ven 22 novembre 2024 - 17:11

Je suis franc-maçon depuis plus de 20 ans : voici ce que vous ne saviez pas sur notre société

De notre confrère actu.fr – Par  Amandine Mehl

Gérant d’une librairie ésotérique à Nancy, Denis, 72 ans, est également franc-maçon depuis plus de 20 ans. Il se livre sur “ces choses” que les non-initiés ignorent. Depuis de nombreuses années, Denis, 72 ans, est à la tête d’une librairie articulée autour de l’ésotérisme et de la spiritualité, à Nancy.

Passionné par la géographie sacrée, autrement dit l’étude d’un lieu sous un angle religieux ou encore symbolique, le gérant s’est, en parallèle de son activité, lancé dans l’écriture. Mais, il ne se doutait pas que la publication de ses écrits allait radicalement changer sa vie.

Repéré par ceux qu’il appelle aujourd’hui « ses frères francs-maçons » , il y a plus de 20 ans maintenant, le septuagénaire a sauté le pas à son tour et a fait son entrée dans la franc-maçonnerie. Pour Lorraine Actu, Denis se livre sur « ces choses » que les non-initiés ignorent.

« La franc-maçonnerie n’est pas une secte »

Dès le début de nos échanges, Denis insiste : « la franc-maçonnerie n’est pas une société secrète, mais une société discrète. » Et, encore moins une secte, selon le principal intéressé. 

Il y a une grande différence entre une société discrète et une secte. Une secte, on y entre très facilement, mais pour en sortir, c’est une autre affaire. En revanche, il est “difficile” de devenir franc-maçon, mais on peut tout arrêter sans avoir besoin de se justifier.

Mais, justement, comment devient-on franc-maçon ? À l’instar de Denis, il est possible d’être repéré. On peut également être appuyé par un « parrain » . « Si dans son entourage un franc-maçon estime qu’une personne est susceptible d’apporter des choses à la société, il peut le conseiller aux membres de la loge. » Plus classique cette fois : les intéressés peuvent envoyer une lettre de candidature

L’épreuve du passage sous le bandeau

Pour autant, comme le soulignait Denis, ce n’est pas parce que l’on envoie une lettre de candidature, ou encore que l’on a l’appui d’un parrain, que l’on devient franc-maçon en un claquement de doigts. D’abord, vient le temps de l’enquête

Dans un premier temps, il y a une enquête. On ne peut pas devenir franc-maçon si l’on a un casier judiciaire, par exemple. Ensuite, trois membres de la loge vont interroger le candidat afin d’en savoir plus sur ses aspirations. Si l’entretien est concluant, il est soumis à l’épreuve du passage sous le bandeau. Pour faire simple : le profane est convoqué au temple et on lui met un bandeau sur les yeux afin de préserver l’identité des personnes présentes. Là, il subit une rafale de questions. Cela peut être : “croyez-vous en dieu ? Que pensez-vous du racisme ? Quelle est l’importance de la tolérance ?

Une fois l’épreuve terminée, vient le vote. « Les francs-maçons présents, après avoir entendu les réponses du candidat, se prononcent. Le vote se fait à l’aide de boules blanches et noires. S’il y a 75 % de boules blanches, alors la personne est admise. Dans le cas contraire, sa candidature est refusée » précise Denis.

Après l’initiation, le candidat devient apprenti franc-maçon et suit des « cours ». Et, s’il souhaite passer au grade supérieur, il devra le mériter.

Au bout de deux ou trois ans, l’apprenti doit se lancer dans un travail écrit sur une thématique donnée. Si cela convient à l’assemblée des maîtres, alors il passera au grade supérieur : celui de compagnon. Mais, encore une fois, cela ne se fait pas comme ça. Il y a un vrai travail derrière. Pour l’anecdote, un ancien président souhaitait devenir franc-maçon. Mais, il ne voulait pas passer par les grades d’apprenti ou de compagnon. Il voulait être maître. Ce qui n’a pas été possible, même si monsieur était président de la République.

S’il souhaite rester franc-maçon, l’apprenti devra se « tenir à carreaux ». Car, il est tout à fait possible d’être radié de la société.

Chez les francs-maçons comme ailleurs, il y a des règles. Si un membre a des problèmes avec la justice, il peut être viré. Même chose s’il ne respecte pas le secret maçonnique : s’il révèle à autrui, par exemple, que son voisin est franc-maçon. On peut dire que l’on est franc-maçon, mais on ne doit surtout pas dire que telle ou telle personne l’est.

Un millier de francs-maçons à Nancy

D’après Denis, Nancy compte près d’un millier de francs-maçons. Des hommes comme des femmes. Et, s’ils ne le portent pas sur eux, le septuagénaire, lui, est en mesure de les reconnaître.

Entre nous, on se reconnaît par des phrases qui sont significatives. Mais aussi par ce que l’on appelle l’attouchement franc-maçonnique, une manière particulière de se serrer la main. Tout cela est indispensable, car nous ne pouvons nous risquer à parler en présence d’un profane.

D’ailleurs, si les profanes ne peuvent assister à des cérémonies, ils sont parfois invités au sein des temples.

Une à deux fois par an, et je prends ici l’exemple d’une loge réservée aux hommes, les épouses, et parfois les époux, sont invités à partager un repas. À la fin du dîner, on explique aux convives qu’ils n’ont pas prêté serment, mais qu’ils ont côtoyé des francs-maçons. On leur offre donc une rose, d’où l’expression “ne pas révéler le pot aux roses“, afin qu’ils taisent ce qu’ils ont pu voir et entendre.

« Il y a une vraie fraternité chez les franc-maçons »

À l’instar des clubs sportifs, une cotisation à l’année est demandée à tous les francs-maçons, entre 200 et 300 euros d’après Denis. Et, contrairement aux idées reçues, « il n’y a pas que des personnes aisées financièrement ».

Dans la franc-maçonnerie, on retrouve toutes les classes sociales. Des pharmaciens, des notaires, des menuisiers, des ouvriers… Toutes les corporations sont représentées. Pour ce qui est de la cotisation, elle sert à payer les locaux, à l’acquisition des décors et à financer les repas. Car, chaque assemblée, (il y a une à deux assemblées par mois), se termine par un repas.

Un fonds de solidarité existe également. Et Denis est bien placé pour le savoir puisqu’il en a profité à l’ouverture de sa librairie.

Chez les francs-maçons, il y a une vraie fraternité. Lorsque j’ai lancé mon commerce, j’ai connu des mois difficiles. Un jour, j’en ai parlé à un frère de ma loge et il m’a répondu “de combien as-tu besoin ?” Je lui ai ensuite dit que quand ma situation serait meilleure, je procéderai à un remboursement. Il m’a répondu que ce n’était pas la peine.

Et l’entraide ne s’arrête pas là. « Imaginons qu’un gérant de société est franc-maçon et qu’un frère cherche un travail. Si des emplois sont à pourvoir, il le choisira bien plus volontiers, car il sait qu’ils partagent les mêmes valeurs » ajoute le septuagénaire.

« Je suis sur le droit chemin »

Franc-maçon depuis plus de 20 ans, Denis ne regrette absolument pas son choix. « Ma vie a changé à partir du moment où je suis devenu franc-maçon. J’ai rencontré des gens, des pointures qui, par leur travail, leur façon d’être, leur attitude, sont parvenus à me convaincre que j’étais sur le droit chemin. »

Devenir franc-maçon m’a permis de me perfectionner, de mieux me connaître. Je suis plus respectueux des traditions, des choses qui m’entourent. Je suis aussi plus attentif et moins dans “l’action, réaction“. En maçonnerie, on nous apprend à envisager la thèse, l’anti-thèse et à faire la synthèse. Ainsi, les décisions que l’on prend sont plus réfléchies.

Autrement dit, Denis ne compte pas quitter la franc-maçonnerie de sitôt.

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