pourrait être perçu comme une rupture avec cet héritage, voire comme une tentative d’effacer une partie de l’histoire locale. D’un autre côté, les défenseurs de la proposition arguent que maintenir une référence confessionnelle dans un texte constitutionnel moderne est anachronique dans une société de plus en plus diverse, où les croyances évangéliques, les spiritualités alternatives et l’agnosticisme gagnent du terrain.

Cette tension reflète un dilemme plus large en Amérique latine, où l’influence de l’Église catholique décline face à la montée d’autres courants religieux et à une sécularisation croissante. Des études récentes montrent que dans plusieurs pays de la région, comme le Brésil ou le Chili, la population catholique représente désormais moins de la moitié des habitants, un phénomène qui pourrait encourager des réformes similaires ailleurs.

Une position maçonnique controversée

La franc-maçonnerie, souvent associée à des idéaux de rationalité et de liberté individuelle, a historiquement entretenu une relation tendue avec l’Église catholique, qui la considère comme incompatible avec la foi chrétienne. Cette proposition à Santa Fe renforce cette opposition, certains y voyant une tentative d’imposer une vision laïque au détriment des convictions religieuses majoritaires. Cependant, il est important de noter que la maçonnerie ne parle pas d’une seule voix, et ses loges locales pourraient avoir des priorités variées, allant de la défense de la laïcité stricte à une reconnaissance pluraliste des cultes.

On peut se demander si cette initiative reflète une véritable aspiration populaire ou si elle est portée par une minorité influente cherchant à marquer un point idéologique. Sans un large consensus, une telle réforme risque de polariser davantage la société santafesina, déjà divisée sur des questions comme l’avortement, l’éducation sexuelle ou les droits des minorités, où l’Église et la maçonnerie ont des positions souvent opposées.

Santé Fé (Argentine)

Vers un avenir incertain

À ce jour, la réforme constitutionnelle n’est pas encore finalisée, et la proposition maçonnique devra être débattue par la Convention constituante élue en avril 2025. Le résultat dépendra du rapport de forces entre les différents courants politiques et sociaux, ainsi que de la capacité des acteurs à trouver un compromis. Que la mention catholique soit supprimée, amendée ou maintenue, cette controverse illustre les défis d’adapter des textes fondateurs à une société en mutation, où les valeurs traditionnelles et les aspirations modernes s’entrecroisent.

Alors que le débat se poursuit, Santa Fe pourrait devenir un exemple pour d’autres régions d’Amérique latine confrontées à des questions similaires.

Reste à voir si cette réforme marquera une avancée vers une laïcité inclusive ou si elle exacerbera les divisions existantes.

le diable, aujourd’hui, parle anglais

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Notre monde contemporain est en difficulté, et il est peu probable que la situation s’améliore avec le temps. Cet ouvrage propose une réflexion sur l’influence de la suprématie anglo-saxonne dans ce contexte de crise globale. Il examine minutieusement les aspects essentiels de notre existence : langue et culture, mode de vie, environnement, économie, finance, technologie, politique, puissance militaire, histoire et influence géographique.

Diable, aujourd’hui parle anglais est un texte stimulant, bref et incisif. En s’appuyant sur l’histoire et l’analyse contemporaine, l’auteur soulève l’opposition entre deux philosophies : l’anglo-saxonne pragmatique, efficace, flexible, valorisant l’individu et celle européenne faite de tradition, de solidarité, de préservation des identités culturelles et environnementale avec une vision à plus long terme. En se plongeant dans l’histoire pour éclairer notre époque, l’auteur suggère des sratégies de résilience pour l’avenir. 

Auteur

Jacques Isnard est colonel , ancien militaire français. Il a allié, dans sa carrière , terrain et contact humain, puis stratégie et défense-diplomatie. Formé à la géopolitique, il a servi en qualité d’attaché militaire : au Brésil, au Cambodge, et a participé à une mission OTAN en Bosnie.Après un court passage en politique ( quatrième circonscription du Morbihan), il se consacre aujourd’hui à l’économie locale : Système d’Echange Local – Monnaie Locale Complémentaire du pays de Ploërmel = le GALAIS. Il participe au : Club d’Investisseurs pour une Gestion Alternative et Locale d’une Epargne Solidaire. (CIGALES)

Son prochain ouvrage sera titré : L’ISLAM VU PAR CANDIDE

Voyance et Franc-maçonnerie : Regards croisés sur deux quêtes de lumière

La voyance et la Franc-maçonnerie, bien qu’évoluant dans des champs distincts, ont depuis longtemps suscité interrogations et rapprochements, fascination et méfiance.

John Collier, Prêtresse de Delphes, 1891, musée national d'Australie-Méridionale (Adélaïde).
John Collier, Prêtresse de Delphes, 1891, musée national d’Australie-Méridionale (Adélaïde).

D’un côté, l’image de la Pythie antique, du médium contemporain ou du lecteur de cartes, dont les yeux paraissent lire dans les trames invisibles de la destinée. De l’autre, celle du Franc-Maçon, compas en main, arpentant avec gravité les degrés d’un Temple symbolique dont les colonnes ne s’élèvent qu’à la mesure de son effort intérieur. Deux figures, deux postures – mais peut-être, au fond, une même aspiration. Percer le voile du monde, chercher l’invisible derrière le visible, redonner au réel une épaisseur symbolique et spirituelle.

SITE EQUERRE COMPAS
Site Équerre Compas

La voyance s’ouvre dans l’instant. Elle surgit dans l’éclair de l’intuition, dans le bruissement subtil d’un message perçu, senti, plus que déduit. Elle se déploie dans un langage symbolique propre – celui du tarot, de l’astrologie, des runes, des lignes de la main, des rêves aussi. Elle s’adresse à l’immédiateté d’une question, à l’urgence d’une quête personnelle. C’est une parole adressée à l’individu dans sa singularité, un miroir tendu vers ses angoisses, ses désirs, ses incertitudes.

La Franc-Maçonnerie, quant à elle, se déploie dans la durée, dans l’espace sacré du rituel, dans le silence partagé d’une Loge. Elle ne répond pas ; elle questionne. Elle ne promet pas de révélation soudaine, mais une transformation lente et profonde, fruit du travail intérieur, de la discipline symbolique, du compagnonnage fraternel. Le Maçon n’attend pas un oracle : il œuvre sur lui-même, en lui-même, pour faire émerger ce qui dort encore dans l’ombre de sa conscience. Il ne consulte pas un voyant ; il s’engage dans une voie.

Cartes de tarot
Cartes de tarot

Et pourtant, les convergences ne manquent pas. Toutes deux, voyance et Franc-Maçonnerie, mobilisent un regard symbolique sur le monde. Toutes deux s’inscrivent dans une tradition ésotérique, c’est-à-dire une approche qui postule que la vérité ultime ne se donne pas d’emblée, mais se révèle à celui qui accepte d’en franchir les seuils, d’en interpréter les signes. L’univers devient alors un texte, un livre de symboles à décrypter. L’étoile filante, la Lune, la clef ou la balance ne sont plus seulement des objets célestes ou des figures : ils deviennent archétypes, messages, révélateurs de l’être.

Le Franc-maçon comme le voyant travaillent avec des symboles. Le Tarot pour l’un, le Tablier pour l’autre. L’un évoque les arcanes majeurs, l’Empereur ou la Papesse ; l’autre se souvient de la pierre brute, du maillet, de la perpendiculaire. Tous deux savent que le monde est plus vaste que ce que montrent les apparences, que derrière chaque forme dort une énergie, un sens à révéler.

Il y a dans les deux démarches une volonté de transformation. Le voyant, par ses visions, peut amener une prise de conscience, un dévoilement de ce qui était ignoré ou refoulé, ouvrant ainsi un chemin d’évolution. Le Franc-Maçon, lui, ne cherche pas la prédiction mais la rectification. Rectifier la pensée, le cœur, l’action, pour tendre vers l’harmonie intérieure et le progrès collectif. Dans les deux cas, on vise une élévation : non point forcément vers le ciel, mais vers la vérité de soi.

Boule de Cristal Voyance – Parfaite pour Cristallomancie, Divination, Medium [Garantie A Vie] source Amazon
Boule de Cristal Voyance – Parfaite pour Cristallomancie, Divination, Medium [Garantie A Vie] source Amazon

Mais leurs voies divergent. La voyance procède souvent d’un don ou d’une disposition particulière, un canal ouvert vers l’invisible. Elle est spontanée, fluide, parfois imprévisible. La Franc-Maçonnerie, au contraire, trace une voie régulière, initiatique, balisée par des rituels anciens, des degrés, des outils, une méthode éprouvée. Là où la voyance dit « je vois », la Maçonnerie dit « je cherche ». Là où la première propose une lecture du destin, la seconde offre une lecture de soi. L’une est parole immédiate, l’autre est silence méditatif.

La Franc-Maçonnerie repose sur un cadre structurant, avec des Loges, des Obédiences, des règlements, une éthique rigoureuse. Elle est à la fois personnelle et collective. L’initiation est vécue dans la solitude de l’âme, mais aussi dans la fraternité de la Loge. Le travail du Maçon se fait dans la rencontre de l’autre, dans l’échange, dans le rituel partagé. La voyance, elle, reste souvent un face-à-face : le voyant et le consultant, dans l’intimité d’un moment, autour d’une question, d’une inquiétude, d’un espoir.

Atout non numéroté, le Fol, du jeu de Jean Dodal, début XVIIIe siècle.
Atout non numéroté, le Fol, du jeu de Jean Dodal, début XVIIIe siècle.

Et pourtant, il serait injuste d’opposer ces chemins comme s’ils s’excluaient. Car le monde intérieur est vaste, et chacun le parcourt avec ses clés. Certains Maçons, sensibles à la dimension symbolique du monde, peuvent s’intéresser à la voyance comme à une autre voie d’accès à l’invisible – à condition de ne pas y chercher de certitude mais un reflet, une stimulation de la pensée. Certains voyants, curieux d’un symbolisme plus structuré, peuvent être appelés par l’architecture initiatique de la Franc-Maçonnerie, son éthique, son enracinement dans la tradition.

Voyance - site théoriedudroit.net
Voyance – site théoriedudroit.net

Mais la prudence est de mise. Car si la Franc-Maçonnerie tolère et même encourage l’exploration intérieure, elle se défie des démarches non encadrées qui pourraient nourrir l’illusion ou flatter l’ego. Elle préfère la lente maturation à l’éblouissement passager, la recherche de la vérité à la séduction de la réponse facile. L’intuition, oui ; mais éclairée par la Raison, tempérée par la Fraternité, enracinée dans l’Humanisme.

Peut-on alors concevoir un dialogue ?

Peut-être. Mais un dialogue exige la reconnaissance des différences. La voyance, dans sa forme la plus noble, peut offrir des pistes, ouvrir des regards, poser des questions. La Franc-Maçonnerie, dans son exigence, construit des réponses à long terme, forge un homme libre et éclairé, non par ce qu’il croit voir, mais par ce qu’il est prêt à devenir.

Symboles maçonniques
Symboles maçonniques

En définitive, ces deux voies parlent à des besoins humains fondamentaux : comprendre le monde, se comprendre soi-même, inscrire son existence dans un horizon de sens. L’une offre des éclats de lumière, comme des éclairs dans la nuit. L’autre trace une route, balisée par les symboles, éclairée par la fraternité, exigeante et patiente. Chacune éclaire un visage de la quête humaine : l’immédiat et le lent, l’intuitif et le réfléchi, le solitaire et le collectif.

Et si elles empruntent des chemins différents, peut-être se rejoignent-elles un jour – non dans une synthèse illusoire, mais dans la reconnaissance mutuelle d’un même mystère, d’un même appel : celui de l’homme en quête de lui-même, tendu vers une lumière qu’il devine plus qu’il ne la possède, et qu’il n’atteindra jamais tout à fait… mais dont le rayonnement suffit, parfois, à éveiller une conscience.

Table de voyante avec 2 cartes de Tarot
Table de voyante avec 2 cartes de Tarot

Initiation par l’absurde : les complots au prisme du rire noir

Dans l’épaisseur grinçante de notre époque, où les certitudes s’effritent comme les statues de sel des antiques révélations, Nous Sachons de Dimitri Halby se lit comme un bréviaire de l’absurde moderne, un évangile moqueur dans l’ère des croyances éclatées. Sous ses apparences de farce, ce livre trace une véritable cartographie de l’imaginaire contemporain, où le grotesque rivalise avec le tragique et où l’ombre du complot remplace le Logos.

Nous Sachons
Nous Sachons

Ce n’est pas tant un recueil que nous découvrons qu’un miroir diffracté de la psyché collective, où chaque mème, chaque fausse publicité, chaque post grotesque révèle, par effet de contraste, une faille dans l’architecture mentale du monde.

Dimitri Halby, en artisan du rire noir, travaille comme un alchimiste inversé : il ne transmue pas le plomb en or, mais l’or supposé de la vérité officielle en la glaise friable de l’incertitude. Ce renversement, qu’il opère sans dogme et avec un sens vertigineux du contrepoint, fait de ce livre une véritable entreprise initiatique – par le rire, par la provocation, par l’outrage même.

Il serait trop facile d’y voir une simple moquerie des théories complotistes. Il ne s’agit pas ici d’un rationalisme triomphant, encore moins d’un fact-checking militant. Dimitri Halby opère dans un autre registre : celui du symbolisme retourné, du simulacre revendiqué, où la Vérité – avec un V majuscule – devient non pas une donnée, mais un outil comique, une illusion féconde. Nous ne sommes pas face à un traité de sociologie, mais à une parabole du monde désenchanté, où le rieur porte le masque du bouffon pour dévoiler, derrière les apparences, le vide laissé par les anciens récits.

Dimitri Halby - Babelio
Dimitri Halby – Babelio

L’auteur, Dimitri Halby, musicien (entre autres) mais surtout ingénieur en informatique installé en Normandie et originaire de la région de Bernay dans l’Eure, s’est d’abord imposé sur les réseaux sociaux avec sa page « Complots faciles pour briller en société ».

Complots faciles pour briller en société
Complots faciles pour briller en société

Ce titre, en soi, pose le décor : il s’agit moins de croire que de paraître croire, moins de dénoncer que d’exposer l’artifice. Fort de plus d’un million de suiveurs sur Facebook, Dimitri Halby a su capter l’humeur d’un temps qui se méfie de tout et rit de tout. Il puise dans cette houle numérique une matière première inépuisable, qu’il condense ici avec un sens du montage et du rythme d’une redoutable efficacité. Loin d’être un simple humoriste, il se révèle ici comme un écrivain du chaos doux, un chroniqueur de l’ère de la crédulité sceptique.

Dans cette entreprise, Nous Sachons épouse la forme du magazine pour mieux en détourner les codes. Édito grotesque, sommaire délirant, fausses rubriques, images détournées, tout concourt à créer un effet de décalage permanent. C’est un travail de déréalisation systématique, une initiation par la désorientation. Nous sommes conviés à un banquet carnavalesque où le réel lui-même devient suspect. Le lecteur est initié, à son insu, à une forme de lucidité amère : celle qui naît non de la révélation, mais de la saturation du mensonge.

On pourrait croire à une simple satire, mais ce serait méconnaître la portée alchimique du rire. Car le rire ici ne détruit pas. Il transmute ! Il ne ridiculise pas seulement, il révèle par l’absurde la foi de ceux qui croient savoir. Dans ce sens, l’auteur accomplit une œuvre de dévoilement – certes masqué, camouflé, crypté –, mais nullement superficielle. Il prend le relais des anciens clercs, non pour prêcher, mais pour exposer. Il agit comme ces fous sacrés du soufisme, qui enseignent par le paradoxe, le renversement, l’illogisme fécond.

La franc-maçonnerie, quoique moquée de manière potache, transparaît dans l’œuvre comme une figure parmi d’autres du grand théâtre complotiste. Et pourtant, cette parodie révèle malgré elle un hommage inconscient : car toute initiation, en tant que rite de passage et quête du sens, devient dans le regard complotiste l’ombre d’un pouvoir caché. Le rire que Dimitri Halby adresse aux Francs-Maçons vise moins l’institution que ceux qui en fantasment le pouvoir occulte.

Nous Sachons
Nous Sachons

En première de couverture, le ton est donné avec ce faux scoop provocateur : « Scoop ! Francs-maçons : ils sont nuls en maçonnerie. » Derrière l’ironie perce une forme de reconnaissance inversée : pour devenir les cibles privilégiées des fantasmes complotistes, encore faut-il incarner, malgré soi, une part de mystère.

Mais c’est le traitement de la religion qui déconcerte, provoque, déstabilise. Là encore, le texte joue des symboles et des dogmes comme d’une boîte à outils pour artisans de la dérision. Jésus y devient un zombie de Pâques, les crucifixions sont mises en scène comme des sketches, les fêtes religieuses tournées en ridicule. Certains y verront un blasphème, d’autres une nécessaire profanation du sacré durci par le temps et les dogmes. Le choix de ne pas trop se moquer d’autres traditions religieuses peut être lu à la fois comme prudence…

Reste une constante : derrière chaque rire, une douleur refoulée. Celle d’un monde où les croyances, même les plus précieuses, sont devenues objets de suspicion.

Nous Sachons
Nous Sachons

L’interview d’un Illuminati, sommet d’absurde maîtrisé, est une perle noire dans ce collier de moqueries. L’anonymat du maître du monde autoproclamé, sa confession sur la difficulté de semer de fausses pistes, son autodérision quant à la création des noms mêmes de ses groupes secrets, tout cela participe d’une mécanique burlesque redoutable. Le rire y devient rite d’exorcisme, purgation des peurs diffuses, déconstruction des récits de contrôle.

Il faudrait citer encore ces images détournées, ces aphorismes absurdes, ces posts d’une drôlerie glacée qui ponctuent l’ouvrage. Comme dans tout travail véritablement hermétique, c’est par la multiplicité des couches qu’émerge le sens.

Au premier degré, c’est drôle. Au second, c’est inquiétant… Au troisième, c’est révélateur !

Car en rendant visible l’absurde, Dimitri Halby en fait la matière même de notre monde. Nous ne sommes plus dans le vrai ou le faux, mais dans une alchimie de signes contradictoires. Le réel est devenu un labyrinthe dont il faut se moquer pour pouvoir en sortir.

Ainsi, Nous Sachons s’inscrit dans cette tradition paradoxale de l’humour comme voie d’initiation. À l’image du fou du Tarot, il avance sans plan, les poches pleines de symboles, la tête dans les nuées. Ce qu’il propose, ce n’est pas un savoir mais une lucidité. Ce n’est pas une vérité, mais une hygiène mentale. Ce n’est pas une démystification, mais un antidote. Dans cette époque de crédulité toxique, c’est une médecine qui prend la forme du poison. Et peut-être faut-il, pour guérir, rire jusqu’à l’os.

En refermant ce livre, nous savons que nous ne savons pas. Et c’est peut-être cela, l’ultime sagesse du lecteur véritable.

Nous Sachons « Les complotistes ne mentent pas. C’est la vérité qui se trompe. »

Dimitri HalbyRobert Laffont, 2024, 208 pages, 19,90 €

Les travailleurs d’Hiram Abiff : la Vérité

De notre confrère elnacional.com – Par Mario Múnera Muñoz

« Aime la vérité, mais pardonne l’erreur » (Voltaire, penseur sarcastique des Lumières, philosophe français 1694-1778). De même que le Triangle, sur le chemin initiatique, dépasse l’entendement humain, il en va de même pour la vérité, car elle est comprise dès l’instant où l’on commence à avoir conscience. Les rayons de sagesse pénètrent votre être dès que la lumière trouve le bon angle pour pénétrer et ainsi comprendre un tel sujet. L’intelligence n’a pas accès à « la vérité » ; elle ne peut que percevoir ses informations. C’est pourquoi la justice est soumise à la raison ; elle crée donc ses lois, le moyen de les comprendre et de les manipuler.

Voltaire

C’est là qu’interviennent l’expert en droit, l’avocat et le juge, pour les interpréter et les appliquer. Justice et vérité, à mon sens, ne vont pas de pair, si l’on part du principe que le fondement du droit est « la moralité du peuple ». Chaque peuple et chaque lieu de l’Univers a ses propres interprétations de ses actions et de ses comportements. La justice n’est pas une ; elle a ses différentes variantes. Au contraire, la « vérité » est une, comme le dit le dicton populaire : la vérité est la vérité, même si elle blesse. Les grands penseurs de l’Antiquité et de la modernité continuent d’interpréter la « justice », mais la « vérité » n’a jamais été le but ; il n’existe aucun moyen de la définir, et elle peut se résumer en deux mots : « La vérité est. »

La vérité et ses obstacles

Krishnamurti

La vérité est obscurcie par « l’égoïsme, la malice et la méfiance. » Autre aspect important : les êtres humains sont des juges constants sur ce plan, jugeant et critiquant tout, ce qui est à la base des conflits humains. Toute « sagesse védique » est appelée « Trividya » en sanskrit : « Tri » signifie triple, et le mot « vidya » signifie sagesse. H.P. Blavatsky (fondatrice de la Théosophie) a fait pour la première fois, dans son livre Isis Dévoilée, une déclaration très transcendante sur la triple nature de l’Univers : « La Création est un triangle de force, et les secrets de la Création sont enfermés dans sa triple nature (c’est la serrure). La clé pour entrer dans la salle des mystères est “la nature de l’homme” (c’est la clé) qui est également triple ; par conséquent, la “vérité” est dans l’être humain lui-même. » J. Krishnamurti écrit dans son livre Truth ? ce qui suit :

« La vérité est un pays sans chemin… on ne peut y accéder par aucun chemin, par aucune secte, par aucune religion. Étant illimitée, inconditionnée, inaccessible par aucun chemin, elle ne peut être organisée. Aucune organisation ne peut être formée pour guider ou forcer les gens à suivre un chemin particulier. »

L’effort vers la vérité

La Vérité
La Vérité

La vérité ne peut être rabaissée ; c’est l’individu qui doit faire l’effort de s’élever vers elle. Elle ne peut amener le sommet de la montagne dans la vallée ; au contraire, pour atteindre le sommet, il faut traverser la vallée et gravir le sommet sans crainte. Aucune organisation ne peut conduire les êtres humains à la spiritualité. La croyance ne devrait jamais être organisée, car elle devient un corps mort, une secte, une croyance, une religion qu’il faut imposer aux autres, et c’est ce que tout le monde fait. La vérité est diminuée et transformée en jouet pour les faibles, momentanément mécontents. Dès que vous suivez quelqu’un d’autre, vous cessez de suivre la vérité. Le but de la Franc-Maçonnerie est de rendre les êtres humains libres, sans conditions, sans peur de la mort, du salut, de l’amour ou de la vie, de les libérer de leurs limitations ; seule cette liberté leur procurera le bonheur éternel.

La vérité en psychanalyse

En psychanalyse, la vérité n’est pas définie comme bonne ou mauvaise ; elle est simplement douloureuse. Elle n’est pas exacte, comme les sciences exactes ; c’est la vérité de la subjectivité. Elle n’est ni mesurable ni calculable, mais quelque chose de construit. Selon Freud, la vérité est impossible à la conscience. La vérité est la coïncidence entre l’énoncé et les faits. La fausseté et la vérité sont des propriétés des énoncés et des croyances. Sur ce plan physique, il existe quelque chose qui se positionne comme vérité universelle ; ce sont des constantes dans le monde et dans la réalité elle-même, et elles sont indiscutables. Lorsque nous tombons dans le piège du relativisme ou du subjectivisme dans l’interprétation de la réalité, l’exercice de la rationalité perd tout son sens. Le savoir que possèdent les êtres humains leur permet de façonner la pensée et de modifier la réalité là où elle est la plus attrayante, mais il limite la compréhension de la vérité.

Réflexions philosophiques sur la vérité

Friedrich Nietzsche jeune

Dans son ouvrage Le Criterion, Jaime Balmes soutient à juste titre que « bien penser consiste soit à connaître la vérité, soit à orienter la compréhension sur le chemin qui y mène. » Nietzsche affirme que « nous, scientifiques, devons apprendre que la vérité est aussi une illusion, bien qu’une illusion sans laquelle nous ne pouvons survivre » (Yalom, 2011, p. 339). Le même penseur a également écrit : « Une vie sans Vérité est une mort dans la vie » (Irvin D. Yalom, Washington 1931, professeur de psychiatrie à l’université de Stanford et psychothérapeute. Il a également écrit de nombreux essais et romans). L’acceptation de la vérité et du destin est essentielle pour que l’homme ait une idée de ce qui l’attend dans sa vie.

Opinions versus vérité

« Le monde est aussi plein d’opinions qu’il est plein de gens. Et vous savez ce qu’est une opinion. L’un dit ceci, l’autre dit cela. Chacun a une opinion, mais l’opinion n’est pas la vérité ; par conséquent, n’écoutez pas une simple opinion, quelle qu’elle soit, mais découvrez par vous-même ce qui est vrai…

…Les opinions peuvent changer du jour au lendemain, mais nous ne pouvons pas changer la vérité. »

(Jiddu Krishnamurti, écrivain et conférencier sur des questions philosophiques et spirituelles – Indu)

Tolérance maçonnique : vertu ou compromis ?

De notre confrère expartibus.it – Par Rosmunda Cristiano

La tolérance, en Franc-maçonnerie, n’est ni une affectation morale, ni une condescendance tiède. C’est l’une des pierres angulaires de l’Art Royal, mais elle ne peut ni ne doit être confondue avec l’indifférence ou le silence lâche. La question est donc légitime : jusqu’à quel point un Frère Maçon doit-il être tolérant ?

La réponse est simple mais claire : assez pour être un homme libre, mais pas un millimètre au-delà, si cela signifie nier la vérité, la justice ou la dignité. La tolérance commence ici : par l’écoute, par l’acceptation des opinions des autres, même si elles s’opposent aux vôtres. Mais ce n’est pas tout.

Un Frère ne tolère pas tout et tout le monde : il tolère ce qui est motivé par la bonté, l’honnêteté intellectuelle et l’intention constructive. Il ne tolère pas le vice, l’arrogance, les mensonges déguisés en opinions, ni l’ignorance obstinée déguisée en orgueil.

Avec qui un franc-maçon doit-il être tolérant ?

Avec le frère qui erre de bonne foi, avec le profane qui cherche, avec l’hérétique de son idée, si elle est le fruit de la pensée et non de la propagande. Avec le jeune homme qui trébuche sur le chemin, avec le vieil homme qui ne comprend plus l’époque dans laquelle il vit.

La tolérance est sœur de la miséricorde, mais aussi fille de la justice. Elle ne peut exister sans discernement.

Tolérer tout, sans distinction, c’est accueillir même ce qui détruit.

Summum ius, summa iniuria.

Trop de lois, c’est de l’injustice.

Trop de tolérance est donc aussi un poison déguisé en miel.

Avec quoi peut-on confondre la tolérance maçonnique ?

Avec faiblesse. Avec peur du conflit. Avec le bien-être qui engendre des monstres.

On s’y réfugie souvent pour éviter de l’affronter. Sans compter que cette idée est indigne, cette attitude mesquine, ce langage offensant.

Non, mon frère, non, ma sœur. La franc-maçonnerie ne vous demande pas de vous taire. Elle vous demande d’être juste.

La tolérance ne signifie pas justifier toute méchanceté, accepter tout compromis ou fermer les yeux sur une « fraternité apparente ». La véritable fraternité se nourrit de Vérité, même lorsqu’elle brûle.

La vérité vous libère.

La vérité vous rendra libre.

Et parfois, cela vous rendra même seul.

Un franc-maçon ne peut tolérer la médiocrité imposée comme règle, la superstition déguisée en foi, la violence verbale déguisée en opinion.

Il ne peut tolérer la corruption, le silence ni une conscience endormie. Quiconque justifie l’injustifiable au nom de la tolérance a abandonné le Temple et est devenu un serviteur du Chaos.

Être tolérant n’est pas être neutre. La neutralité est le refuge de ceux qui ont peur de prendre parti. Un franc-maçon prend parti. Toujours. Avec la lumière, contre les ténèbres. Avec l’humanité, contre la barbarie. Avec la recherche, contre le dogme. Même au prix de quelque chose.

Sans peur, sans espoir.

Un franc-maçon qui refuse de payer le prix de sa tolérance est un demi-frère. Une coquille vide.

La tolérance n’est pas pour les timides, mais pour les audacieux. Pour ceux qui savent que les autres ont aussi le droit d’être entendus, mais que parfois, après avoir écouté, il faut répondre fermement : Non. C’est inacceptable !

Au Temple, il n’y a pas de place pour ceux qui confondent l’amour de l’humanité avec l’acceptation de l’ignorance comme valeur. Un franc-maçon tolère la diversité, mais pas l’opportunisme. Il tolère l’opposition loyale, et non le sabotage déguisé en « liberté de pensée ».

C’est pourquoi la tolérance est un art. Et un art difficile.

C’est la modération, l’équilibre, l’endurance. C’est une vertu aussi tranchante que l’épée du Maître.

C’est cette force invisible qui vous fait serrer la main de ceux qui méprisent vos idées, mais aussi cette voix qui vous oblige à vous lever quand le silence serait plus confortable.

La tolérance sine veritate est caritas mortua.La tolérance sans vérité est une charité morte.

Et nous sommes ici pour construire la vie.
Alors, frère ou sœur, soyez tolérants.
Mais ne vous laissez jamais prendre au piège de la soumission.

Tendez la main, mais ne vendez pas votre cœur.
Soyez accueillant, mais pas complice.
Soyez franc-maçon : libre, fort et lucide.

Et rappelez-vous : la tolérance est une conquête, pas une reddition.

Rendez-vous au prochain Festival national de la Voyance

De notre confrère hebdo-des-savoie.fr – Par Claire Castelar

Le traditionnel Festival de la Voyance revient comme chaque année depuis plus de trois décennies à Aix-les-Bains. Pour l’occasion, 10 voyants issus des quatre coins de France seront présents du 2 au 20 août, de 10h à 21h, soit durant près de trois semaines. La médium Dominique Coulet, qui a repris le flambeau du festival l’année dernière suite au décès de sa fondatrice Marie-Hélène Exertier, dévoile le programme et apporte des précisions sur cet évènement devenu une véritable institution locale. 

Consultations, ateliers, conférences, animations gratuites… Découvrez le programme de cette nouvelle édition du festival national de la voyance qui se déroulera du 2 au 20 août au Centre des congrès d’Aix-les-Bains. 

10 voyants et mediums, aux diverses spécificités

La nouvelle organisatrice détaille les spécificités de chacun : Elisa (voyance avec support, lignes de la main), Eugénie (voyance guidance, pendule), Gaïa (cartes, voyance sur photos, pendule), Isa (cartes, oracles), Jane (tarologue, numérologue), Karine (cartes, médium), Lina (oracle, voyance), Dominique (voyance dans les tarots, coquillages, photos), Frédéric (voyance sans support) et Rubens (médium, tarots, lignes de la main). « Chaque année il y a des anciens, à savoir les piliers, et des nouveaux qui ont été sélectionnés ». Pour une consultation de 45 minutes, une participation de 57€ sera demandée et 100 € pour deux consultations avec deux voyants différents.

13 conférences et ateliers

Plus d’une dizaine de conférences (10€) et ateliers (30€) sont également programmés en fin de journée (18h ou 19h), selon diverses thématiques. Atelier sur le tarot de Marseille (avec Elisa et Isa, le 4 août), conférence sur la communication animale (avec Sandrine, le 5 août, en remplacement de la conférence « comment se protéger contre la pollution et les agressions énergétiques grâce à la radionique » avec Marc Devalmorel qui arrivera plus tard que prévu sur le festival), atelier « lire dans les lignes de la main » (avec Rubens, le 6 août), conférence « contact avec l’invisible » (avec le médium spirit Chrys Angel, le 7 août, en remplacement de la conférence « activer les bénéfices de l’utilisation des pierres naturelle » avec Nicole). « Si vous souhaitez recevoir un message d’un de vos défunts, pensez à venir avec une photo papier de lui ou avec un bijou lui ayant appartenu » précise l’organisatrice. Atelier sur l’hypnose, atelier sur la méthode d’utilisation du pendule, conférence sur le bien vivre chez soi avec la géobiologie et l’harmonisation de l’habitat, conférence sur la pensée positive, conférence sur les chiffres miroirs, conférence sur la sagesse de la kabbale, conférence sur la loi de l’attraction par les forces énergétiques des lettres berbères… Il y en aura pour tous les goûts, toutes les curiosités et toutes les sensibilités.

Animations gratuites

Le samedi 2 août à 18h, les voyants se présenteront un à un et proposeront de tester gratuitement leur pratique à travers « une question par personne ». Les deux samedis suivants (9 et 16 août), une séance de voyance gratuite sera proposé sur les marches du centre des congrès.

« Une clientèle très variée et de plus en plus de jeunesse »

Selon Dominique, qui était très proche de Marie-Hélène depuis une quinzaine d’années, « dès que je l’ai connue, je ne l’ai plus quittée« , et fidèle au festival pour lequel elle a toujours été très impliquée, ce rendez-vous annuel attire de nombreux visiteurs. « Il est déjà très connu, grâce notamment au bouche à oreille, et les gens d’Aix-les-Bains l’attendent avec ferveur. C’est une sorte de rituel« . Concernant les profils du public toutes générations, « nous avons une clientèle très variée et de plus en plus de jeunesse, de plus en plus de messieurs et de plus en plus d’hommes d’affaires ». Aixois, Savoyards, Haut-Savoyards, Rhônalpins, curistes… « Il y a les fidèles, les convaincus, les curieux et les nouveaux. Parmi les fidèles, il y a ceux qui reviennent toujours pour le même voyant, ceux qui aiment bien changer. Parmi les nouveaux, il y a ceux qui vont vers un type de voyance en particulier et ceux qui se laissent plutôt guider par une attirance de la personne. Quand ils me demandent conseil, je leur dis de faire au feeling ou je les envoie vers un voyant qui correspond plus à leur personnalité ». Du côté des questions posées, celles qui reviennent le plus concernent le travail, la carrière, la santé, l’amour et la famille.

L’inventrice de « la conchyomancie »

Une des spécialités de Dominique est la conchyomancie, mot qu’elle a elle-même inventé pour définir la voyance par les coquillages (association de conchyophile, collectionneur de coquillages, et mancie, divination). La médium a écrit un livre à ce sujet en 2001 et créé un jeu de carte www.hebdo-des-savoie.fr/decouvrez-la-voyance-par-les-coquillage . Bienveillance et convivialité seront les maîtres mots de ce festival dont l’entrée est libre, avec ou sans rendez-vous. Quelques exposants seront également présents (librairie ésotérique, voyage autour des minéraux, géobiologie énergéticien, bijoux messages universels). Renseignements au 06 08 09 51 23.

Cartes, pendule, lignes de la main, numérologie, voyance sans support... Toute une diversité d'arts divinatoires seront à découvrir. -
Cartes, pendule, lignes de la main, numérologie, voyance sans support… Toute une diversité d’arts divinatoires seront à découvrir. –
La médium Dominique Coulet, organisatrice du festival depuis la précédente édition. -
La médium Dominique Coulet, organisatrice du festival depuis la précédente édition. –

Le philosophe Bertrand Russell et le concept de « métaphysique »

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(De l’esprit dans la matière ? Il y a la matière à reflexion !)

« Existe-t-il au monde une connaissance dont la certitude soit telle qu’aucun homme raisonnable ne puisse la remettre en doute ? Cette question qui, à première vue pourrait paraître simple, est en réalité l’une des plus difficiles »

 Bertrand Russell « Problèmes de philosophie)

Cette pensée du grand philosophe britannique nous amène d’emblée à mettre à distance nôtre rêve ou idéal pythagoricien de pouvoir accéder à des vérités parfaites, éternelles, indubitables ! Ne demeure pour nous que le poids d’une interrogation sans réponse, que nous comblons par la mise en place d’une foi momentanée ou définitive, scientifique, philosophique ou religieuse, mais dont nous savons qu’elle ne joue qu’un rôle rassurant, un calmant, devant la peur « des espaces infinis » pascalien.

Aussi longtemps que l’être humain ne se développera pas en sagesse autant qu’en connaissance, l’accroissement de son savoir impliquera une augmentation de ses dangers de destruction.

Bertrand Russell pense que la personne heureuse est celle qui a des affections libres et des intérêts larges. Dès lors cet être humain « se sent un citoyen de l’Univers, il jouit en toute liberté du spectacle et des joies que le monde lui offre, il n’est pas troublé par la pensée de la mort parce qu’il ne se sent pas réellement séparés de ceux qui viennent après lui. C’est dans cette union profonde et instinctive avec le courant de la vie que l’on trouvera les joies les plus intenses » (1). N’en demeure pas moins qu’une interrogation, liée à l’homme depuis son apparition, continue à se poser : Existe-t-il une dimension indépendante de la matière, que nous pourrions appeler l’âme, qui serait issue de cette matière pour les uns, ou qui lui donnerait une orientation spirituelle pour les autres ? En fait, l’homme n’est-il que l’un des aboutissements du transformisme de la nature ou un être crée par une puissance divine supérieure dont il représente la finalité et est à son service ? C’est l’une des questions à laquelle Bertrand Russell va tenter de répondre.

I-LE GALOPIN DE LA PHILOSOPHIE BRITANNIQUE.

Avant d’entrer dans une réflexion sur le concept de métaphysique tel que Bertrand Russell l’entendait (et dont il avait fait un ennemi auquel s’affronter !), il est bon de jeter brièvement un coup d’œil sur la biographie d’un grand philosophe riche en couleurs.

Bertrand Russell pourrait se définir, en premier lieu par une appartenance forte à ses racines et à la culture galloises même si sa vie sera ponctuée de voyages divers : né le 18 mai 1872 à Trelleck, il décédera à Penrhyndeudraeth, ces deux lieux étant au pays de Galles. Il laissait derrière lui une œuvre immense de plus de 60 livres et environ deux mille articles. Il est unanimement reconnu comme l’un des plus grands philosophes et logiciens du XXe siècle, et est le cofondateur de l’influente école de philosophie analytique. Il fut également un penseur de l’éthique, du politique et de l’éducation, un vulgarisateur de la science et de la philosophie et un intellectuel engagé.

Issu d’un milieu où l’aristocratie et la haute bourgeoisie se côtoient (son grand-père paternel était lord John Russell qui fut deux fois Premier Ministre), il eut la chance de n’être pas enfermé dans l’immobilisme conservateur, car ses parents étaient libres-penseurs ! Ce qui marquait une originalité dont il allait devenir, lui et son frère, les héritiers. Malheureusement, ses parents décéderont très tôt et ils seront confiés à leurs grands-parents qui les scolariseront à domicile. C’est par son frère qui lui donne à 11 ans sa première leçon de géométrie avec les « Eléments » d’Euclide qu’il va développer une véritable passion pour la géométrie et les mathématiques. Passions qui demeureront permanentes jusqu’à la fin de sa vie, mais qui débuteront par des études de mathématiques à Cambridge qu’il poursuivra à Berlin. En 1894, il travaille à l’ambassade britannique à Paris, puis, en 1896, il commence à enseigner à la London School of Economics puis aux Etats-Unis avant de devenir professeur au Trinity College en 1899. C’est durant ces années que Russell va commencer à s’intéresser aussi, très sérieusement, à la philosophie.

Il est aussi un homme qui s’engage politiquement : en 1907, il se présente au Parlement et défend le droit de vote des femmes. Il est défait ! En 1911, arrive à Cambridge un brillant étudiant allemand : Ludwig Wittgenstein et va s’établir entre eux une coopération fructueuse. Au moment de la guerre de 1914, Russell milite pour le pacifisme et il se voit refuser le passeport qui lui était nécessaire pour aller enseigner à Harvard aux Etats-Unis. Ses collègues universitaires vont jusqu’à voter pour que lui soit retiré son poste de professeur. Pire, en 1918, il sera condamné à 6 mois de prison !

Entre les deux guerres se déroule une longue période de production d’ouvrages philosophiques. C’est aussi un grand nombre de bouleversements dans sa vie affective par toute une série de divorces. Il accepte finalement de retourner en Amérique du nord pour enseigner. En 1939, c’est là que la guerre le surprend avec sa famille, une guerre que cette fois il juge nécessaire de mener contre le nazisme. Contraint de rester aux Etats-Unis, il accepte un poste au City College of New-York, mais une violente campagne est lancée contre lui en raison de ses écrits et opinions progressistes sur le mariage, les femmes et la sexualité. De nombreuses personnalités le soutiennent (Charlie Chaplin, Albert Einstein, Aldous Huxley, etc.) mais il perdra son poste. C’est à cette époque qu’il publie son « Histoire de la philosophie occidentale » qui le mettra à l’abri du besoin.

Revenu en Grande-Bretagne, son œuvre étant connue désormais, il est honoré pour ses idéaux humanitaires et sa défense de la liberté de pensée. En 1955, il publie avec Einstein le « Manifeste Russell-Einstein » sur le contrôle atomique, et en 1958, il devient le président de la campagne pour le désarmement nucléaire. C’est d’ailleurs au cours d’une manifestation en 1961, que Russell écopera encore d’une semaine de prison ! Son dernier combat, en 1967, sera la mise en place, en collaboration avec Jean-Paul Sartre, du « Tribunal Russell » (Appelé aussi « International War Crimes Tribunal ») contre les crimes de guerre et de génocide commis par les Etats-Unis au Vietnam.

Evidemment, devant une telle personnalité et une telle œuvre, nous nous bornerons à n’aborder qu’un thème de sa pensée qui lui était cher : la métaphysique et sur lequel il reviendra toute sa vie (parfois avec contradiction !), dans une interrogation constante sur le sens de l’éthique.

II-LA METAPHYSIQUE : L’ILLUSION D’UN AU-DELA DE LA MATIERE OU L’HERITAGE DU MYSTICISME ANTIQUE ?

Débutons en donnant le contenu du mot « métaphysique ». Ce dernier, désigne, en premier lieu, l’ensemble des traités d’Aristote qui faisaient suite à la physique et abordaient les problèmes qui concernaient la matière, l’esprit, l’être, le non-être, la vie et l’au-delà. Questions essentielles dans la démarche vers la connaissance. La philosophie générale définit mieux le rôle de la métaphysique dans la mesure où elle apparaît comme une réflexion sur notre expérience vécue, qu’elle soit psychologique, morale ou scientifique, pour en dégager de sa diversité une vision générale et convergente. C’est là où elle prend distance avec la psychologie et la psychanalyse qui sont des études phénoménales des manifestations de l’esprit, de la logique, qui définit des règles de raisonnement, et de la morale qui édicte des règles de conduite. Si la métaphysique pose le problème de l’Être, elle met en même temps, la possibilité de le connaître : ontologique et épistémologique, la métaphysique demeure le projet fondamental de la réflexion et de la recherche philosophique.

Dans l’Antiquité, la pensée mythique sera essentiellement nourrie par les interrogations métaphysiques. On peut avancer l’idée que c’est à partir du VIe siècle avant J.-C. Que le concept va prendre forme : au-delà des croyances, des rites et des tabous, quelques hommes vont tenter de faire prévaloir une réflexion personnelle ayant pour seuls critères les « moyens de la raison ». Elle consistait dans des importantes innovations : le raisonnement est un discours qui transporte la certitude d’une proposition considérée comme vraie à une autre proposition, par le canal de l’évidence. Déconcertés par le caractère changeant et contradictoire des phénomènes, décrits par Héraclite, les Grecs voulurent une stabilité en cherchant un réel situé au-delà des apparences sensibles, d’où l’opposition entre « doxa », connaissance sensible et empirique, et « noesis », connaissance intellectuelle et rationnelle. Cette orientation devait tout naturellement conduire à la conception métaphysique d’une réalité immuable, cosmologique, nécessaire par-delà le devenir, l’altérité et la diversité permanente des phénomènes sensibles. Conception que résume Parménide quand il dit : « C’est dans le moment présent qu’est rassemblé tout l’Être, maintenu immobile dans sa totalité par les liens puissants de la nécessité et pareil à la masse d’une sphère bien arrondie dont tous les rayons sont égaux ». Optique qui sera reprise par Platon dans son fameux mythe de la caverne : « L’esprit est un prisonnier qui se délivre de ses chaînes, qui marche vers la lumière du jour et qui, en découvrant le soleil, découvre à la fois les objets qu’il éclaire et la raison de l’ombre qu’ils laissent derrière eux ». Cette mutation intellectuelle que l’on appellera le « miracle grec » va ouvrir deux modes de pensées qui peuvent devenir facilement contradictoires : la vérité serait au-delà des contingences matérielles d’une nature qui emprisonnerait l’homme mais, en même temps, en mettant en question le témoignage trompeur des sens, ouvrir la voie aux mathématiques théoriques démonstratives et aux premières découvertes scientifiques, ce qui serait un retour pragmatique à la matière, l’âme devenant la priorité de l’intelligence. Socrate va souligner aussi que ce que nous appellerons la naissance de la dialectique remet en cause les idées reçues, les certitudes passionnelles et les postulats implicites qui hantent la pensée humaine. Se mettait en place la recherche d’un discours rationnel destiné à unir les hommes dans la quête de la vérité et du bien. Cependant, un malaise va peu à peu survenir : la peur de devenir prisonnier d’une logique qui ressemble à un dogme qui priverait l’homme de sa liberté. Des tentatives vont avoir lieu pour dépasser la logique d’Aristote.

Mais, il ne faut pas oublier que l’effort rationnel ou métaphysique des premiers philosophes grecs ne peut être séparé du contexte mystique dans lequel il est apparu et qui a joué un rôle fondamental dans ses orientations. Par exemple, dans l’orphisme ou le pythagorisme, le mysticisme paraît favorisé l’essor de la pensée logique, mais dans la mesure ou la connaissance discursive de l’ordre du monde y est envisagée comme l’une des voies de la catharsis préalable à l’union mystique avec le divin. D’où une recherche permanente de l’identité profonde du vrai et du bien sous le signe d’un absolu qui a besoin d’une perfection dans la connaissance. Ce que Bertrand Russell confirme dans sa vision des choses : « La philosophie, qui est un effort pour embrasser le monde dans son ensemble au moyen de la pensée, s’est développée dès le début, grâce à l’union et au conflit de deux tendances humaines qui poussent les hommes, l’une vers le mysticisme, l’autre vers la science » Et dire que nous sommes toujours coincés dans cette tension contradictoire ! D’ailleurs, la place conservée jusqu’à nos jours par la mystique dans la métaphysique rationnelle apporte un argument à cet héritage et le fait que certains philosophes grecs aient adopté des positions métaphysique matérialistes, comme par exemple l’atomisme de Démocrite, qui ne contredit pas cette thèse. La confiance dans une certaine identité entre la Pensée et l’Être a soulevé très tôt, dès la période hellénistique, des objections diverses, dont Socrate qui faisait de la raison la maîtresse suprême de la vie morale, mettant en doute ainsi son ambition d’expliquer l’Univers.

III-PHILOSOPHES ET SCIENTIFIQUES EN QUÊTE DU GRAAL DE LA METAPHYSIQUE.

Statut de Platon en marbre blanc
Statut de Platon assis en marbre blanc devant un chapiteau de Temple

Les premiers sceptiques grecs, comme les Sophistes (Protagoras, Gorgias) vont très vite mettre l’accent sur la relativité de nos jugements et la fragilité de l’esprit humain. Si, à la suite de Parménide, Platon, Aristote ; le courant de la métaphysique relationnelle s’est poursuivi jusqu’à nos jours, à travers des remarquables personnalités (Saint Thomas d’Aquin, Descartes, Spinoza, Leibniz, Hegel, Husserl) il convient de constater qu’un courant critique n’a cessé de le critiquer comme l’empirisme britannique (Occam, Locke, Hume, par exemple) qui pense que notre entendement est incapable de penser par abstraction et que les idées générales n’ont aucune existence en dehors de notre conscience, ce que la scolastique appellera le « Nominalisme ». Le positivisme d’Auguste Comte, lui, affirme que le seul savoir objectif possible ne peut provenir que de l’observation des phénomènes et de la constatation de leur rapport constant de succession ou de similitude. Et le criticisme de Kant qui repose sur l’idéalisme, le phénomène, l’objet de la pensée, est le résultat d’une construction opérée à partir d’un donné sensible, informe et chaotique. La métaphysique commence, pour Kant, quand nous pensons que nous pouvons étendre l’application de notre pensée sur les phénomènes observables dans des entités abstraites inobservables comme « substance », « matière », « âme », « Dieu », etc… Il n’y a de savoir objectif que phénoménal, ce qui légitime la science qui serait l’illustration parfaite de ce mode de connaissance, mais qui condamnerait le rationalisme et ses prétentions métaphysiques. Mais le scepticisme intégral est une position insoutenable : il se détruit lui-même quand il nie qu’on puisse affirmer quoi que ce soit et l’existence de la science, avec son efficacité pratique, suffit à prouver que l’homme est capable d’accéder à une certaine connaissance. Cependant subsiste le problème de la relativité de la connaissance par rapport à notre structure cérébrale…

Emmanuel Kant

L’objet de la science ne paraît pas être le fait concret lui-même, mais le modèle de ce fait concret, c’est à dire la fonction principale du modèle est d’exprimer, par sa nécessité logique, la nécessité naturelle qui est censée présider aux aspects observables de l’objet qu’il représente. L’objet de la pensée scientifique, comme le pense Kant, n’est pas le phénomène mais ce qui le fonde rationnellement. Le physicien Max Planck, l’un des fondateurs de la mécanique quantique, écrit à ce sujet (2) : « Une expérience n’est rien d’autre qu’une question adressée à la nature, la mensuration, le relevé de la réponse. Mais avant d’effectuer l’expérience, on doit la penser, c’est-à-dire formuler la question que l’on entend adresser à la nature et, avant de tirer une conclusion de la mensuration, on doit l’interpréter, c’est-à-dire comprendre la réponse de la nature. Ces deux tâches appartiennent au théoricien ». En fait, la connaissance scientifique oscille en permanence entre deux pôles : un pôle rationnel et un pôle expérimental. En cela se poursuit un dialogue constant entre la nature et l’humain qui est lui-même issue de cette nature. Nous pouvons évoquer une métaphysique qui exclue un Tiers divin, contrairement à une autre définition de la métaphysique qui inclurait obligatoirement une dimension religieuse. Russell rejette naturellement cette dernière orientation en pensant que la science n’est pas un athéisme par nature, mais une transcendance qui se transforme en une métaphysique laïque.

 L’importance du rôle tenu par les mathématiques dans la formulation des théories ne pose-t-il pas en lui-même un problème philosophique de première grandeur : les rapports entre la pensée et la matière. La pensée rationnelle est un procédé indispensable à la Connaissance sous réserve qu’elle ne se cantonne pas que dans l’aspect scientifique. Ce qu’exprime Jean Piaget (3) : « La fonction métaphysique propre à la philosophie aboutit à une sagesse et non pas à une connaissance parce qu’elle est une coordination raisonnée de toutes les valeurs, y compris les valeurs cognitives, mais en les dépassant, sans demeurer sur le plan de la seule connaissance ». Les options que nous prenons dans la vie dépassent sans cesse notre connaissance objective et motivent une synthèse raisonnée entre nos croyances et notre savoir.

Cherchant au-delà d’une vérité dans la Science, une vérité dans la Vie, la Métaphysique apparaît comme une réflexion sur l’ensemble des Valeurs, qu’elles soient cognitives, morales, affectives, esthétiques, idéologiques ou religieuses. Son but est de tenter de comprendre les relations signifiantes qui unissent l’aspect empirique, sensible de l’être humain, à son intériorité. C’est par cette aptitude à l’échange entre nature et conscience que la métaphysique peut constituer une voie de sagesse et un véritable savoir qui sont les traits de notre Humanité…

Personne n’a bu la tasse ? Bon on arrête de nager pour aujourd’hui. On fait la planche !

 NOTES

(1) Russell Bertrand : La conquête du bonheur. Paris. Ed. Payot. 2001. (Page 233).

(2) Planck Max : L’image du monde dans la physique contemporaine. Paris. Ed. Gonthier. 1949.

– (3) Piaget Jean : Sagesse et illusions de la philosophie. Paris. PUF. 1992.

 BIBLIOGRAPHIE

– Baillargeon Normand et Santerre Chantal : Bertrand Russell. Paris. Ed. Que sais-je ? 2025.

– Benmakhlouf Ali : Bertrand Russell. L’atomisme logique. Paris. PUF. 1996.

– Russell Bertrand : Science et religion. Paris. Ed. Gallimard. 1971.

– Russell Bertrand : Histoire de mes idées philosophiques. Paris. Ed. Gallimard 1989.

– Russell Bertrand : Signification et vérité. Paris. Ed. Flammarion. 1989.

– Russell Bertrand : La connaissance humaine. Paris. E. Vrin. 2002.

– Russell Bertrand : Problèmes de philosophie. Paris. Ed. Payot. 2005.

– Russell Bertrand : Mysticisme et logique. Paris. Ed. Vrin. 2007.

– Russell Bertrand : Histoire de la philosophie occidentale. Paris. Ed. Les Belles Lettres. 2011.

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Dans un coin lumineux du blog maçonnique de Bertrand Ségonzac, on trouve une pépite hilarante : une étude sur Melchisédek, ce mystérieux VIP des textes sacrés qui semble avoir un CV plus énigmatique qu’un agent secret en mission. Roi de Salem, prêtre du Dieu Très-Haut, et probablement barman à ses heures perdues (pain et vin, ça vous dit quelque chose ?).

Ce gars est le MacGyver spirituel des traditions juive, chrétienne et islamique.
Ségonzac, tel un détective avec une loupe et une cape, se lance dans une quête épique pour démêler le mythe de ce héros oublié, qui semble être à la fois un sage, un précurseur du Christ, et le patron d’un club sélect appelé « Tradition Primordiale ».

Ségonzac est agacé, et on le comprend ! Melchisédek est partout dans les bouquins spirituels et maçonniques, mais toujours avec des descriptions vagues du genre : « Oh, il est super énigmatique, ce mec, passons à autre chose. » Alors, notre auteur enfile son costume d’Indiana Jones et décide de fouiller les textes sacrés, les exégèses religieuses, et même les coulisses de la Franc-maçonnerie pour prouver que Melchisédek est LA rockstar des initiés, avec des vibes de justice, de paix, et de pain frais.

Melchisédek, la Célébrité des Religions

A. Les Textes Sacrés : Trois Apparitions

Melchisédek, c’est le genre de type qui fait des caméos dans la Bible et laisse tout le monde perplexe. Il apparaît trois fois, comme une star de cinéma qui refuse les grands rôles mais vole la vedette à chaque fois.

Ancien Testament :
Genèse 14:18-20 : Imaginez la scène. Abram, fraîchement sorti d’une baston contre des rois ennemis, se fait accueillir par Melchisédek, le roi de Salem, qui sort du pain, du vin, et une bénédiction digne d’un animateur de talk-show. « T’es béni, mon pote ! » dit-il, et Abram, impressionné, lui file 10 % de son butin, comme un pourboire à un serveur divin. Mais c’est quoi, ce passage ? Un ajout tardif ? Une pub pour le vin de Salem ? Les traductions grecques et hébraïques se chamaillent sur les détails, et nous, on se demande : Salem, c’est Jérusalem ou un bar branché ? Et El Elyon, c’est le même boss que le Dieu d’Abram ou un cousin éloigné ?
Psaume 110:4 : Là, ça devient épique. « T’es prêtre pour toujours, à la sauce Melchisédek ! » lance le texte à un roi ou un messie (David, peut-être ?). Melchisédek devient le modèle d’une prêtrise éternelle, genre prêtre VIP avec carte platinum. Mais les traductions chipotent : « à la manière de » ou « selon l’ordre de » ? On dirait une dispute sur la recette d’un cocktail sacré.

Ce qu’on sait : Melchisédek est roi, prêtre, et son nom veut dire « Roi de Justice » (melki = roi, sédeq = justice, classe, non ?). Il règne sur Salem (Jérusalem ou pas ?), sert un dieu cool nommé El Elyon, et joue les hôtes parfaits avec son pain-vin combo. Mais pourquoi Abram, l’élu, se fait bénir par ce mec sorti de nulle part ? Mystère et boule de gomme.

Nouveau Testament :
Épître aux Hébreux (5-7) : ce passage, attribué à tort à Paul, semble destiné à un public érudit et vise à établir la supériorité de la prêtrise chrétienne sur celle des Lévites. Là, Melchisédek passe en mode superstar. Il est « Roi de Justice », « Roi de Paix » (Salem = paix, bien vu), et attention… sans père, sans mère, sans arbre généalogique, sans date de naissance ni de décès ! En gros, c’est l’Highlander de la Bible, « rendu semblable au Fils de Dieu ». Le texte oublie le pain et le vin (dommage, c’était sympa), mais insiste sur son statut de prêtre éternel. Problème : en le décrivant comme quasi-divin, les Hébreux mettent tout le monde mal à l’aise. Les juifs crient au scandale (« seul Yahvé est éternel ! »), et les chrétiens se demandent si Melchisédek est juste un teaser du Christ ou carrément son sosie.

B. Les Religions en Mode Fan-Club

Avec si peu de lignes dans les textes, Melchisédek a quand même inspiré des fan-fics religieuses à n’en plus finir.

Christianisme :


Les Pères de l’Église adorent Melchisédek, car il leur donne une arme pour narguer le judaïsme. « Sa prêtrise est plus vieille que celle des Lévites, donc Jésus rules ! » Justin (vers 160) le surnomme « prêtre des incirconcis », genre hipster spirituel avant l’heure. Tertullien rigole : « Pas besoin de circoncision ni de sabbat, Melchisédek est au-dessus de tout ça ! » Origène le voit comme un prêtre cosmique qui squatte les cieux, et Cyprien trouve que son pain et vin sentent l’eucharistie à plein nez. Au Moyen Âge, Thomas d’Aquin s’emballe : « Pas de généalogie ? C’est un clin d’œil à la naissance virginale du Christ ! » D’autres, comme Hugues de Saint-Cher, comparent les textes et se disent : « Attends, c’est pas Jésus, ça ? » Le pain, le vin, la bénédiction… tout ça sent le sacrement chrétien à des kilomètres.
Et puis, il y a cette théorie rigolote : Melchisédek serait une sorte de lieutenant du Christ, qui sort de l’ombre quand il faut secouer les choses. Genre, il vit dans une grotte secrète, mais quand Abram arrive avec son peuple têtu, Melchisédek dégaine son pain-vin et dit : « Calmez-vous, les gars, voici l’alliance 1.0 ! » Le texte des Hébreux dit qu’il est « sans père, sans mère, sans généalogie » non pas parce qu’il est un alien, mais parce que la Bible a oublié de remplir sa fiche d’état civil. Résultat : il devient le

Les rabbins, eux, sont un peu vexés par les chrétiens qui s’approprient leur Melchisédek. Dans le Midrash et le Talmud, ils lui reprochent d’avoir béni Abram avant Dieu. « Non mais, sérieux, Melchi, t’as pas lu le manuel ? » Du coup, il perdrait sa prêtrise au profit d’Abram. Certains, comme Ephrem le Syrien, essaient de le faire passer pour Sem, le fils de Noé, histoire de le garder dans la famille juive. D’autres chipotent sur Salem : « C’est pas Jérusalem, c’est peut-être Salîm, ou un Airbnb à Sichem ! » Tout ça pour dire : Melchisédek, t’es cool, mais reste dans le cadre de la Torah, OK ?

Gnostiques :
Les gnostiques, eux, partent en freestyle. Dans la « Légende hébraïque de Melchisédek » (trouvée à Qumrân), il devient un juge badass qui viendra à la fin des temps pour distribuer des cartons rouges aux méchants. Dans le « Second livre d’Hénoch » (
chapitres 69-73, parfois appelée l’« Exaltation de Melchisedech »), c’est carrément un prêtre céleste, né par miracle et mis en stand-by par Dieu pour le grand final. En gros, Melchisédek, c’est le lien entre le Netflix terrestre et le streaming divin

Melchisédek, le Guru Ésotérique

Dans le monde de l’ésotérisme, Melchisédek est comme un smoothie spirituel : un mélange de tout ce qui est cool et universel. René Guénon et Jean Tourniac, les rockstars de la Tradition Primordiale, le voient comme le symbole ultime de l’unité. Dans son bouquin « Melchisédek ou la Tradition Primordiale », Tourniac écrit : « Ce mec, c’est le centre du club spirituel, il réunit tout le monde autour d’un bon verre de vin cosmique. » Roi de justice, roi de paix, prêtre éternel, il est l’ancêtre des utopistes maçonniques qui rêvent d’un monde sans drama religieux.

Dans la kabbale, son nom (justice) et Salem (paix) sont des vibes d’harmonie cosmique. Dans le gnosticisme, il est un initiateur qui distribue des clés pour débloquer le niveau divin. Bref, Melchisédek, c’est le prof de yoga spirituel que tout le monde veut suivre.

Melchisédek dans la Franc-Maçonnerie : Où est-il Passé ?

Dans la franc-maçonnerie, Melchisédek est un peu comme Waldo : il est là, mais faut le chercher. Ségonzac fouille et trouve quelques miettes :

  • Loges de Melchisédek (1780) : En Autriche et en Allemagne, des maçons essaient de créer des loges pour initier des Juifs, avec la Genèse comme livre de chevet. Spoiler : ça floppe, car tout le monde se dispute comme dans une réunion de famille.
  • Illuminés de Bavière : Weishaupt, le rebelle de 1776, invente un grade « Melchisédek Prêtre Royal », mais son club est plus politique que maçonnique, donc on passe.
  • Rite Ancien et Primitif : Dans ce rite ultra-marginal, il y a un grade « Grand Prêtre de Melchisédek », mais c’est comme trouver une licorne dans une loge : rare et pas reconnu.

Bref, Melchisédek est discret, mais Ségonzac insiste : ce mec est une mine d’or symbolique pour les maçons !

Melchisédek, le Coach Maçonnique Ultime

Initiation à la Sauce Melchisédek :
La rencontre entre Melchisédek et Abram, c’est comme un stage d’initiation maçonnique version deluxe. Abram, l’apprenti qui écoute sans broncher, se pointe, et Melchisédek, le grand maître avec son badge « Roi-Prêtre Éternel », lui sert du pain, du vin, et une bénédiction qui claque. Résultat : Abram passe au niveau supérieur spirituel. Tout y est : libre choix, gestes solennels, et un formateur au CV divin. Les maçons adorent ce genre de scénario.

Le Message Initiatique :
Melchisédek confirme l’alliance universelle entre Dieu et Abram, sans passer par les dogmes religieux. C’est la « religion naturelle » des Constitutions d’Anderson (1723), celle qui dit : « Pas besoin de se chamailler, aimons-nous et buvons un coup. » Sans généalogie, Melchisédek représente la Tradition Primordiale, le Graal des initiés. En tant que roi de Salem (la Jérusalem céleste, pas le bistrot du coin), il guide les maçons vers le « Centre », là où le Temple intérieur brille plus qu’un néon.

Melchisédek et le Rite Français :
Dans le Rite Français, Melchisédek est comme un guest star implicite. Sa simplicité (pain, vin, bénédiction) colle à la vibe fraternelle du rite. Sa justice inspire les apprentis (charité, équité), les compagnons (règle, équerre), et les maîtres (justice intérieure). Et spirituellement, il emmène les maçons d’une Tradition Primordiale cool vers une Nouvelle Alliance encore plus cool.

Symbolique Maçonnique :
Pain et Vin : Dans les loges, ces offrandes symbolisent la vie, la renaissance, et le travail bien fait. C’est comme un buffet maçonnique avec une touche de sagesse.
Vertus : Melchisédek, c’est le combo parfait des vertus théologales (Foi, Espérance, Charité) et cardinales (Justice, Prudence, Tempérance, Force). Un vrai super-héros maçonnique.
Le Trois : Roi, prêtre, prophète, Melchisédek est la sainte trinité de la maçonnerie. Il représente l’unité totale, comme un puzzle cosmique enfin terminé.

Alors, Melchisédek, le Héros Maçonnique Oublié ?
Initiateur, gardien de la Tradition Primordiale, porteur de vertus et symbole d’unité, Melchisédek a tout pour être le poster-boy des francs-maçons. Alors pourquoi reste-t-il dans l’ombre ? Peut-être parce qu’il est trop divin pour les loges modernes, ou parce que sa vibe « Ancienne Alliance » fait peur à une Maçonnerie qui a parfois viré au club laïc.

Dommage, car ce mec, avec son pain, son vin, et son charisme, pourrait animer n’importe quelle tenue maçonnique !

Pour voir Melchisédek en action, matez l’illustration de l’article La Rencontre d’Abraham et de Melchisédek au Musée du Prado.