sam 23 novembre 2024 - 05:11

Il y a 60 ans déjà, Martin Luther King et son « I have a dream »

Notre frère en humanité Martin Luther King Jr., né Michael King Jr., plus couramment appelé Martin Luther King, est né à Atlanta, en Géorgie, le 15 janvier 1929, et est mort assassiné le 4 avril 1968 à Memphis, dans le Tennessee. C’était un pasteur baptiste et militant non-violent afro-américain pour le mouvement américain des droits civiques, fervent militant pour la paix et contre la pauvreté.

Foule à la marche sur Washington de 1963.

Il prononce un discours célèbre le 28 août 1963 devant le Lincoln Memorial à Washington, D.C. durant la marche pour l’emploi et la liberté : il s’intitule « I have a dream ». Ce discours est soutenu par John Fitzgerald Kennedy dans la lutte contre la ségrégation raciale aux États-Unis. Le président Lyndon B. Johnson, par une plaidoirie infatigable auprès des membres du Congrès, arrive à faire voter différentes lois fédérales comme le Civil Rights Act de 1964, le Voting Rights Act de 1965 et le Civil Rights Act de 1968, qui mettent juridiquement fin à toutes les formes de ségrégation raciale sur l’ensemble des États-Unis.

28 août 1963 : « I have a dream », discours de Martin Luther King

Aujourd’hui, lundi 28 août 2023, 60 ans après « I have a dream », nous vous proposons un retour sur le discours prononcé à Washington D.C., devant 250 000 personnes, qui fit de Martin Luther King l’une des figures emblématiques de la lutte contre la ségrégation et le racisme.

Portrait datant de 1964.

À lire et relire, mais aussi à écouter. Où le pasteur prononce les mots de liberté, égalité et fraternité…

L’intégralité du discours en français, puis la vidéo YouTube

« Je suis heureux de me joindre à vous aujourd’hui pour participer à ce que l’histoire appellera la plus grande démonstration pour la liberté dans les annales de notre nation.

Il y a un siècle de cela, un grand Américain qui nous couvre aujourd’hui de son ombre symbolique signait notre Proclamation d’Émancipation. Ce décret capital se dresse, comme un grand phare illuminant d’espérance les millions d’esclaves marqués au feu d’une brûlante injustice. Ce décret est venu comme une aube joyeuse terminer la longue nuit de leur captivité.

Mais, cent ans plus tard, le Noir n’est toujours pas libre. Cent ans plus tard, la vie du Noir est encore terriblement handicapée par les menottes de la ségrégation et les chaînes de la discrimination. Cent ans plus tard, le Noir vit à l’écart sur son îlot de pauvreté au milieu d’un vaste océan de prospérité matérielle. Cent ans plus tard, le Noir languit encore dans les coins de la société américaine et se trouve exilé dans son propre pays.

Bus historique de Rosa Parks exposé au Henry Ford Museum.

C’est pourquoi nous sommes venus ici aujourd’hui dénoncer une condition humaine honteuse. En un certain sens, nous sommes venus dans notre capitale nationale pour encaisser un chèque. Quand les architectes de notre République ont magnifiquement rédigé notre Constitution de la Déclaration d’Indépendance, ils signaient un chèque dont tout Américain devait hériter. Ce chèque était une promesse qu’à tous les hommes, oui, aux Noirs comme aux Blancs, seraient garantis les droits inaliénables de la vie, de la liberté et de la quête du bonheur.

Martin Luther King Jr,1964.

Il est évident aujourd’hui que l’Amérique a manqué à ses promesses à l’égard de ses citoyens de couleur. Au lieu d’honorer son obligation sacrée, l’Amérique a délivré au peuple Noir un chèque en bois, qui est revenu avec l’inscription “ provisions insuffisantes ”. Mais nous refusons de croire qu’il n’y a pas de quoi honorer ce chèque dans les vastes coffres de la chance, en notre pays. Aussi, sommes-nous venus encaisser ce chèque, un chèque qui nous donnera sur simple présentation les richesses de la liberté et la sécurité de la justice.

Nous sommes également venus en ce lieu sacrifié pour rappeler à l’Amérique les exigeantes urgences de l’heure présente. Ce n’est pas le moment de s’offrir le luxe de laisser tiédir notre ardeur ou de prendre les tranquillisants des demi-mesures. C’est l’heure de tenir les promesses de la démocratie. C’est l’heure d’émerger des vallées obscures et désolées de la ségrégation pour fouler le sentier ensoleillé de la justice raciale. C’est l’heure d’arracher notre nation des sables mouvant de l’injustice raciale et de l’établir sur le roc de la fraternité. C’est l’heure de faire de la justice une réalité pour tous les enfants de Dieu. Il serait fatal pour la nation de fermer les yeux sur l’urgence du moment. Cet étouffant été du légitime mécontentement des Noirs ne se terminera pas sans qu’advienne un automne vivifiant de liberté et d’égalité.

Rosa Parks vers 1955 avec Martin Luther King.

1963 n’est pas une fin, c’est un commencement. Ceux qui espèrent que le Noir avait seulement besoin de se défouler et qu’il se montrera désormais satisfait, auront un rude réveil, si la nation retourne à son train-train habituel.

Il n’y aura ni repos ni tranquillité en Amérique jusqu’à ce qu’on ait accordé au peuple Noir ses droits de citoyen. Les tourbillons de la révolte ne cesseront d’ébranler les fondations de notre nation jusqu’à ce que le jour éclatant de la justice apparaisse.

Mais il y a quelque chose que je dois dire à mon peuple, debout sur le seuil accueillant qui donne accès au palais de la justice : en procédant à la conquête de notre place légitime, nous ne devons pas nous rendre coupables d’agissements répréhensibles.

Ne cherchons pas à satisfaire notre soif de liberté en buvant à la coupe de l’amertume et de la haine. Nous devons toujours mener notre lutte sur les hauts plateaux de la dignité et de la discipline. Nous ne devons pas laisser nos revendications créatrices dégénérer en violence physique. Sans cesse, nous devons nous élever jusqu’aux hauteurs majestueuses où la force de l’âme s’unit à la force physique.

Le merveilleux esprit militant qui a saisi la communauté noire ne doit pas nous entraîner vers la méfiance de tous les Blancs, car beaucoup de nos frères blancs, leur présence ici aujourd’hui en est la preuve, ont compris que leur destinée est liée à la nôtre. L’assaut que nous avons monté ensemble pour emporter les remparts de l’injustice doit être mené par une armée biraciale. Nous ne pouvons marcher tout seul au combat. Et au cours de notre progression il faut nous engager à continuer d’aller de l’avant ensemble. Nous ne pouvons pas revenir en arrière.

Rencontre entre Martin Luther King et le président américain Lyndon Johnson à la Maison-Blanche, 1966.

Il y a des gens qui demandent aux militants des Droits Civiques : “ Quand serez-vous enfin satisfaits ? ” Nous ne serons jamais satisfaits aussi longtemps que le Noir sera la victime d’indicibles horreurs de la brutalité policière. Nous ne pourrons être satisfaits aussi longtemps que nos corps, lourds de la fatigue des voyages, ne trouveront pas un abri dans les motels des grandes routes ou les hôtels des villes.

Nous ne pourrons être satisfaits aussi longtemps que la liberté de mouvement du Noir ne lui permettra guère que d’aller d’un petit ghetto à un ghetto plus grand. Nous ne pourrons être satisfaits aussi longtemps que nos enfants, même devenus grands, ne seront pas traités en adultes et verront leur dignité bafouée par les panneaux “ Réservé aux Blancs ”. Nous ne pourrons être satisfaits aussi longtemps qu’un Noir du Mississippi ne pourra pas voter et qu’un Noir de New-York croira qu’il n’a aucune raison de voter. Non, nous ne sommes pas satisfaits et ne le serons jamais, tant que le droit ne jaillira pas comme l’eau, et la justice comme un torrent intarissable.

Le président Lyndon B. Johnson signant le Civil Rights Act devant Martin Luther King le 2 juillet 1964.

Je n’ignore pas que certains d’entre vous ont été conduis ici par un excès d’épreuves et de tribulations. D’aucuns sortent à peine d’étroites cellules de prison. D’autres viennent de régions où leur quête de liberté leur a valu d’être battus par les orages de la persécution et secoués par les bourrasques de la brutalité policière. Vous avez été les héros de la souffrance créatrice. Continuez à travailler avec la certitude que la souffrance imméritée vous sera rédemptrice.

Retournez dans le Mississippi, retournez en Alabama, retournez en Caroline du Sud, retournez-en Georgie, retournez en Louisiane, retournez dans les taudis et les ghettos des villes du Nord, sachant que de quelque manière que ce soit cette situation peut et va changer. Ne croupissons pas dans la vallée du désespoir.

Je vous le dis ici et maintenant, mes amis, bien que, oui, bien que nous ayons à faire face à des difficultés aujourd’hui et demain je fais toujours ce rêve : c’est un rêve profondément ancré dans l’idéal américain. Je rêve que, un jour, notre pays se lèvera et vivra pleinement la véritable réalité de son credo : “ Nous tenons ces vérités pour évidentes par elles-mêmes que tous les hommes sont créés égaux ”.

Martin Luther et Coretta Scott King, 1964. La vie dans les bidonvilles à Chicago a été très dure pour la famille de King.

Je rêve qu’un jour sur les collines rousses de Georgie les fils d’anciens esclaves et ceux d’anciens propriétaires d’esclaves pourront s’asseoir ensemble à la table de la fraternité.

Je rêve qu’un jour, même l’Etat du Mississippi, un Etat où brûlent les feux de l’injustice et de l’oppression, sera transformé en une oasis de liberté et de justice.

Je rêve que mes quatre petits-enfants vivront un jour dans une nation où ils ne seront pas jugés sur la couleur de leur peau, mais sur la valeur de leur caractère. Je fais aujourd’hui un rêve !

Je rêve qu’un jour, même en Alabama, avec ses abominables racistes, avec son gouverneur à la bouche pleine des mots “ opposition ” et “ annulation ” des lois fédérales, que là même en Alabama, un jour les petits garçons noirs et les petites filles blanches pourront se donner la main, comme frères et sœurs. Je fais aujourd’hui un rêve !

Martin Luther King à un rassemblement pour la liberté, 1962.

Je rêve qu’un jour toute la vallée sera relevée, toute colline et toute montagne seront rabaissées, les endroits escarpés seront aplanis et les chemins tortueux redressés, la gloire du Seigneur sera révélée à tout être fait de chair.

Telle est notre espérance. C’est la foi avec laquelle je retourne dans le Sud.

Avec cette foi, nous serons capables de distinguer dans la montagne du désespoir une pierre d’espérance. Avec cette foi, nous serons capables de transformer les discordes criardes de notre nation en une superbe symphonie de fraternité.

Avec cette foi, nous serons capables de travailler ensemble, de prier ensemble, de lutter ensemble, d’aller en prison ensemble, de défendre la cause de la liberté ensemble, en sachant qu’un jour, nous serons libres. Ce sera le jour où tous les enfants de Dieu pourront chanter ces paroles qui auront alors un nouveau sens : “ Mon pays, c’est toi, douce terre de liberté, c’est toi que je chante. Terre où sont morts mes pères, terre dont les pèlerins étaient fiers, que du flanc de chacune de tes montagnes, sonne la cloche de la liberté ! ” Et, si l’Amérique doit être une grande nation, que cela devienne vrai.

Que la cloche de la liberté sonne du haut des merveilleuses collines du New Hampshire !

Signature de Martin Luther King Jr.

Que la cloche de la liberté sonne du haut des montagnes grandioses de l’Etat de New-York !

Que la cloche de la liberté sonne du haut des sommets des Alleghanys de Pennsylvanie !

Que la cloche de la liberté sonne du haut des cimes neigeuses des montagnes rocheuses du Colorado !

Que la cloche de la liberté sonne depuis les pentes harmonieuses de la Californie !

Mais cela ne suffit pas.

Que la cloche de la liberté sonne du haut du mont Stone de Georgie !

Que la cloche de la liberté sonne du haut du mont Lookout du Tennessee !

Que la cloche de la liberté sonne du haut de chaque colline et de chaque butte du Mississippi ! Du flanc de chaque montagne, que sonne la cloche de la liberté !

Quand nous permettrons à la cloche de la liberté de sonner dans chaque village, dans chaque hameau, dans chaque ville et dans chaque Etat, nous pourrons fêter le jour où tous les enfants de Dieu, les Noirs et les Blancs, les Juifs et les non-Juifs, les Protestants et les Catholiques, pourront se donner la main et chanter les paroles du vieux Negro Spiritual : “ Enfin libres, enfin libres, grâce en soit rendue au Dieu tout puissant, nous sommes enfin libres ! ”. »

King parlant à la marche sur Washington à Washington, D.C., le 28 août 1963.

« Martin Luther King au nom de la Fraternité » : l’expo des 50 ans

Souvenons-nous, en 2018 – du 3 avril au 30 septembre – à Champagney, en Haute-Saône (région Bourgogne-Franche-Comté), l’association Valmy retraçait, au sein de la Maison de la Négritude et des Droits de l’Homme Négritude qui fait partie du réseau « Route des Abolitions de l’esclavage », la vie et les combats de Martin Luther King, militant pour l’avancée des droits civiques aux Etats-Unis dont on commémorait cette année-là, le 50e anniversaire de sa disparition.

Le Youtube « Martin Luther King et son discours « I have a dream »

Écoutez, en 6 vidéos, quelques rencontres exceptionnelles ou témoignages avec le pasteur Martin Luther King.

 
Le Dr Martin Luther King, Jr. prend la parole au Prince Hall Masonic Lodge à Columbus, en Géorgie, le 1er juillet 1958. (Columbus Black History Museum).

450.fm avait déjà consacré un papier, le 13 février 2022 à Martin Luther King Jr. titrant « USA : Lié par la fraternité – Martin Luther King Jr. et la Franc-maçonnerie », et en publiant, du reste, une photo du pasteur en conférence à Prince Hall

Le balcon du Lorraine Motel où a été assassiné Martin Luther King. Le bâtiment abrite désormais le musée national des droits civiques.

Remember

Le pasteur Martin Luther King (1929-1968), leader du mouvement américain pour les droits des Noirs, est mortellement blessé de plusieurs coups de feu, alors qu’il tient un discours au balcon d’un hôtel de Memphis, dans le Tennessee.

Tombe de Martin Luther King au Martin Luther King, Jr. National Historical Park à Atlanta sur laquelle on peut lire « Free at last » (Enfin libre).

King avait joué un rôle décisif dans les entretiens qu’il avait eus avec les autorités fédérales américaines ; il n’aura malheureusement pu assister à la ratification du document qu’il avait défendu, la loi 168 sur les droits du citoyen, qui sera signé une semaine après sa mort par le président Lyndon B. Johnson. La loi contient des dispositions pour l’abolition des principales discriminations qui frappent la population noire.

55 ans déjà. Et l’Amérique toujours entre rage et désespoir !

Sources : Maison de la Négritude et des Droits de l’Homme ; Wikipédia, Wikimedia Commons

Le président Barack Obama faisant visiter le Bureau ovale à un groupe d’Afro-Américains, où il a placé un buste de Martin Luther King et la proclamation d’émancipation d’Abraham Lincoln.

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Yonnel Ghernaouti
Yonnel Ghernaouti
Yonnel Ghernaouti, fut le directeur de la rédaction de 450.fm de sa création jusqu'en septembre 2024. Il est chroniqueur littéraire, membre du bureau de l'Institut Maçonnique de France, médiateur culturel au musée de la franc-maçonnerie et auteur de plusieurs ouvrages maçonniques. Il contribue à des revues telles que « La Chaîne d’Union » du Grand Orient de France, « Chemins de traverse » de la Fédération française de l’Ordre Mixte International Le Droit Humain, et « Le Compagnonnage » de l’Union Compagnonnique. Il a également été commissaire général des Estivales Maçonniques en Pays de Luchon, qu'il a initiées.

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