L’ordre Mevlevi est un ordre musulman soufi fondé au XIIIe siècle par Jalal al-Din Rumi à Konya dans le sultanat de Roum (dans l’actuelle Turquie). Ses membres sont souvent appelés « derviches tourneurs » en référence à leur danse appelée samā‘ (ou sema), dont les mouvements rappellent ceux d’une toupie.
L’ordre des Mevlevis, souvent appelés « Derviches tourneurs » en Europe, a été fondé par Sultan Veled, le fils de Djelal-Eddine Roumi, pour propager l’enseignement de son père.
Parler d’une voie soufie demande quelques précautions de vocabulaire : les mots « confrérie » ou « ordre » proviennent du vocabulaire employé pour les ordres de moines chrétiens, or il n’y a pas de moines dans l’Islam, pas plus qu’il n’y a de célibat institutionnalisé. Si l’on considère l’aspect d’une organisation qui s’est développée avec le temps, avec ses lieux d’implantation et ses rituels ou ses particularités concrètes, il redevient possible d’employer des termes qui décrivent des réalités matérielles de ce type, mais il faut veiller à ne pas perdre de vue que, jusqu’aux détails vestimentaires les plus infimes, les aspects concrets sont la traduction de notions directement inspirées de l’enseignement des maîtres soufis. Cet enseignement étant clairement différent de celui des moines chrétiens, ces précautions linguistiques sont nécessaires.
Le terme originel (en arabe) est tariqa, ce qui signifie exactement « voie » ou « chemin ». La voie Mevlevi situe les arts traditionnels comme des moyens au travers desquels les disciples progresseront afin de « raffiner » leur goût et leur personne, ce qui n’est pas une démarche courante, y compris au sein des autres voies soufies. Cette voie Mevlevi était bien établie dans l’Empire ottoman (1299-1920).
Si de nombreux membres de l’ordre servaient des positions officielles dans le califat, il est à noter qu’ils devaient choisir entre celles-ci et d’éventuelles responsabilités d’enseignement des disciples au sein des Mevlevi Hane, les lieux de réunions des derviches Mevlevis. On ne pouvait pas être à la fois haut fonctionnaire auprès du Sultan, et avoir un rôle important au sein des tekke Mevlevis.
C’est durant cette période que l’ordre produisit plusieurs poètes et musiciens renommés, comme Sheikh Ghalib, qui est considéré comme le deuxième Pir ou Sheyh de référence après Roumi, Ismail Ankaravi ou Abdullah Sari. La musique instrumentale et les chants jouent un rôle important dans le samâ’, qui vient de l’arabe sama et signifie « l’écoute ». Des compositeurs comme Dede Efendi ont composé des ayin (les compositions de musique cérémoniale), qui sont encore jouées de nos jours lors des cérémonies.
L’ordre s’est étendu aux Balkans, en Syrie et en Égypte (où ils sont connus comme Mawlawi).
L’ordre des Mevlevi partage des similitudes avec d’autres ordres soufis comme les Qadiri, (fondé en 1165), les Rifa’i (fondé en 1182), mais se distingue d’autres ordres moins liés à l’orthodoxie comme les Bektashis ou les Kalendris.
On trouvait également au XIXe siècle à Constantinople des derviches hurleurs mentionnés notamment par Xavier Marmier : « Y a-t-il dans les contrées du monde connu, si ce n’est parmi les fakirs de l’Inde, une institution plus absurde que celle des derviches hurleurs qui croient rendre hommage à la Divinité en poussant des cris sauvages, ou des derviches tourneurs, qui, pour imiter la rotation des astres, tournent sur eux-mêmes comme des toupies ? ».
L’ordre fut déclaré hors-la-loi en Turquie lors de la révolution (1925) et le Mevlevi Hane de Konya, où se trouve le tombeau de Djelal-Eddine Roumi, fut converti en musée par Kemal Atatürk. En 1950, le gouvernement turc légalisa l’ordre à nouveau et permit aux Derviches tourneurs de faire une représentation annuelle le 17 décembre, date anniversaire de la mort de Jalâl ud Dîn Rûmî. C’est ainsi que l’ordre existe toujours en Turquie, officiellement conduit aujourd’hui par le 20e arrière-petit-fils (22e génération) de Rûmî, Faruk Hemdem Celebi (Fârûq Hamdam Chalabî).
Par la suite, il y eut de nombreuses représentations des cérémonies de derviches tourneurs, depuis les premières tournées qui eurent lieu à Londres ou en 1972 aux États-Unis. Il y eut également une représentation pour le pape Jean-Paul II. En avril 2007, ils se produisirent aux États-Unis à guichets fermés dans les plus grandes villes du pays.
Une des particularités de l’organisation de cette voie Mevlevi est que traditionnellement il y avait non pas un, mais deux shayh, maîtres spirituels, dans les Mevlevi Hane : un qui s’occupait ouvertement de l’organisation du lieu et un autre qui éveillait les cœurs des disciples. Par adab (convenance et savoir-vivre traditionnel), la désignation du shayh visible était entérinée par le Celebi de Konya, c’est-à-dire le descendant le plus âgé de la famille de Djelal-Eddine Roumi résidant à Konya ; mais comme dans les autres tariqas soufis, la désignation du shayh capable d’éveiller les disciples se faisait par le précédent shayh capable de le faire.
J’ai assisté à une “cérémonie” des derviches tourneurs. En effet, comme il s’agit d’une cérémonie religieuse, il est demandé au public de ne pas applaudir à la fin ! “ça fait drôle”.
cette pratique est faite pour faire obtenur l’extase au derviche par la rotation.
Notion biologique : pour éviter de tomber par vertige (cat ils tournent longtemps, vraiment très longtemps !!) ils ont une robe très lourde et large donnant l’équilibre. Et ils tiennet la tête légèrement en arrière (voir la photo) : ainsi ils mettent leurs deux canaux semi-circulaires pour l’horizontal exactement à l’horizontale (car ils sont physiologiquement un peu décalés (ils avaient copnnaissance de ça au XIIIè siècle ?)
Sur ce sujet, je vous invite à lire l’ouvrage d’Ambrosio Alberto Fabio, Feuillebois Éve et Zarcone Thierry intitulé “Les derviches tourneurs. Doctrine, histoire et pratiques” (Cerf, 2006, 210 p.).
Bonjour Yonnel,
J’ai eu le grand privilège d’assister à deux séances de derviches tourneurs à Konya en Turquie et d’aller visiter le tombeau de Rumi…émotions garanties !
Merci de ces très intéressants rappels…
Bien frat,
Georges ROLLAND