De notre confrère chilien elzorronortino.cl
Depuis plusieurs mois, la région d’Atacama, au Chili, est le théâtre de débats intenses autour des liens présumés entre le Frente Amplio, un conglomérat politique de gauche, et la franc-maçonnerie, notamment la Grande Loge du Chili. Ces allégations, relayées par le média régional El Zorro Nortino, ont suscité un vif émoi, tant au sein des cercles politiques que parmi les citoyens, en raison des implications potentielles sur la transparence et l’intégrité des institutions publiques. Cet article se propose d’explorer ces accusations, d’examiner les preuves disponibles, et de contextualiser cette controverse dans le cadre plus large des dynamiques politiques et sociales chiliennes.
Contexte politique et rôle du Frente Amplio à Atacama

Le Frente Amplio, coalition de partis progressistes fondée en 2017, s’est imposé comme une force politique majeure au Chili, notamment sous l’impulsion de figures comme le président Gabriel Boric, membre du parti Convergencia Social, une des composantes du Frente Amplio. À Atacama, une région marquée par des enjeux économiques liés à l’exploitation minière et des défis sociaux persistants, le Frente Amplio a cherché à consolider son influence, notamment à travers des alliances stratégiques et un discours axé sur la justice sociale et la lutte contre la corruption.
Cependant, cette montée en puissance a également attiré des critiques, notamment en raison de soupçons de favoritisme et de réseaux d’influence opaques. Ces accusations ont pris une tournure particulière avec les révélations sur des liens présumés entre des figures locales du Frente Amplio et la franc-maçonnerie, une organisation historiquement influente au Chili, mais souvent entourée de mystère et de controverses.
Les allégations de liens avec la franc-maçonnerie

Selon un article publié par El Zorro Nortino, une figure centrale du Frente Amplio à Atacama, Nora Montero, surnommée « la profe », serait au cœur de ces liens présumés. Montero, ancienne candidate au Conseil Régional (CORE) pour la province de Copiapó et mentor politique au sein de Convergencia Social, est accusée d’avoir des connexions étroites avec la Grande Loge du Chili. Plus précisément, des sources anonymes au sein de la franc-maçonnerie affirment qu’elle aurait été ou serait encore membre du centre féminin du club Copiapó de la loge « Ordre et Liberté Numéro 3 ».
En outre, l’article met en lumière le mariage de Nora Montero avec José Gastón Retamal Belmar, un homme qui, selon les mêmes sources, détiendrait un « diplôme de maître » au sein de la « Chaîne Fraternelle Caldera n° 218 », une autre loge maçonnique. Ces informations, bien que publiques en ce qui concerne l’acte de mariage, reposent sur des témoignages anonymes pour ce qui est de l’appartenance maçonnique, ce qui soulève des questions sur leur véracité et leur impartialité.
Réactions et implications politiques
Ces révélations ont provoqué des remous, notamment parmi les opposants politiques du Frente Amplio et certains membres de la franc-maçonnerie qui s’opposent à la gestion actuelle de la région sous le gouvernement de Gabriel Boric. Pour ces derniers, ces liens présumés renforcent les soupçons de « protectionnisme » au sein des institutions publiques, notamment dans le cadre des enquêtes sur les « cas convenios » – des scandales de corruption impliquant le transfert de fonds publics à des fondations liées à des partis politiques, y compris le Frente Amplio.
Un point particulièrement controversé concerne le rôle de Tomás Garay, SEREMI (Secrétaire Régional Ministériel) de la Justice à Atacama et membre actif du Frente Amplio. Son implication dans des postes clés de l’administration régionale alimente les spéculations sur un éventuel conflit d’intérêts, notamment en ce qui concerne la lenteur des enquêtes sur les cas convenios. Deux ans après le début de ces scandales, aucune accusation formelle n’a été portée dans la région, ce qui alimente les théories de protectionnisme et de trafic d’influence.
Le propriétaire de El Zorro Nortino, dans une déclaration citée dans l’article, va plus loin en accusant directement des membres de la magistrature, des fonctionnaires publics et des politiciens locaux d’être impliqués dans un réseau de corruption orchestré par des francs-maçons et des figures du Frente Amplio. Ces accusations, bien que graves, ne sont pas étayées par des preuves concrètes, ce qui limite leur portée juridique et médiatique.
La franc-maçonnerie au Chili : un acteur historique influent
Pour comprendre la portée de ces allégations, il est essentiel de replacer la franc-maçonnerie dans son contexte historique et social au Chili. Fondée en 1862, la Grande Loge du Chili est une des organisations maçonniques les plus anciennes et influentes d’Amérique latine. Historiquement, elle a joué un rôle clé dans la promotion des idées libérales, la laïcité et la modernisation de l’État chilien, notamment au XIXe et au début du XXe siècle. De nombreuses figures politiques, intellectuelles et économiques de premier plan ont été membres de la franc-maçonnerie, ce qui a contribué à forger son image de réseau de pouvoir.
Cependant, cette influence a également alimenté des théories du complot et des accusations d’élitisme, en particulier dans des contextes de crise politique ou de scandales. La franc-maçonnerie, par sa nature discrète et ses rituels confidentiels, est souvent perçue comme un symbole d’opacité, même si ses membres insistent sur son caractère philanthropique et philosophique, axé sur l’amélioration personnelle et la tolérance, comme le soulignent certains témoignages dans des médias tels que La Rioja.
Une analyse critique des preuves
Si les allégations relayées par El Zorro Nortino sont graves, elles souffrent de plusieurs faiblesses. Tout d’abord, elles reposent en grande partie sur des témoignages anonymes, ce qui limite leur crédibilité en l’absence de corroboration indépendante. Ensuite, l’appartenance à la franc-maçonnerie, même si elle était avérée, ne constitue pas en soi une preuve de corruption ou de trafic d’influence. Enfin, les accusations portées par le propriétaire du média, qui se présente comme victime de persécution politique, pourraient être motivées par des biais partisans, notamment dans un contexte de polarisation politique au Chili.
Cela dit, il est indéniable que les scandales des cas convenios, qui impliquent des transferts de fonds publics à des fondations liées à des partis politiques, soulèvent des questions légitimes sur la transparence et la gouvernance. À Atacama, ces affaires ont mis en lumière des irrégularités dans les processus d’attribution de contrats, notamment sous la supervision de figures comme Rocío Díaz, SEREMI du MINVU (Ministère du Logement et de l’Urbanisme), elle-même membre du Frente Amplio. Ces irrégularités, documentées par des rapports de la Contraloría General de la República, alimentent les soupçons, même si aucune preuve directe n’établit un lien entre ces affaires et la franc-maçonnerie.
Perspectives et débats
Cette controverse soulève des questions plus larges sur la transparence des réseaux d’influence au Chili, qu’ils soient politiques, économiques ou sociaux. D’un côté, les défenseurs du Frente Amplio et du gouvernement Boric pourraient arguer que ces accusations sont une tentative de discréditer un projet politique progressiste dans une région stratégique. De l’autre, les critiques estiment que l’absence de progrès dans les enquêtes sur les cas convenios et la présence de figures du Frente Amplio à des postes clés alimentent un sentiment d’impunité.
Pour aller plus loin, il serait nécessaire de mener des enquêtes indépendantes, notamment par des organes comme la Contraloría ou le Ministère Public, afin de clarifier les allégations de protectionnisme et de trafic d’influence. Par ailleurs, une réflexion sur le rôle des organisations comme la franc-maçonnerie dans la sphère publique pourrait contribuer à apaiser les tensions et à renforcer la confiance des citoyens dans les institutions.
Conclusion
Les liens présumés entre le Frente Amplio Atacama et la franc-maçonnerie, bien que médiatisés et controversés, restent pour l’heure non prouvés de manière concluante. Si les scandales des cas convenios soulignent des failles réelles dans la gouvernance régionale, les accusations portées contre Nora Montero et d’autres figures du Frente Amplio doivent être traitées avec prudence, en raison du manque de preuves solides et du contexte de polarisation politique. Cette affaire illustre les défis auxquels le Chili est confronté dans sa quête de transparence et de justice, tout en mettant en lumière les tensions entre les récits officiels et les critiques alternatives.
Note : Cet article s’appuie sur des informations disponibles dans des sources publiques, notamment des articles de El Zorro Nortino et d’autres médias chiliens. Toutefois, en raison des limites des preuves et de la nature sensible des allégations, il est crucial de poursuivre les investigations pour établir la vérité.
Connaissant bien le Chili il faut faire attention à se qui s,ecrit dans la presse en majorité de droite et d’extrême droite qui voit des conspiration de gauche et “communistes”un peu partout.Que beaucoup de politiciens anciennement étaient membre de la Franc maçonnerie est un fait,le président Allende était maçon a la grande loge du Chili mais aussi beaucoup de ses ministres.Quand au dictateur Pinochet il abandonne très vite et ne passe pas le grade d’apprenti.Comme dans toutes les dictatures la Franc maçonnerie souffrira sous la dictature.