De notre confrère sudinfo.be – Par Elie Bok
À Bruxelles, les Francs-maçons ne passent pas leurs journées à conspirer dans l’ombre pour contrôler le monde, contrairement à ce que certains illuminés du clavier voudraient faire croire. Non, ils ont un problème plus terre-à-terre : les fake news qui pullulent en ligne et qui, portées par la caisse de résonance des réseaux sociaux, menacent leur réputation déjà auréolée de mystères. C’est ce que révèle une récente enquête, alors que les loges bruxelloises tentent de naviguer entre discrétion séculaire et tempête numérique.
« Les réseaux sociaux donnent un écho particulier aux fantasmes », déplore Jean-Philippe Schreiber, historien et professeur à l’Université libre de Bruxelles (ULB), dans une déclaration qui sonne comme un cri du cœur – ou un soupir d’exaspération. Et comment lui donner tort ? Sur X, TikTok ou autres forums mal éclairés, les théories les plus farfelues fleurissent : les francs-maçons bruxellois seraient tantôt des marionnettistes de l’économie, tantôt des adeptes de rituels occultes dignes d’un mauvais film d’horreur. Tout ça parce qu’un internaute a cru voir un compas dans le logo d’une friterie du quartier européen.

Le phénomène n’est pas nouveau, mais il prend une ampleur inquiétante. Historiquement, la Franc-maçonnerie, avec ses rituels discrets et son goût pour les symboles, a toujours été une cible de choix pour les amateurs de complots. À Bruxelles, où plusieurs loges affiliées au Grand Orient de Belgique (successeur du GODF en Belgique) opèrent depuis des décennies, cette méfiance s’est amplifiée avec l’ère numérique. « Avant, les rumeurs restaient dans les cafés ou sur des pamphlets mal imprimés. Aujourd’hui, un post sur X peut faire le tour du monde en une heure », note Schreiber, probablement en secouant la tête devant tant de bêtise humaine.
Et les exemples ne manquent pas. Dernier en date :
Une rumeur absurde prétendant que les francs-maçons bruxellois auraient orchestré les embouteillages autour de la gare du Midi pour tester la patience des citoyens
Comme si la STIB avait besoin d’aide pour ça. Résultat : les loges, habituées à travailler dans l’ombre sur des questions philosophiques ou caritatives, se retrouvent à devoir démentir des inepties au grand jour. Un comble pour une organisation qui cultive la réserve comme une seconde nature.

Mais derrière l’humour grinçant, le problème est sérieux. Ces fake news ne se contentent pas de faire rire (ou pleurer) : elles alimentent une défiance croissante envers une institution qui, à Bruxelles comme ailleurs, revendique un rôle de réflexion et de solidarité. Les loges locales, souvent composées de citoyens ordinaires – avocats, profs, ou même employés de la Région bruxelloise – se voient affublées d’une aura maléfique par des internautes en mal de sensationnel. « On passe plus de temps à expliquer qu’on ne sacrifie pas de chèvres qu’à discuter d’éthique ou de justice sociale », plaisante un maçon anonyme, avant d’ajouter, plus sérieux : « Ça devient usant. »

Face à cette vague de désinformation, les Francs-maçons bruxellois hésitent sur la riposte. Ouvrir davantage leurs portes pour démystifier leur fonctionnement ? Trop risqué, au vu de leur tradition de confidentialité. Ignorer superbement les ragots ? Difficile quand un hashtag comme #MasonsControlBrussels gagne du terrain. Pour Schreiber, la solution passe par l’éducation : « Il faut enseigner la pensée critique, sinon les réseaux sociaux resteront un terrain de jeu pour les fantasmes. » Noble idée, mais bonne chance pour convaincre un complotiste que l’équerre n’est pas un outil de domination mondiale.
En attendant, les loges bruxelloises continuent leur chemin, entre agacement et résilience. Si les fake news sont une menace, elles sont aussi, ironiquement, une preuve de leur aura persistante. Après tout, qui perdrait son temps à inventer des histoires sur une organisation insignifiante ? Reste à espérer que la prochaine rumeur soit au moins un peu plus créative. Allez, messieurs les complotistes, un effort : et si les francs-maçons avaient caché un trésor sous la Grand-Place ? Ça, au moins, ça ferait une bonne histoire.
Si l’on ne peut plus sacrifier de chèvre, que nous restera-t-i ?
La viande de complotiste est, parait’il, sans saveur et difficile à mâcher … et la tremper dans du vinaigre pour la ramollir demanderait trop de temps.
je suis également porté par la même reflexion. la loi de brandolini dicte que l’on passe bien plus de temps a raisonner le complotiste, qu’eux a raconter leur bétise. A la question du sacrifice de chèvre, je répond sacrifice d’humain dont on boit le sang pour garder la jeunesse éternelle. Parce que c’est plus usant a se justifier de réflechir sur l’etat de l’humanité que d’être aussi stupide qu’eux.
Bonjour, l ensemble de La maçonnerie, me semble etre impactée au delà des complots locaux ;). De plus nous sommes rattachés souvent au marasme géopolitique.
J espère simplement que cela ne va pas soulever des vague de violence comme l on peut voir aux portes des lieux de cultes.
Belle journee