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L’Ordre du Minorange : une Fraternité corporative entre Compagnonnage et Franc-maçonnerie

En cette période calendaire symbolique de renouveau et d’équilibre, il est pertinent de s’intéresser à une institution méconnue mais emblématique du monde du BTP : l’Ordre des Compagnons du Minorange. Créé en 1963 par Francis Bouygues, cet ordre au sein du groupe Bouygues Construction célèbre le savoir-faire des ouvriers tout en s’inspirant de traditions anciennes comme celles des Compagnons du Devoir. Mais derrière ses rituels et ses symboles, des parallèles troublants avec la franc-maçonnerie émergent, bien que les liens réels restent ténus.

Cet article propose une exploration approfondie de l’Ordre du Minorange, de ses rapports avec le compagnonnage et de ses éventuelles résonances maçonniques, tout en examinant les implications de ces connexions dans un contexte contemporain.

L’Ordre du Minorange : Une Création de Francis Bouygues

L’Ordre des Compagnons du Minorange est né en 1963, en pleine période des Trente Glorieuses, une ère de croissance économique et de plein emploi en France. Francis Bouygues, le fondateur du groupe éponyme, a créé cette institution pour répondre à un défi pratique : fidéliser les meilleurs ouvriers dans un marché du travail compétitif. À cette époque, les chantiers de Bouygues, souvent marqués par l’utilisation de la peinture antirouille « minium orange » – d’où le nom « Minorange » – nécessitaient une main-d’œuvre qualifiée et loyale. Francis Bouygues, dans une citation rapportée sur le site officiel de Bouygues Construction, exprime sa fierté : « Parmi tout ce que j’ai entrepris dans ma carrière de constructeur, l’Ordre des Compagnons du Minorange est l’initiative dont je suis le plus fier. »

L’Ordre compte aujourd’hui environ 600 membres au sein des 12 000 compagnons de Bouygues Construction, répartis entre la France et l’international. Ces membres, appelés « compagnons », sont sélectionnés pour leur excellence professionnelle et leur savoir-être. L’organisation est structurée avec des grades – une, deux ou trois étoiles – et distingue ses membres les plus émérites sous le titre de « champions ». Une pépinière, instaurée par Martin Bouygues en 1993, identifie et forme de jeunes talents pour intégrer l’Ordre. Les compagnons du Minorange se réunissent régulièrement lors de congrès annuels, comme celui de 2023 au Center Parcs de Sologne, qui a rassemblé 500 membres pour des ateliers sur la sécurité, la décarbonation et les innovations technologiques.

Les valeurs de l’Ordre – savoir-faire, savoir-être, et transmission – sont incarnées par des engagements concrets : respect des règles de sécurité, transmission des compétences aux jeunes générations, et esprit d’équipe. Un compagnon du Minorange est un ambassadeur du chantier, un facilitateur qui incarne l’esprit de famille cher à Bouygues. Mais derrière cette structure corporative, des échos de traditions plus anciennes se font entendre, notamment celles des Compagnons du Devoir.

Les Compagnons du Devoir : Une Influence Directe

Le choix du terme « compagnon » par Francis Bouygues n’est pas anodin. Il renvoie directement à la tradition des Compagnons du Devoir, une institution séculaire qui remonte au Moyen Âge et qui s’est structurée autour de la transmission des savoir-faire artisanaux. Les Compagnons du Devoir, souvent associés à la construction des cathédrales gothiques, se distinguent par leur système d’apprentissage basé sur le Tour de France – un voyage initiatique où les apprenants perfectionnent leur métier en travaillant dans différentes régions. Ce système, encore en vigueur aujourd’hui, forme environ 10 000 jeunes par an, avec un taux d’emploi de 90 % à la sortie, selon des données publiées par Le Figaro Étudiant.

L’Ordre du Minorange s’inspire de cette tradition compagnonnique, mais avec une nuance importante : il est une initiative corporative, intégrée à une entreprise privée, et non une association indépendante comme les Compagnons du Devoir. Chez Bouygues, les « compagnons » sont des ouvriers salariés, valorisés pour leur expertise et leur engagement, mais ils ne suivent pas un Tour de France ni ne passent par des rituels initiatiques comparables à ceux du compagnonnage traditionnel. Cependant, des parallèles existent : la transmission intergénérationnelle, l’accent sur le travail bien fait, et une certaine fraternité professionnelle rappellent les valeurs du Devoir.

Un point de convergence notable est l’idée de « chef-d’œuvre ». Dans le compagnonnage, l’aspirant doit réaliser un travail de réception – anciennement appelé chef-d’œuvre – pour être reconnu comme compagnon. Chez Bouygues, bien que cette pratique ne soit pas formalisée de la même manière, l’excellence technique et la capacité à transmettre sont des critères centraux pour intégrer l’Ordre. On pourrait voir dans cette valorisation de l’expertise une réinterprétation moderne du compagnonnage, adaptée aux exigences d’une entreprise industrielle.

Les Liens avec la Franc-Maçonnerie : Symbolisme et Malentendus

La franc-maçonnerie entre en jeu dès qu’on parle de structures initiatiques ou fraternelles, et l’Ordre du Minorange n’échappe pas à ce questionnement. À première vue, des similitudes superficielles apparaissent : une organisation hiérarchique, des grades, et un langage symbolique (le « minium orange » comme emblème). Ces éléments rappellent les loges maçonniques, avec leurs degrés (apprenti, compagnon, maître) et leurs symboles comme l’équerre et le compas. Mais un examen plus approfondi montre que les liens entre l’Ordre du Minorange et la franc-maçonnerie sont plus spéculatifs que réels.

Historiquement, la franc-maçonnerie et le compagnonnage ont des origines distinctes. La franc-maçonnerie, née en Angleterre au XVIIe siècle, est une société initiatique philosophique qui utilise les outils des maçons de manière symbolique pour promouvoir des idéaux humanistes. Le compagnonnage, attesté en France dès le XVe siècle, est une association opérative, centrée sur la pratique réelle d’un métier. Comme le souligne le Musée du Compagnonnage de Tours, « le compagnonnage n’est pas l’ancêtre de la franc-maçonnerie », bien que des emprunts symboliques aient eu lieu, notamment au XIXe siècle, lorsque de nombreux compagnons ont rejoint des loges maçonniques. Des symboles comme l’étoile flamboyante ou la légende d’Hiram Abiff, architecte du Temple de Salomon, ont ainsi migré du monde maçonnique vers le compagnonnage.

L’Ordre du Minorange, en revanche, n’a pas de dimension initiatique ou ésotérique. Ses grades (une à trois étoiles) sont des distinctions honorifiques, pas des étapes spirituelles. Il n’y a pas de rituels d’initiation, de serments ou de références au « Grand Architecte de l’Univers », figure centrale en franc-maçonnerie. L’Ordre se concentre sur des objectifs pragmatiques : valoriser le travail, renforcer la cohésion, et transmettre des compétences. Cependant, son nom – « Ordre » – et son organisation hiérarchique peuvent prêter à confusion, surtout dans un contexte culturel où la franc-maçonnerie est souvent associée à tout ce qui est structuré et secret.

Un autre point de comparaison est la notion de fraternité. La franc-maçonnerie met l’accent sur une fraternité universelle, transcendant les métiers et les classes sociales, tandis que l’Ordre du Minorange cultive une fraternité corporative, limitée aux ouvriers de Bouygues. Les Compagnons du Devoir se situent quelque part entre les deux : leur fraternité est professionnelle, mais elle inclut une dimension morale et parfois spirituelle, sans pour autant atteindre le niveau philosophique de la franc-maçonnerie. Certains compagnons, comme le note Jean-Michel Mathonière dans un article publié sur compagnonnage.info, ont historiquement adopté une double appartenance, rejoignant des loges maçonniques tout en restant fidèles à leur Devoir. Mais cette double appartenance est aujourd’hui mal vue dans de nombreuses sociétés compagnonniques, notamment en raison d’un anti-maçonnisme hérité de la période vichyste.

Une Analyse Critique : Entre Tradition et Modernité

L’Ordre du Minorange peut être vu comme une tentative de réinventer le compagnonnage dans un cadre moderne et industriel. Francis Bouygues, en s’inspirant des Compagnons du Devoir, a cherché à insuffler un esprit de tradition et de fierté dans une entreprise confrontée aux défis de la standardisation et de la révolution industrielle. Mais cette réinvention a ses limites. Contrairement aux Compagnons du Devoir, qui valorisent l’itinérance et l’indépendance, les compagnons du Minorange sont intégrés à une structure hiérarchique d’entreprise, avec des objectifs alignés sur les intérêts de Bouygues. Cela soulève une question : l’Ordre est-il une véritable fraternité, ou un outil de management déguisé en tradition ?

En ce qui concerne la franc-maçonnerie, les parallèles sont encore plus ténus. L’Ordre du Minorange n’a ni les rituels, ni les objectifs philosophiques de la franc-maçonnerie. Mais son existence illustre une tendance plus large : la persistance de structures fraternelles dans des contextes modernes, qu’il s’agisse de corporations, de syndicats ou d’associations professionnelles. En 2025, alors que le secteur du BTP fait face à des défis comme la crise de la construction neuve et les exigences de décarbonation, l’Ordre du Minorange pourrait jouer un rôle clé en promouvant l’innovation tout en ancrant les ouvriers dans une tradition valorisante.

L’Équinoxe de Printemps 2025 : Un Symbole de Renouveau

Le 20 mars 2025, à 10h01 heure de Paris, l’équinoxe de printemps marquera un moment d’équilibre entre jour et nuit, un symbole puissant pour les traditions initiatiques comme la franc-maçonnerie et le compagnonnage. Bien que l’Ordre du Minorange ne célèbre pas officiellement cet événement, il pourrait s’en inspirer pour renforcer son message de renouveau. Dans un contexte où Bouygues Construction s’engage dans des projets durables – comme la rénovation énergétique, soutenue par des dispositifs publics prolongés jusqu’en 2027 – l’Ordre pourrait incarner un équilibre entre tradition et innovation, entre le savoir-faire ancestral et les exigences du XXIe siècle.

Conclusion : Une Fraternité Hybride

L’Ordre des Compagnons du Minorange est une institution unique, à la croisée des chemins entre le compagnonnage et une forme moderne de fraternité corporative. Il puise son inspiration dans les Compagnons du Devoir, avec leur accent sur le travail bien fait et la transmission, mais il s’en éloigne par son intégration à une logique d’entreprise. Quant à la franc-maçonnerie, les liens sont plus symboliques que réels, bien que l’Ordre illustre une fascination persistante pour les structures hiérarchiques et les valeurs fraternelles.

A quelques jours d’un équinoxe qui rappelle l’importance de l’équilibre, l’Ordre du Minorange nous invite à réfléchir sur la manière dont les traditions peuvent s’adapter à la modernité. Pour les ouvriers de Bouygues, il est un symbole de fierté et de cohésion. Pour les observateurs extérieurs, il pose une question essentielle : comment concilier l’héritage des fraternités opératives et spéculatives avec les exigences d’un monde en mutation ? La réponse, peut-être, réside dans cet équilibre délicat que l’équinoxe incarne si bien.

Site officiel : www.bouygues-batiment-ile-de-france.com/les-compagnons-du-minorange-lexcellence-partagee

Le Dessin de Jissey : « Comment faire avec l’intelligence… naturelle ? »

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La question qui préoccupe actuellement tout un chacun est : « Comment ferons-nous lorsque l’Intelligence Artificielle aura envahi tout notre territoire ? » Cette interrogation semble toutefois secondaire pour notre Frère Jissey. Son inquiétude se porte davantage sur ce qu’il nous reste d’intelligence naturelle. En fin de compte, force est de constater que nous ne faisons pas face à un seul problème, mais à deux !

Procès des assassins : Les 3 mauvais compagnons face à la justice

Tribunal de Grande Instance de Jérusalem, Cour d’Assises – 17 mars 2025

Le silence pesait comme une pierre tombale dans la salle d’audience. Sous les voûtes austères du Tribunal de Grande Instance de Jérusalem, réaménagé pour l’occasion en une cour d’assises exceptionnelle, un procès hors du commun s’ouvrait. Trois hommes, aux visages burinés et aux regards fuyants, se tenaient dans le box des accusés. Leurs noms – Jubela, Jubelo et Jubelum – résonnaient comme des échos d’un passé immémorial. Ils étaient accusés d’un crime qui transcendait le temps :

l’assassinat du Maître Hiram Abiff, architecte légendaire du Temple de Salomon, figure centrale de la mythologie maçonnique.

Ce jour-là, la justice humaine osait juger une fable fondatrice, portée devant les hommes par une plainte déposée par une loge maçonnique internationale, arguant que ce crime symbolique méritait une sentence réelle pour apaiser les âmes et rétablir l’ordre moral.

L’ouverture du procès : un défi au temps

Le président de la cour, le juge Aaron Lévy, un homme aux cheveux gris et au regard perçant, frappa son marteau sur le bois usé du pupitre. « La séance est ouverte. Nous sommes réunis pour juger les accusés Jubela, Jubelo et Jubelum, présumés coupables du meurtre avec préméditation de Hiram Abiff, survenu, selon la tradition, aux environs de l’an 1000 avant notre ère. Que les accusés se lèvent. »

Les trois hommes, vêtus de combinaisons grises, se redressèrent maladroitement. Jubela, le plus âgé, affichait une barbe hirsute et un rictus nerveux ; Jubelo, trapu et taciturne, fixait le sol ; Jubelum, le plus jeune, lançait des regards défiants à la salle. Leur présence semblait anachronique, comme s’ils avaient été arrachés à une fresque antique pour comparaître devant une justice moderne.

La procureure générale, Miriam Cohen, une femme d’une quarantaine d’années au port altier, prit la parole. « Monsieur le Président, mesdames et messieurs les jurés, ce procès est exceptionnel, non seulement par son ancienneté, mais par sa portée symbolique. Hiram Abiff, maître d’œuvre du Temple de Salomon, fut assassiné par ces trois compagnons maçons, mus par la jalousie et l’avidité. Ils ont frappé un homme qui incarnait la sagesse, le travail et la loyauté, privant l’humanité d’un savoir précieux. Nous demandons une condamnation exemplaire : la réclusion criminelle à perpétuité. »

Les faits : une reconstitution légendaire

L’accusation s’appuyait sur une reconstitution des faits tirée des récits maçonniques, enrichie de témoignages fictifs et d’archives symboliques. Selon la tradition, Hiram Abiff supervisait la construction du Temple de Salomon sous le règne du roi Salomon. Chaque jour, il inspectait les travaux et distribuait les salaires aux ouvriers – apprenants, compagnons et maîtres. Mais trois compagnons, frustrés de ne pas accéder aux secrets réservés aux Maîtres Maçons, décidèrent de l’extorquer.

Hiram dans cercueil
Hiram sortant du cercueil

Miriam Cohen déroula le récit avec une précision dramatique : « Le jour fatidique, Hiram achevait sa tournée au crépuscule. À la porte Est du Temple, Jubela l’intercepta, exigeant les mots sacrés du grade de Maître. Hiram refusa, invoquant l’honneur et la patience. Jubela, furieux, le frappa à la gorge avec une règle de 24 pouces – un coup violent, mais non mortel. Hiram tituba vers la porte Sud, où Jubelo l’attendait, armé d’une équerre. Le second coup, porté à la poitrine, le fit chanceler. Enfin, à la porte Ouest, Jubelum l’acheva d’un coup de maillet sur le front. Le Maître s’effondra, mort, emportant avec lui les secrets qu’ils convoitaient. »

Un murmure parcourut la salle. Les jurés, un mélange de citoyens lambda et de maçons initiés, écoutaient, fascinés. Cohen brandit une reproduction des outils – règle, équerre, maillet – comme pièces à conviction, bien que leur authenticité fût purement symbolique.

La défense : une plaidoirie sur l’humanité déchue

L’avocat de la défense, Maître Ezra Benami, un homme mince au verbe acéré, se leva pour contrer l’accusation. « Mesdames et messieurs, ce procès est une aberration. Nous jugeons des figures allégoriques, des ombres d’une parabole maçonnique destinée à enseigner l’humilité et la quête de perfection. Mes clients ne sont pas des meurtriers réels, mais des symboles de nos propres failles – l’envie, l’impatience, la violence. Condamnez-les, et vous condamnez l’humanité elle-même ! »

Benami appela à la barre un expert en histoire maçonnique, le professeur Daniel Stern, qui expliqua : « L’histoire de Hiram est un mythe initiatique, pas un fait historique. Elle illustre le combat intérieur de chaque maçon pour surmonter ses vices. Ces trois compagnons ne sont pas des individus, mais des archétypes. Les juger ici revient à profaner une leçon spirituelle. »

Le procureur Cohen objecta : « Mythe ou pas, ce récit a des conséquences réelles. Des générations de maçons ont pleuré Hiram, et son assassinat reste une blessure dans notre tradition. Ces accusés, qu’ils soient réels ou ressuscités par la justice, doivent répondre de leur acte. »

Les témoignages : entre ombre et lumière

Le procès prit une tournure théâtrale avec les dépositions. Un « témoin » fictif, un apprenti maçon nommé Elias, fut interprété par un acteur mandaté par la loge plaignante. « J’ai vu Hiram tomber », déclara-t-il, la voix tremblante. « Il était bon, juste. Ces trois-là l’ont entouré comme des vautours. J’ai entendu les coups, vu le sang sur le marbre du Temple. » Les jurés froncèrent les sourcils, troublés par cette mise en scène.

Jubela, appelé à s’exprimer, marmonna : « On voulait juste savoir. Les secrets, c’était notre droit. Il nous a méprisés, nous, les petits. » Jubelo resta muet, les poings serrés. Jubelum, lui, éclata : « Hiram était un tyran ! Il gardait tout pour lui, pour les siens. On a fait ce qu’il fallait ! » Des huées fusèrent dans la salle, vite réprimées par le marteau du juge.

Les délibérations : un verdict pour l’éternité

Une séance de déliberation de Sainte-Vehme sur une miniature du Herforder Rechtsbuch, v. 1375.

Après trois jours de débats, les jurés se retirèrent. Les discussions furent âpres. Certains voyaient dans les accusés des criminels à punir pour l’exemple ; d’autres, des métaphores à absoudre pour préserver leur sens initiatique. Le 18 mars, le verdict tomba.

« Jubela, Jubelo, Jubelum, la cour vous déclare coupables du meurtre de Hiram Abiff avec préméditation. Vous êtes condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité, sans possibilité de libération. Que cette sentence serve de leçon : la quête de la lumière ne tolère ni la violence ni la trahison. »

Un silence glacial suivit. Les accusés furent menottés et emmenés, leurs silhouettes s’évanouissant comme des spectres dans les couloirs du tribunal. Dehors, des maçons en tablier blanc, venus du monde entier, déposèrent des branches d’acacia – symbole de Hiram – devant les marches, en hommage au Maître perdu.

Épilogue : une justice symbolique

Ce procès, bien que fictif, marqua les esprits. Pour les uns, il réaffirma l’intégrité de la franc-maçonnerie face aux dérives humaines. Pour les autres, il troubla la frontière entre mythe et réalité, posant une question éternelle : peut-on juger les ombres d’un passé légendaire ? À Jérusalem, ce jour-là, la justice humaine tenta de répondre, avec toute la solennité d’un rituel maçonnique.

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La dimension mystique

La dimension mystique, souvent perçue comme une porte vers des réalités spirituelles et transcendantes, occupe une place unique dans l’expérience humaine. Présente dans la vie quotidienne à travers des moments de contemplation ou des pratiques personnelles, elle trouve une expression structurée dans des traditions comme la franc-maçonnerie, où rituels et symboles guident une quête intérieure. Elle influence également les dirigeants, dont les décisions et le leadership peuvent être façonnés par des intuitions ou des croyances mystiques. Enfin, un aspect essentiel de la mystique réside dans le sentiment profond d’être connecté à quelque chose de bien plus grand que soi, une expérience qui transcende l’individu et l’ancre dans une réalité universelle.

Qu’est-ce que la dimension mystique ?

La mystique peut être définie comme une expérience ou une quête de connexion directe avec le divin, l’absolu ou une réalité transcendante. Elle dépasse souvent les cadres rationnels ou dogmatiques pour toucher des vérités intérieures, souvent ineffables. Dans de nombreuses traditions spirituelles, la mystique est le chemin vers une connaissance intime et profonde de soi et de l’univers, une voie qui privilégie l’expérience personnelle plutôt que les enseignements extérieurs.

Dans la vie de tous les jours, cette dimension peut se manifester de manière subtile : un moment de silence dans la nature, une méditation profonde, ou même une œuvre d’art qui touche l’âme. Ces instants permettent de se sentir connecté à quelque chose de plus grand, d’échapper à l’ordinaire pour toucher à l’extraordinaire. La mystique, loin d’être réservée à quelques élus, est accessible à tous ceux qui cherchent à explorer les profondeurs de leur être.

La mystique dans la vie quotidienne

Dans notre existence moderne, souvent rythmée par le stress et la rapidité, la dimension mystique offre un espace de respiration spirituelle. Elle peut prendre la forme de pratiques simples mais profondes :

La méditation : qu’elle soit active ou passive, c’est un temps dédié à l’introspection, à l’écoute de soi et à la connexion avec une conscience plus vaste.

La contemplation : observer un coucher de soleil, une œuvre d’art ou simplement le mouvement de la vie, en cherchant à percevoir l’essence derrière les apparences.

Les rituels personnels : des gestes symboliques, comme allumer une bougie ou tenir un journal de gratitude, qui ancrent l’esprit dans une réalité plus sacrée.

Ces pratiques, bien que simples, ouvrent la porte à des expériences mystiques où le temps semble suspendu, où la conscience personnelle s’estompe pour laisser place à une présence plus vaste. Elles rappellent que la mystique n’est pas une fuite du monde, mais une manière de l’habiter plus pleinement.

La franc-maçonnerie : une voie mystique structurée

La franc-maçonnerie, intègre la mystique dans ses pratiques et sa philosophie. Elle propose une quête de lumière où chaque membre travaille à se perfectionner tout en contribuant à un idéal collectif.

La franc-maçonnerie : une voie mystique structurée

La franc-maçonnerie, société initiatique, est une tradition qui intègre essentiellement la dimension mystique dans ses enseignements et ses rituels. Elle se présente comme une quête de lumière, où chaque membre est invité à travailler sur lui-même pour devenir une meilleure version de soi, contribuant ainsi, par cette démarche personnelle, à l’amélioration de l’humanité.

Les rituels et symboles : portes vers le mystique

Au cœur de la franc-maçonnerie se trouvent des rituels et des symboles qui, loin d’être de simples formalismes, sont des outils puissants pour éveiller la conscience spirituelle. Chaque rite, chaque geste, chaque parole prononcée lors des tenues est chargé de sens ésotérique. Par exemple :

L’initiation : le passage du profane au franc-maçon est marqué par un rituel qui symbolise la mort de l’ancien moi et la renaissance dans une nouvelle lumière. Ce processus, souvent décrit comme une expérience transformatrice, peut être vécu comme un moment mystique où le candidat prend conscience de sa dimension spirituelle.

Les symboles : le compas, l’équerre, le pavé mosaïque, ou encore le delta lumineux sont autant de figures qui invitent à la méditation et à la réflexion sur des vérités cachées. Ils sont des clés pour décrypter les mystères de l’univers et de l’âme humaine.

Le temple : lieu sacré où se déroulent les tenues, le temple maçonnique est conçu comme un microcosme du cosmos, et le macrosome de notre temple intérieur, un espace hors de l’agitation où le matériel et le spirituel se rencontrent. Y entrer, c’est déjà s’engager dans une démarche mystique.

Ces éléments ne sont pas de simples décors : ils sont des supports pour l’expérience intérieure.
Chaque rituel est une invitation à plonger en soi, à dépasser les apparences pour toucher à l’essence. C’est dans ces moments que l’on ressent le plus intensément la présence du Grand Architecte de l’Univers.

La quête de connaissance ésotérique

La franc-maçonnerie est également une voie de connaissance. Elle encourage ses membres à étudier les sciences hermétiques, la philosophie, les traditions spirituelles du monde entier, non pas pour accumuler des savoirs, mais pour éveiller une sagesse intérieure. Cette quête de connaissance est intérieurement mystique, car elle vise à révéler les vérités cachées derrière le voile des apparences.

La franc-maçonnerie enseigne que la véritable Lumière ne se trouve pas à l’extérieur, mais en moi. Chaque grade, chaque enseignement est une étape vers cette réalisation, une marche de plus vers l’union avec le divin.

La dimension mystique chez les dirigeants

La mystique ne se limite pas aux sphères spirituelles : elle joue un rôle subtil mais puissant dans le leadership, qu’il soit politique, économique ou social. Chez les dirigeants, elle se traduit par une inspiration transcendante, une guidance intérieure ou des pratiques symboliques.

Inspiration et légitimité

La mystique renforce l’autorité des dirigeants en leur conférant une dimension symbolique :

• Historiquement, les rois de droit divin tiraient leur pouvoir d’une connexion supposée avec le divin.

• Aujourd’hui, des figures comme Gandhi ou Mandela ont incarné une vision mystique par leur engagement quasi prophétique.

Cette mystique, qu’elle soit religieuse ou laïque, crée un lien profond entre le dirigeant et ceux qu’il guide, enracinant son leadership dans une dimension symbolique et émotionnelle.

Guidance et intuition

Certains dirigeants s’appuient sur la mystique pour orienter leurs décisions :

• Steve Jobs, par exemple, utilisait la méditation zen pour affiner sa vision.

• En temps de crise, des dirigeants comme Churchill ont suivi des intuitions profondes, perçues comme des « voix intérieures ».

Ces approches permettent aux dirigeants de transcender les pressions immédiates et d’accéder à une perspective plus vaste, essentielle pour aborder des défis complexes.

Rituels et symboles de pouvoir

La mystique se manifeste aussi à travers des rituels et des symboles qui renforcent le pouvoir et l’unité collective :

Cérémonies officielles : l’intronisation d’un roi ou la prestation de serment d’un président s’accompagnent souvent d’un symbolisme mystique, invoquant des forces supérieures pour guider le leader.

Symboles collectifs : drapeaux, emblèmes ou logos corporatifs transcendant leur matérialité pour incarner des valeurs partagées, créant un sentiment de destin commun entre le dirigeant et son peuple ou son organisation.

Ces éléments ancrent le leadership dans une dimension qui dépasse le pragmatisme, touchant à l’émotionnel et au spirituel.

Le sentiment d’être en relation avec quelque chose de bien plus grand que soi

Au cœur de la mystique se trouve une expérience profonde : celle de se sentir connectée à une réalité qui transcende l’individu, qu’elle soit perçue comme l’immensité de l’univers, une présence divine ou une harmonie cosmique. Ce sentiment, souvent difficile à décrire, survient lorsque la conscience s’élargit, lorsque les limites de l’individualité s’effacent pour laisser place à une sensation d’unité avec l’ensemble. Loin d’être une simple idée abstraite, il offre des bienfaits précieux qui enrichissent l’existence de manière subtile et puissante.

• Un sens profond à l’existence : Ce vécu donne à l’individu une signification qui va au-delà des tracas quotidiens, en l’ancrant dans une réalité plus vaste qui nourrit sa raison d’être.

• Une humilité libératrice : Face à l’ampleur de cette réalité, les préoccupations personnelles et les ambitions égoïstes s’atténuent, ouvrant la voie à une sérénité nouvelle et à un détachement apaisant.

• Une perspective élargie : Ce sentiment élargit la vision de l’individu, qui ne se voit plus comme une entité isolée, mais comme un élément intégré à un tout infini, enrichissant ainsi sa compréhension de lui-même et de ce qui l’entoure.

• Un éveil spirituel : En dépassant les frontières de la pensée rationnelle ou des émotions habituelles, cette expérience invite à une dimension spirituelle où la paix profonde et la contemplation guident l’âme.

Ce sentiment est une clé vers une vie plus riche et équilibrée. En dépendant de l’individu à l’incommensurable, il lui permet de trouver à la fois sa place et sa liberté dans un ordre universel plus vaste.

L’appel de l’invisible

Tel un souffle venu d’un ailleurs insondable, la dimension mystique nous appelle à briser les chaînes du matérialisme et de la laïcité dogmatique qui aveuglent notre âme. Elle nous entraîne vers un seuil invisible, un espace où les limites de notre condition humaine s’effacent pour laisser place à une élévation spirituelle infinie. Dans ce sanctuaire éthéré, nous percevons que nous ne sommes pas de simples mortels déracinés, mais des fragments d’une lumière éternelle, tissés dans une trame sacrée qui transcende le visible. Loin des certitudes arides d’un monde mécanique, elle nous révèle que la vraie quête est celle de l’esprit, une odyssée vers l’incommensurable où la liberté se forge dans l’abandon à ce qui nous dépasse. Ainsi, en embrassant cette danse avec l’inconnu, nous pouvons tracer un chemin vers un horizon où l’âme s’épanouit, délivrée, dans sa splendeur la plus divine.

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Avons-nous encore besoin de Dieu ? Une réflexion profonde dans un monde en mutation

De notre confrère Arte

Dans un monde où la modernité semble souvent s’opposer aux traditions, la question de la foi et de l’existence de Dieu reste un sujet brûlant qui traverse les cultures et les continents. Le récent documentaire d’Arte, Avons-nous encore besoin de Dieu ?, diffusé dans le cadre de la série 42 – La réponse à presque tout le 25 novembre 2024, plonge avec audace dans cette interrogation universelle.

Réalisé par Thomas Wagner et disponible en replay jusqu’au 8 décembre 2027, ce reportage de 26 minutes invite à une réflexion nuancée sur la place de la spiritualité à l’ère de la sécularisation, tout en mettant en lumière des paradoxes saisissants. Voici une exploration détaillée des thèmes abordés, enrichie d’analyses et de perspectives pour nourrir le débat public.

Un recul de la foi en Europe, une exception mondiale

Le documentaire ouvre sur une constatation troublante : en France et en Allemagne, la foi religieuse est en net recul. Seulement environ 40 % de la population de ces deux pays se déclare croyante, un chiffre qui contraste avec la tendance globale. À l’échelle planétaire, plus de 70 % de l’humanité reconnaît l’existence d’un ou plusieurs dieux, selon les estimations présentées. Cette dichotomie soulève une première question : la sécularisation européenne est-elle un modèle universel ou une anomalie culturelle ?

Cette baisse de la pratique religieuse en Europe occidentale pourrait être attribuée à plusieurs facteurs : l’essor de la science, l’éducation laïque, et une méfiance croissante envers les institutions religieuses marquées par des scandales. Pourtant, cette tendance ne se reflète pas ailleurs. En Afrique, en Asie et dans une grande partie des Amériques, la foi reste un pilier central de la vie sociale et personnelle. Le reportage souligne ainsi une fracture entre un Occident de plus en plus rationnel et un reste du monde où le spirituel conserve une influence dominante. Mais cette fracture est-elle vraiment aussi nette qu’il y paraît ? Certains pourraient arguer que la spiritualité, même sous des formes non institutionnalisées, persiste dans les sociétés sécularisées à travers des pratiques comme le bien-être ou la quête de sens.

La souffrance comme argument contre la divinité

L’un des points forts du documentaire réside dans son exploration des arguments sceptiques. La guerre, la souffrance et la misère, omniprésentes dans l’histoire humaine, sont présentées comme des preuves potentielles de l’absence d’un dieu bienveillant. Comment concilier l’idée d’un créateur omniscient et miséricordieux avec les atrocités qui ponctuent notre quotidien ? Cette question, vieille comme la philosophie elle-même, est revisitée avec des exemples contemporains : conflits armés, crises humanitaires, et inégalités flagrantes.

Pourtant, cette approche soulève des critiques. Si la souffrance est utilisée pour nier l’existence de Dieu, ne pourrait-on pas aussi l’interpréter comme un test ou une épreuve, comme le suggèrent certaines traditions théologiques ? Le reportage, en se concentrant sur une vision matérialiste, risque de simplifier un débat qui a occupé des penseurs pendant des millénaires. Il aurait pu, par exemple, explorer davantage les réponses apportées par des théologiens ou des philosophes comme Leibniz, avec sa théorie du « meilleur des mondes possibles », ou encore les perspectives existentialistes de Kierkegaard, qui voient dans la souffrance une occasion de transcendance.

Le besoin humain de croire : une constante universelle

Au-delà des arguments rationnels, Avons-nous encore besoin de Dieu ? s’interroge sur une réalité psychologique et sociale : pourquoi l’être humain ressent-il ce besoin viscéral de croire, même face à l’adversité ? Le documentaire suggère que la foi répond à des besoins fondamentaux : donner un sens à l’existence, offrir un espoir face à la mort, ou encore structurer les communautés. Cette analyse trouve un écho dans les travaux de sociologues comme Émile Durkheim, qui voyait la religion comme un facteur de cohésion sociale.

Mais cette nécessité de croire évolue. Dans les sociétés modernes, des alternatives laïques émergent : le développement personnel, les ideologies politiques, ou même les communautés en ligne. Le reportage aurait pu creuser cette transition, en examinant si ces substituts suffisent à combler le vide laissé par le déclin religieux. Par exemple, les mouvements écologistes ou humanitaires ne reprennent-ils pas, à leur manière, des rôles autrefois dévolus aux religions ?

Une diversité de perspectives

L’un des mérites du documentaire est d’éviter les jugements hâtifs. Il donne la parole à des voix variées : athées convaincus, croyants fervents, et agnostiques perplexes. Cette pluralité reflète la complexité du sujet. Par exemple, un intervenant pourrait souligner que la science, bien qu’expliquant de nombreux phénomènes, ne répond pas aux questions existentielles comme « Quel est le sens de ma vie ? ». À l’inverse, un autre pourrait arguer que la foi, lorsqu’elle devient rigide ou dogmatique, alimente les divisions plutôt que l’unité.

Cette approche équilibrée invite à un débat public. En 2025, alors que les tensions géopolitiques et les crises climatiques s’intensifient, la quête de sens pourrait redevenir un moteur social. Le reportage suggère que, même dans un monde sécularisé, la spiritualité pourrait se réinventer sous de nouvelles formes, peut-être plus individualisées et moins institutionnelles.

Limites et perspectives d’avenir

Malgré sa richesse, le documentaire présente des limites. Sa durée de 26 minutes, bien que concise, contraint l’approfondissement de certains aspects. Par exemple, il ne s’attarde pas sur les différences entre les grandes religions monothéistes et les spiritualités polythéistes ou animistes, qui dominent dans de nombreuses régions. De plus, la focalisation sur l’Europe et les statistiques globales occulte parfois les dynamiques locales, où la foi peut être revitalisée par des contextes spécifiques, comme les mouvements religieux en Amérique latine ou en Afrique subsaharienne.

À l’avenir, il serait fascinant d’explorer comment les jeunes générations, nées dans un monde numérique, perçoivent la question de Dieu. Les réseaux sociaux et les algorithmes influencent-ils nos croyances autant que les sermons d’antan ? Une suite au reportage pourrait aussi examiner les implications politiques de la foi, notamment dans les débats sur la laïcité ou les droits des minorités religieuses.

Conclusion : une question toujours ouverte

Avons-nous encore besoin de Dieu ? ne prétend pas apporter une réponse définitive. Au contraire, il ouvre un espace de dialogue dans une société souvent polarisée entre rationalité et spiritualité. En ce 14 mars 2025, alors que les défis mondiaux s’accumulent, cette interrogation prend une résonance particulière. La foi, qu’elle soit religieuse ou séculière, semble répondre à un besoin humain profond de connexion et de sens. Peut-être que la vraie question n’est pas de savoir si nous avons besoin de Dieu, mais de quelle manière nous choisissons de donner un sens à notre existence collective.

Ce reportage d’Arte, disponible en replay jusqu’au 8 décembre 2027, mérite d’être visionné et discuté. Il rappelle que, malgré les avancées scientifiques et les bouleversements sociaux, l’humanité reste attachée à ses grandes questions métaphysiques. À vous, lecteurs, de poursuivre cette réflexion.

La recherche de la vérité est-elle une fin en soi ?

DECLARATION DES PRINCIPES

La Franc-Maçonnerie proclame, comme elle a proclamé dès son origine, l’existence d’un principe créateur, sous le nom de Grand Architecte de l’Univers. Elle n’impose aucune limite à la recherche de la vérité, et c’est pour garantir à tous cette liberté qu’elle exige de tous la tolérance. Ainsi, le cadre est posé, toutes les voies sont possibles pour rechercher la vérité mais avec comme principe l’existence d’un principe créateur. Lors d’une initiation, il est pourtant dit :

« Ne profanez pas le mot de Vérité en l’accordant aux conceptions humaines.
La Vérité absolue est inaccessible à l’esprit humain, il s’en approche sans cesse, mais ne l’atteint jamais. »

Cette recherche selon les principes fondateurs est fastidieuse et nous informe que nous ne serons ni capables ni dignes d’accéder à la Vérité. Un espoir nous est tout de même donné : « La Vérité est la lumière placée à la portée de tout homme qui veut ouvrir les yeux et qui veut regarder»

Platon décrit la célèbre allégorie de la caverne. Des prisonniers sont enchaînés depuis leur naissance dans une grotte. Le dos tourné à l’ouverture, ils ne voient que des ombres. Un seul décide de se défaire de ses liens et de sortir. Il pénètre alors dans la lumière, et voit la réalité. Mais son oeil n’étant pas habitué à tant de clarté, il est aveuglé et il doit faire un effort pour s’accoutumer à ce qu’il voit. De retour dans la caverne, les autres ne le croient pas.

Cet homme représente le philosophe qui s’est libéré des chaînes des apparences au prix d’une conversion de l’âme difficile. Il a dû s’arracher au monde sensible pour atteindre le monde intelligible des Idées vraies. La recherche de la vérité se fait par un effort qui demande d’abord de dépasser les images trompeuses de la réalité (les ombres de la caverne). L’allégorie de la caverne donne l’espoir d’une libération. Mais pourquoi préférer le vrai à l’illusion ?

Atteindre la vérité n’est donc pas un acte spontané. Elle exige une discipline, une méthode.

La vérité se présente comme une exigence qui vient à l’encontre de nos affirmations et des apparences et nécessite un combat contre nous-même.

Alors, qu’est ce que la vérité maçonnique ?

Elle commence par la connaissance de soi qui n’est pas une simple méditation intérieure, comme on l’écrit souvent, auquel cas elle ne serait qu’un simple examen de sa propre psychologie et des ressorts de son comportement inspiré par le souci de sa propre personnalité.

Le maçon se doit de dépasser ses réactions intimes parce que la visée de cette connaissance est de découvrir en soi les sources profondes de notre engagement dans la démarche initiatique, et dont l’importance capitale échappe ordinairement à la conscience profane tournée plutôt vers le matérialisme et la science.

C’est là le premier tremplin dans la recherche de la vérité, en quoi consiste ce soi où se situent les forces profondes de l’esprit qui va animer la pensée et l’action de l’initié. L’autre vérité que nous avons le devoir de poursuivre est désignée à partir du 3ème degré sous le nom de « Parole perdue ».

Que signifie cette recherche ?

Elle semble impliquer que nos ancêtres ont possédé une connaissance authentique des mystères relatifs à l’ordre cosmique, à la naissance de la vie et de l’homme, à la nature de l’âme et à sa survie dans un autre monde, parce qu’ils avaient des relations plus étroites avec le monde invisible et ce que nous nommons le Sacré.

Claude Lévi-Strauss

Il existe pourtant bel et bien, un authentique savoir « primitif« , parfaitement adapté à l’environnement. Mais ce savoir n’intervient que comme médiation pour débloquer une situation vécue, surmonter l’insolite et reprendre le cours familier de l’existence. Il détermine le passage de l’immaîtrisable au maîtrisé, de l’anormal au régulier.

Claude Lévi-Strauss montre que les peuples, dits primitifs, ont constitué sur leur environnement naturel, un savoir parfaitement précis, rigoureux et systématique.

Ce savoir primordial qui a été à l’origine des plus grandes civilisations de l’antiquité, nous l’avons perdu parce que l’homme a progressivement rompu avec cette connaissance ésotérique pour se consacrer toujours plus à la connaissance de son environnement qui conditionnait la maîtrise de la nature.

De ce savoir il ne nous reste que la substitution des récits mythiques souvent contenus dans des écritures religieuses, un corpus de symboles véhiculés par de nombreuses cultures traditionnelles, que nous avons essayé de restituer dans nos rites maçonniques.

Si on nous demande constamment de retrouver la Parole perdue en la recomposant et en la réinterprétant sans cesse, à la lumière de la tradition, c’est qu’une certaine intelligence des mystères de la nature, de la vie, de la mort et de la présence même de l’homme dans le monde est une finalité essentielle de l’initiation et de la condition première de notre transformation intérieure.

Le terme même d’initiation désigne à la fois une marche en avant et une découverte qui illumine progressivement la conscience par la compréhension de mystères, c’est-à-dire de choses cachées qui changent radicalement la vision du monde de l’initié.

Découvrir que nous sommes des êtres spirituels animés par l’amour du bien, de la vérité et de la beauté, que nous possédons une âme immortelle dont le destin ne s’arrête pas aux frontières de la mort, que le sacré prend une dimension ontologique notamment à travers l’affirmation d’un  principe créateur que nous nommons Grand Architecte de l’Univers et à travers la notion de loi émanant de ce principe manifesté selon la maçonnerie dans l’ordre cosmique, est de nature à modifier radicalement le sens que nous donnons à notre vie.

Les idées métaphysiques contenues dans nos rites et nos enseignements donnent un fondement à l’impérativité du Devoir qui tient une si grande place au 4ème degré et d’une manière générale aux valeurs de fraternité, de justice, de courage, d’humilité qui constituent notre éthique. Elles changent nécessairement notre rapport aux autres et à l’existence.

L’esprit et la connaissance sont symbolisés par la Clef d’Ivoire qui nous ouvre le Saint des Saints : la profondeur des mystères et du Sacré.

Que cherchez-vous ? La Vérité et la Parole perdue. 

Il est nécessaire de distinguer Vérité et Parole perdue.

Livre tenu dans des mains
livre, lumiere, symbole,

Cette Parole perdue n’est-elle pas au fond de nous-même, au fond de notre inconscient ?

« …La vérité est une lumière que l’homme perçoit plus ou moins confusément. Elle peut pourtant se révéler dans tout son éclat à celui qui veut ouvrir les yeux et regarder.

« La route du devoir mène sûrement à la Vérité… »

La Vérité est donc abordable, de loin. Peut-être peut-elle se montrer mais il faut beaucoup de volonté et de détermination.

Tout l’intérêt de la Franc-maçonnerie est de nous aider dans la quête comme le dit le rituel lors de l’initiation au quatrième degré :

Vue de la Lumière du fond du puits
Vue de la Lumière du fond du puits

 « Mes frères la Franc-maçonnerie nous a fait sortir du monde de l’ignorance, des préjugés et des superstitions. Elle vous a tirés de la servitude de l’erreur. »

La vérité est donc en Maçonnerie une fin essentielle car sans les outils et les supports qu’elle nous offre, nous serions incapables d’accéder à une sagesse dont le nom même induit une certaine perception juste de la réalité.

Cependant, on ne peut affirmer qu’elle est une fin en soi dans la mesure où elle n’est pas « La fin suprême » de l’initiation qui est de convertir notre être à une vie tournée vers les valeurs de l’esprit.

Elle est la voie, le moyen d’accéder à la transformation de soi. C’est pourquoi j’ai indiqué qu’elle a effectivement le pouvoir de changer notre être à mesure que nous progressons dans la connaissance.

Nous retenons aussi que cette recherche est une lutte. Les choses ne vont pas de soi comme nous l’avons vu précédemment. Des parties cachées existent. Il faut faire un effort.

La méthode pour chercher la vérité consiste d’abord à éliminer les opinions, les idées reçues qui viendraient « obscurcir » la vision du vrai. Rechercher la vérité est donc une lutte contre le dogmatisme qui érige des dogmes, des « vérités » arrêtées qui ne renvoient plus à la réalité.

Il s’agit donc de « suspendre son jugement », c’est à-dire de douter de ce qui se prétend vrai. Dès lors comment ne pas douter de tout et ne pas être sceptique ? La définition et les critères de vérité n’étant pas unanimes, qu’est-ce qui garantit que la vérité soit prononcée par certains et pas par d’autres ?

Il est certain que l’initiation rencontre beaucoup d’obstacles à vaincre à commencer par les passions de l’ego, comme notre rituel ne cesse de nous le rappeler. L’ego peut-être maîtrisé par la volonté morale appuyée sur la connaissance initiatique.

Le défaut de persévérance et de spiritualité peuvent faire que la connaissance n’aboutisse pas à une mutation durable de notre conscience et de nos manières d’être. C’est en ce sens et en ce sens seulement qu’on peut affirmer qu’elle n’est pas une fin en soi.

Elle ne peut se suffire si elle n’a pas réussi à entraîner l’être tout entier en le soumettant aux exigences de l’esprit. Si un conflit se produit dans la démarche initiatique entre le savoir et l’être, le savoir devient un pouvoir inutile, voire dangereux car il a manqué la fin qui lui donnait sens et valeur : le perfectionnement de son être.

 La difficulté va résider dans notre capacité à rester sur le chemin sans s’égarer.

De nombreux pièges existent inhérents à notre nature humaine et à l’imperfection des systèmes dans lesquels nous vivons. Le danger principal est la difficulté d’appréhender la réalité sans se laisser prendre aux pièges des illusions.

Souvenons-nous de l’instruction du Troisième degré :

 « Envisagé sous l’angle moral, la légende d’Hiram peut aussi exprimer la lutte perpétuelle entre la Vérité immortelle mais toujours menacée, et ses trois ennemis : l’ignorance, le fanatisme et l’ambition déréglée. »

 « Les passions, les préjugés et l’erreur placent de nombreux obstacles entre l’homme et la vérité ».

 Ce qui peut s’interpréter par le constat que si nous échappons à l’erreur c’est que nous sommes mis sur le chemin de la Vérité par la conception du travail.

Notre rituel  parle de « la recherche de la Vérité. »

Souhaitons-nous découvrir une réalité quand nous parlons de cette recherche ?

Je ne suis pas sûr que la réponse soit une réalité concrète de notre monde profane mais plutôt un absolu.

Ne parlons-nous pas de la Lumière, de la Connaissance ? Nous voici donc dans une relative incapacité à définir de façon simple la Vérité. Le problème qui rend la recherche difficile c’est que l’être est voilé derrière le paraître. Tout notre travail consiste à devenir aptes à connaître l’être en nous-même, c’est à dire la Vérité dont on dit qu’elle est absolue mais inaccessible. Nous sommes dans une recherche métaphysique où le chercheur que nous sommes devient l’objet de la recherche.

Nous voici revenu à l’introspection évoquée plus haut. C’est pourquoi chacun est seul sur son propre chemin.

En résumé le Franc-maçon, homme libre, se doit d’éviter d’idolâtrer ni idéaux, qu’ils soient politiques, scientifiques, sociaux, spirituels, ni hommes, si valeureux soit-il. Le Franc- maçon ne peut pas admirer ce qui est à l’extérieur, mais se concentrer sur l’intérieur. Et c’est bien dans ces principes de vie que réside son Devoir qui mène sans nul doute à la Vérité, comme le dit le rituel.

    « La Vérité que cherche le Franc-maçon est contenue dans l’univers. Elle est à la fois son origine, sa nature et son milieu ambiant. Dans le spectacle grandiose de la manifestation de l’infiniment grand, la Vérité est là, présente, avec ses messages d’évidence et de contradiction. »

Ainsi la Vérité nous transcende. C’est bien ce que nous avions déjà pressenti et affirmé. Je pense qu’il apparaît maintenant nettement que la recherche de la Vérité ne souffre pas de renoncement. Elle est clairement affirmée comme objectif aux Francs-maçons dans le rituel. Elle imprègne notre discours.

Socrate en penseur vue de face
Statue de Socrate

Socrate disait : « Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien. » Ce doute socratique nous invite à chercher la lumière par la raison et la compréhension des choses.

En conclusion, je pense que pour nous Maçons, la recherche de la vérité est bien une fin essentielle, un devoir envers nous-mêmes qui nous sommes mis sur le chemin et un devoir face à notre engagement. Pourtant, après ce travail, je pense que cette Vérité n’est pas une fin en soi car elle procède de la compréhension, de la connaissance de mystères qui dépassent la raison et se situent au-delà du monde sensible.

Le Franc-maçon peut-il vivre seul ? 

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Il semblerait que tout le pousse à se conduire en harmonie dans l’universalité. Il ne cherche pas uniquement à s’élever sur le plan personnel, spirituel et dans la connaissance, mais aussi il contribue à l’élévation de l’humanité et à son perfectionnement.


« Il travaille sans relâche sur sa pierre brute »

…afin qu’elle devienne une pierre polie et qu’elle rejoigne l’édifice universel du Grand Architecte de l’Univers avec lequel il travaille en résonance.

« Ainsi il va poursuivre sa quête vers la construction de son temple intérieur »


Depuis son initiation, Il poursuit son chemin seul mais accompagné de tous ses frères et soeurs qui lui rappellent sans cesse son appartenance à la Franc-maçonnerie, ainsi que les devoirs et les implications qui en découlent. Tout comme le Grand René dans la vidéo ci-dessous:

L’énigme des Maîtres -10- La traversée des époques

Pour lire l’épisode précédent : ici

Eaton square

Les missives jaunies par le temps portent les traces de plumes anciennes et de cachets de cire brisés. Écrites en latin, en anglais, en ancien français, elles apparaissent vite comme des échanges entre des figures éminentes de chaque époque, des alchimistes, des kabbalistes, des savants, des artistes et des poètes et pour certains, tout à la fois. Ces correspondances révèlent des alliances secrètes et des collaborations ésotériques, formant un réseau complexe d’individus liés par la soif de connaissance et la recherche d’un principe de cohérence entre l’univers, la société et l’individu. Les œuvres d’art ne sont pas simplement des représentations esthétiques, mais des manifestations matérielles des enseignements ésotériques et des quêtes mystiques d’artistes, de lettrés, d’alchimistes partageant souvent les mêmes espaces créatifs.

À première vue, il y avait des lettres de Leonardo da Vinci, l’un des esprits les plus polymathes de la Renaissance, qui était non seulement un artiste de renom, mais aussi un inventeur, scientifique et philosophe. Ses carnets révèlent des esquisses alchimiques et des explorations dans le domaine des sciences occultes. Des lettres aussi de Botticelli, connu pour des œuvres telles que La Naissance de Vénus et La Primavera, L’adoration des mages qui portaient souvent des éléments symboliques et mythologiques qui peuvent être liés à des concepts alchimiques et ésotériques.

Et encore des lettres de Michelangelo Buonarroti, connu sous le nom de Michel-Ange, célèbre pour ses sculptures comme le David et ses fresques de la chapelle Sixtine, qui était également influencé par la pensée néo-platonicienne et avait des liens avec des idées ésotériques de son époque.

Il y avait encore des correspondances de Giovanni Bellini et de Giorgione, ces artistes vénitiens qui avaient été associés à la Renaissance magique, un courant qui combinait l’art avec la mystique et l’alchimie.

Et puis celles de l’artiste Dominique O’Heguerty qui, dans le cadre de l’histoire, représente une figure incarnant la fusion de l’art et de l’alchimie et ayant partagé les mêmes espaces créatifs avec d’autres esprits créatifs et ésotériques. Et d’autres encore…

Après les avoir scannées, pour faciliter leur lecture, il fut convenu de toutes les traduire en français aidés en cela par des logiciels adaptés  et comme la plupart étaient datées, le premier travail consista à les trier sur ce critère et à les annoter.

Tout en s’appliquant, Alexander grignotait de gianduiotti, ces petits lingots doux et crémeux à base de noisettes en poudre et de chocolat qu’Archibald avait disposés près de lui, connaissant son pêché mignon.

Des lettres retinrent l’attention toute particulière de nos explorateurs des documents.

De Marsile Ficin à Pic de la Mirandole.

Cher élève,

Vous méritez que je vous tienne au courant de nos dernières recherches en cette année de 1480. Enfin j’ai pu me procurer le codex de Shaykh Ahmad Ahsa’i, le fameux Jawami’ al-Kalim daté de 1273.

J’ai compris comment fabriquer le diamant dont nous avons besoin. Je vous en remets ici l’extrait du secret alchimique dont je vais me servir, tel que je l’ai traduit de l’arabe.

« De nombreux symboles sont à méditer ici; nous en mentionnerons quelques-uns. Voici, par exemple, le verre; il provient de la silice et de la potasse; toutes les deux, denses et opaques, sont les homologues du corps matériel élémentaire Yaàad A, corps de chair périssable, que tout le monde connaît. On les soumet à la fusion; impureté et ternissure s’en vont; c’est maintenant du verre diaphane : l’extérieur transparaît à travers l’intérieur, l’intérieur transparaît à travers l’extérieur. C’est alors l’homologue du corps spirituel (asad B, taro spiritualis), celui qui surexiste « dans la tombe », c’est-à-dire en Hûrqalyâ, et auquel sont donnés « quiétude et séjour paradisiaque », tandis que la densité opaque, celle de la silice et de la potasse, était l’homologue du corps élémentaire matériel (jasad A). Médite comment, de la silice et de la potasse denses et opaques, est sorti un corps à l’état diaphane et subtil. Celui-ci, c’est bien la même substance minérale, et pourtant non, c’est quelque chose d’autre. Maintenant, que ce verre soit à son tour soumis à la fusion, que l’on projette sur lui certaine drogue appropriée qui en compénètre la masse; il devient du cristal. Que sur ce cristal l’on projette la «drogue des philosophes», laquelle est l’Élixir de blancheur. Il devient alors un cristal qui flamboie au soleil (le «verre de lentille»), parce qu’il fait converger les rayons solaires qui frappent sa surface. C’est bien encore du verre, et pourtant c’est autre chose que du verre, tout en étant cependant encore du verre, mais un verre auquel quelque chose est arrivé, et qui l’a si totalement purifié que le voici maintenant d’un rang très supérieur au premier. Ce cristal incandescent est l’homologue du corps astral (jism A) qui accompagne l’Esprit au moment de l’exitus, lorsque celui-ci sort de son corps matériel élémentaire : le corps avec lequel l’Esprit entre dans le paradis d’Occident, le paradis d’Adam. Eh bien qu’à son tour ce cristal flamboyant soit soumis à la fusion; que l’on projette sur lui l’Élixir blanc. Voici qu’il devient du diamant (alnis). C’est encore du cristal, et pourtant non, c’est quelque chose d’autre, et pourtant si fait, c’est bien lui-même, mais passé par toutes ces épreuves. C’était une substance minérale, dense et opaque; elle a été soumise à la fusion, et elle est devenue un verre transparent, puis elle est devenue du cristal. Et quand ce cristal eut été soumis une première fois à la fusion et à la projection de l’Élixir blanc, il est devenu du cristal flamboyant. Une seconde fois on l’a fait entrer en fusion et on a projeté sur lui l’Élixir; il est devenu du diamant. Qu’on le pose sur l’enclume, qu’on le frappe avec le marteau; il mordra sur l’enclume et sur le marteau, mais il ne se brisera pas. Qu’on le frappe avec un morceau de plomb; il éclatera en fragments ayant chacun la forme d’un cube; et si chaque cube est à son tour frappé avec le plomb, il éclate à son tour en fragments cubiques. C’est là le signe authentique qu’il est vraiment du diamant. Mais qu’il soit maintenant du diamant, c’est aussi l’indice que le diamant était occulté dans le fond essentiel de la substance minérale, parce qu’en fait la composition de celle-ci résulte des deux principes bien connus, le mercure et le soufre, selon ce qui est établi en physique. Et ce diamant dégagé du cristal, ce cristal dégagé du verre, ce verre dégagé de l’opacité minérale, c’est l’homologue du corps de résurrection »

N’oubliez pas mes recommandations, éloignez-vous de Girolamo S. Il voit nos recherches comme des sources de corruption morale. Vous n’avez rien à gagner en le soutenant.

Que Dieu vous garde.

J’ai réussi, je confie le diamant à cet homme extraordinaire de 30 ans Léo…do

Alexander ajouta une note: Malgré la brûlure de cire tombée d’une chandelle qui a effacé une partie du nom à qui fut confié le diamant, on peut penser qu’il s’agirait de Léonard de Vinci.

Lettre non signée

Sur ma foi et mon salut, je jure que ce que je rapporte ici fut vrai parce que j’en fus l’unique témoin silencieux, dissimulé par hasard derrière un volet d’une fenêtre donnant sur les jardins de Clos Lucé en cette année de grâce 1519.

Le doux parfum des fleurs flottait dans l’air. Léonard de Vinci s’immergeait dans les retouches de sa Mona Lisa posée sur un chevalet devant la fenêtre ouverte pour profiter de l’odeur des rayons du soleil de cette matinée printanière.

Soudain, un bruit de pas léger attira son attention. Un jeune lord anglais, s’avançait avec une grâce presque surnaturelle. Sa silhouette élancée et son regard perçant captivèrent instantanément Léonard.

Le lord, avec des cheveux dorés comme alchimisés  sous le soleil, arborait une tenue richement brodée qui soulignait sa jeunesse éclatante. Ses yeux, d’un bleu profond, brillaient d’une malice charmante, tandis qu’un sourire énigmatique se dessinait sur ses lèvres. Il s’approcha du maître et engagea la conversation dans un français parfait.

– «Bonjour maestro, je vous cherchais et la porte ouverte m’a donné licence d’entrer sans vous déranger par le son d’un choc à la porte. Je suis un humble admirateur de vos œuvres, c’est un honneur de croiser votre chemin.»

Vinci ne marqua aucune surprise. Je lui avais annoncé la venue d’un émissaire du roi Henri VIII et la familiarité de ce «bonjour» si direct lui parut avoir la simplicité d’un être authentique.

Au signe d’accueil de la tête que lui fit Vinci, le jeune baron poursuivit

– « Maestro, vos créations parlent d’un monde étrange. Que représente cette toile pour vous ? » Demanda-t-il, désignant le tableau sur le chevalet.

Léonard sentit son cœur s’emballer à l’entente de la voix mélodieuse du jeune homme. Il eut le même sourire intérieur que celui de sainte Anne sur cet autre tableau où il devait encore ajouter quelques coups de pinceau sur la robe.

– « Chaque visage est un récit, une histoire, une âme. Mais, peut-être, le vôtre pourrait m’inspirer davantage ? » Répondit-il, laissant le sourire complice effleurer ses lèvres.

Le lord éclata de rire, un son clair et joyeux, avant de se pencher un peu plus près, comme s’il voulait partager un secret.

– « Je suis  ici pour les préparations du Camp du drap d’or et vous en demander conseil. Mais ce lieu, ce moment, pourrait bien être le plus précieux de ma mission. »

Léonard, piqué par cette audace, ressentit une attirance inexplicable. Les mots s’effacèrent, laissant place à un trouble, à l’évidence aussi soudain que puissant. Quand le beau jeune homme s’avança un peu plus près, Léonard put en sentir la chaleur émanant de ce jeune être qui le réchauffait comme le fut David par la nubile qui le couvrit de son corps, et un frisson parcourut son échine.

Les heures passèrent, mais le temps semblait figé dans cet échange enchanteur. Le jeune lord partagea des histoires sur ses faits d’armes et celles de sa lignée dans laquelle s’inscrit celle de son ancêtre John, le comte de Salisbury, baron Montagu, fidèle conseiller du roi Richard II.

Il s’attarda  sur le faste de la cour anglaise, et Léonard, tout en pensant à ce qui pourrait le surpasser pour rivaliser de munificence à la rencontre attendue l’année suivante, se laissa emporter par le récit en ressentant un désir aussi inattendu qu’intense de sa bouche voluptueuse.

Léonard savait, au fond de son cœur, qu’il venait de croiser non seulement un bel émissaire, mais peut-être aussi un élan de passion qui illuminerait ses vieux jours. Le camp du drap d’or, avec ses festivités à venir, ne serait rien comparé à la magie de cette rencontre.

Je n’entendis pas très bien ce que murmura le maestro à la fin de leur conversation mais j’ai vu alors le maestro se diriger vers son secrétaire d’acajou richement décoré avec des sculptures, des motifs floraux et des éléments de dorure, en retirer d’un tiroir secret un coffret de plomb qu’il enveloppa dans un linge de lin blanc tissé d’or. Il en coupa un morceau qu’il garda et confia au jouvenceau le paquet, « pour le mettre à l’abri de la cupidité de Salaï » lui expliqua-t-il et il ajouta :

– Ne le remettez qu’à la personne qui saura se faire reconnaître de vous avec ceci en lui montrant la pièce découpée.

Le jouvenceau sorti, Léonardo se mit à écrire, inséra le bout de tissu dans la missive avant de la fermer et d’y apposer son cachet.  

Elle était adressée au sieur Charles de Villeneuve Je le sais parce que c’est moi qui ai fait transmettre la missive à son destinataire.

Une lettre non datée

Je viens de recevoir un courrier de notre ami Willey Reveley à qui j’avais confié le coffret des secrets qui conduit au diamant. Il est de retour de son voyage où il avait accompagné Sir Richard Worsley à Constantinople. Il m’en fait connaître l’emplacement que je te transmets.

Suis la voie.

La lettre était signée « Ton frère en humanité ».

Le code sibyllin fut très vire déchiffré par Guido. Enfant déjà, son père cryptologue le distrayait de son chagrin de la mort de sa mère en le faisant jouer à résoudre des énigmes logiques qui demandaient de plus en plus de concentration.

– C’est un codage enfantin expliqua Lhermitt. Je suis parti de l’hypothèse que les nombres correspondent simplement à la position des 26 lettres dans l’alphabet latin. Comme il n’y a ni les nombres 1, ni 2, ni 3, parmi eux, j’en ai conclu que la petite astuce introduite pour lui donner un peu plus de difficulté à décoder est un décalage évident par augmentation de 3. Il suffit donc de reculer d’un pas de 3. Et voilà ce qu’il faut retenir. Il inscrivit la nouvelle liste de nombres. 

Traduite en lettres, le message fut lu d’un seul regard : stella viam in arca post ostium lacrimarum suleimanyi aperit. La traduction à comprendre est : l’étoile ouvre la voie au coffre derrière la porte des larmes de Suleymaniye ajouta Guido. 

– Alors nous partons en Turquie ? demanda Alexander, heureux qui, comme Ulysse, va faire un beau voyage.

– Quel enthousiasme Alex. Ne compte ni sur Archibald, ni sur moi pour t’accompagner dans les jours qui viennent. Nous sommes retenus par des préparations d’une réunion internationale importante auxquelles nous ne pouvons déroger.

– Pas de problème pour moi, ma blessure est cicatrisée et tu sais la joie que j’aurais de rester près de toi Alexander, proposa Amélie, affichant la nature de leur relation agrégée dans le groupe depuis leur retour de Prague.

Lire la suite…

Embarquez pour une odyssée initiatique : 18e Croisière Maçonnique et Philosophique en Asie du Sud-Est

Imaginez un voyage où l’horizon s’ouvre sur des temples millénaires, des eaux turquoise et des métropoles vibrantes, tout en vous invitant à une quête intérieure profonde. Du 30 janvier au 14 février 2026, la 18e Croisière Maçonnique et Philosophique, organisée par le Cannes Cercle Azuréa en partenariat avec Costa Croisières, vous convie à une aventure unique à bord du majestueux Costa Serena. De Hong Kong aux rivages secrets des Philippines, en passant par le Vietnam, le Cambodge, la Thaïlande, Singapour et Brunei, ce périple de 16 jours et 15 nuits promet bien plus qu’une escapade : une exploration des « Émotions Orientales, Émotions Orientées », thème fédérateur de cette édition.

Un itinéraire entre ciel et mer

Le voyage débute à Hong Kong, joyau d’Asie où gratte-ciels futuristes côtoient des marchés flottants ancestraux. Dès le 30 janvier, le Costa Serena lèvera l’ancre, laissant derrière lui les lumières de Victoria Harbour pour une première journée de navigation, propice à la réflexion et aux échanges entre frères et sœurs maçons. Puis, les escales s’enchaînent comme autant de chapitres d’un livre sacré : Nha Trang et Da Nang au Vietnam, avec leurs plages dorées et leurs pagodes sereines ; Sihanoukville au Cambodge, porte d’entrée vers les mystères d’Angkor ; Koh Samui en Thaïlande, oasis tropicale de méditation.

Le 7 février, Singapour déploie son éclat cosmopolite pour deux jours d’immersion, avant que Bandar Seri Begawan, capitale discrète de Brunei, n’offre une pause contemplative les 9 et 10 février. Puerto Princesa, sur l’île de Palawan aux Philippines, clôture les escales avec ses lagons cristallins et ses jungles luxuriantes, avant un retour à Hong Kong via deux jours en mer, idéals pour conclure les travaux philosophiques. Chaque étape, minutieusement choisie, allie découverte culturelle et introspection, dans l’esprit d’une franc-maçonnerie voyageuse et universelle.

Le Costa Serena : un temple flottant

À bord du Costa Serena, inspiré par la mythologie et le raffinement, tout est pensé pour élever l’âme et ravir les sens. Ce géant des mers, surnommé « le navire des Dieux », propose cinq restaurants – dont le Club, la pizzeria Pummid’Oro et le Sushino at Costa (sur réservation) – et neuf bars, incluant une gelateria et un bar à vin pour des instants de convivialité. Le bien-être est à l’honneur avec un centre spa doté de saunas, hammams, et cinq vasques à hydromassage, sans oublier quatre piscines – dont une sous verrière amovible – et un terrain multisport pour les plus actifs.

Les divertissements ne sont pas en reste : un théâtre sur trois niveaux accueillera les conférences maçonniques, tandis qu’un casino, une discothèque et une galerie marchande offriront des parenthèses ludiques. Les enfants, eux, profiteront du Squok Club et d’une piscine dédiée. Mais c’est sur le pont, face à l’immensité de la mer de Chine méridionale, que les participants pourront pleinement méditer sur le thème de cette croisière : les émotions comme boussole de l’initiation.

Une expérience maçonnique unique

Organisée par le Cannes Cercle Azuréa, cette 18e édition s’inscrit dans une tradition bien établie de croisières maçonniques, mêlant tourisme, fraternité et travaux philosophiques. Le thème « Émotions Orientales, Émotions Orientées » invite à explorer comment les cultures d’Asie du Sud-Est – du bouddhisme thaïlandais aux traditions animistes philippines – peuvent enrichir la réflexion maçonnique. Des ateliers en loge, animés par des orateurs comme Jean-Jacques Cros (mentionné à plusieurs reprises dans le programme), rythmeront les journées en mer, tandis que les escales offriront des visites guidées sous l’angle symbolique – temples, marchés, sites historiques – pour nourrir les échanges.

La franc-maçonnerie, forte de ses 300 ans d’histoire et de ses 180 000 membres en France (Hamon, 2020), trouve dans ce voyage une expression moderne de son universalité. Que vous soyez apprenti curieux ou maître aguerri, cette croisière est une occasion rare de tisser des liens avec des maçons du monde entier, tout en découvrant des terres où l’Orient rencontre l’Occident dans un dialogue millénaire.

Pourquoi embarquer ?

À partir de 1 779 € par personne (cabine intérieure double, hors vols), cette croisière allie luxe abordable et profondeur spirituelle. Les forfaits incluent la pension complète, les activités maçonniques et certaines excursions, avec des options personnalisables pour les escales prolongées. Réservez vite : les places, limitées, s’envolent comme des parchemins au vent.

Du 30 janvier au 14 février 2026, le Costa Serena ne sera pas qu’un navire : il deviendra un temple flottant, un lieu où les émotions orientales guideront les âmes orientées vers la lumière. Très loin de la France ou au cœur de vos aspirations, embarquez pour une expérience qui marie l’équerre et le compas à l’appel de l’Asie. Pour plus d’informations, contactez le Cannes Cercle Azuréa ou Costa Croisières – l’Orient vous attend.

INSCRIPTION IMPÉRATIVE par téléphone au + 33 1 800 37974 ou par mail à reservation@fr.costa.it

« Le Petit Cheval Sauvage : Quête et réussite d’un autodidacte » – Une odyssée humaine, républicaine… et maçonnique

Dans Le Petit Cheval Sauvage, Yoann Laurent-Rouault signe une biographie vibrante et intimiste de Jean-Luc Cadeddu, un homme aux multiples facettes – autodidacte, romancier, musicien, élu local, franc-maçon et humaniste. Publié en janvier 2025 par JDH Éditions, ce livre de 160 pages ne se contente pas de retracer une vie : il dresse le portrait d’un « petit cheval sauvage » – traduction littérale du nom sarde Cadeddu – dont l’énergie indomptable et la quête de sens résonnent comme une ode à la résilience, à l’apprentissage et à la fraternité. Sous la plume habile de Laurent-Rouault, cette histoire personnelle devient un miroir de la France du XXe siècle, de ses migrations, de ses bouleversements et de ses espoirs.

Jean-Luc Cadeddu : un homme aux racines profondes

Né le 1er novembre 1948 à l’hôpital Boucicaut, dans le 15e arrondissement de Paris, Jean-Luc Cadeddu est le fruit d’une lignée d’immigrés italiens ayant fui le fascisme mussolinien dans les années 1930. Ses grands-parents paternels, Pilola et Baptiste Cadeddu, originaires d’Iglesias en Sardaigne, et ses grands-parents maternels, venus du Piémont, incarnent cette vague migratoire qui a façonné la France moderne – près de 3,5 millions d’Italiens entre 1870 et 1940, selon les estimations historiques (INED, 2020). Baptiste, un « gentil anarchiste » aux idéaux libertaires, nomme ses enfants Violette, Esmeralda et Libero – des prénoms symboliques d’une famille éprise de liberté et de rébellion douce.

Cadeddu grandit dans une France en reconstruction, celle des années 1950 et 1960, entre Noisy-le-Sec et Maisons-Alfort, dans une maison héritée d’une exposition universelle. Fils d’un staffeur des studios des Buttes-Chaumont et d’une employée administrative, il incarne le « titi parisien » – espiègle, vif, et porté par une curiosité insatiable. Autodidacte assumé, il quitte l’école avec un BEPC en poche, mais refuse de se limiter à ce destin modeste. « J’ai vite compris que le manque de culture m’empêchait de saisir ce que des gens plus érudits me disaient », confie-t-il dans un entretien retranscrit par Laurent-Rouault (p. 133). Ce constat devient le moteur d’une vie d’apprentissage hors des sentiers académiques.

Une vie en deux actes : rock’n’roll et érudition

Le livre se divise en deux parties distinctes, comme les deux visages d’un même homme. La première, « Rock’n’roll attitude », plonge dans la jeunesse vibrante de Cadeddu. Adolescent des Sixties, il tombe amoureux du rock’n’roll américain – Elvis, les Beatles, les Stones – et apprend la guitare dans un garage avant de monter sur scène avec son groupe amateur. « J’ai toute une collection de guitares aujourd’hui… elles font partie de la vie », raconte-t-il (p. 29). Cette passion musicale, qu’il n’abandonnera jamais, symbolise une liberté juvénile face à une société encore marquée par l’austérité de l’après-guerre.

La deuxième partie, « L’autodidacte qui voulait devenir érudit », explore sa métamorphose. Du service militaire en Allemagne en 1968 à son rôle d’adjoint au maire de Maisons-Alfort, Cadeddu se réinvente. Il devient romancier avec Les Enquêtes du commandant Icare, un polar à succès publié en feuilleton dans Le Journal de France (Lafont Presse) puis en livre chez JDH Éditions, illustré par Laurent-Rouault. Historien amateur, il produit des podcasts sur la Révolution française et des chroniques pour Spécial Histoire. Son engagement maçonnique, détaillé plus loin, complète ce portrait d’un homme en quête de sens et de connexion.

Le Franc-maçon : un bâtisseur d’humanité

Un chapitre clé de la biographie, « Qu’est-ce que la franc-maçonnerie ? » (p. 59), suivi de l’« Entretien maçonnique avec Jean-Luc Cadeddu » (p. 74), éclaire l’engagement de Cadeddu dans la franc-maçonnerie, une facette essentielle de son identité. Initié dans les années 1980 – une période probable compte tenu de son parcours et de l’essor des obédiences mixtes ou progressistes en France –, il rejoint le Grand Orient de France (GODF), vu son attachement aux valeurs républicaines et son goût pour une « franc-maçonnerie moderne et décomplexée » (p. 145).

La franc-maçonnerie, née en 1717 à Londres et implantée en France dès 1728, compte aujourd’hui environ 180 000 membres dans l’Hexagone, répartis entre diverses obédiences (Hamon, 2020, pp. 45-67). Pour Cadeddu, elle n’est pas un simple réseau d’influence, mais un espace de réflexion et de fraternité. « En franc-maçonnerie, lorsqu’un apprenti dit qu’il sait, on lui rétorque qu’il ne sait rien », rapporte-t-il dans l’entretien (p. 136), une maxime qui reflète son humilité et sa quête d’apprentissage perpétuel. Passé du grade d’apprenti à celui de maître – et peut-être plus, bien que le texte reste discret sur son degré –, il voit dans les rituels maçonniques un écho à son parcours autodidacte : une progression par étapes, fondée sur l’écoute, la patience et la transmission.

Son engagement s’inscrit dans une tradition française où la maçonnerie a souvent joué un rôle politique et social. Du XVIIIe siècle, avec des figures comme Voltaire, aux débats sur la laïcité sous la IIIe République, les loges ont été des creusets d’idées progressistes (Pöhlmann, 2017, pp. 89-112). Cadeddu, élu local et républicain convaincu, y trouve une continuité avec ses valeurs. « La fidélité, je la retrouve systématiquement, ou presque, en franc-maçonnerie, surtout dans les rapports de parrainage », confie-t-il (p. 139), soulignant le lien maître-apprenti comme un modèle de loyauté rare dans une société qu’il juge individualiste.

Laurent-Rouault enrichit ce chapitre d’un contexte historique : la répression sous Vichy, qui força les maçons dans la clandestinité, et la renaissance post-1945, marquée par des figures comme Pierre Mendès France, membre du GODF. Cadeddu, avec son passé d’immigré antifasciste, incarne cette résilience maçonnique. Ses conférences sur l’histoire et ses podcasts – notamment Histoire de la Révolution française : J’y étais ! – pourraient même refléter des travaux en loge, où l’étude symbolique et historique est centrale. Bien que le texte ne précise pas son obédience, son plaidoyer pour une maçonnerie « décomplexée » suggère une vision ouverte, peut-être influencée par des courants mixtes ou libéraux, comme ceux de la Grande Loge Mixte de France (GLMF), dirigée en 2024 par Félix Natali (cf. article précédent).

Une plume au service d’une vie

Yoann Laurent-Rouault, biographe, illustrateur et plasticien breton, apporte à ce récit une sensibilité artistique et une rigueur narrative. Rencontré en 2023 à La Baule grâce à l’éditeur Jean-David Haddad, Cadeddu séduit immédiatement Laurent-Rouault par son charisme et son parcours atypique. « Je n’avais jamais rencontré de personnage similaire », écrit-il dans sa note d’intention (p. 9). Le biographe se voit comme un « confesseur » et un « narrateur », laissant Cadeddu raconter son histoire tout en y insufflant des contextes historiques et culturels – l’immigration italienne, les Trente Glorieuses, Mai 68, et ici, la franc-maçonnerie.

Le style de Laurent-Rouault oscille entre lyrisme et simplicité. Il excelle dans les descriptions vivantes – le garage où résonnent les premières notes de guitare, les rues de Paris sous tension migratoire, le silence d’un temple maçonnique – et dans les citations en italique de Cadeddu, qui donnent une voix authentique au texte. « La volonté d’intégration et le respect du pays d’accueil sont primordiaux pour tout migrant voulant s’installer », déclare-t-il (p. 19), un propos qui reflète son attachement à la République et son rejet des clivages identitaires modernes.

Une fresque historique et intime

Le Petit Cheval Sauvage n’est pas qu’une biographie : c’est une fresque de la France du XXe siècle vue à travers les yeux d’un homme ordinaire devenu exceptionnel. Les chapitres explorent des thèmes universels : l’immigration et l’intégration, avec les épreuves des Cadeddu face à l’italophobie des années 1930 ; la quête de savoir, incarnée par un autodidacte qui lit Le Monde pour combler ses lacunes ; la franc-maçonnerie comme quête spirituelle et sociale ; et l’amour, célébré dans l’addendum dédié à Marie Maitre, artiste et compagne rencontrée sur Facebook en 2023. « Elle est ma muse, mon inspiration », confesse-t-il (p. 143), dans un passage émouvant qui clôt le récit sur une note personnelle.

Le livre s’adresse aussi à la jeunesse, avec une « Lettre à la jeunesse » (p. 129) et un entretien final (p. 132-140) où Cadeddu distille ses conseils : lire voracement, écrire pour retenir, rester humble, fidèle et patient. « La fidélité est une valeur qui se perd », déplore-t-il (p. 138), un regret teinté de nostalgie pour une époque où les liens humains semblaient plus solides, un thème qu’il relie à son expérience maçonnique.

Forces et limites

La force de l’ouvrage réside dans sa capacité à mêler petite et grande histoire. Laurent-Rouault contextualise brillamment les migrations italiennes, les bouleversements des années 1960, l’engagement maçonnique, et l’évolution des valeurs républicaines, tout en laissant Cadeddu briller par sa simplicité et sa détermination. Les amateurs de récits initiatiques y trouveront une inspiration, tandis que les passionnés d’histoire sociale et maçonnique apprécieront les digressions érudites.

Quelques limites émergent toutefois. Le récit, limité à 160 pages, laisse certains aspects en suspens – la carrière politique de Cadeddu aurait mérité plus de détails, malgré le chapitre maçonnique étoffé. Les lecteurs avides d’approfondissements sur Les Enquêtes du commandant Icare resteront sur leur faim, bien que la bibliographie annonce un troisième tome imminent. Enfin, le ton parfois laudatif du biographe pourrait agacer ceux qui préfèrent une distance critique.

Un témoignage pour aujourd’hui

Publié en 2025, Le Petit Cheval Sauvage arrive dans un monde en crise – économique, identitaire, écologique – où les parcours comme celui de Cadeddu semblent d’un autre temps. Pourtant, son message est intemporel : l’éducation, la persévérance et la fraternité – maçonnique ou non – peuvent transcender les origines et les obstacles. « Se renouveler sans cesse » (p. 139), tel est son credo, un appel à la jeunesse autant qu’un bilan de vie.

Avec sa couverture signée Cynthia Shonpa et Laurent-Rouault, ce livre s’impose comme un objet littéraire soigné, porté par une maison d’édition, JDH, qui mise sur les récits humains et historiques. À mi-chemin entre témoignage et méditation, il séduira ceux qui cherchent dans les vies singulières des leçons universelles. Jean-Luc Cadeddu, ce « petit cheval sauvage », galope encore, et son histoire – maçonnique, républicaine, humaine – mérite d’être lue, très loin de la France ou au coin de votre librairie préférée.