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Pas de Franc-maçonnerie sans symbolisme

Dans les salles voûtées des loges maçonniques, où les murmures des siècles se mêlent aux reflets des symboles, une confusion persiste souvent entre deux notions fondamentales : le symbole et le signe. Certains les considèrent comme des synonymes, une erreur que cette réflexion se propose de dissiper. Bien que complémentaires dans certains contextes, ces deux concepts remplissent des fonctions distinctes, enracinées dans des origines étymologiques et des intentions différentes.

Cette exploration, audacieuse mais mesurée, comme une bourrasque printanière, vise à éclaircir ces distinctions, tout en invitant les esprits plus éclairés à enrichir ce travail. Si, par inadvertance, je devais décevoir certains d’entre vous, je vous présente d’ores et déjà mes excuses les plus sincères. Plongeons dans cette quête initiatique pour mieux comprendre la voie maçonnique.

I. Le Signe : Un Guide Profane et Fonctionnel

Définition et Origine

Le signe, dans son essence, est un indicateur extérieur, un outil destiné à guider, à transmettre une information claire et pragmatique. Son étymologie, puisée dans les racines indo-européennes liées au verbe « suivre », souligne cette fonction directrice. Les chiffres, les lettres, les panneaux de circulation, les devises – tous relèvent de cette catégorie. Ils nous orientent vers une destination, un sens, sans porter en eux une profondeur métaphysique.

Certains pourraient objecter : « Et les nombres 3, 5, 7 dans nos rituels ? Ne sont-ils pas des chiffres ? » Ma réponse est catégorique : non, ce ne sont pas de simples signes, mais des nombres symboliques, enveloppés de mystère selon nos traditions. Ces nombres transcendent leur fonction indicative pour évoquer des réalités spirituelles, une nuance que nous explorerons plus loin.

Limites du Signe

Main sur la Bible lors du serment

Même lorsqu’ils pointent vers un lieu sacré, les signes restent ancrés dans le profane. Prenons des exemples concrets : les mots de semestre en maçonnerie, le serment prononcé au tribunal avec le « Je le jure », ou encore les gestes rituels – ces éléments portent une signification sacrée, mais ne recèlent pas d’essence propre. Ils servent de substituts verbaux ou visuels, dépourvus de conscience spirituelle. Pour illustrer cette idée, je me permets de rappeler une planche antérieure où j’avais évoqué les gâteaux « Petit Lu ». Avec leurs 4 oreilles (comme les 4 saisons), 52 dents (comme les 52 semaines) et 12 trous (comme les 12 mois), ces motifs pourraient sembler symboliques. Pourtant, ils restent des signes, car ils ne sont pas habités par une valeur ou une essence spirituelle. Si, par une volonté collective, tous les temples maçonniques remplaçaient demain le Delta rayonnant par ce biscuit, il deviendrait symbole – non par sa nature intrinsèque, mais par l’intention spirituelle qui l’animerait.

II. Le Symbole : Un Pont vers l’Unité

Une Définition Historique et Spirituelle

Passons maintenant au symbole, cœur battant de la maçonnerie. Issu du grec ancien sumbolon (« mettre ensemble », « joindre », « comparer »), ce terme renvoie à une pratique antique : deux contractants brisaient une poterie en deux morceaux, conservant chacun une partie comme preuve de leur entente. Lors d’une rencontre ultérieure, l’emboîtement parfait des fragments scellait leur volonté commune. Le symbole, ainsi, est un outil de réunion, un appel à « rassembler ce qui est épars », un travail d’unité autour d’un centre.

À l’opposé, la division trouve son expression dans le mot « diable » (diabolos), qui sépare, désunit. Les religions, cherchant à consolider leur pouvoir, ont souvent remplacé le symbole par l’image de Dieu, posant le diable – puis Lucifer, l’ange déchu et porteur de lumière – comme son antagoniste. En maçonnerie, cette dualité se manifeste dans la tension entre Lumière et Ténèbres. Imaginons un point central entouré de 360 points : la Lumière est unique, les Ténèbres multiples. Même en superposant trois cercles de 1080 points, le centre reste un, indivisible. Entre ce centre et la périphérie s’affrontent deux forces : le diabolos qui divise, et le sumbolon qui unit, oscillant comme les deux faces d’une pièce en rotation.

Le Travail Maçonnique : Trouver l’Équilibre

Thich Nhat Hanh

La maçonnerie, outil neutre et objectif, invite à transcender cette dualité sans s’y opposer ni se comparer. Elle guide vers le centre, l’harmonie, au-delà des trois complexes identifiés par Thich Nhat Hanh : supériorité, infériorité, et – trop fréquent en loge – égalité. Le chemin vers l’unité est solitaire, un « Pas Sage » effectué dans le vide central, qu’il faut apprendre à aimer. Comme le soulignait Oscar Wilde : « Soyez vous-même, les autres sont déjà pris. »

En loge, cette quête commence avec l’Apprenti au Septentrion, mot latin signifiant « les 7 bœufs de labour ». Il doit labourer sa terre intérieure, un processus alchimique de solve et coagula – dissolution et coagulation –, semblable à la mort du grain de blé pour sa renaissance. Face à lui, le Midi réunit, car à midi, l’ombre portée est minimale, symbolisant la verticalité et l’unité solaire, ce point central tant recherché.

Une Danse Symbolique en Loge

Observons le Frère ou la Sœur Maître des Cérémonies, armé(e) d’une canne, ouvrant la voie avec une énergie féminine, attirant comme la Lune. Derrière, le Frère ou la Sœur Expert, avec son épée, pousse avec une force masculine, comme le Soleil. Le maçon, lien central, doit se tenir entre ces deux polarités, en rectitude, aligné comme le fil à plomb du V.I.T.R.I.O.L. Chez les Égyptiens, le pharaon incarnait cette unité en croisant les bras : dans sa main gauche, le sceptre Heka (crochet, féminin, recevant), dans sa droite, le fouet flagellum (masculin, donnant). Lors de la chaîne d’union, l’énergie dextrogyre – passant à gauche et revenant à droite – célèbre ce mariage des opposés, une alchimie des contraires.

III. L’Égrégore : Un Réveil Intérieur, Pas une Fusion Collective

Carl Gustav Jung

La loge baigne dans ces énergies symboliques, où rien n’est neutre. Nous y venons pour nous initier – commencer le chemin intérieur – et, avec persévérance, atteindre l’égrégore. Ce terme, souvent mal compris comme un esprit collectif à la Jung, est une erreur. Issu du grec egrègoraô (« faire lever », « éveiller »), l’égrégore désigne un réveil personnel, un alignement vertical, non une réunion rassurante. La maçonnerie n’est ni un sport d’équipe, ni une thérapie pour panser les blessures de l’âme, ni un centre de formation idéologique. Contrairement au coaching – héritier des cochers guidant des coches –, elle est une voie solitaire où la fraternité soutient, sans accompagner. Le centre n’accueille qu’une seule place.

IV. Une Réflexion sur la Pratique Maçonnique

Les Pièges de l’Intellectualisme

J’invite maintenant vos lumières : comment une franc-maçonnerie axée sur des débats intellectuels – laïcité, fin de vie, OGM avec des intervenants parfois superficiels – pourrait-elle mener à l’unité et à l’éveil ? Ces discussions, si distrayantes soient-elles, encouragent la division, le diabolos, loin de la sagesse maçonnique. Une tenue peut s’achever sur un consensus après deux heures de négociation, mais le mois suivant, un nouveau thème relance la discorde. Où est l’harmonie dans cette gymnastique mentale ?

Une Diversité à Préserver

Je n’impose pas une maçonnerie symboliste aux 160 000 maçonnes et maçons de France. Beaucoup démissionneraient par incompatibilité, et tous ne sont pas prêts à en saisir les arcanes, exigeant patience et travail. Dans une société avide de vitesse, beaucoup préfèrent le superficiel, courant après les grades ou les plateaux comme d’autres chassent l’argent – un veau d’or moderne. Chacun doit pratiquer selon sa capacité, mais gare à ce que la médiocrité ne ternisse pas l’Art Royal, évitant ainsi le sort de certaines églises vidées de leur symbolisme, réduites à des dogmes nostalgiques.

Une Transmission Exemplaire

Que les Maîtres, nourris de symbolisme, transmettent par leur exemplarité le sens profond de notre pratique. Ainsi, chaque Frère ou Sœur pourra un jour déclarer : « Chaque matin, je sens cet alignement en moi, me reliant aux trois règnes – minéral, végétal, animal – et à mon essence. » Alors, oui, le maçon travaillera à l’amélioration de l’humanité, libre, ambassadeur de l’univers, unissant pieds sur terre, tête dans les étoiles, et mains dans une chaîne d’union universelle.

Le serment maçonnique

Dans l’enceinte sacrée d’une loge, où les murmures des siècles résonnent sous la voûte étoilée, j’ai choisi d’aborder un sujet aussi rare qu’inhabituel en franc-maçonnerie : le serment. Ce thème, peu souvent exploré dans nos travaux, demande une approche prudente, compte tenu du temps limité dont nous disposons. Pourtant, je m’autoriserai quelques audaces, une bourrasque printanière en somme, avec l’espoir que des esprits plus éclairés que le mien apporteront leurs lumières pour enrichir cette réflexion.

Si, par inadvertance, je venais à décevoir certains d’entre vous, je vous présente par avance mes excuses les plus sincères. Ce voyage initiatique, à travers l’historique, la définition et la spécificité du serment maçonnique, vise à éclairer son rôle d’outil de liberté, de fidélité à la tradition et d’engagement librement consenti.

I. Comprendre le Serment : Définition et Enracinement Historique

Qu’est-ce qu’un Serment ?

Le Serment (Dionysos Tsokos, 1849) illustre une cérémonie d’initiation : le pope semble être Grigórios Phléssas, le combattant Theódoros Kolokotrónis.

Le mot « serment » tire ses racines du latin sacramentum, signifiant « sacré ». Le sacré, par essence, inspire un respect profond, une vénération, et revêt un caractère inviolable. Un serment est ainsi une affirmation solennelle, un jurement, une promesse prononcée en invoquant une entité ou un objet sacré – qu’il s’agisse d’une divinité, d’un symbole moral ou d’un gage de bonne foi. Prononcé en public, il devient un témoignage de sincérité et de fidélité envers ceux qui le reçoivent, un engagement irrévocable.

Universel à travers les âges et les civilisations, le serment se structure généralement en trois parties distinctes :

  1. L’invocation (invocare, appeler à l’aide), une prière adressée à une divinité ou une puissance garante.
  2. La promesse (promissa, ce que l’on s’engage à faire), cœur de l’engagement.
  3. L’imprécation (imprecatio, souhait de malheur), qui énonce les sanctions encourues en cas de parjure.

Cette triade, vieille comme le droit lui-même, repose sur un principe juridique ancestral : nul engagement n’a de force sans sanction. Dès l’Antiquité, les châtiments imaginés étaient aussi variés que cruels – Charlemagne ordonnait la mutilation de la main, tandis que les rituels maçonniques évoquaient des supplices comme la gorge tranchée ou la langue arrachée, symboles d’une rupture morale et spirituelle.

Un Pilier de Confiance à Travers l’Histoire

2 mains posées sur le Bible pour le serment

Depuis la nuit des temps, les sociétés humaines, comme les individus, ont eu besoin de confiance pour s’organiser, entreprendre et préserver leurs acquis – sociaux, culturels, religieux ou initiatiques. Cette confiance, moteur de notre distinction du monde animal, s’est souvent cristallisée autour du serment. Quelques exemples illustrent cette universalité :

  • Au Moyen Âge, un marché se concluait par une poignée de main sur le champ de foire, avec l’adage « cochon qui s’en dédit ».
  • Dans le système féodal, le vassal prêtait allégeance au suzerain, la félonie étant la pire des trahisons.
  • En 1789, les révolutionnaires du serment du Jeu de Paume affirmèrent leur détermination face au marquis de Dreux-Brézé : « Dites à votre Maître, nous sommes ici par la volonté du peuple, nous n’en sortirons que par la force des baïonnettes. »
  • Le citoyen témoigne sous serment de dire « la vérité, toute la vérité », sous peine de faux témoignage.
  • Le serment d’Hippocrate guide les médecins, tandis qu’aux États-Unis, les immigrants prêtent serment sur la Bible et le drapeau.
  • Dans les sociétés primitives, le pacte de sang scellait une fraternité indéfectible, et même le Christ, dans l’humilité, offrit son sang comme symbole ultime.
  • Les chevaliers, par l’adoubement, juraient fidélité à leur ordre.

Pour arracher un sourire fraternel, évoquons aussi le serment de l’ivrogne ou du joueur, aussi légers que des vapeurs d’alcool, ou encore les serments d’amour, souvent aussi éphémères qu’un souffle. Ces exemples, qu’ils soient graves ou ludiques, soulignent un objectif commun : garantir une déclaration sur un fait passé, une promesse pour l’avenir. Le serment maçonnique, avec son caractère promissoire, s’inscrit dans cette lignée, mais avec une spécificité qui le distingue.

II. Le Serment Maçonnique : Un Acte de Transformation

Un Moment Clé de l’Initiation

Le serment maçonnique occupe une place centrale, pour ne pas dire primordiale, dans la cérémonie d’initiation. Il provoque un bouleversement mental, des modifications cognitives et des évocations d’états d’être inédits. Solennel par sa dénomination, il se déploie en plusieurs étapes entrelacées, marquant un passage irréversible.

Les Étapes du Serment

  1. Le Cabinet de Réflexion : Avant même la cérémonie, l’impétrant rédige un testament philosophique, incluant un engagement écrit envers l’Ordre, signé en pleine conscience – comme le rappelait Corneille, « quiconque écrit s’engage ».
  2. Les Avertissements Progressifs : Le Vénérable Maître, depuis sa chaire, interroge à plusieurs reprises l’impétrant, le prévenant des étapes à venir et des engagements croissants, jusqu’à l’avertissement final : au-delà, il ne pourra plus se rétracter.
  3. La Coupe d’Amertume : Une libation symbolique, empreinte de remords, scelle un nouvel engagement.
  4. Les Épreuves : À travers les épreuves de l’air, de l’eau et du feu, l’impétrant réitère son acceptation.
  5. Le Serment Solennel : Agenouillé à l’autel des serments, les yeux bandés, il prononce :
    « Moi …, de ma propre et libre volonté, en présence du GADLU et de cette respectable loge de Francs-Maçons, je jure et promets solennellement et sincèrement de ne jamais révéler aucun des mystères de la Franc-Maçonnerie qui vont m’être confiés et de ne m’entretenir qu’avec de bons et légitimes maçons ou dans une loge régulièrement constituée. Je promets d’aimer mes FF:., de les secourir, de leur venir en aide en toute circonstance. Aussi, je préfèrerais avoir la gorge coupée et la langue arrachée plutôt que de manquer à mon serment et d’être rejeté comme parjure. »

Une Gestuelle Chargée de Symboles

Bible et 3 grandes Lumières
Bible ouverte avec équerre, compas dans le Temple. Serment

Ce serment, prononcé à l’autel des serments – au pluriel, en prévision des degrés futurs –, s’accompagne d’une gestuelle unique. L’impétrant, en pantoufles, agenouillé sur une jambe formant une équerre, pose la main droite sur le Volume de la Loi Sacrée et tient le compas, branches ouvertes à 90°, une pointe sur le cœur, l’autre vers le ciel. Ce geste unit matière et esprit, invoquant le GADLU comme créateur sacré. Le compas devient une antenne, offrant l’âme pour recevoir la lumière qui forge un homme nouveau. Dante, évoquant la Divinité, écrivait : « Celui qui par son compas marque les limites du monde et règle dedans tout ce qui se voit et tout ce qui est caché. » Cette appartenance, paradoxalement, se vit comme « une liberté perdue pour une liberté éternelle ».

Le bandeau retiré, l’impétrant découvre les épées pointées vers lui et le parjure, allongé sur un drap noir, tête vers l’occident, sans gants ni tablier, un linge sanglant sur le cœur. Cette image, rare dans les serments profanes, symbolise la mort spirituelle du traître, dont le cœur est « soudé » au GADLU par l’initiation. Un proverbe berbère éclaire cette démarche : « Si tu ne sais pas où tu vas, regarde d’où tu viens. » Le combat hors du temple, pour rester digne de cet engagement « en toute circonstance », devient alors une quête quotidienne.

Les Imprécations : Symbole ou Réalité ?

Les imprécations – gorge tranchée, langue arrachée – intriguent. Aucun apprenti ne croit réellement à leur application littérale aujourd’hui. Mais pourquoi les avoir conservées dans le passage de l’opératif au spéculatif, alors que leur nécessité pratique a disparu ? La réponse réside dans la tradition, ce fil vivant qui relie notre passé à notre avenir. Renoncer à ces racines reviendrait à trahir notre histoire. Ces sanctions, bien que symboliques, structurent notre spiritualité : violer le serment menace notre élévation, nous transformant en nos propres bourreaux. Erasme le disait : « L’Homme ne naît pas, l’Homme il le devient. » Le serment, en révélant nos imperfections, devient un outil de liberté, un devoir de les corriger.

La pénalité de la langue arrachée, liée au signe d’ordre, vise la parole pervertie du parjure. Privé de parole, il ne peut plus donner les mots de reconnaissance ni restituer la parole sacrée, brisant son lien avec le Volume de la Loi Sacrée, où s’ouvre l’Évangile de Jean : « Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu. » C’est seulement après ce serment que l’impétrant, devenu néophyte, est créé, constitué et reçu franc-maçon.

III. Conclusion : Un Chemin vers la Lumière

Prêter serment est un acte rare, que beaucoup ne connaîtront jamais. J’ai tenté de montrer que, contrairement aux engagements profanes – souvent laïcisés, formels et parfois oubliés –, le serment maçonnique, pris sur les trois grandes lumières sous le regard du GADLU, marque la naissance de l’initié. C’est le premier pas vers une reconstruction métaphysique, du matériel vers le spirituel. Un sartrien pourrait dire : « Un homme est ce qu’il fait de lui-même. » Dans ce secret alchimique d’engagements, de promesses et de sanctions, méditons cette phrase de Tolstoï dans Anna Karénine :

« Si ce n’était que la raison pure, ce serait un vêtement de mousseline incapable de protéger du froid. » Que ce serment, vivace à chaque tenue, nous guide avec humilité vers une lumière toujours plus grande.

Le voyage ou la conquête des mondes

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Le voyage est depuis toujours au centre de tous les imaginaires humains. S’appuyant sur les mythes, l’auteur montre en quoi le voyage est par nature  » initiatique  » et au c?ur de la dialectique sédentaire et nomade. Il explore les figures archétypales du voyageur, du chevalier errant, du savant cosmopolite. Il montre en quoi le voyage est une tentative de reliance avec l’altérité, ce qui relie à la fois le ici et le là-bas, ce qui unit ces pôles contradictoires que sont le foyer et l’aventure.

Ainsi le contact avec l’étrange et l’étranger, l’ambiguïté que cela induit, le poly-culturisme que la reliance sociale qui y est inhérente, ouvre à des références diverses et permet d’accéder à une plénitude que le rationalisme et le positivisme ne lui accorde pas : le voyage est une ouverture constante à un ailleurs autrement où  » une présence invisible  » se fait sentir.

AUTEUR

 Michel Maffesoli a construit une oeuvre autour de la question du lien social communautaire, de la prévalence de l’imaginaire et de la vie quotidienne dans les sociétés contemporaines. Directeur de la revue Sociétés, il est également secrétaire général du Centre de recherche sur l’imaginaire et membre du comité scientifique de plusieurs revues internationales, notamment Social Movement Studies, Space and Culture et Sociologia Internationalis.
Michel Maffesoli a reçu le Grand Prix des Sciences humaines de l’Académie française en 1992 pour La transfiguration du politique. Il est vice-président de l’Institut international de Sociologie, fondé en 1893 par René Worms, et membre de l’Institut universitaire de France depuis septembre 2008,

Il est l’auteur d’une quarantaine d’ouvrages, traduits dans une quinzaine de langues dont :
– Le Grand Orient : les lumières sont éteintes
– La franc-maçonnerie peut-elle réenchanter le monde ?
– Apologie : Autobiographie intellectuelle

Valeurs de l’humain et Initiation

Initier, c’est commencer. Le mot vient du latin initium, qui signifie commencement, sens que l’on retrouve par exemple dans le mot français « initial ». Le dictionnaire de l’Académie française donne pour le verbe initier le sens d’amorcer, engager, mettre en œuvre la phase initiale d’un processus.

L’initiation est donc un commencement.

C’est de ce sens premier, primordial, que dérive le sens particulier qui signifie, comme le précise encore le Dictionnaire « Admettre à la connaissance de mystères religieux et à la célébration du culte sacré ». Celui qui est initié entame une nouvelle phase, accède à un nouveau statut.

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Dans de très nombreuses sociétés, l’initiation marque encore de nos jours le passage de l’irresponsabilité de l’enfance aux droits et devoirs de l’âge adulte. On connaît ainsi les rites et les épreuves, les cérémonies, qui marquent l’initiation des jeunes membres de la plupart des tribus du continent africain. Leur initiation fait d’eux des membres à part entière de la société.

Bien qu’il y ait presque toujours une part spirituelle, au cours d’un rituel fondé sur des archétypes mythiques auxquels s’associe l’évocation du divin et du sacré, l’initiation est avant tout un rite de passage profane, qui a ici une fonction d’intégration sociale.

Plus proches de nous non seulement par la géographie mais aussi par le jeu des influences philosophiques et historiques, on peut évoquer ici les initiations de l’ancienne Egypte ou de la Grèce antique.

Les Mystères d’Eleusis étaient les plus importants de ces rites. Le culte sacré se déroulait dans le secret du temple de Déméter, déesse de la fécondité et du cycle des naissances et des morts.

Tout hellène présenté par un parrain pouvait être initié, sous réserve de ne pas être souillé par un meurtre ou toute autre faute grave et notoire. On connaît l’essentiel des rituels de ces initiations, basées sur la symbolique de la mort et de la résurrection.

Surtout, bien qu’il fût possible à tout citoyen grec d’être initié à ces Mystères, ils devaient conserver leur caractère à la fois sacré et secret.

La Grèce antique pratiquait aussi les initiations tribales, ou plutôt civiques. On retrouve également des rites d’initiation parmi les artisans et bâtisseurs admis dans les Collegia fabrorum romains.

Eleusis

Comme leurs devanciers égyptiens et grecs, ils se transmettaient, selon un mode progressif, les secrets des justes dimensions et de la juste orientation des sanctuaires qu’ils érigeaient et décoraient à la gloire des dieux. Ils s’efforçaient de créer le beau et l’harmonieux en respectant les proportions, les angles, les rapports de la Nature elle-même, telle que la divinité les avait déterminés.

Ainsi ce qui était en bas était comme ce qui était en haut. Le microcosme était homothétique au macrocosme.

Quelques siècles plus tard, même si la continuité historique n’est pas parfaitement établie, les bâtisseurs des cathédrales du Moyen-âge ont sans nul doute hérité de ces connaissances sacrées. Ils ont aussi hérité de leur mode de transmission, en en conservant en particulier le caractère progressif.

La transmission se faisait sous le sceau du secret car il convenait que ces connaissances liées à l’essence même du projet divin ne soient pas divulguées à qui n’aurait pas eu qualité pour les connaître.  De nombreux documents attestent que ces bâtisseurs, charpentiers, tailleurs de pierre et autres maçons appartenaient à des associations pratiquant des rituels d’initiation, respectant le secret et faisant vœu de solidarité.

Peu à peu, des membres n’appartenant pas au métier furent co-optés au sein des Loges. Clercs, érudits, membres de la noblesse des villes où s’érigeaient les cathédrales et basiliques, ils avaient à cœur de partager la Connaissance qui gouvernait la construction de l’édifice qu’ils avaient commandité. Ainsi les Loges s’enrichirent-elles de membres « acceptés« .

Dans tous les cas, l’essentiel est ce que l’on nomme le rite, c’est-à-dire un ensemble cohérent constituant un enseignement traditionnel, dispensé de manière progressive et discontinue, formant ainsi, palier après palier, un système à degrés.

La méthode initiatique telle qu’elle est par exemple pratiquée dans toutes les loges maçonniques du monde transmet ainsi graduellement à la fois le fond de l’enseignement – son contenu – et la forme traditionnelle qui véhicule cet enseignement – son contenant -.

Cette forme pluri-centenaire, pluri-millénaire même pour certains de ces composants essentiels, est constituée par les rituels correspondant à chaque degré, à chaque grade. Ainsi, le mode de transmission de la Tradition est lui-même inscrit dans la tradition, et le Rite se pérennise.

En fait, en Franc-Maçonnerie les trois premiers, Apprenti, Compagnon et Maître, tirent leur origine de la tradition initiatique du Métier. Les trente degrés suivants, qui permettent la poursuite du cheminement initiatique au Rite Ecossais Ancien et Accepté, ,sont placés sous la direction d’un Suprême Conseil et empruntent davantage aux traditions spirituelles de l’Orient et de l’Occident, et à la tradition chevaleresque.

Quel que soit le degré qu’il est atteint dans son cheminement, le Franc-maçon progresse selon une démarche initiatique qui est une quête spirituelle lui ouvrant, progressivement, la voie vers la Connaissance.

De quelle connaissance s’agit-il ici ?

De la connaissance de soi et du rapport du soi aux autres et au monde, d’une compréhension, d’une perception à la fois intime et profonde, d’une conscience.

C’est aussi la conscience de l’ordre universel, de l’unité de la Création, du caractère absolu du Un – Tout fondamental que les Francs-maçons appellent la Vérité. C’est la Lumière vers laquelle ils s’efforcent de progresser et qui éclaire leur chemin.

Chaque initiation est un passage, l’ouverture à un nouvel espace de la conscience, de la pensée et de l’action.

Mircea Eliade

Mircea Eliade a pu écrire que philosophiquement, l’initiation équivaut à une modification ontologique du régime existentiel. « Ontologique » signifie « essentielle », « fondamentale » : la modification ontologique qu’évoque Mircea Eliade correspond à une transformation de l’être même dans sa façon de voir, de penser et d’agir le monde.

Ce qui est une manière de dire qu’il y a un avant et un après, que l’initiation est bien un passage, un tournant, une mutation. Elle est une mort à l’état antérieur, immédiatement suivie d’une renaissance à un état nouveau. Chaque initiation transforme celui qui la vit.

Le Grand Architecte de l’Univers à la Gloire duquel travaillent les loges traditionelles est confondu avec Dieu pour les uns, considéré comme un principe métaphysique placé hors du champ des religions pour d’autres, ou encore assimilé à l’Ordre cosmique. Mais en tout état de cause, ce principe unique, universel, intemporel, dépourvu de tout caractère anthropomorphique, est créateur de l’ordre universel, organisateur d’un équilibre, d’une harmonie, qui assurent la cohésion et la cohérence de l’Univers, par-delà les désordres contingents, les agitations locales, les soubresauts et les accidents ponctuels.

C’est de cet Ordre universel que prend peu à peu conscience l’initié, en même temps que de son rôle, de sa mission.

L’initiation est ainsi au cœur même de l’éthique, c’est-à-dire relative aux conduites humaines et aux valeurs qui les fondent.

L’initié s’est un jour résolu à se mettre en chemin.

Le chemin de l’initié demeure un chemin individuel, s’il ne saurait être un chemin solitaire.

Peut-être, si l’on donne à cette expression le sens d’une démarche délibérée, volontaire, d’une détermination à se remettre en question, à aller à la recherche de soi.

En effet, la méthode initiatique va conduire le Maçon à découvrir non seulement l’importance de l’écoute de l’Autre, en invitant l’Apprenti à garder le silence, à se taire pour mieux écouter et mieux entendre, mais aussi et peut-être surtout  le silence intérieur, qui loin d’être une attitude passive et inerte, permet d’être à l’écoute de l’Etre à l’intérieur de soi. Ce silence actif, cet éveil, cette écoute, conduit à l’Etre intérieur, d’où l’on peut percevoir le Tout, le Un, l’Universel. La démarche initiatique est donc une démarche de l’homme en lui-même, pour lui-même. Elle est en même temps une ouverture aux Autres, à leurs différences, à leurs particularités. Et cette progression, qui lui fait prendre conscience de lui-même, l’améliore, le transforme progressivement et transforme en même temps son rapport à l’autre, aux autres, à l’univers entier.

L’initié, étape après étape, degré après degré, va se construire et contribuer avec d’autres à construire le monde autour de lui, bâtir son temple intérieur et participer au Grand Œuvre, concourir à l’édification du temple de l’humanité, et à l’accomplissement du projet que les Francs-maçons attribuent au Grand Architecte de l’Univers.

La démarche initiatique est donc à la fois individuelle et universelle.

En pleine liberté de conscience, en pleine responsabilité, les Francs-Maçons vont travailler sur eux-mêmes, à leur propre perfectionnement en même temps qu’ils vont contribuer au perfectionnement de l’humanité. Ils œuvreront inlassablement, sans avoir besoin de bannière ni de mot d’ordre, sans espérer de récompense ni dans le présent ni dans une hypothétique vie future. Ils travailleront à créer davantage de justice et d’équité, davantage de vérité, davantage de respect de l’autre, de tolérance et d’Amour.

Ils feront vivre ces valeurs qui ne sont hélas pour beaucoup que des paroles vides de sens gravées au fronton de nos édifices publics et auxquelles nous nous vouons solennellement dans nos Loges :  Liberté – Egalité – Fraternité. 

Nous pouvons faire ensemble, assurément, le constat que le monde contemporain est en quête de repères, en quête de sens.

Le monde dans lequel nous vivons court le risque de perdre l’essentiel, que sont les valeurs de l’humain. Il est aussi, ce qui n’est peut-être qu’une manière de dire la même chose, en quête de spiritualité, en comprenant bien que ce principe que nous nommons Grand Architecte de l’Univers nous offre le champ infini d’une spiritualité ouverte, qui ne nous interdit ni ne nous impose aucune appartenance, aucune croyance ni aucune pratique.

Il ne s’agit pas d’arriver à un consensus, plus ou moins sincèrement partagé. Il ne s’agit pas davantage de recevoir une vérité qui aurait été conçue par quelque puissance supérieure. Au contraire, il s’agit, en faisant usage d’une méthode partagée, de donner à chacun l’occasion de progresser vers sa vérité, dans ce qu’elle a d’intime, comme dans sa vision de la vérité universelle. Une telle quête, un tel projet, un tel engagement, dont l’objet est le véritable humanisme compris comme une spiritualité universelle, n’a rien de contingent. Elle est émancipation, conquête progressive de la liberté intérieure.  La voie maçonnique est aussi la voie qui permet en effet à mesure que l’initié progresse, de conquérir sa pleine liberté de conscience, sa pleine liberté de pensée.

Le Franc-maçon n’est pas asservi à une idéologie mais fondamentalement libre, pour créer davantage de liberté donc de responsabilité, et s’approcher de l’homme réalisé, en harmonie avec la Vérité éternelle et universelle. L’initiation, c’est une longue quête qui amène le Franc-maçon, par une démarche progressive, à la recherche du Bon, du Beau, du Vrai et du Juste. Nous sommes donc Maçons pour cultiver en nous et faire rayonner autour de nous des valeurs, des principes moraux susceptibles d’inspirer et de guider nos choix, nos pensées et nos actes.

La Franc-Maçonne ou le Franc-Maçon, au motif que le rituel, les décors, les appellations des Officiers ou les outils de la Loge perpétuent d’antiques traditions, ne saurait être le défenseur d’un passéisme nostalgique, d’un conservatisme poussiéreux. La Franc-Maçonne ou le Franc-Maçon doit inlassablement œuvrer au progrès de l’homme et de la société. Il doit être un homme de son temps, partager les interrogations de son époque, comme par exemple sur la pollution, l’énergie, mais aussi le respect de la différence et de la dignité de chacun. La Franc-Maçonne ou le Franc-Maçon doit être le gardien de l’éthique, le gardien des valeurs de l’humain dans tout ce que le progrès technologique peut apporter qui facilite, démultiplie, voire rend possible ce qui jusque-là semblait impossible.

il y a des principes fondamentaux dont nous avons choisi d’être, à notre place et à notre office, les défenseurs et les garants.

20-21-Sept-25 – Journées Européennes du Patrimoine 2025 : Découvrez les Temples du Droit Humain à Paris

Du site officiel du Droit Humain droithumain-france.org

Les 20 et 21 septembre 2025, les Journées Européennes du Patrimoine offriront une nouvelle occasion de célébrer la richesse culturelle et architecturale de la France, sous le thème national du « patrimoine architectural ». Initiées en 1984 par le ministère de la Culture et placées sous le patronage du Conseil de l’Europe et de la Commission européenne, ces journées ouvrent chaque année des milliers de lieux exceptionnels au public.

Pour leur 42e édition, l’accent sera mis sur les savoir-faire artistiques et techniques qui façonnent nos paysages urbains et ruraux, avec une attention particulière portée au centenaire de l’Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes de 1925, berceau de l’Art déco. Parmi les temps forts, le vendredi 19 septembre sera dédié aux scolaires avec l’opération « Levez les yeux ! », en partenariat avec le ministère de l’Éducation nationale, pour sensibiliser les jeunes à la préservation de ce patrimoine vivant.

Dans ce cadre festif, l’Ordre Maçonnique Mixte International « Le Droit Humain » invite le public à découvrir deux de ses temples parisiens, véritables joyaux architecturaux et symboles de son engagement pour l’égalité et la fraternité. Ces visites, ouvertes gratuitement de 14h00 à 18h00 les samedi 20 et dimanche 21 septembre, promettent une immersion unique dans l’histoire et la spiritualité maçonnique.

Les Lieux à Explorer : Maison Maria Deraismes et Maison Georges Martin

Maison Maria Deraismes – 9, rue Pinel, 75013 Paris

Nommée en l’honneur de Maria Deraismes, pionnière du féminisme et cofondatrice du Droit Humain en 1893, cette maison abrite un temple emblématique. Située dans le 13e arrondissement, elle témoigne de l’engagement de l’Ordre pour l’émancipation des femmes et l’universalité des valeurs maçonniques. Les visiteurs pourront admirer l’architecture intérieure, riche en symboles, et en apprendre davantage sur l’histoire de cette figure marquante, dont l’œuvre a inspiré des générations de francs-maçons et de francs-maçonnes.

Maison Georges Martin – 5, rue Jules Breton, 75013 Paris

Dédiée à Georges Martin, médecin et compagnon de Maria Deraismes, cette seconde adresse complète l’offre de découverte. Ce temple, également situé dans le 13e arrondissement, reflète l’héritage mixte du Droit Humain, où hommes et femmes travaillent ensemble depuis plus d’un siècle. Les espaces, décorés avec soin, invitent à une réflexion sur les rituels et les idéaux portés par l’Ordre, dans un cadre architectural chargé d’histoire.

Un Patrimoine Maçonnique à la Rencontre du Public

Ces deux lieux, habituellement réservés aux membres de l’Ordre, ouvriront leurs portes pour révéler au grand public leur beauté et leur signification. Les temples du Droit Humain ne sont pas de simples bâtiments : ils incarnent une philosophie d’égalité, de liberté et de progrès, inscrite dans la pierre et les symboles qui ornent leurs murs. Les visiteurs pourront profiter de cette occasion rare pour explorer des espaces empreints de mystère, accompagnés par des membres de l’Ordre prêts à partager leurs connaissances.

Cet événement s’inscrit dans l’esprit des Journées Européennes du Patrimoine, qui encouragent la découverte de lieux souvent méconnus, tout en sensibilisant à leur préservation. En mettant en lumière son patrimoine architectural, le Droit Humain contribue à enrichir le dialogue culturel et intergénérationnel, un objectif au cœur de cette manifestation nationale.

Informations Pratiques

  • Dates et horaires : Samedi 20 et dimanche 21 septembre 2025, de 14h00 à 18h00.
  • Lieux :
    • Maison Maria Deraismes, 9, rue Pinel, 75013 Paris.
    • Maison Georges Martin, 5, rue Jules Breton, 75013 Paris.
  • Accès : Gratuit, sans réservation préalable (sous réserve de places disponibles).
  • Conseil : Prévoyez une tenue confortable et arrivez à l’heure pour profiter pleinement des visites.

Que vous soyez passionné d’histoire, curieux de spiritualité ou simplement en quête d’une expérience culturelle, ces visites offrent une plongée fascinante dans le patrimoine maçonnique parisien. Ne manquez pas cette opportunité de lever les yeux sur un héritage méconnu, et laissez-vous guider par les lumières du Droit Humain lors de ce week-end patrimonial exceptionnel !

05/07/2025 : Marseille accueille un événement exceptionnel – Rencontre Jeunesse et valeurs européennes

Le chemin vers les Droits de l’Homme : un rendez-vous citoyen incontournable

Le 5 juillet prochain, Marseille accueillera un événement d’exception consacré aux valeurs européennes et aux droits humains. Portée par l’Association Architecture et Patrimoine Maçonniques (AAPM), en partenariat avec les Heures Bleues et avec le soutien fraternel de la Grande Loge de France, cette matinée s’adresse à toutes celles et ceux qui souhaitent penser le monde de demain, débattre avec exigence et s’engager avec conviction pour un avenir plus juste, plus solidaire et plus fraternel.

Un programme riche en sens et en perspectives

Dès 9h30, Jean-Claude Joly, président de l’AAPM, ouvrira les portes de cette rencontre citoyenne et initiatique. À 9h45, Thierry Zaveroni, Passé Grand Maître de la Grande Loge de France, posera les fondements symboliques et éthiques d’un colloque placé sous le signe de l’ouverture, du dialogue et de la responsabilité.

À 10h45, une table ronde animée par Clément Ledoux, Vénérable Maître de la Respectable Loge n°133 « La Justice », donnera la parole au public pour échanger, questionner et proposer ensemble des pistes d’action concrètes.

Enfin, trois jeunes intervenants viendront partager leurs expériences et réflexions autour d’un thème d’une brûlante actualité :
« Droits humains en Europe : les sauvegarder, les affirmer, les vivre ».

  • Doctorant, Aix-Marseille University, Faculté d’économie et de gestion (FEG)Xavier Chatron-Collet (Aix-Marseille Université, FEG) interrogera la pérennité et l’effectivité des droits fondamentaux dans nos sociétés.

Xavier Chatron-Collet ouvrira la séquence des témoignages avec une réflexion fondamentale sur la place et la pérennité des droits de l’Homme dans nos sociétés européennes. Il rappellera que ces droits sont le fruit d’un long cheminement philosophique, historique et juridique, profondément ancrés dans le droit positif français et européen, mais aussi dans l’éthique collective.

Sa prise de parole interrogera la solidité de ces acquis :

  • Les droits de l’Homme sont-ils gravés dans le marbre, immuables et indiscutables ?
  • Sont-ils réellement aboutis ou demeurent-ils des idéaux à atteindre ?
  • Ne pourrait-on pas imaginer d’autres droits, comme un véritable droit au bonheur ?

Xavier insistera sur la nécessité de garantir l’effectivité de ces droits : il ne suffit pas qu’ils existent dans les textes, encore faut-il qu’ils soient vécus, respectés et défendus au quotidien. Il soulignera que la vigilance citoyenne et l’engagement de chacun sont indispensables pour que ces droits ne deviennent pas de simples mots, mais restent une réalité vivante et évolutive.

  • Apolline Presle (Sciences Po Aix) mettra en lumière le rôle essentiel de la culture et de l’art engagé dans la défense des droits humains.

Présidente du Bureau des Élèves de Sciences Po Aix-en-Provence

Apolline Presle mettra en lumière le rôle essentiel de la culture dans la défense et la promotion des droits humains en Europe. Elle montrera que la culture, loin d’être un simple divertissement, est souvent le premier rempart contre les violations des droits fondamentaux.

Son intervention s’articulera autour de deux axes :

  • D’une part, la culture est un miroir des abus et des oppressions : à travers l’histoire, l’art et la littérature ont dénoncé la censure, la persécution et la marginalisation.
  • D’autre part, la culture est un outil de résistance et de libération : les artistes, par leur créativité, offrent une voix à ceux qui n’en ont pas, dénoncent les injustices et font avancer la cause des droits humains, notamment à travers l’art engagé.

Apolline insistera sur la force de l’expression artistique pour éveiller les consciences, mobiliser la société et inspirer l’action collective, rappelant que la défense des droits de l’Homme passe aussi par la liberté de création et la diversité culturelle.

  • Julian Stieger (Université d’économie et de commerce de Vienne) rappellera l’importance de la démocratie et de l’engagement citoyen pour garantir ces droits.

Étudiant à l’Université d’économie et de commerce de Vienne

Julian Stieger abordera la question des droits de l’Homme sous l’angle politique et institutionnel. Il rappellera que la démocratie, les élections libres, les constitutions et les institutions représentatives ne sont pas de simples formalités, mais le socle même de la protection des droits humains.

Il insistera sur le fait que la santé d’une société démocratique se mesure à sa capacité à garantir ces droits à tous ses membres. Selon Julian, les droits de l’Homme ne sont pas un sous-produit de la démocratie, mais bien son fondement et son objectif ultime.

  • Il mettra en garde contre toute forme de banalisation ou de remise en cause de ces acquis.
  • Il soulignera que chaque citoyen a un rôle à jouer pour défendre la démocratie, condition sine qua non de la vitalité des droits humains.

Enfin, Julian conclura sur l’importance de l’engagement individuel et collectif pour préserver ces valeurs, qui sont à la fois un héritage et une responsabilité à transmettre aux générations futures.

La matinée s’achèvera à 11h45 par une conclusion de Jean-Raphaël Notton, Grand Maître de la Grande Loge de France.

Pourquoi ne pas manquer ce rendez-vous ?

  • Un événement ouvert à tous : jeunes, étudiants, citoyens engagés ou curieux, venez partager vos idées et enrichir le débat !
  • Des intervenants passionnés : des jeunes issus de parcours variés, porteurs d’une vision européenne ambitieuse et humaniste.
  • Un moment de réflexion et de partage : pour réaffirmer que les droits humains ne sont jamais acquis, mais se construisent chaque jour, ensemble.

Pour vous inscrire ou en savoir plus, contactez l’AAPM ou rendez-vous sur le site de la Grande Loge de France.

Un événement soutenu par Les Heures Bleues et la Grande Loge de France.

Infos pratiques

Date : Samedi 5 juillet 2025
Lieu : Château Saint-Antoine 10 boulevard Jules Sebastianelli 13011 Marseille, Bouches-du-Rhône 
Horaires : 9h30 – 12h00
Entrée libre, sur inscription https://route33.eu/inscription-registration-2/

AAPM MARSEILLE
AAPM MARSEILLE

Epistolæ Latomorum – La tradition peut-elle encore s’épanouir dans une démocratie moderne  ?

Sous la reliure discrète et précieuse du n°71 d’Epistolæ Latomorum, la question posée n’est pas rhétorique. Elle ouvre une brèche. La Tradition peut-elle encore s’épanouir dans une démocratie moderne ? Non pas vivre, subsister, s’adapter – mais bien s’épanouir, c’est-à-dire fleurir, rayonner, porter du fruit. Loin d’une simple enquête intellectuelle, cette livraison tisse un chant à plusieurs voix, grave et clair, où chaque page devient pierre d’un Temple intérieur.

La parole du Très Respectable Frère Philippe Cangémi, Grand Maître de la GLTSO, résonne d’emblée comme un rappel fondamental : la Tradition n’est pas un bastion idéologique, ni un musée des formes. Elle est souffle. Respiration silencieuse et continue, non pour réanimer les vestiges du passé, mais pour habiter le présent. Elle ne s’oppose pas, elle relie. Elle ne s’enferme pas, elle irrigue. Face à une époque saturée de vitesses, de tensions, de fragmentation, Philippe Cangémi ne cherche pas à redessiner des frontières entre un monde ancien et un monde nouveau. Il perçoit, avec une lucidité fraternelle, le vertige d’un déracinement. Le lien n’est plus seulement distendu ; il est en passe de disparaître. La parole, elle, n’est plus fondée sur le silence. Elle devient bruit, tension, interruption.

Mais dans cette inquiétude, une voie subsiste. Une verticale. Et cette verticale, c’est le silence. Non pas une soustraction, mais une densité. Non pas une absence, mais une matrice. Là où tout bruit cherche à s’imposer, le silence devient une contre-force d’éveil. Il n’est pas fuite, il est fondement. Philippe Cangémi le dit avec pudeur : c’est de ce silence habité que peut naître, encore et toujours, une parole juste. Une parole fidèle.

À cette ligne vibrante répond, en miroir, l’éditorial de Claude Godard. Il évoque la « famille » – mais ce mot, dans sa plume, devient archétype. Non point cellule biologique ou affective, mais constellation initiatique. Ce que nous appelons « fraternité », il en révèle la source matricielle : une alliance symbolique, fondée sur l’altérité reconnue, sur la transmission vivante, sur la lente construction d’un nous. Ce que Claude Godard nomme, c’est la possibilité d’un lien qui ne se construit ni sur le sang ni sur le droit, mais sur la présence. Et dans ce tissage patient de reconnaissance, la Tradition retrouve non son autorité, mais sa fécondité.

Philippe Foussier, ancien Grand Maitre du Grand Orient de France. | VERNIER/JBV NEWS

C’est pourtant dans la contribution de Philippe Foussier, ancien Grand Maître du Grand Orient de France, que la question centrale trouve l’un de ses développements les plus riches. Il ne théorise pas une conciliation artificielle entre Tradition et modernité. Il affirme que la voie traditionnelle, loin d’être archaïque, est une réponse possible au désordre du monde. Il n’y a pas de contradiction à être fils des Lumières et dépositaire d’un héritage initiatique. Bien au contraire. C’est dans l’alliance de ces deux dimensions que réside, peut-être, la mission maçonnique aujourd’hui.

Philippe Foussier ne cherche pas à simplifier. Il assume la complexité. Il reconnaît que notre monde, hyperconnecté et pourtant fragmenté, éreinté par les replis identitaires, asséché par la consommation du sens, a besoin d’une école d’émancipation. Et la Franc-Maçonnerie, dans sa structure même – rituelle, symbolique, initiatique – peut encore offrir cela. Elle n’est pas faite pour le spectacle, mais pour la transmutation. Elle ne propose pas une idéologie ; elle offre un rythme, un espace, un silence. Le silence, encore lui, comme fondation d’une liberté retrouvée.

Car c’est bien ce silence, exploré dans les textes denses de Pierre Franceschi, Jean-Claude Sitbon et Yvon Gal, qui devient la véritable clef de voûte de ce numéro. Le silence, ici, n’est plus un simple élément du rituel. Il devient organe de transmission, langage de l’invisible, chemin vers une parole vraie. Chez Ramsay, le silence est d’abord protection – le fruit d’un temps où le secret protégeait la parole. Mais dans cette revue, il devient sanctuaire. Le silence est ce qui prépare, ce qui recueille, ce qui féconde. Ce qui ne s’enseigne pas, mais se transmet par le corps, par le regard, par la tenue.

Dans cette polyphonie subtile, la Tradition n’apparaît ni comme un trésor à conserver ni comme un poids à délester. Elle est une exigence. Une tension vivante. Une fidélité non pas à ce qui fut, mais à ce qui nous relie. À travers elle, la démocratie ne devient pas ennemie, mais terrain de preuve. Car c’est bien là que la Tradition doit se risquer : dans le tumulte du monde, non pour s’y perdre, mais pour y porter lumière. Non pour imposer, mais pour éclairer. Non pour préserver, mais pour éveiller.

Epistolæ Latomorum ne proclame rien. La revue veille. Elle n’argumente pas. Elle éclaire. Elle ne répond pas à la question qu’elle pose ; elle nous apprend à la porter. Comme une pierre dans la poche, comme une prière sans mots. La Tradition, ici, n’est pas morte. Elle attend. Elle respire. Elle veille dans l’ombre des colonnes, dans le regard d’un Frère, dans le silence d’un Temple. Et il nous appartient, encore et toujours, de la faire vivre. Non en la répétant. Mais en l’habitant.

Epistolæ Latomorum – La tradition peut-elle encore s’épanouir dans une démocratie moderne  ?
La revue de la Grande Loge Traditionnelle et Symbolique Opéra
GLTSO, Saint-Jean d’été, N°71, 64 pages, 14 €

En vente sur le site Conform édition https://www.conform-edit.com/produit/epistolae-n71/

A quoi sert un café maçon ? L’exemple de Lyon

En septembre, le café maçon de Lyon ouvrira sa 16ᵉ saison. Nous l’avons créé début 2011, avec une sœur du DH. Il est probablement le premier café maçon créé en France, en tout cas sous cette forme. Nous l’avons voulu mixte et non-obédientiel. Depuis quelque temps, d’autres s’ouvrent un peu partout, sous d’autres formes.

Qu’est ce que c’est ? Le premier jeudi de chaque mois, le Café Maçon de Lyon ouvre un temps d’échange structuré entre franc-maçons et profanes, au Café de la Cloche, en plein centre ville, sans invitation. Il suffit de pousser la porte. Le Café de la Cloche est habitué, depuis de nombreuses années, à accueillir des cafés philo, cafés de la mode, café géo…..Chaque mois, le café maçon. propose un thème de réflexion. Il ouvre rituellement par un coup de clochette (Café de la Cloche), puis le thème est annoncé.

Pour le lancer, on lit d’abord un texte d’introduction, écrit par un profane participant, qu’on appelle le Texte Visiteur. Ensuite on lit un texte écrit par un maçon, qu’on appelle le Texte Maçon. Puis, la parole circule selon le principe maçonnique de la triangulation. Les participants sont informés de cette façon de procéder. On ne prend pas la parole, on la demande. On s’écoute, on se respecte, on ne se répond pas directement. On ne cherche pas à avoir raison. On réfléchit ensemble. Pour obtenir la parole, il faut la demander au porteur de micro qu’on appelle le Passe-Parole, lui-même la demande à l’Animateur. Les échanges sont donc à la fois très organisés et très libres, ils ne peuvent en aucun cas virer à la confrontation d’idées. Après ce temps d’échange, dix minutes avant la fin, on garde un peu de temps pour répondre à des questions générales sur la franc-maçonnerie, quand il y en a. 

Les thèmes abordés lors de ces cafés maçons sont en général philosophiques ou sociétaux, quelquefois avec une forte charge symbolique. Mais ce sont toujours des thèmes suggérés par les participants, en début de saison. Même lorsqu’ils présentent une forte résonance maçonnique, on se débrouille évidemment pour ne rien révéler de ce qui ne doit pas l’être. En voici quelques-uns : 

La vérité est-elle toujours préférable au mensonge ? 
Sommes-nous responsables des fautes de nos ancêtres ?
Quelle est la valeur du travail ? 
Avons-nous besoin de croire en quelque chose ?
Qu’est ce que le sacré? Qu’est ce qui est sacré pour nous ?
Pourquoi sommes-nous attirés par la lumière ? 

Qui vient au café maçon ? Entre 25 et 60 personnes à chaque fois. Ce rendez-vous est une des rares manifestations dans lesquelles les profanes sont majoritaires. Au début, il n’y avait quasiment pas de maçon à part les organisateurs. Au fil des années, on commence à compter des participants réguliers. On les fidélise comme on peut, on leur suggère de laisser leur adresse mail pour recevoir les prochaines invitations, on a créé un groupe Facebook, un blog. Mais, ce qui n’était pas prévu, le café maçon sert de plus en plus souvent de “premier contact”, pour des profanes qui sont intéressés par la franc-maçonnerie et qui ne savent pas à qui s’adresser. D’ailleurs il y a aussi des FF et des SS qui envoient des profanes de leur connaissance au café maçon pour qu’ils viennent voir…comment ça se passe. Depuis le début, autant qu’on le sache, au moins une trentaine de profanes ont entamé une démarche, suite à leurs visites au café maçon. Ce qui nous a obligés à nous organiser en conséquence. Car nous n’avons pas vocation à recruter pour le compte d’une obédience ou d’une autre. Nous avons donc cherché des contacts dans différentes obédiences lyonnaises vers qui renvoyer ceux qui se posent des questions. On les aide mais on ne fait pas à leur place, c’est à eux de s’orienter. Pour l’instant, des membres de six ou sept obédiences sont impliqués. On doit pouvoir faire mieux. A Lyon, les Rencontres Culturelles Maçonniques parviennent à faire travailler ensemble onze obédiences dont le GODF et la GLNF. Ça laisse de l’espoir…

L’organisation du Café Maçon est assurée par une association Loi de 1901. Elle n’est pas maçonnique ni paramaçonnique, aucune obédience ne tient les rennes. Elle est composée de maçons libres et de profanes qui sont tout autant. Une organisation mixte, comme le sont des associations comme ATD ou Cabiria, pour éviter d’avoir d’un côté les organisateurs et de l’autres les “bénéficiaires” ; tout le monde travaille ensemble. L’association a pour rôle d’organiser la programmation des cafés maçons, choisir les thèmes, répartir les rôles d’animation, commander les Textes Visiteurs à des participants non-maçons et les Textes Maçons à des maçons participants. 

Aujourd’hui, une bonne dizaine d’autres cafés maçons se sont créés en France, souvent sous le nom de café maçonnique, avec des formules qui varient d’un endroit à l’autre. Le 19 Janvier dernier, 450.fm parlait de l’ouverture du Café Maçon de Paris. On en a repéré d’autres, notamment grâce à l’association de maçons du Droit Humain Georges Troispoints : à Bordeaux, Clermont-Ferrand, Créteil, Metz, Nice, Sarreguemines, Vannes, Versailles, Vichy, et même sur l’île de La Réunion. Il y en a sans doute d’autres. Ils semblent se multiplier ces derniers temps, ils doivent correspondre à un vrai besoin du public. D’abord parce que, pour une fois, les francs maçons se rendent accessibles dans un lieu ouvert. Les échanges se déroulent à l’horizontale, sur le principe d’égalité, il n’y a pas d’un côté ceux qui parlent et de l’autre ceux qui posent des questions. La deuxième raison est que le monde profane manque terriblement d’occasions pour réfléchir ensemble à des questions difficiles dans une ambiance apaisée. Un des plus gros succès du Café Maçon de Lyon était une thématique sur la mort. Plus les sujets semblent durs, plus ils attirent du monde. Enfin le dialogue avec la société est déjà ouvert depuis longtemps à travers des blogs, des chaînes Youtube, des réseaux sociaux. Le Café Maçon est un moyen parmi d’autres, il privilégie le contact humain, plutôt que le passage par un média. 

Café Maçon de Lyon : 

Blog : https://cafemacon.wixsite.com/cafe-macon-lyon
Page Facebook https://www.facebook.com/CafeMaconDeLyon
Groupe Facebook https://www.facebook.com/groups/httpscafemacon.wixsite.comcafemaconlyon

Autres Cafés Maçons

Café Maçon de Paris
Café Maçonnique de Bordeaux

Cafés maçonniques de l’association Georges Troispoints (DH)

Pierre Mollier, gardien de la mémoire et passeur de tradition

Ce 26 juin 2025, une page se tourne pour la Franc-maçonnerie française et pour le monde de la recherche maçonnique : Pierre Mollier, historien, bibliothécaire et conservateur, prend sa retraite. Une retraite bien méritée, à la mesure d’une carrière exemplaire dédiée à la transmission, à la rigueur intellectuelle et à la mise en valeur de la tradition initiatique.

Une trajectoire d’exception

Né à Lyon en 1961, Pierre Mollier suit un double cursus d’excellence à Sciences Po Paris (promotion 1984) et à l’École Pratique des Hautes Études (Ve section), où il obtient un DEA en sciences religieuses. Très tôt, il choisit de consacrer sa vie à l’étude et à la compréhension de la franc-maçonnerie. Il devient directeur de la bibliothèque du Grand Orient de France et conservateur du Musée de la franc-maçonnerie, deux institutions auxquelles il donnera une aura nouvelle, alliant exigence scientifique, accessibilité pédagogique et rayonnement culturel.

Une autorité de la maçonnologie

Spécialiste incontesté de l’histoire des rites maçonniques, de l’iconographie symbolique (marques de métier, emblèmes, phaléristique – une science auxiliaire de l’histoire qui a pour objet l’étude des ordres, décorations et médailles, etc.) et des relations entre pouvoir et franc-maçonnerie – notamment sous le Premier Empire et la Troisième République –, il est l’un de ceux qui ont su élever la maçonnologie au rang des disciplines académiques à part entière. Il a fait sortir la maçonnerie de la caricature pour la faire entrer dans le champ des sciences humaines.

Un éditeur, un conférencier, un pédagogue

Renaissance Traditionnelle (R.T.)
Renaissance Traditionnelle (R.T.)

De 1992 à 2022, il dirige la revue Renaissance Traditionnelle, devenant une figure centrale de la réflexion maçonnique francophone. Il codirige Les Chroniques d’Histoire Maçonnique, anime la revue anglophone Ritual, Secrecy and Civil Society, et collabore à Franc-maçonnerie magazine. Son œuvre écrite – une dizaine d’ouvrages majeurs, une centaine d’articles – fait référence. Citons Le Régulateur du Maçon (2004 et 2018), La Chevalerie maçonnique (2005), Les Hauts Grades du Rite Français (2017), ou encore Le Rite des Antients en France (2019) ou encore Masonic Myths and Legends (2022), Curiosités maçonniques (2e éd., 2021) et La Chevalerie maçonnique (2é éd., 2022).

Il a aussi dirigé plusieurs ouvrages collectifs qui font désormais autorité.

Pierre Mollier est aussi un passeur de savoirs, un pédagogue qui a formé, soutenu et inspiré des générations de chercheurs, de jeunes maçons et de passionnés d’histoire.

Un commissaire et un muséographe

Bibliothèque nationale de France
Bibliothèque nationale de France

Son nom reste attaché à la grande exposition « La franc-maçonnerie » à la Bibliothèque nationale de France en 2016, qui fut un moment de reconnaissance publique du patrimoine maçonnique. Grâce à son action, le Musée de la franc-maçonnerie a accueilli plus de 20 000 visiteurs par an, devenant un lieu de transmission entre l’initiatique et le profane, entre mémoire et citoyenneté.

Un homme de culture et d’utopie

Engagé dans le Haut Conseil des musées de France depuis 2018 (mandat renouvelé jusqu’en 2026), il est également un amoureux des marges et des légendes. Régent en 2023 du royaume poétique d’Araucanie et de Patagonie, il y a relancé les Études araucaniennes, rendant hommage à Antoine II, roi, communard et franc-maçon. Il est aujourd’hui secrétaire perpétuel de l’Académie des Hautes Études Araucaniennes, témoignant d’un goût jamais démenti pour les utopies éclairées.

Une reconnaissance méritée

Ses engagements et ses publications lui valent de nombreuses distinctions, dont le titre de commandeur de l’Ordre des Arts et des Lettres (2024) et de chevalier de l’Ordre du Mérite agricole (2015),  surnommé familièrement « le poireau ». Mais sa véritable distinction demeure sans doute celle que lui accordent ses pairs : celle d’un homme de transmission, de loyauté, de culture et de lumière.

Une œuvre vivante

Musée de la franc-maçonnerie dont Pierre Mollier est le directeur - Photo GODF officiel
Musée de la franc-maçonnerie dont Pierre Mollier est le directeur – Photo GODF officiel

Aujourd’hui, alors que Pierre Mollier s’apprête à « tirer sa révérence », il ne quitte pas la scène, il change simplement de rôle. Il laisse un héritage vivant : un musée et une bibliothèque renforcés, une communauté de chercheurs soudée, une tradition maçonnique mieux comprise, mieux partagée, mieux aimée.

Dans un monde en quête de repères, il a su faire dialoguer temples et universités, rituels et recherche, symboles et Histoire. Il a œuvré pour que la franc-maçonnerie soit mieux connue, mieux étudiée, et toujours respectée dans sa complexité.

Sa probité intellectuelle, sa curiosité et sa générosité ont inspiré bien au-delà des colonnes. Et s’il se retire aujourd’hui, nul doute qu’il continuera de nourrir sa passion pour l’histoire et les symboles… Peut-être avec un peu plus de temps pour explorer les sentiers de l’Araucanie.

Merci, Pierre. Pour ta constance, ton humour, ta patience et ton immense savoir. Que ta retraite soit une nouvelle aventure, riche en livres, en voyages et en lumières.

La rédaction de 450.fm salue cet humaniste d’exception, ce frère de l’ombre devenu figure de lumière, et lui souhaite une retraite aussi féconde que sa carrière.
Merci, Pierre, pour avoir éclairé la Franc-maçonnerie sous tous ses angles.

Le Canard enchaîné anesthésie le Grand Orient de France

Le docteur Sandillon est toujours Conseiller de l’ordre, malgré la pression de sa loge et du président du Grand Chapître Général du Rite Français… combien de temps encore pourra t-il être protégé par le Grand Maître ?

Dans son édition du mercredi 25 juin 2025, Le Canard enchaîné a repris des révélations initialement publiées par notre journal le 16 mai 2025, à la suite du jugement retentissant dans l’affaire Joël Le Scouarnec, chirurgien reconnu coupable de crimes odieux. Ce praticien, déjà condamné à trois reprises, a été reconnu coupable d’avoir agressé sexuellement au moins 300 enfants, un chiffre qui glace le sang et soulève des questions troublantes sur les failles institutionnelles qui ont permis de tels actes.

Cette affaire, loin de se limiter à un individu isolé, met en lumière des responsabilités partagées, notamment celles du Dr Henri Sandillon, figure éminente du milieu médical et maçonnique, dont le silence et les contradictions alimentent un scandale grandissant.

Sandillon contesté dans sa propre Loge

Informée par 450.fm de l’affaire Sandillon-Le Scouarnec, la Vénérable de cette loge a adressé, le 23 juin 2025, une lettre signée par une cinquantaine de membres (sur un total de 70) réclamant l’application des mesures réglementaires à l’encontre du frère Sandillon, qui occupe toujours la fonction de Grand Officier en charge des droits des femmes et des enfants. Il est notable que le Garde des Sceaux, Gérard Sabatier, membre de cette même loge et avocat de profession, ne figure pas parmi les signataires de cette missive. Plus troublant encore, malgré sa responsabilité de signaler au Conseil de l’Ordre tout dossier susceptible de porter atteinte aux intérêts de l’obédience, il n’a, à ce jour, transmis aucun document aux conseillers de l’Ordre.

Voir en bas de cet article la lettre intégrale envoyée par la Loge au Grand Maître Penin

Sandillon contesté lâché par le Président du Grand Chapître Général du Rite Français du GODF

La rédaction s’est procurée dans la journée du jeudi 26 juin une copie d’un courrier officiel adressé par Philippe Guglielmi le Président du Grand Chapître Général du Rite Français du GODF au Grand Maître Nicolas Penin qui est de plus en plus isolé et va devoir faire face à une situation de crise grave. Il n’a désormais plus d’autre choix que d’agir au plus vite s’il veut éviter un scandale à quelques semaines du convent.

Ce courrier à été mis en copie aux 225 Chapîtres pour diffusion aux membres, soit un total de 700 destinataires.

Voir en bas de cet article la lettre intégrale envoyée par Philippe Guglielmi au Grand Maître Penin

Un recrutement controversé et des révélations choc

Joël Le Scouarnec, surnommé le « chirurgien pédocriminel » par les médias, avait été recruté au Centre Hospitalier de Jonzac (Charente-Maritime) à une époque où le Dr Henri Sandillon, chirurgien ORL, présidait la Commission Médicale d’Établissement.

En tant que responsable médical de ce recrutement, Sandillon porte une responsabilité directe dans l’intégration de Le Scouarnec, malgré des signaux d’alerte graves.

Joël Le Scouarnec : l’ombre d’un prédateur – (Crédit : TF1)

Lors du procès devant la Cour Criminelle du Morbihan, la directrice de l’établissement a avoué avoir été informée de la condamnation antérieure de Le Scouarnec pour détention d’images pédopornographiques, un aveu qui a jeté une lumière crue sur les négligences administratives.

L’affaire a pris une tournure dramatique en 2017, lorsque Le Scouarnec fut inculpé pour l’agression de sa voisine de 6 ans à Jonzac. Interrogé par la gendarmerie, Sandillon avait initialement confirmé connaître cette condamnation. Pourtant, face à la Cour Criminelle, il a nié toute connaissance, un revirement qui s’est soldé par un faux témoignage flagrant. La présidente de la Cour, indignée, l’a sévèrement réprimandé :

« Vous ne rendez pas honneur à votre profession. »

Cette volte-face a non seulement terni sa crédibilité, mais a également ouvert la voie à des conséquences judiciaires potentielles.

Une nomination qui pose des questions

Ce qui rend cette affaire encore plus troublante, c’est le statut maçonnique de Sandillon. Reconnu dans la région Sud-Ouest, il est membre actif de la Loge « Émile Combes » à Pons, rattachée au Grand Orient de France (GODF), ainsi que du Chapitre « L’esprit laïque du futur » à La Rochelle, sous l’égide du Grand Chapitre Général des Hauts Grades. En 2023, alors que l’affaire Le Scouarnec était déjà publique depuis 2017, il a été élu au Conseil de l’Ordre par le Congrès des Loges du Sud-Ouest (région 16), une décision qui soulève des interrogations sur l’éthique et la transparence au sein de l’obédience.

Au-delà de son ancrage régional, Sandillon jouit d’une notoriété nationale en tant que 5e Ordre du Rite Français. Au sein du Conseil de l’Ordre du GODF

il occupe le poste stratégique de Grand Officier délégué à la réflexion sur la fin de vie, la santé, ainsi que les droits des femmes et des enfants…

…un paradoxe saisissant au vu des accusations portées contre Le Scouarnec. Membre également de la Loge d’Études et de Recherches « Les Fils et Filles d’Ariane », dédiée à la lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants, son silence face à cette affaire contraste cruellement avec les valeurs défendues par le GODF. On pourrait presque ironiser avec un titre comme « un pyromane pompier au GODF », si la gravité des faits ne jetait pas une ombre si pesante sur l’institution.

Une réaction maçonnique en demi-teinte

Cette affaire interpelle la franc-maçonnerie sur plusieurs fronts, révélant des failles institutionnelles et une apparente inertie :

  1. Une position compromise : Après son faux témoignage, Sandillon se trouve dans une situation délicate. Des victimes de Le Scouarnec envisagent une plainte contre lui, tandis que la présidente de la Cour Criminelle a saisi le procureur de Vannes. Des poursuites ordinales pourraient également être engagées. Pourtant, en tant que haut responsable du GODF chargé des droits des enfants, il n’a pas démissionné, un choix qui alimente les critiques.
  2. Un silence des instances régionales : Le Congrès des Loges du Sud-Ouest, qui l’a élu, s’est réuni à plusieurs reprises depuis les révélations, sans exiger sa démission du Conseil de l’Ordre. Cette passivité interroge sur la capacité de la base maçonnique à faire respecter ses propres principes.
  3. L’inaction du Conseil de l’Ordre : Ni le Grand Chapitre Général ni le Conseil de l’Ordre du GODF n’ont réagi en deux mois et demi, malgré les procédures de suspension à leur disposition. Cette inertie semble s’appuyer sur la présomption d’innocence, un principe louable mais qui, dans ce contexte, frôle l’aveuglement.

La récente suspension d’Alain Bauer par la Section Permanente de la Chambre Suprême de Justice Maçonnique (CSJM), suite à des poursuites du Parquet National Financier (PNF), devrait pourtant servir de précédent. Elle illustre l’indépendance nécessaire de la justice maçonnique face à la présomption d’innocence, un équilibre que le GODF semble hésiter à trouver dans l’affaire Sandillon.

Une demande d’intervention et un Convent sous tension

Face à cette situation, il serait pertinent que le Garde des Sceaux active l’article 93, demandant la suspension temporaire et exceptionnelle de Sandillon par la CSJM, à titre conservatoire. Cette mesure, motivée par :

  • Une atteinte aux intérêts généraux de l’Ordre,
  • Des actes contraires à l’honneur et à la probité,
  • La production d’une attestation fausse et incomplète, pourrait protéger l’intégrité de l’institution en attendant les clarifications judiciaires.

Si le Conseil de l’Ordre tarde à agir, le Convent 2025, qui se tiendra à Bordeaux – au cœur de la région Sud-Ouest – risque de devenir un théâtre de débats houleux. Les délégués auront sans doute deux dossiers brûlants à l’ordre du jour : Bauer et Sandillon. Cette double crise pourrait laisser une tache indélébile sur le mandat de Nicolas Pénin, actuel Grand Maître du GODF, mettant à l’épreuve la capacité de l’obédience à concilier ses idéaux de justice, de transparence et de défense des plus vulnérables.

Un appel à la réflexion

Cette affaire dépasse le cadre d’une simple controverse judiciaire pour interroger les fondements mêmes de la gestion de la franc-maçonnerie par la plus importante des Obédiences françaises.

On ne peut s’empêcher de faire le parallèle avec la protection des prêtres du Vatican dans l’affaire de pédophilie.

Caricature en Allemagne sur le traitement des abus par l’Église catholique. (Source Wikipedia)

Le silence du GODF, les contradictions de Sandillon et l’inaction des instances maçonniques soulignent un décalage alarmant entre les valeurs proclamées et les actes posés. Alors que des centaines d’enfants ont souffert des crimes de Le Scouarnec, la responsabilité collective – médicale et maçonnique – doit être assumée avec courage. L’avenir de l’obédience dépendra de sa capacité à tirer les leçons de ce scandale et à restaurer la confiance, non seulement en son sein, mais aussi aux yeux du public.

Que la lumière, si chère aux francs-maçons, éclaire enfin ce chemin obscurci par le silence.

lettre intégrale envoyée au Grand Maître Penin par la Loge

Lettre de Philippe Guglielmi Président du Grand Chapître Général du Rite Français du GODF