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L’énigme des Maîtres -7- La vie est faite de rencontres

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Centre de Prague, Place Wenceslas

Arrivés à Prague, le chauffeur les déposa au centre de la ville avant de s’occuper de l’intendance à l’Hôtel Cube où avait été réservé leur séjour. 

Leur visite avait été annoncée au Conservateur du Musée aussitôt qu’ils avaient eu connaissance de l’exposition qui devait avoir lieu maintenant dans deux jours. Rendez-vous avait été pris pour après déjeuner.

La place Wenceslas où ils arrivèrent, est entourée de bâtiments historiques, de magasins, de restaurants et de cafés. Une imposante statue équestre de Vencesla, le saint patron de la République tchèque, due au célèbre sculpteur tchèque Josef Václav Myslbek, y tient l’espace central.

Comme pour surseoir encore un peu à cette visite, nos trois amis choisirent de déjeuner au café Prokoff, une brasserie semblable «aux tavernes bavaroises avec ses massives pièces de viandes rôties, arrosées de bières amères et légères».  En guise de dépaysement culinaire, chacun y choisit un plat traditionnel différent : Alexander une kulajda polévka, une soupe épaisse à base de champignons, de pommes de terre, et de crème, parfumée à l’aneth et garnie d’œufs de caille ; Guido la svíčková, un bœuf mijoté aux légumes, nappé d’une sauce crémeuse aux légumes à base de carottes, de céleri-rave et de racine de persil accompagnée de crème fouettée d’airelles et servie avec des quenelles, et Archibald un ragoût d’agneau à base d’oignon rouge, d’ail et de paprika accompagné de choucroute crue. Ils avaient envisagé de partager ces mets afin que chacun puisse en découvrir les saveurs.

Ils s’étaient assis à une table ronde, de telle sorte qu’ils aient toute latitude pour voir, à travers la baie vitrée, le Musée national, de l’autre côté de la place.

Le bâtiment imposant, flanqué de deux ailes majestueuses, avec ses trois dômes recouvert de cuivre patiné lui donnant un air d’opéra, présente une façade impressionnante d’équilibre construite en grès rougeâtre lui conférant une teinte chaude et vibrante. C’est une ode à la néo-renaissance. Le fronton central est orné d’une sculpture allégorique représentant la Bohême entourée de figures symbolisant les arts et les sciences, Une grande rosace vitrée surmonte le porche. La façade est rythmée par de nombreuses pilastres et colonnes engagées, qui s’élancent sur toute la hauteur Les fenêtres cintrées reflétaient le ciel, tandis que le dôme central, surmonté d’une allégorie en bronze doré de la Renommée – une femme ailée, vêtue d’une tunique et tenant une trompette dans sa main droite – brillait sous les rayons du soleil.

Vers la fin du repas, Alexander se leva soudainement, bousculant un peu la table, pour s’approcher de la vitre comme pour mieux voir à l’extérieur et se tournant vers ses amis leur dit en excuse de son attitude éruptive :

– Je dois être complétement obnubilé, j’ai cru apercevoir la silhouette d’Hircine Enhardir, vous savez le galeriste, mais je ne le vois plus, il a disparu. Ce doit être une berlue due au Milan Nestarec que nous avons bu. Dans le fond, j’ai hâte que nous allions vers le mystère de cette exposition.

Aussitôt dit, aussitôt fait et le trio de se diriger vers le Musée pour y retrouver l’experte déléguée par le conservateur qui devait les accueillir devant la porte du personnel, sur le côté du Musée.

Effectivement, elle était là et, se présente  en leur tendant la main, sa voix douce, imprégnée d’une séduction délibérée.

– Amélie Delacroix. Et si vous me demandez si… Oui. Je porte le nom de famille emblématique du célèbre peintre Eugène Delacroix, mon lien avec le grand artiste remonte à plusieurs générations, j’en suis une de ses descendants directs. J’espère que vous avez fait un bon voyage jusqu’à Prague, enchaîna-t-elle rapidement, mettant fin à cette confidence qui n’en n’était pas vraiment une.

En effet, au fil des ans, la famille Delacroix a préservé et célébré l’héritage artistique d’Eugène, transmettant une passion commune pour l’art, la créativité et l’esthétique à travers les générations. Les récits de l’artiste talentueux, de son époque romantique et de ses contributions emblématiques à l’histoire de l’art ont été chéris comme des trésors familiaux.

Amélie, élevée dans un environnement imprégné d’admiration pour la créativité et la vision artistique, a développé une profonde appréciation pour l’art et la culture. Et c’est tout naturellement qu’elle débuta son parcours à Harvard, où elle obtint un diplôme de licence en histoire de l’art puis, avec ses études au Courtauld Institute of Art de Londres, un master en histoire de l’art, se spécialisant davantage dans la période de la Renaissance. Elle choisit de perfectionner ses compétences en muséologie à l’École du Louvre, acquérant une expertise pratique dans la gestion et la conservation des œuvres d’art. Enfin, son travail de thèse de doctorat à l’Accademia di Belle Arti di Brera de Milan, devint une contribution significative sur la Renaissance, et de là sa réputation reconnue depuis trois ans en tant qu’experte internationale même si nos amis n’avaient appris son existence que par les journaux. 

Mais quelle ne fut leur surprise ! Les deux quadragénaires semblaient fascinés, l’aîné Archibald pensant en lui-même 

– Redoutable !   

Amélie Delacroix, la trentaine épanouie, incarne l’essence de la beauté classique et intemporelle. Sa chevelure d’ébène encadre délicatement un visage aux traits délicats, illuminé par des yeux verts pétillant d’intelligence. Sa démarche gracieuse et assurée révèle une confiance en elle qui attire instantanément l’attention de tous ceux qui croisent son chemin. Séduisante sans effort, Amélie possède cette aura magnétique qui intrigue et ensorcelle. Son sourire éclatant et son regard d’émeraude la rendent envoûtante. 

 Elle porte un tailleur qui allie à la perfection sophistication et modernité. Le tissu de son ensemble est d’une qualité exceptionnelle, doux au toucher pensa Alexander, et sa couleur, un nuance de gris perle, met en valeur la finesse de sa silhouette. La veste cintrée, portée à même la peau, arbore des lignes épurées qui soulignent la grâce de ses épaules, son échancrure ajoute une touche de sensualité subtile à son look. Les manches trois-quarts, dévoilent subtilement ses poignets délicats ornés d’une discrète montre Cartier, la Tank couronnée de fins diamants. Le pantalon du tailleur, coupe droite et fluide, allonge sa silhouette avec une élégance décontractée. La taille haute met en valeur sa finesse naturelle, marquant subtilement la courbure de ses hanches. Des escarpins gris foncé, aux semelles rouges, soulignent la courbe de ses mollets, la finesse de ses chevilles, donnant à sa démarche encore plus de sensualité s’il en était besoin.    

S’adressant d’abord à Guido Lhermitt elle lui tend gracieusement sa main sur laquelle il se penche, sans l’effleurer, pour un baisemain délicat tout en lui disant

– Ravi de vous rencontrer Madame.

Avec un air malicieux mais charmant, Amélie lui fit comprendre qu’il avait bien été annoncé.

– Monsieur Lhermitt, Commissaire divisionnaire de la police internationale Interpol, alors comme cela l’exposition intéresse vos services?

À son tour, Alexander tout en se penchant sur sa main se présente en faisant le séducteur avec un sourire que Salaï aurait pu avoir pour enjôler Léonard de Vinci.

– Alexander Van de Meïr pour vous admirer Madame.

Archibald ne fut pas en reste et tout aussi élégamment, mais en claquant discrètement les talons et avec un peu plus de raideur du dos s’annonça plus sobrement.

– Archibald Winston, Comte de Kerval.

– Bienvenue Messieurs. Le conservateur du musée m’a demandé de vous ouvrir tous les accès aux préparatifs. Un motif précis ? Et sans attendre la réponse elle continua.

– Venez messieurs, je vous conduis à l’entrepôt où les œuvres attendent que soit achevés l’installation de la salle qui va les accueillir et, surtout, les contrôles des mesures de sécurité. Et disant cela elle leur adressa un délicieux sourire d’un air entendu, tout en invitant le petit groupe à la suivre.

Dans le sillage du parfum Aromatics élixir que portait leur guide, Alexander s’enhardit à parler le premier.

– Au-delà de l’exploit d’avoir obtenu que ces œuvres soient prêtées au National de Prague par des différents musées, quel intérêt particulier avez-vous eu en réunissant Michel-Ange, Botticelli, Bronzino et Albrecht Dürer ? Demanda Archibald.

– Le défi que je me suis donné de pouvoir le faire tout simplement répondit Amélie en levant ses deux mains devant elle en supination, comme pour souligner cette évidence.

– Le vrai défi n’est-il pas leur sécurité ? demanda Guido, très professionnel, mais avec une intonation légèrement plus douce et plus basse que la normale.

– Pour le moment, l’entrepôt est gardé de jour par des hommes en armes et la nuit par des alarmes sophistiquées. Mais nous, nous allons pouvoir y entrer.

Respectueusement, les gardes s’écartent de la porte, reconnaissant l’organisatrice qui tape le code de passe sur le boîtier de côté. C’est comme réunir les deux moitiés d’un symbolon qui permet l’évaluation, la reconnaissance et la validation de la confiance.

Les œuvres, soigneusement déballées et stockées dans l’entrepôt, attendent patiemment d’être révélées au public lors de l’exposition à venir. Leur juxtaposition dans cet espace provisoire crée un supra-tableau de la diversité artistique de la Renaissance, montrant la variété de styles, de sujets et de compétences qui ont prospéré à cette époque. Chaque œuvre représente un chef-d’œuvre à part entière, témoignant du génie artistique de son créateur.

Les trois visiteurs, chacun avec ses propres sensibilités, partagent un moment d’émerveillement, d’extase ou plutôt d’instase silencieuse, face à la richesse et à la diversité des œuvres présentes.

Chaque tableau offre une expérience unique, créant un dialogue visuel de grâce, de beauté, de virtuosité picturale qui transcende les époques et suscite une profonde admiration pour le talent de ces artistes.

Amélie non sans fierté les présente, insistant sur leur provenance pour marquer son mérite d’avoir pu les réunir.

Portrait de jeune homme par Sandro Botticelli, une tempera sur bois de 1483, prêtée par le Louvre de Paris

La madone Bardi di San Spirito probablement de 1485, également de Botticelli, en provenance de la Galerie des Offices de Florence.

– C’est la Vierge Marie qui est peinte faisant le signe, tenant l’Enfant Jésus sur ses genoux semblant l’esquisser également avec sa menotte droite nota silencieusement Alexander.

– Et juste à côté le tableau du même artiste et sur le même thème, poursuivit Amélie Delacroix, La Madone de l’Eucharistie peint vers 1470 de la fondation Amélie Stewart Gardner Museum de Boston. Remarquez l’enfant qui semble bénir de sa main celui qui le regarde.

– Et comment nous observons, mais charmante madame, ce n’est pas une position de la main pour une bénédiction pensa si fort Alexander qu’il en eut peur de l’avoir dit à haute voix.

Portrait d’un jeune homme, peinture à l’huile sur bois, de Bronzino exécutée vers 1530-1540, prêté par le Métropolitain Musée d’Art de New York.

Après une légère pause, Amélie enchaîna.

– Enfin, ces deux tableaux exceptionnels d’Albrecht Dürer, voici L’Autoportrait à la fourrure, sur panneau de bois, daté de 1500, prêté par l’Alte Pinakothek de Munich

et La fête du rosaire de 1506, un de ses chefs d’œuvre les plus précieux synthétisant toutes les techniques italiennes de la Renaissance sur un panneau de bois. C’est l’Empereur Rudolf II qui l’a ramené à Prague depuis l’église dominicaine de Francfort, en 1606. Il nous est prêté par la Galerie nationale, ici à Prague, connu sous le nom de Veletržní palác, dans le quartier de Holešovice où il est exposé habituellement dans le bâtiment principal. Vous remarquerez le jeu de doigts sur le luth tenu par l’ange au premier plan. Il joue la musique des anges et la joie du paradis célébrant l’amour divin et la beauté spirituelle de la Vierge Marie.

Les trois hommes l’avaient bien évidemment remarqué silencieusement, mais pas seulement. Il y avait, outre la posture des doigts de l’ange jouant du luth au premier plan, le maintien de l’équerre par le probable architecte du comptoir des marchands allemands de Venise, Hieronymus d’Augsbourg, sur l’extrême-droite du tableau, qui n’avaient pas manqué de les intéresser.

Se tournant résolument vers Guido, elle redemanda candidement.

– Me diriez-vous quel est le motif précis votre visite?

Alexander et Archibald se taisent, tournant leur regard vers Guido, lui laissant le soin de répondre ce qui convenait de dire.

Après un instant de réflexion Guido se contenta de dire :

– Nous n’avons rien à vous cacher, chère madame. Nous sommes missionnés par l’instance internationale Interpol pour prévenir plusieurs musées de possibles vols imminents d’œuvres de la Renaissance. Le musée de Prague est l’un de ceux-là du fait de votre exposition.

– Aaah ! Ne sut que dire la belle Amélie à la fois étonnée, inquiète et contrariée, laissant échapper un imperceptible froncement des sourcils et un furtif pincement de ses lèvres.

Archibald, qui fut témoin de cette réaction y trouva quelque chose qui le gêna, se promit d’en parler à ses amis qui, pour le moment, étaient subjugués tout autant par cette exposition exclusive que par son organisatrice.

Prétextant le rendez-vous avec le conservateur qui les attendait dans l’heure, le comte suggéra à ses amis de prendre rapidement congé de cette charmeuse personne, lui promettant de la retrouver le lendemain.

C’est très chaleureusement que le conservateur les accueillit dans son bureau allant même jusqu’à étreindre, par une affectueuse accolade, Archibald et Guido qui fit les présentations.

– Jakub voici notre ami Alexander Van de Meïr. Alexander voici Jakub Novák, notre conservateur, mieux notre archiviste.

Alexander compris par le mot « notre » qu’il s’agissait de M.

Après s’être amicalement échangé des nouvelles, Lord Archibald l’alerta à nouveau du danger probable entourant l’exposition non sans évoquer l’hypothèse qu’il viendrait de « Savonarole ».

– J’y veillerai. Ce n’est pas la première fois que je suis confronté à cette organisation. Rappelle-toi, il y a sept ans, je t’avais prévenu d’une tentative de vol de la partie des archives qui m’avait été confiée. Seulement quelques documents avaient été soustraits. J’avais dû alors mettre les archives en lieu plus sûr.

L’après midi était avancé quand ils se séparèrent après leurs discussions où furent rapportés les derniers événements, envisageant de déjeuner ensemble le lendemain.

Le chauffeur les attendait de l’autre côté de la place, mais au moment de monter dans la voiture, Alexander se rétracta.

– Partez sans moi, je vous retrouverais à l’Hôtel Cube et si je ne suis pas de retour à l’heure du dîner, ne m’attendez pas.

Et sans explication, mais en fallait-il une, il rebroussa chemin et retourna vers le musée, espérant qu’Amélie n’était pas encore partie.

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La force de l’esprit de la Franc-maçonnerie traditionnelle

Michel Maffesoli
Michel Maffesoli

Parmi ces mystères fondateurs de toute vie commune, il y a ce va et vient structurel entre la genèse et le déclin. Engendrement mutuel, en toutes choses : nature, civilisation, politique, affects, individus et communautés, de la naissance et de la mort. Ainsi est récurrent dans la Franc-maçonnerie authentique le recours à la formule empruntée à l’alchimie : « ordo ab chao ». Cela vient de la mystique juive, dont on sait l’influence sur la démarche initiatique, et qui glosa, longuement, sur la parole biblique : « tohû bohû ».

Dès le second verset de la Genèse (1, 2), il est dit que la « terre était vide et vague », ou déserte et vide : tohû bohû. Chaos précédent la création. Et c’est à partir de là que la parole divine mit de l’ordre : le monde sous la « voûte étoilée ». On retrouve cette expression à diverses reprises. Il en est une, instructive, celle rapportée par le prophète Isaïe concernant le « jugement d’Eden ». C’est le « jour de la vengeance » où Yahvé « tendra le cordeon du chaos et le niveau du vide » (Is, 34, 11). Là encore le tohû bohû précédant un ordre régénéré.

C’est cela qu’entend faire ressortir le secret maçonnique : la fondamentale dialogie existant entre la mort et la renaissance. Cristallisation, s’il en est, du sentiment diffus dans la sagesse populaire des lois, inéluctables, de la transformation, du mouvement constant des métamorphoses. Dans toutes les traditions, les épreuves initiatiques rejouent un tel processus. La mort symbolique des « voyages » que l’on retrouve dans tous les rituels, exprime à loisir le mystère de « l’onostasis » : la résurrection, le relèvement successif à la fin d’une manière d’être et de penser.

À se taire sur l’adventice, ce qui est le propre de l’humain périssable, le « secret » met l’accent sur l’essence des choses : la fin d’un âge annonce la naissance d’un autre. Le désaccord entre les anciennes mœurs et les nouvelles est l’indice qu’une époque s’achève : une « parenthèse » se ferme et qu’une autre commence : une autre parenthèse s’ouvre.

C’est en ce sens que dans la succession des crises civilisationnelles, s’inscrivant dans la longue chaîne de la connaissance traditionnelle « l’ordo ab chao » maçonnique rappelle que l’on ne peut pas réduire à une cause matérielle la faillite d’une organisation sociale donnée. Mais celle-ci en appelle, tout simplement à une autre révolution spirituelle, qui est l’apanage et l’honneur de notre espèce animale. La panique peut régner dans la politique, les élites être totalement déconsidérées, l’économie partir en capilotade, l’essentiel est de pouvoir parler de l’esprit pour trouver une véritable issue à la décrépitude d’une société.

Il est fréquent de rappeler qu’étymologiquement le mot « crise », en grec, signifie jugement. On signale moins, et ce n’est pas moins important, que cela désigne, aussi, cet instrument permettant de trier qu’est le crible. Belle métaphore populaire soulignant qu’il faut savoir rejeter ce qui doit l’être et garder, également, ce qui le mérite.

Frari (Venise) – Sacristie – triptyque de Giovanni Bellini – Saint Benoît de Nursie et Saint Marc

À cet égard, puis-je ici noter une historiette par laquelle, dit-on, commença la vie monastique du grand Saint Benoît de Nurcie. Ce qu’il est convenu de nommer le « miracle du crible » ! Crible qui est prêté à sa nourrice, et que celle-ci brise en deux. Benoît réunifie les deux morceaux. Mais pour échapper à la ferveur de ses admirateurs il se retire dans un lieu désert appelé Subiaco où il va mener une vie érémétique dans la grotte appelée depuis « Sacro Speco », le saint « crible ».

A la fin de ce terrible Ve siècle, les barbares sont à toutes les portes, la fin d’un monde est vécue et ressentie comme telle, et c’est en se retirant de l’action immédiate, c’est par la force de l’esprit qu’un autre monde émerge. Cela mérite d’être souligné, quand on sait le rôle joué par les ecclésiastiques lorsque la maçonnerie, au XVIIIe siècle, entend participer à l’élaboration d’une nouvelle civilisation. Et ce en reprenant l’intuition primordiale de tous ceux que Chateaubriand nomme les « génies Mères » : c’est la puissance de l’esprit qui est matricielle. Le reste : politique, économie, social, « sociétal » vient de surcroît.

La sagesse du « crible » est indéniable en ce qu’elle ne procède pas à partir d’une « tabula rasa », mais est faite de prudence, de discernement, cette « discrétion-secrète » qui sait, de savoir incorporer : celui de la Tradition initiatique que l’ordre des choses est une perpétuelle métamorphose en appelant, toujours, à une nouvelle renaissance. De ce point de vue, ce dont sont conscients les francs-maçons traditionnels, c’est qu’il faut savoir mettre en œuvre une médecine expectante, c’est-à-dire prudente, qui sait attendre en mettant en œuvre des remèdes de longue durée, ayant fait leurs preuves au cours du temps.

On a souvent reproché à la prudence maçonnique cette attitude du juste milieu, aussi loin du révolutionnarisme que du conservatisme. Attitude faisant place à toutes les sensibilités. Mais cela ne fait que traduire le souci de l’harmonie, fut-elle conflictuelle, qui redit, sous une forme sophistiquée, ce que la sagesse humaine sait d’antique mémoire : il faut de tout pour faire un monde. Et ces sensibilités diverses, avant de se dire et de se vivre au grand jour, doivent s’expérimenter dans le secret de ce qui inconsciemment attend la manifestation consciente.

Jacques-Bénigne Bossuet

Peut-être est-ce ainsi qu’il faut comprendre cette lucide observation de Bossuet sur l’Histoire universelle, lorsqu’il rappelle que la « vraie science de l’histoire est de remarquer dans chaque temps les dispositions secrètes qui ont préparé les grands changements et les conjonctures importantes qui les ont fait arriver ». Parmi bien d’autres, cette remarque souligne que c’est toujours en catimini que s’opèrent les grands changements sociétaux. C’est bien en ce sens que le « secret » et la « loi du silence » maçonniques redisent une structure anthropologique dont il est vain de vouloir faire l’économie.

C’est bien une sagesse au jour le jour que propose l’accompagnement maçonnique, et ce en ponctuant l’année civile par le comput liturgique que l’on retrouve dans toutes les religions. Les solstices d’hiver et d’été rendant attentif au soleil qui décroît, mort symbolique préparant à la mort réelle, et le soleil qui repart, allégorie de la résurrection et de la lumière de la connaissance. Dans la liturgie chrétienne : Saint Jean-Baptiste, la « voix » annonçant celui qui doit venir, Saint Jean l’Évangéliste proclamant la parole, le verbe se faisant chair. « Solstice » : « sol stare », le soleil s’arrête, mais ce afin qu’un cycle nouveau recommence : la vie en son développement perpétuel !

Gilbert Durand

Ainsi que l’a analysé, avec constance mon maitre et frère Gilbert Durand : l’éternelle métamorphose des choses et de la vie, voilà, certainement, ce qui est le cœur battant de l’ésotérisme maçonnique (« Les grands mythes fondateurs de la Franc-maçonnerie », Ed Dervy 2024). C’est par là qu’un tel ésotérisme est, sur la longue durée, et sous des formes différentes, un excitateur de l’âme continuant à attirer nombre d’intelligences aiguës, et à la dynamiser vers un plus-être existentiel. Et ce, très précisément en montrant comment l’esprit, sans les contraindre ou les dévaster, permet à la nature et à la vie sociale de donner le meilleur d’elles-mêmes. On est loin, bien entendu, de ces obédiences se prétendant maçonniques, alors qu’elles se contentent d’agir et de penser (?) comme de désuets partis politiques aux préoccupations essentiellement « sociétales ».

L’idée même de la métamorphose est celle d’une création renouvelée faisant créance à l’efficace interne des situations, et qui reconnaît que lorsqu’une forme sociale spécifique est épuisée, c’est une autre qui est appelée à en prendre la relève.

En la matière voir comment la Franc-maçonnerie, protagoniste essentielle de la modernité, est en phase secrète avec la post-modernité naissante. Et ce même si, nombreux sont les membres de diverses obédiences ne voulant pas en convenir, voire luttant contre un tel état de fait.

En effet, ce passage d’une époque à une autre, certains ne veulent pas le voir car l’abâtardissement de la pensée, c’est-à-dire la perte de ses qualités originelles, de sa vigueur propre, freine la reconnaissance de ce qui est. La routine philosophique et les facilités de l’opinion commune, c’est chose fréquente dans le déroulement des histoires humaines, empêchent de voir en quoi, et comment, certaines structures anthropologiques, archétypales, reprennent force et vigueur alors qu’on les avait crues exténuées.

Martin Heidegger

Faut-il, d’ailleurs, le rappeler, l’expression même : « reprendre force et vigueur », que l’on retrouve, fréquemment, dans les textes et les divers rituels maçonniques ne traduit-elle pas l’inéluctable récurrence des phénomènes humains ? Récurrent ne signifie-t-il pas courant en arrière ? C’est-à-dire retourner à la source, revenir au fondamental. Le « Schritt zurück », ce pas en retour vers l’expérience ancestrale, celle de la Tradition, dont la pensée de Martin Heidegger, a montré la pertinence et l’actualité.

Blocage que l’on doit à des élites n’étant plus en phase avec la vie sociale réelle. Et parmi eux nombre de ceux s’affichant francs-maçons sans en comprendre l’intime et profonde inspiration. Quelques-uns, ayant le pouvoir institutionnel, celui de l’opinion publiée, mais qui reste une simple opinion, et oubliant que la pensée n’est jamais et en rien réductible à la facilité exotérique.

Une telle situation peut être éclairée par cette remarque émise, dans le domaine qui était le sien, ses considérations sur la Révolution française, par Joseph de Maistre :

« Il serait à désirer que cette nation impétueuse, qui ne sait revenir à la vérité qu’après avoir épuisé l’erreur, voulût enfin apercevoir une vérité bien palpable : c’est qu’elle est dupe et victime d’un petit nombre d’hommes qui se placent entre elle et son légitime bien ».

Portrait de Joseph de Maistre, par Carl Christian Vogel de Vogelstein, Huile sur toile, vers 1810, Musée d’Art et d’Histoire de Chambéry. (©Wikimedia Commons)

Son « légitime bien » est, pour lui, le souverain. Mais là n’est pas l’essentiel. L’important est l’acuité de son regard. Vision profonde des événements et des hommes lui permettant de noter en quoi une minorité active, obsédée par le pouvoir n’est plus à même de saisir qu’elle est la véritable puissance à l’œuvre dans une époque donnée. Ainsi que le souligne Gilbert Durand dans « Un comte sous l’acacia » (Edimaf,1999), mystique qu’il était, Joseph de Maistre fortement marqué, en sa jeunesse, par la pensée maçonnique, a toujours su voir, au-delà des agitations de surface, quels étaient les courants profonds à l’œuvre dans les histoires humaines.

Georg Wilhelm Friedrich Hegel
Philosophe allemand

Puis-je extrapoler son propos en rappelant, au-delà du mouvement historique suscitant ces « considérations », qu’il est fréquent qu’un « petit nombre d’hommes » s’interposent, jouent les utilités et empêchent, de ce fait, la vraie compréhension d’une société donnée. En la matière, au-delà des aspects affairistes, politiques, voire maffieux dont on la soupçonne, quel est le véritable sens de la Franc-maçonnerie de Tradition ? Peut-être de jouer le rôle de ce que certains nomment le « roi clandestin » de l’époque. C’est-à-dire ce qui régit, véritablement, les manières d’être et de penser. Ce qui agit, souterrainement, mais non moins efficacement. Et ce parce que ceux qui s’en réclament sont en phase avec ce que ce franc-maçon qu’était Hegel nommait le Zeitgeist, l’esprit du temps.

Donc une aristocratie de l’esprit, quelque peu libertaire, et moins préoccupée du pouvoir institué que soucieuse de la puissance instituante.

Portrait de François-René, vicomte de Chateaubriand, par Pierre-Louis Delaval, (vers 1828)

S’agit-il là d’une vue de l’esprit quelque peu utopique ? Pas forcément. Certes, il existe des pesanteurs sociologiques conduisant au « conformisme logique ». Une endogamie favorisant la bienpensance qui répète, à l’infini, des phrases toutes faites et multiplie les lieux communs. Voire, un tel entre-soi peut aboutir à des pratiques perverses où la légitime solidarité s’inverse en passe-droits généralisés où la faveur remplace le mérite. C’est ce que d’antique mémoire on nomme le « pactum sceleris », pacte scélérat. Il s’agit là d’un phénomène récurrent de toute société humaine quelque peu languissante. La médiocrité trouvant un adjuvant de choix dans ce que j’ai nommé la « médiacratie » c’est-à-dire ce qui se contente de l’opinion publiée. N’est-ce point cela que nous rappelle la roborative lucidité d’un Chateaubriand (Mémoires d’Outre-tombe, liv 38,ch 6) : « l’incapacité est une Franc-maçonnerie dont les loges sont en tous pays ». Ces loges, ou pseudos-loges, chacun les reconnaitra dans les obédiences essentiellement « politistes ». ou aux préoccupations uniquement « sociétales » !

Tout cela est bien réel et constitue une évidence qu’il serait vain de nier. Mais au-delà ou en deçà d’un tel abâtardissement subsiste un goût certain pour une pensée exigeante, lucide et enracinée dans la tradition. Cela est particulièrement repérable chez les jeunes générations, n’ayant pas connu les ivresses idéologiques héritées du XIXe siècle que provoquèrent les totalitarismes, en particulier « wokistes », issus de ces théoriques constructions quelque peu paranoïaques.

La paranoïa, certes, en son sens simple, est la maladie psychiatrique que l’on sait, contribuant à une personnalité où dominent rigidité, orgueil, surestimation de soi et, surtout, raisonnements construits à partir d’a priori douteux. Mais n’oublions pas qu’étymologiquement il s’agit d’une pensée se voulant surplombante (para noia en grec). Une pensée qui édicte et qui impose.

Tout autre est la démarche de la Franc-maçonnerie authentique dont le caractère essentiel est l’hétérodoxie. Et c’est en s’éloignant de tout dogmatisme, en relativisant la scholastique que, tout au long du XVIIIe siècle, elle fut en phase avec son temps. C’est de là qu’est issue la tolérance et l’ouverture à l’altérité. Il s’agit là de son principe générateur, on dirait, de nos jours, son code génétique.

Ce qui en fait des penseurs libres. À ne pas confondre avec les « libres-penseurs » dont Nietzsche rappelait qu’ils n’étaient ni libres, ni penseurs !

C’est cette alternative au fanatisme qui attire, de plus en plus, les esprits avides d’exigence spirituelle. Car au-delà des scholastiques du moment, celles de la bienpensance « sociétale », c’est-à-dire « wokiste », il est un défi que nous lance la postmodernité : trouver les mots, les moins faux possible. Mots pouvant devenir paroles fondatrices. N’est-ce point cela la recherche continuelle de ce qu’il est convenu d’appeler la recherche de la « parole perdue » ?

Être en phase avec l’esprit du temps postmoderne. Trouver les mots pour le dire. Cela nécessite quelque audace. Mais l’esprit questionnant est, toujours, aventureux. Il faut, en effet, faire fi des pusillanimités qui sont le propre des esprits étroits. Ne pas avoir peur des responsabilités intellectuelles. C’est-à-dire savoir « répondre » au défi dont il a été question. En bref, voir en quoi les « grands mythes fondateurs » de la Franc-maçonnerie sont, toujours et à nouveau, actuels. Cela ne manque pas de faire mal, d’irriter. Mais, comme le rappelait Virgile, n’est-ce point cela la marque d’une pensée authentique ? « Jubes renovare dolorem », vous m’ordonnez de rouvrir de cruelles blessures. Il faut, en effet, le faire !

Kieffner : 60 ans de Franc-maçonnerie autour de « l’amitié, la moralité et l’amour fraternel »

De notre confrère des USA (Indiana) duboiscountyfreepress.com – ParMatthieu Crane

Il est difficile pour Eugène Kieffner de ne pas pleurer d’émotion lorsqu’il réfléchit à ses 60 années avec les francs-maçons. « Je ne l’abandonnerais pour rien au monde », dit M. Kieffner à propos de son expérience maçonnique. M. Kieffner a été initié à la franc-maçonnerie alors qu’il était encore un jeune garçon et qu’il a remarqué par hasard la bague maçonnique de son oncle Dennis Kieffner. « Elle était remarquable. Elle brillait », a déclaré M. Kieffner. « Je lui ai dit : « Mon Dieu, tu as une bague brillante. » »

Son oncle l’a regardé et a dit : « Oui, un de ces jours, je veux que tu en portes unE. »

Le résident de Haysville, âgé de 83 ans, a récemment reçu le prix du Past Master de 50 ans de la Grande Loge de l’Indiana, un honneur rare reconnaissant ses décennies de leadership et de service.

Une photo de la cérémonie au cours de laquelle M. Kieffner a reçu son prix. De gauche à droite : le maître de la loge actuelle Tyson Cravener, Mike Cravener et M. Kieffner.

M. Kieffner a rejoint la Loge maçonnique Line à Jasper en 1965, la même année où le bâtiment actuel a été inauguré. Il a rapidement gravi les échelons, devenant la deuxième personne élevée au rang de Maître maçon à l’autel de la loge. Il a servi comme Maître pendant deux mandats, en 1975 et en 1982, et a été secrétaire de tous les autres Maîtres de la loge, à l’exception d’un seul.

« Il y a très peu de gens qui vivent assez longtemps pour dire qu’ils sont devenus Maître il y a 50 ans », a-t-il expliqué. « C’est une sorte d’honneur. »

La Loge Line, l’une des trois loges maçonniques du comté de Dubois, compte actuellement environ 60 membres. M. Kieffner considère que son rôle est de préserver l’histoire et d’inspirer une nouvelle génération de francs-maçons.

L’engagement des francs-maçons envers le service communautaire est une source de fierté pour M. Kieffner. En plus des bourses d’études, des événements spéciaux et du soutien aux événements locaux, ils apportent également un soutien aux autres francs-maçons, quelle que soit leur origine.

Il se souvient d’une nuit à la Loge de la Ligne où deux visiteurs inattendus – l’un d’Angleterre et l’autre de Suisse – sont entrés dans la loge, illustrant la fraternité mondiale des francs-maçons.

L’entrée de la Line Lodge présente l’histoire de sa fondation.

Malgré la longue histoire et les traditions de l’organisation, Kieffner reconnaît que de nombreuses personnes ne comprennent pas ce qu’est la franc-maçonnerie. Il espère changer cette perception.

Pour Kieffner, l’essence de la franc-maçonnerie peut être résumée en trois mots : « Amitié, moralité et amour fraternel ».

Il estime que ces principes, s’ils étaient adoptés plus largement, pourraient avoir un impact profond sur la société. « Si 1 % des gens de l’extérieur du mur profitaient de ce qui se passe dans cette salle, nous n’aurions pas les problèmes que nous connaissons aujourd’hui dans le monde », a-t-il affirmé.

« Il n’y a aucun endroit au monde où vous ne rencontrerez pas un franc-maçon », a déclaré M. Kieffner.

Alors que M. Kieffner regarde vers l’avenir, il voit une opportunité pour les trois loges maçonniques du comté de Dubois de travailler ensemble pour sensibiliser à leur histoire et à leur engagement communautaire continu.

En réfléchissant à ses six décennies de service maçonnique, la passion de Kieffner pour l’organisation reste intacte. Ses yeux s’illuminent lorsqu’il raconte des histoires d’anciens membres, des projets communautaires et les liens durables de la fraternité.

« C’est vraiment agréable d’accueillir un nouveau membre », déclare M. Kieffner. « On noue de nombreux liens. »

Pour Eugène Kieffner, la franc-maçonnerie n’est pas seulement une organisation : c’est un mode de vie qui a façonné son caractère, élargi sa vision du monde et lui a donné une plate-forme pour servir sa communauté pendant plus d’un demi-siècle.

« J’aime voir le bonheur. J’aime voir les gens sourire. Cela fait partie de la franc-maçonnerie », a-t-il déclaré.

M. Kieffner et son épouse, Judy, sont mariés depuis 60 ans et vivent à Haysville. Ils ont deux filles, Tara Betz et Michelle Schmitt.

M. Kieffner pose pour une photo avec les outils de travail du maçon.

Le match striatum / cortex, lourd par ses conséquences

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Certaines de nos facultés mentales, comme la liaison striatum/cortex, peuvent se « muscler », voici pourquoi et comment.

Sébastien Bohler est titulaire d’un diplôme de neurologie, mais est aussi le directeur de la revue «  Cerveau et psycho ». A ce titre, il fait métier de vulgariser ces neurosciences toutes jeunes. Elles ont pris leur essor grâce à l’IRMf, Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnelle. Ce fonctionnelle désigne que l’observation se focalise sur le cerveau en cours de fonctionnement, par exemple en pilotant les mains , en visionnant des images, ou en réfléchissant. A l’écran les zones du cerveau activées s’affichent en couleurs différentes. Tout ceci a suscité beaucoup d’espoir, mais une douche froide est venue de ce que les fonctions et les circuits physiques sont disons mélangés . Nous expliquions cette complexité dans un précédent article, basé sur les livres d’Albert Moukheiber.  

Mais notre Sébastien Bohler ne se sent pas empêché d’expliquer un tas de processus de manière simple et déterministe. Sans doute est-ce à imputer à son objectif obsessionnel de nous expliquer quoi faire pour sauver la planète, et nous en convaincre. Ceci étant dit, le livre nous captive comme un roman, comme ses précédents.

Et on y apprend des trucs !

D’abord, l’immense majorité des espèces vivantes se débat quasiment tout le temps dans les étages bas de la pyramide de Maslow. Il y a donc des besoins basiques qui ne sont pas satisfaits ou de manière trop aléatoire : faim, soif, besoin de chaleur, de protection, etc. Pas question donc de monter dans les étages des désirs, culminant à l’accomplissement de soi. On le sait depuis les anciens grecs :  pour philosopher, faut avoir le ventre plein. L’évolution, sans doute émue de tant de souffrances ( je rigole ! ) nous a dotés de circuits qui ont pour mission, en quelque sorte, de nous regonfler un peu le moral. Et surtout, de nous mettre sur la bonne voie, celle de la survie de l’espèce. L’organe central chargé de cette mission, c’est le striatum. Il dispose des capteurs qui analysent les comportements, et il récompensera les comportements « qui vont dans le bon sens ».

Cela se passe sous forme d’un shoot de dopamine dispensatrice de sensations agréables. Cette dopamine viendra renforcer les circuits neuronaux qui ont permis ce bon comportement, en reliant les zones concernées ( par exemple celles du plaisir gustatif ) au striatum. A son tour, ce renforcement facilitera la reproduction de ce comportement dans le futur. Tout ceci se passe en automatique ( pas d’intervention de la conscience ). Et concerne surtout des plaisirs basiques et court-terme :  manger, boire, jouer, faire l’amour…

Tout cela nous ramène-t-il au niveau des enfants ? On voit Winnie l’ourson qui ne résiste pas au miel… Mais on voit aussi les ados accros aux jeux vidéo, ou les adultes accros aux petites vidéos « divertissantes » des réseaux sociaux, qui les noient en fait de pubs. Au final on voit aussi les junkies addicts à leur shoot quotidien.  Oui, laissé seul au commandes, le striatum ne nous tire pas vers le haut !

Car il a un adversaire, qui s’appelle le cortex .

Et surtout le cortex préfrontal, tout devant dans la boîte crânienne : c’est le porteur de la raison. Va  t on se retrouver avec le vieux face à face raison contre cœur ? Pas tout à fait ;  ce serait plutôt le ça contre moi + surmoi, ou système 2 contre système 1.

Le cortex est capable d’analyser le pour et le contre des choix pour le court et le moyen/long terme, et de prendre une décision éclairée sur cette base. Lui aussi a été un allié de choix pour obtenir la survie de l’espèce. Il existe un faisceau neuronal qui relie le cortex préfrontal et le striatum. Le cortex dispose d’un droit de véto des actions préconisées par le striatum. Ce frein se muscle lors de la sociabilisation de l’humain.

Première phase : à la petite enfance, le cortex du bébé, qui n’était pas fini à la naissance, se structure et se renforce . A l’âge de raison, tout est en principe sous contrôle ( sauf chez les enfants-rois…) .

Deuxième phase :  l’adolescence, au cours de laquelle tout est fait pour obtenir la reconnaissance du groupe ( des likes…) . L’étudiant sera devant le lourd choix de sacrifier des plaisirs immédiats avec les copains et copines dans le but de décrocher son diplôme.

Cela fait penser au «  Gloire au Travail » que l’on trouve dans les textes maçonniques.

C’est donc en phase avec les philosophies anciennes. Nous avions donc un équilibre entre striatum ( panem et circenses ) et cortex.

Oui mais, la technologie est arrivée, et avec elle ( et l’abondance d’une énergie bon marché ) les besoins basiques de la pyramide de Maslow ont été entièrement satisfaits dans nos pays. La première victime de tout cela a été la cohésion sociale. Jusque-là, la solidarité n’était pas une option mais une condition nécessaire à la survie de l’espèce. Désormais, celui qui dispose du pouvoir d’achat peut obtenir ce qu’il veut sans dépendre de personne :  c’est l’avènement de l’individualisme.

L’abondance fut telle que la majorité de nos populations pouvaient s’offrir un style de vie individualiste ; la seule limite était celle du pouvoir d’achat. Joli gâteau pour les commerçants, habiles à créer d’artificiels nouveaux besoins.

Pour Bohler donc, affaiblir l’individualisme de nos sociétés est un préalable si on veut rendre la sobriété acceptable . Ensuite, il faut aussi muscler le frein du cortex préfrontal, lors de l’éducation des enfants. Cela passe par une réhabilitation de l’effort, alors que ces dernières années on a toujours cherché à développer le caractère ludique de l’enseignement. Exit la gamification de la société ?

Mais chez les adultes également il existe des méthodes pour muscler le fameux frein. Ces techniques dites Go/no Go permettent d’associer à l’envie que l’on cherche à contrôler à une vision du bon geste à faire .

On se souvient du test du chamallow, vérifiant la résistance d’un enfant au plaisir immédiat.

Tout de même, n’oublions pas que si certains enfants résistent le temps voulu au chamallow immédiat, c’est dans la perspective d’en avoir deux peu après. Le soutien est conditionnel, et la condition est que les répartitions soient équitables ( le test de l’ultimatum mesure bien cette nécessité ) .

En maçonnerie, on n’est donc pas trop mal placés par rapport à ces préceptes :  notre liberté absolue de conscience est clairement individualiste, mais on compense par l’importance de la fraternité et de la solidarité. Bref, on vise les avantages des groupes ou communautés sans leurs inconvénients. On aime le travail, sur soi ou en groupe. Et notre liberté de penser fait que notre soutien aux causes est lui aussi conditionné à l’équité. 

Mais le drame des efforts que l’on nous recommande afin de « sauver la planète » est que la condition d’équité ne semble absolument pas remplie :  pas de confiance dans nos dirigeants politiques, qui ne voient rien au-delà de la prochaine échéance électorale, et pas de confiance non plus que les efforts seront équitablement répartis entre les pays :  voir les centrales à charbon qui poussent partout hors France, de l’Allemagne à la Chine.  Déjà que le striatum est tout sauf le moteur des efforts désagréables, si en plus la justice n’est pas au rendez-vous, on conclut que nos populations ne sont pas prêtes à se défaire des ( derniers ? ) plaisirs sponsorisés par le circuit de la récompense. Enfin, tant qu’il y a la démocratie….et un peu de liberté individuelle : devoir tous les matins faire allégeance à un commissaire du peuple idéologique, un dictateur ou un intégriste religieux, non merci !

Texte rédigé sans IA !

Comment bâtir un avenir et faire briller ses idées ?

En devenant Franc-maçon !

Si les oeuvriers se lèvent et se remplacent, c’est, déjà, parce que les colonnes sont bien « garnies » ! Et pour que les colonnes se parent de nouveaux maillons, il faut bien de nouveaux apprentis… Il faut donc communiquer ; il faut donc recruter !

Cliquez sur le lien et remplissez le formulaire. Nous vous contacterons dans les plus brefs délais !

Le nouveau Musée de la Grande Loge de France : un projet culturel et immersif

Le nouveau Musée de la Grande Loge de France, situé au siège de l’obédience au 8 rue Louis Puteaux, dans le 17e arrondissement de Paris, est un projet ambitieux qui devrait être ouvert le 27 mars prochain, sous l’impulsion de Thierry Zaveroni, grand maître de la GLDF depuis 2022. Après une année de travaux intensifs, ce musée rénové s’inscrit dans une volonté de moderniser la transmission du patrimoine maçonnique tout en restant fidèle à ses racines historiques et spirituelles.

Un lieu repensé pour le public

Cliquez sur l’image ci-dessus afin d’écouter l’émission « Divers aspects de la pensée contemporaine »

Autrefois un espace plus traditionnel, le musée a été entièrement repensé pour devenir un lieu « vivant » qui tisse un dialogue entre tradition et modernité. Il s’articule autour d’un triptyque unique appelé MAB (Musée, Archives, Bibliothèque), inspiré des muséions antiques – ces temples grecs dédiés aux Muses, symboles de savoir et d’inspiration. L’objectif, selon Marcela Louvel, conservatrice du musée et membre de l’Institut national du patrimoine, est de « valoriser cet héritage unique pour le partager et l’inscrire dans un dialogue avec la société contemporaine ».

Le parcours de visite se divise en trois étapes symboliques :

  1. Rez-de-chaussée : Une introduction au patrimoine maçonnique avec des objets emblématiques (tabliers, épées, médailles).
  2. Ascension spirituelle : Un grand escalier restauré, chargé d’histoire, mène à un espace mémoriel dédié aux francs-maçons de la Résistance, rendant hommage à leur engagement durant la Seconde Guerre mondiale.
  3. Espace immersif : Une section interactive avec des supports multimédias pour explorer les rituels, les symboles et l’histoire de la franc-maçonnerie.

Une collection exceptionnelle

Le musée abrite près de 4 000 pièces, parmi lesquelles :

  • Objets rituels : Tabliers brodés du XVIIIe siècle, épées maçonniques, porcelaines rares.
  • Documents historiques : Un registre de délibérations datant des origines de la GLDF, témoignant de ses racines profondes.
  • Textiles et bijoux : Des cordons, sautoirs et médailles illustrant les grades et les rites, notamment le Rite écossais ancien et accepté (REAA), pilier de la GLDF.

Ces collections, enrichies par des prêts internationaux et des restaurations menées en partenariat avec l’École de Condé, offrent un panorama complet de trois siècles d’histoire maçonnique.

Une approche moderne et ouverte

L’ambition du nouveau musée est de s’adresser à tous les publics : francs-maçons, chercheurs, scolaires ou simples curieux. Des visites thématiques et des outils numériques (écrans interactifs, reconstitutions virtuelles) rendent l’expérience accessible et engageante. Selon Max Aubrun, président délégué au MAB, ce projet illustre une « volonté d’ouverture » de la GLDF, qui cherche à dépasser son image de société discrète pour devenir un acteur culturel reconnu.

Le musée s’inscrit aussi dans une dynamique collaborative, notamment avec l’Association of Masonic Museums, Libraries and Archives in Europe (AMMLA), présidée par la GLDF depuis 2005. Cette ouverture se reflète dans des événements passés, comme les Journées du Patrimoine, où le siège de la rue Puteaux a attiré des milliers de visiteurs.

Un hommage à la mémoire et à l’avenir

Temple Pierre Brossolette, Grand Temple de la Grande Loge de France.
Temple Pierre Brossolette, Grand Temple de la Grande Loge de France.

Un espace notable est dédié à la Loge Clio – du nom de la muse de l’Histoire – pour souligner que « transmettre, c’est prolonger la mémoire du monde ». L’exposition sur les francs-maçons résistants, avec des témoignages et des objets d’époque, rappelle leur rôle sous l’Occupation, lorsque le régime de Vichy avait interdit la franc-maçonnerie et pillé ses temples.

Ce musée ne se contente pas de regarder le passé : il se projette dans l’avenir en posant des questions sur la place de la franc-maçonnerie dans un monde en mutation. Comme le note France Culture, il s’annonce comme « un trait d’union entre passé, présent et avenir ».

Informations pratiques :

  • Adresse : 8 rue Louis Puteaux, 75017 Paris.
  • Visites : Traditionnellement, le musée est ouvert le 2e et 4e mercredi de chaque mois (10h-12h ou 14h-16h), mais des horaires spécifiques pour l’inauguration reste à confirmer. Consultez www.gldf.org pour les mises à jour.
  • Contact : 01 53 42 41 41 ou via le site officiel.

Pourquoi ce musée intrigue-t-il ?

Ce projet arrive à un moment où la GLDF, forte de 32 000 membres et 940 loges, cherche à renforcer sa visibilité culturelle. Initié sous Pierre Simon dans les années 1970, le MAB a évolué pour devenir un pôle d’excellence, et cette rénovation marque une étape majeure. Si vous êtes passionné d’histoire, de symbolisme ou simplement curieux de découvrir un univers souvent méconnu, ce musée promet une expérience captivante.

Septième degré du REAA Prévôt et Juge ou Maître Irlandais

Le « Prévôt et Juge » ou « Maître Irlandais », l’un des plus anciens grades de la Maçonnerie française, était déjà connu sous ce nom en 1745 dans l’Ancienne Maîtrise parisienne en quatorze degrés, en 1750 dans l’Ancienne Maîtrise bordelaise en douze degrés et même avant, puisqu’il reste un tableau daté de 1711 (Aujourd’hui utilisé pour ce grade par la Grande Loge de France). Ce grade est donc antérieur à la création du REAA (1804).

Le nombre sept de ce degré, nombre particulièrement sacré, devrait nous inciter à la prudence en ce qui concerne une interprétation rapide ou l’idée de s’en débarrasser, soit en ne l’étudiant plus, soit en faisant appel à un rituel funéraire chinois, tout en faisant l’impasse sur le mot de passe Tito, sous prétexte, comme l’écrit avec raison Irène Mainguy, qu’il s’agit d’un véritable « casse-tête chinois ». Et ce d’autant que les deux T de Tito n’apparaissent pas toujours sur les tableaux de loge comme c’est le cas sur ce premier tableau.

Le rituel du REAA 1804 (Kloss XXVII)

Ce degré, nous dit-on, concerne l’organisation judiciaire des ouvriers du temple de Salomon après la mort d’Hiram ou plutôt de Khiram ou de Chiram car Hiram ne commence pas par un h latin mais par un ‘Heith hébreu qui se prononce comme un Ch allemand soit comme le Ch de Bach.

L’édification du tombeau de Khiram ayant été le thème du 5ième degré, nous retrouvons Salomon et les travaux du temple après l’épisode de Johaben, veillant sur la sécurité du roi au risque de sa vie au 6ième degré. Salomon crée alors un septième grade, le « Prévôt et Juge ». Johaben en sera le premier candidat après un certain Tito.
Le « Prévôt et Juge » doit rendre la justice et être le gardien d’une part des plans du Temple conservés dans une boite d’ébène et d’autre part du cœur embaumé d’Hiram placé dans une urne flamboyante. Pour cela il recevra une clef d’or qui servira à ouvrir la cassette où se trouvent les plans du temple et ouvrir le lieu où se trouvent le corps et le cœur d’Hiram.

Que ce grade soit le septième n’est pas anodin d’autant que le nombre sept, en hébreu est la lettre hébraïque, Zayin, mot, qui signifie « clef » et que, dit le rituel, «La clef d’or est la marque distinctive de ce grade. »

On peut donc penser que ce degré nous donne des clefs d’interprétation intéressantes, non seulement pour lui-même mais également pour l’ensemble du REAA. Il n’empêche : ce degré est particulièrement un degré à clefs !

Le Président de la loge représente Tito, prince des harodim (‘Heith Reish Daleth Yod Mem) nombre 7 (pluriel de harod) et mot que l’on ne trouve qu’une fois dans la Bible. Ces harodim sont les chefs surveillants ou préfets dans I Rois V, 30. Il y en 3300.
Bien qu’il n’y ait pas de Tito dans la Bible et que ce mot n’existe pas, le rituel maçonnique fait de lui Le Plus Ancien des Prévôts et Juges, Grand Surveillant et Inspecteur des 300 architectes (qui ne sont pas dans la Bible non plus) qui étaient destinés à lever les plans pour les ouvriers.

Il n’est pas dans un lieu précis : il est partout pour veiller à la conduite de l’ouvrage.

Décoration

La loge est tapissée de rouge. Rouge comme le feu de l’Éternel, avec à l’Orient un dais d’azur. Elle est éclairée par cinq grandes lumières, une dans chaque coin plus une au milieu, marquant ainsi les quatre points cardinaux plus le centre, soit l’ensemble du monde.

Heures d’ouverture et de fermeture :

« Huit heures, deux et sept », les mêmes pour l’ouverture et la fermeture des travaux. Car il n’y a pas d’heure pour rendre la justice, tout comme il n’y a pas de lieu.

Batterie

4 +1 détaché, rappelant la position des cinq lumières, les quatre points cardinaux plus le centre.

Réception

Le récipiendaire est à nouveau Johaben (celui qui est devenu le conseiller de Salomon dans le degré précédent). Il reçoit la clef d’or et voit dans le temple une balance, symbole de justice, ainsi que l’urne contenant le cœur d’Hiram.

Placé entre les deux Surveillants, le 1er Surveillant lui ordonne de s’agenouiller et dit : CIVI puis lui pose son épée nue sur l’épaule et après une minute, le 3 Fois Illustre dit : KI
Ensuite le 1er surveillant lui fait faire 7 voyages récapitulant les signes des grades au passage. Après quoi, le 3 Fois Illustre lui confie la clef du lieu où sont placés le corps et le cœur de Khiram Abif.

Instruction

-Etes-vous Prévôt et Juge ?
-Je rends la justice à tous les ouvriers sans exception
-Que veut dire CIVI ?
-Mettez-vous à genoux.
-Et KI ?
-Relevez-vous.
-Que vous a-t-il donné ?
-Une clef d’or

Dans une urne placé en haut d’un obélisque.
-Que signifie les deux lettres X et J ?
-XENICE et JACQUINAI
-Que signifient les lettres J H S surmontées d’une branche d’acacia ?
-J, JVA ; H, Hiram et S, Stolkin.

Quel est l’usage de cette clef ?

Elle sert à ouvrir une petite boite d’ébène dans laquelle sont déposés tous les plans nécessaires à la construction du temple.
-Quelle est la parole de passe ?
-TITO
-Où repose le cœur d’Hiram Abif ?

Notons qu’il s’agit là des anciens rituels, ceux de 1745 et de 1750 : on y retrouve les mêmes significations pour les lettres X et J soit Xenice et Jacquinaï et non pas du chinois genre Xinxee !

Chez Franken (1783) dans le Rite de Perfection Xenice est devenu Xinxee de sorte X et J dans le tableau de loge signifient Xinxee et Jakinaï ! Et il est vrai que Xinxee pourrait bien évoquer une sonorité chinoise. Et il semble bien que c’est grâce à cette erreur de transcription que soit née l’idée d’un rituel chinois comme certains veulent bien nous le faire croire ?

Or il nous paraît logique de se référer aux mots d’origine plutôt qu’à ceux déformés au cours de la transmission. Mais mettons.
Commençons par le commencement si l’on peut dire : soit l’un des titres du degré « Prévôt et Juge ».

Certes ce degré concerne l’organisation judiciaire des ouvriers du temple de Salomon après la mort d’Hiram, mais on l’a vu le Prévôt et Juge n’a ni lieu ni heure pour rendre la justice…

Le plus ancien des Prévôts et Juges

Où se trouve donc Tito, ce « plus ancien Prévôt et Juge », « prince des Harodim », soit des nobles ou des puissants comme des membres importants parmi les douze tribus d’Israël, ayant avec lui 300 « architectes » ?

Ne serait-ce pas logiquement dans le Livre des Juges en hébreu « Juges » Shophetim (Shin 300 + Pé 80 + Teith 9 + Yod 10 + Mem 40 = 439 = 16 = 7) dont le nombre est sept comme celui de ce degré ?
Juge Shofèt et Prévôt Shitef ! Deux mots commençant par un Shin nombre 300.
Cherchons-le donc dans le Livre des Juges :
Dans ce livre, qui fait suite à Josué, les fils d’Israël ont du mal à rester fidèles à Yahvé. Sacrifiant aux autres dieux, ils suscitent sa colère et se retrouvent impuissants devant les autres nations. Ils pleurent.

Des Sauveurs

Si les juges d’Israël existent depuis Moïse (Exode 18) qui les constitua, on les voit dans Josué le suivre, marchant avec lui aux côtés de la Tente et de l’Arche d’Alliance, que les Lévites transportaient. Dans le Livre des Juges, ils deviennent des chefs de guerre :
Yahvé suscitent régulièrement aux fils d’Israël des Juges, qui, dorénavant, prenant les choses en mains, les « sauvent », rétablissent la situation, leur permettent de continuer leurs conquêtes et les mènent à la « victoire ».

Le premier « Sauveur » Moshia en hébreu – car c’est aussi comme ça qu’on les appelle- est Othniel qui sera juge durant quarante ans, le quatrième sera Deborah, la prophétesse vers qui « les fils d’Israël montaient pour le jugement ».

Le cinquième en rapport avec le nombre cinq de la batterie c’est Guid’ôn (Guimel 3+ Daleth 4 +Ayin 70 + Vav 6 + Noun 50 = 133 = 7), nombre sept, en français Gédéon…

Il doit, sur ordre de Yahvé, sélectionner 300 guerriers, après avoir éliminé tous les autres milliers dont il dispose. Ce qu’il fait et Yahvé lui fait gagner la guerre. C’est la Victoire.
Ainsi, s’il n’y a pas de Tito dans la Bible, ni de Grand Surveillant ou Inspecteur travaillant avec 300 architectes, il y a bien là le Premier Juge et Prévôt à la tête d’une armée architecturée sur 300 guerriers.

Trois cents et le Tau grec

Les commentateurs chrétiens de la Bible, depuis les premiers Pères de l’Église jusqu’au XVI° siècle, ont fait de l’Ancien Testament une figure du Nouveau, mettant un certain nombre de scènes de l’Ancien Testament en rapport avec des scènes de l’Évangile pour en faire sentir la profonde concordance.
C’est ainsi par exemple qu’ils vont expliquer l’histoire de Gédéon en la fondant sur les chiffres et l’alphabet grec !
Ils nous expliquent que « Si Gédéon entre en campagne avec trois cents compagnons, ce n’est pas sans raison profonde, car il y a dans le nombre trois cents un mystère. En grec, trois cents se rend par la lettre Tau (le T grec) T : or cette lettre est la figure de la croix, celle de la crucifixion. Donc, par-delà Gédéon et ses compagnons , il faut voir Jésus et sa croix »

Ainsi l’écrivait Walafried Strabo (808-849) dans sa Glose ordinaire (dans Juges VII) mais déjà Isidore de Séville (560-636) écrivait que la victoire remportée par Gédéon avec ses trois cents compagnons préfigurait la victoire que le Sauveur remportera en mourant sur la croix parce que le nombre de trois cents (T) est le hiéroglyphe même de la croix.

Cette interprétation du nombre 300 fut répétée sans cesse par les Pères de l’Église en commençant par Barnabé (II° siècle) dans son Épître. Suivie par Clément d’Alexandrie (150-215) qui le cite : « Par sa forme (T) la lettre qui représente 300, est dit-on une figure du signe du Seigneur », puis par St Augustin (354- 430), puis par Raban Maur (780- 856).
Enfin Thibaut de Langres à la fin du XII° siècle reprit cet argument dans son Traité sur le symbolisme des nombres .

Dans l’Apocalypse. Le Tau grec : le signe des Justes

Dans l’Apocalypse, dernier chapitre du Nouveau Testament, écrit en grec, ce sera donc le Tau grec « T » de valeur 300, qui sera le signe des Justes. Il sera donc gravé sur leur front.
300 et les 24 vieillards, les 24 juges de l’univers :
Or, écrit Thibaut de Langres, « on trouve remarquable le nombre de 300 soldats de Gédéon parce que 300 a pour origine le nombre des 24 vieillards ».
En clair le triangulaire de 24 est égal à 300.
Et justement ces 24 vieillards sont présents dans l’Apocalypse : Ils entourent le trône de Dieu que Jean de Patmos voit dans le ciel et sont eux même assis sur des trônes et portent des couronnes. On les retrouvera au 17ième degré du REAA.
Ils font référence aux 24 étoiles nommées Juges de l’univers dans l’astronomie chaldéenne rapportée par Diodore de Sicile : les 12 au-dessus de l’Équateur affectées aux êtres vivants, les 12 au-dessous, aux morts.
Par ailleurs, l’Apocalypse qualifie le Tau grec, ce signe des Justes, de « Sceau du Dieu Vivant » sphragida theou zôntos, transposition du « Dieu Vivant » ou de « Dieu la Vie » de la Bible hébraïque Elohim Khaïim (pluriel de Khaï qui s’écrit ‘Heth Yod et transcrit en français donne le fameux « Ki » signifiant « relevez-vous » en chinois !). Ceux qui seront marqués de ce sceau seront sauvés.

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« Moi, Éternelle Apprentie » : Lumières et ombres sur la pratique maçonnique de Nicole Assélé

De notre confrère gabonais gabonactu.com – Par M.-O. Mignonne, proposé par Frida Dodo et Christine Thélin Ondo

Du militantisme féminin à la littérature, Dr Nicole Assélé a choisi l’écriture pour briser les tabous et transformer ‘’l’essai’’, en commettant ce livre « Moi, Eternelle Apprentie », qui relate 34 ans de vie et de pratique maçonnique, pour celle qui compte parmi les fondatrices de la Loge maçonnique féminine du Gabon, dénommée ‘’Okoumé Torche de l’Equateur’’, affilée à la Grande Loge Féminine de France, où elle est ‘’passée sous le bandeau’’, où elle a fait son entrée en Franc-maçonnerie, a-t-on appris.

Pascal Binéné, enseignant de philosophie a, dans son rôle de critique littéraire, lors de la présentation de cet ouvrage (essai), le premier de l’auteure, renseigné que son « contenu est tellement richement détaillé qu’il nous suffirait simplement de lire page par page » ce coup ‘’d’essai’’ et non moins coup de ‘’maîtresse maçonne’’, fait dire au président de l’Union des écrivains gabonais (UDEG), Eric Joël Békalé, présent lors de cette cérémonie dédicace à la Chambre de commerce de Libreville, dira qu’il s’agit d’ « un livre scientifique qui relate un parcours initiatique ».   

Œuvre passionnante s’il en est, « Moi, Eternelle Apprentie » , parue aux éditions Abeme, l’éditrice Pulchérie Abeme Nkoghé, se tenant du reste aux côtés de l’auteure; enrichie de toute évidence la documentation maçonnique et la production locale en la matière, plutôt rare et discrète.

Toujours imprévisible et déroutante, l’auteure pénétrée par le symbolisme chère à la fraternité maçonnique, « ici, tout est symbole qu’il faut savoir décrypter pour avancer dans la vie », dit-elle, considère comme symbole et donc l’opportunité de commettre cet ouvrage-vérité, l’année des 30 ans de création et d’existence de la Loge féminine maçonnique du Gabon.  

« J’écris pour ouvrir les yeux aux profanes. Nous y entrons pour transformer nos défauts en qualités. Les loges sont des laboratoires pour réfléchir sur le devenir de nos sociétés, de nos pays et aujourd’hui, je peux dire que la Franc-maçonnerie féminine est bien implantée au Gabon », a-t-elle révélé, au sujet de la franc-maçonnerie qui rassemble des hommes et des femmes libres et de bonnes mœurs, « pour apprendre à vous connaitre et à travailler d’abord sur vous-même », souligne Nicole Assélé.

L’auteure, entre l’éditrice et le critique littéraire© Gabonactu.com

« Moi Eternelle Apprentie », apprentie parce que l’auteure dit demeurer sur les  »planches » et les tablettes de l’apprentissage, du haut de ses 34 années de pratique maçonnique, est un ouvrage de 237 pages qui se décline en trois parties relatant chacune, toutes réserves et proportions gardées, les péripéties de l’entrée en maçonnerie de la ‘’jeune étudiante qui n’avait alors que 26 ans ; son parcours et sa pratique maçonnique, ainsi que les symboles maçonniques.

Et c’est là où Nicole Assélé fait tomber les masques. « Aujourd’hui, je peux dire que, sans un seul doute que la franc-maçonnerie m’a aidée à me retrouver dans les aspects multiples d’une femme de notre époque et surtout à m’assumer. J’ai appris à éliminer toute forme de jugement. L’humilité pour pouvoir savoir avec une autodiscipline : Rigueur – Persévérance – Obéissance. Oser, Vouloir, Savoir et se Taire, sont quatre qualités fondamentales que doit symboliser une initié », a-t-elle exhorté.

A propos des préjugés si promptement partagées et considérées au Gabon et en Afrique, souvent frappés par l’incompréhension et la méfiance à l’égard de ce qui est perçu comme différent, Nicole Assélé affirme sans ambages que « Je suis entrée librement dans cet ordre, non pas sous l’emprise de secrets indiscrets qui seraient destinés à nous isoler, mais par un désir authentique de connaissance et d’épanouissement personnel, de quête de sagesse et de vérités profondes », assure-t-elle.

Vue partielle d’une assistance captivée par les récits et explications de l’auteure © Gabonactu.com

Pédagogue à souhait, elle ne manque pas de prévenir pour autant qu’il est essentiel de ne pas confondre l’idéal maçonnique avec la réalité de chaque individu. « Tous les maçons ne sont pas nécessairement des figures d’exception, mais chaque membre de notre ordre peut aspirer à l’excellence et transcender ses limites personnelles », a-t-elle précisé.

Disponible sur le marché au prix de 20 000 Francs CFA, « Moi, Eternelle Apprentie » est le premier ouvrage de Nicole Assélé. Femme aux multiples facettes, cette ancienne sportive de haut niveau, amateure de pêche et de musique et maintenant passionnée d’écriture, elle est Médecin – Colonel des Forces armées gabonaises.

Deux fois ministres (Formation professionnelle et Sports) et ancien Directeur général de la CNSS (Caisse nationale de sécurité sociale) et de la SGEPP (Société gabonaise d’entreposage des produits pétroliers), Nicole Assélé est présidente du Mouvement féministe ‘’L’Appel des mille et une’’ et pleinement engagée dans la lutte contre les discriminations faites aux femmes.    

Francs-maçons en Russie : histoire, structure et influence

De notre confrère Russe gallerix.ru

L’histoire de la fraternité maçonnique s’étend sur plus de trois siècles, au cours desquels elle est passée d’une guilde de bâtisseurs médiévaux à un mouvement philosophique mondial. L’organisation, connue pour ses symboles, ses rituels et ses principes d’égalité, continue de susciter l’intérêt en tant qu’objet de recherche et source de théories du complot. La franc-maçonnerie est fondée sur les idées d’amélioration personnelle, de solidarité fraternelle et de recherche de vérités spirituelles, exprimées à travers le symbolisme architectural et les allégories.

L’origine et l’évolution du mouvement maçonnique

À l’Assemblée générale de la Grande Loge de Russie, à Veliki Novgorod, le 2 juin 2024, organisée par le Grand Maître, Andreï Bogdanov (assis, 6e en partant de la g.). © FACEBOOK ANDREY BOGDANOV

Les racines de la Franc-maçonnerie sont liées aux corporations artisanales de francs-maçons qui existaient en Europe depuis le début du Moyen Âge. Les équipes de construction qui ont édifié les cathédrales gothiques ont développé un système de connaissances professionnelles qui était transmis à travers des rituels d’initiation. Les guildes de francs-maçons avaient une structure fermée et leurs membres s’appelaient entre eux « frères ». Au XVIIe siècle, les guildes ont commencé à accepter des personnes non associées à la construction. Cela a conduit à la transformation de la franc-maçonnerie opérationnelle (artisanale) en franc-maçonnerie spéculative (philosophique).

La date officielle de fondation de la Franc-maçonnerie moderne est considérée comme le 24 juin 1717, lorsque quatre loges londoniennes se sont unies pour former la Grande Loge d’Angleterre. Au milieu du XVIIIe siècle, le mouvement s’était répandu dans toute l’Europe et l’Amérique, s’adaptant aux réalités culturelles et politiques de différents pays. Au cours des Lumières, les francs-maçons furent associés aux idées de liberté, d’égalité et de rationalisme, ce qui suscita la méfiance des monarchies et de l’Église.

Les premières étapes du développement en Europe

Les premières loges maçonniques en Europe continentale sont apparues en France, en Allemagne et aux Pays-Bas. Les rituels et la structure de l’organisation empruntent des éléments aux ordres chevaleresques, à l’alchimie et à la Kabbale. Dans les années 1730, des différences apparurent entre les « anciennes » et les « nouvelles » loges, conduisant à la formation de deux branches principales :

  • La franc-maçonnerie anglo-saxonne (la Grande Loge d’Angleterre) a conservé l’accent mis sur les trois degrés traditionnels (apprenti, compagnon, maître) et sa neutralité en politique.
  • La Franc-Maçonnerie continentale (le Grand Orient de France) autorisa la création de degrés supplémentaires et participa plus activement au débat public.

Dans l’Empire russe, les loges maçonniques ont commencé à apparaître sous Pierre Ier, mais le mouvement a prospéré pendant l’ère Catherine. Des personnalités comme Nikolaï Novikov et Ivan Elagin ont promu les idées éducatives en ouvrant des écoles et des bibliothèques. Cependant, en 1822, Alexandre Ier interdit la franc-maçonnerie en tant que « société secrète », ce qui obligea la confrérie à entrer dans la clandestinité.

Structure et principes organisationnels

Lutte contre la franc-maçonnerie. – Poursuite de la conspiration maçonnique. « Francs-maçons » contre l’URSS. – Résolution de l’Église orthodoxe hors de Russie.

La base d’une organisation maçonnique est une loge – une association locale de membres qui tient des réunions régulières. Les Loges sont organisées en  Grandes Loges ou Grands Orients , qui contrôlent les activités au niveau national ou régional. Par exemple, la Grande Loge Unie d’Angleterre (UGLE) est considérée comme la plus ancienne structure administrative.

Degrés d’initiation

La Franc-Maçonnerie traditionnelle comprend trois degrés de base :

  1. L’Apprenti est un débutant qui étudie les bases du symbolisme et de l’éthique.
  2. Compagnon – un membre qui approfondit les aspects philosophiques de l’enseignement.
  3. Le Maître est un membre à part entière, capable de diriger la loge.

Des degrés supplémentaires (par exemple, le Rite écossais propose 33 degrés) permettent l’étude des traditions ésotériques, mais ne sont pas obligatoires. La transition entre les degrés s’accompagne de rituels, notamment de pièces allégoriques et de conférences.

Principes éthiques

La Franc-Maçonnerie se positionne comme un système moral basé sur la foi en un Être Suprême (le Grand Architecte de l’Univers). Les membres sont tenus d’adhérer aux principes suivants :

  • L’amour fraternel est le soutien des camarades dans les situations difficiles.
  • La vérité est la poursuite de la connaissance par la pensée rationnelle.
  • La charité est une activité charitable et une assistance aux personnes dans le besoin.

Les discussions politiques et religieuses sont interdites lors des réunions pour éviter les conflits. Cette règle n’a cependant pas toujours été respectée dans l’histoire – par exemple, les loges françaises du XVIIIe siècle sont devenues une plate-forme de critique de l’absolutisme.

Symbolisme et rituels

Les symboles maçonniques sont empruntés aux outils des francs-maçons médiévaux, aux récits bibliques et à la philosophie antique. Chaque élément porte une signification allégorique associée à la connaissance de soi et à l’amélioration morale.

L'œil qui voit tout

Symboles clés

  • Le compas et l’équerre représentent l’harmonie entre le spirituel et le matériel. Le compas symbolise le ciel et la raison, l’équerre symbolise la terre et les actions pratiques.
  • L’œil qui voit tout est un rappel de la providence divine et de la responsabilité morale.
  • Les colonnes de Boaz et de Jachin sont les portes du Temple de Salomon, signifiant le passage de l’obscurité à la lumière.
  • L’acacia est un symbole de l’immortalité de l’âme, associé à la légende de la mort de Maître Hiram.

Pratiques rituelles

Les réunions de loge suivent un scénario strict, qui comprend :

  1. L’ouverture des œuvres est la création d’un espace sacré à travers des gestes et des paroles.
  2. Initiation – la consécration de nouveaux membres à travers des épreuves allégoriques.
  3. Conférences – interprétation des symboles et des principes éthiques.
  4. Fermeture des travaux – retour au monde « profane ».

Une place particulière est occupée par la légende d’Hiram Abiff , l’architecte du Temple de Salomon, dont la mort et la résurrection symbolisent le chemin de la transformation spirituelle. Cette histoire se joue lors de l’ascension au rang de maître.

La franc-maçonnerie dans l’Empire russe et en URSS

Les premières loges en Russie sont apparues sous Pierre Ier, mais leur développement actif a commencé à l’époque de Catherine. Les plus grands centres étaient Moscou et Saint-Pétersbourg, où opéraient des associations telles que « Astrea » et « Trois Bannières ». Les francs-maçons s’impliquaient dans l’éducation : Nikolaï Novikov publiait des livres et Ivan Schwartz organisait un séminaire pédagogique.

Rôle politique aux XIXe et XXe siècles

Malgré l’interdiction de 1822, les cercles maçonniques survécurent. Au début du XXe siècle, ils sont devenus une plate-forme pour l’intelligentsia libérale. Après la Révolution de Février 1917, de nombreux membres du Gouvernement provisoire (Alexandre Kerenski, Nikolaï Nekrassov) appartenaient à des loges. Les historiens notent cependant que leur influence est souvent exagérée : les francs-maçons n’avaient pas de programme politique unifié.

Avec l’arrivée au pouvoir des bolcheviks, la franc-maçonnerie fut interdite car considérée comme une « relique bourgeoise ». Le renouveau du mouvement n’a commencé que dans les années 1990 avec la création de la Grande Loge de Russie.

Situation actuelle et mythes

Il existe aujourd’hui environ 3 millions de francs-maçons dans le monde, les plus grandes communautés opèrent aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en France. L’organisation reste secrète, même si elle publie des rapports sur ses projets caritatifs. Par exemple, les loges anglaises donnent chaque année des millions de livres aux hôpitaux et aux écoles.

Théories du complot

Depuis le XVIIIe siècle, les francs-maçons sont accusés de chercher à établir un contrôle mondial. Ces idées furent soutenues par la participation de membres individuels aux révolutions (la Française en 1789, la Russe en 1917) et par l’utilisation de symboles secrets. Cependant, les recherches montrent que les francs-maçons n’ont pas de plate-forme politique unifiée et que leurs rituels se concentrent sur l’amélioration éthique de soi.

Les femmes et la franc-maçonnerie

Traditionnellement, l’adhésion était limitée aux hommes, mais depuis le XIXe siècle, il existe des loges « mixtes » (par exemple, l’Ordre du Droit de l’Homme). Dans la tradition anglo-saxonne, les organisations de femmes (comme l’Ordre de l’Étoile de l’Est) fonctionnent parallèlement aux organisations d’hommes.

La franc-maçonnerie demeure un phénomène qui allie traditions historiques et quêtes philosophiques. Son héritage comprend à la fois ses contributions à la culture des Lumières et un ensemble complexe de symboles qui continuent d’inspirer les chercheurs.

L’influence de la franc-maçonnerie sur les idées du siècle des Lumières

Le siècle des Lumières, avec son accent mis sur le rationalisme, la pensée critique et la remise en question des autorités traditionnelles, a trouvé dans la franc-maçonnerie non seulement un allié mais aussi une sorte de laboratoire pour la mise en œuvre d’idées clés. La symbiose de ces deux phénomènes a déterminé les processus intellectuels et politiques des XVIIIe et XIXe siècles, créant la base de la transformation de la conscience publique.

Fondements philosophiques : déisme et morale rationnelle

La franc-maçonnerie devient le véhicule des concepts déistes caractéristiques des Lumières. La croyance dans le Grand Architecte de l’Univers – un créateur abstrait qui n’interfère pas dans les affaires terrestres – a permis d’unir les représentants de différentes confessions, évitant ainsi les conflits dogmatiques. Cette position reflétait la tendance générale de l’époque vers la sécularisation, où la religion conservait son pouvoir éthique mais perdait son pouvoir institutionnel.

Les idéologues francs-maçons tels que James Anderson ont intégré les principes de « loi naturelle » de John Locke et de Charles Montesquieu dans leurs œuvres. La Constitution d’Anderson (1723) proclamait l’égalité des membres de la loge quel que soit leur statut social, ce qui faisait écho aux idéaux des Lumières. Cependant, l’universalisme maçonnique avait ses limites : les gens du commun étaient encouragés à adhérer à la religion traditionnelle, tandis que l’élite pouvait interpréter la foi à travers le prisme de la raison.

Le rituel comme outil d’illumination

Voltaire

Les pratiques initiatiques des francs-maçons incarnaient allégoriquement l’idée de progrès. Le retrait du bandeau du néophyte symbolisait la transition de l’ignorance à la connaissance, un récit clé des Lumières. Les rituels étaient construits autour de métaphores de « construction spirituelle », où les outils des maçons (compas, équerres) étaient transformés en symboles d’harmonie entre la raison et l’action.

Les loges fonctionnaient comme des sociétés de débat où l’on discutait des œuvres de Voltaire, Diderot et Rousseau. Dans le même temps, l’interdiction des débats politiques, inscrite dans les chartes, était souvent violée. Les loges françaises, par exemple, devinrent des plateformes de critique de l’absolutisme, préparant le terrain à la révolution de 1789.

Influence politique : des réformes aux révolutions

Les réseaux maçonniques ont joué un rôle catalyseur dans la diffusion des idées révolutionnaires. En Amérique du Nord, les membres de la loge, dont Benjamin Franklin et George Washington, ont utilisé les structures organisationnelles fraternelles pour coordonner la lutte pour l’indépendance. Des processus similaires ont été observés en Europe : les Illuminati bavarois, associés aux francs-maçons, ont promu des programmes anticléricaux et antimonarchistes.

En Russie, les cercles maçonniques de Novikov et de Lopukhin combinaient des activités éducatives avec la formation d’une position civique. Leurs écoles, leurs bibliothèques et leurs projets d’édition contribuèrent à la diffusion des courants philosophiques occidentaux, ce qui suscita l’inquiétude de Catherine II. Cependant, au XIXe siècle, la franc-maçonnerie russe s’est orientée vers le conservatisme, abandonnant les idées radicales.

Éduquer les masses : éducation et charité

Les francs-maçons ont mis en œuvre des idées éducatives à travers des projets sociaux spécifiques. En Angleterre, les loges finançaient des écoles pour les enfants des ouvriers et, en Russie, elles organisaient des hôpitaux gratuits. Nikolaï Novikov, profitant de ses relations maçonniques, publia des revues satiriques et des sources historiques, rendant ainsi les connaissances accessibles au grand public.

Ces initiatives reflétaient la croyance dans le pouvoir transformateur de l’éducation, pierre angulaire de la philosophie des Lumières. Comme le notait Friedrich Schiller, dont les œuvres étaient étudiées dans les loges, la culture devait « ramener l’homme à la nature » par le principe rationnel.

Conflits et contradictions : entre l’idéal et la réalité

Malgré leurs objectifs communs, l’alliance entre la franc-maçonnerie et les Lumières n’était pas sans tensions. Les courants conservateurs au sein de la confrérie, comme le rite suédois, rejetaient l’anticléricalisme des philosophes. L’Église catholique et les hiérarques orthodoxes ont condamné les francs-maçons pour leur relativisme en matière religieuse, les considérant comme une menace pour les valeurs traditionnelles.

Les bouleversements révolutionnaires de la fin du XVIIIe siècle ont exacerbé ces contradictions. Alors que certains voyaient les francs-maçons comme le moteur du progrès, d’autres (comme l’abbé Barruel) les accusaient de comploter contre les monarchies. Les répressions contre les loges en Russie et en Bavière ont montré que l’absolutisme éclairé n’était prêt à soutenir que des formes apolitiques de franc-maçonnerie.

Patrimoine : de l’utopie à la pratique

Au XIXe siècle, la franc-maçonnerie avait perdu son rôle d’avant-garde des Lumières, mais ses institutions conservaient leur influence. Les loges sont devenues un espace de mise en œuvre de projets libéraux, de l’abolition de l’esclavage à l’élargissement du droit de vote. Les principes de fraternité, d’égalité et de dialogue rationnel formulés au XVIIIe siècle font toujours partie du discours public contemporain, confirmant la profondeur de l’influence mutuelle entre les deux époques.

Le lien entre la Franc-Maçonnerie et l’Ordre Rosicrucien : entrelacs historiques et parallèles idéologiques

Ancien ordre rosicrucien, auquel appartenait Cambaréni

L’interaction de la Franc-Maçonnerie et du Rosicrucianisme représente une synthèse complexe de traditions ésotériques, de symbiose organisationnelle et de polémiques philosophiques. Ces deux mouvements, apparus à des époques différentes mais développés dans le cadre d’un paradigme culturel commun, présentent à la fois des points de contact et des différences fondamentales.

Origines historiques : du mythe à l’institutionnalisation

Les racines du rosicrucianisme remontent aux manifestes du début du XVIIe siècle – Fama Fraternitatis (1614) et  Confessio Fraternitatis (1615), qui proclamaient l’existence d’une confrérie secrète luttant pour le renouveau spirituel de l’humanité. On dit que le fondateur légendaire, Christian Rosenkreutz, a combiné les connaissances mystiques de l’Est et de l’Ouest, créant une organisation dont les membres pratiquaient l’alchimie, la Kabbale et la théosophie. Cependant, les historiens, dont Umberto Eco, notent le caractère littéraire et utopique de ces documents, probablement créés par un cercle d’intellectuels allemands.

La franc-maçonnerie, formalisée en tant qu’institution en 1717, se positionnait initialement comme l’héritière des guildes de francs-maçons médiévaux. Cependant, dès les années 1730, des éléments empruntés à la tradition rosicrucienne apparaissent dans ses structures :

  • Le symbole de la rose et de la croix, interprété comme une synthèse du spirituel et du matériel.
  • Rituels associés au symbolisme alchimique.
  • Le concept de « connaissance secrète » accessible uniquement aux initiés.

Une étape importante fut la création dans les années 1760 de l’Ordre de la Croix d’Or et de la Rose , une structure qui réunissait des loges maçonniques avec des groupes d’alchimistes qui se considéraient comme les héritiers des Rosicruciens. En Russie, cette tradition s’est manifestée à travers les activités de Nikolaï Novikov et d’Ivan Lopukhin, qui ont combiné les réunions maçonniques avec l’étude des textes hermétiques.

Intersection institutionnelle : diplômes et ordres

Le mécanisme clé de l’intégration fut l’introduction du grade de Chevalier de la Rose-Croix dans les systèmes d’initiation maçonniques. Dans le Rite Écossais Ancien et Accepté, il correspond au 18ème degré, où le néophyte étudie les doctrines kabbalistiques et alchimiques. Le rituel de ce degré comprend :

  • Interprétation de la légende de Christian Rosenkreutz comme allégorie de la transformation spirituelle.
  • Travaillant avec les symboles d’un pélican nourrissant ses poussins de son propre sang (sacrifice) et d’une étoile à sept branches (synthèse de la matière et de l’esprit).
  • Une étude du Mariage chimique, un texte dans lequel les processus alchimiques sont métaphoriquement identifiés aux étapes de l’initiation.

Au XIXe siècle, des organisations hybrides apparaissent, comme la Société des Rosicruciens d’Angleterre (SRIA), fondée en 1865. Malgré son autonomie formelle, ses membres étaient également membres de loges maçonniques et ses rituels comprenaient des éléments de théurgie rosicrucienne et de symbolisme maçonnique.

Contradictions philosophiques : mysticisme et rationalisme

Bien que les deux mouvements professaient un désir de « bien commun », leurs méthodes et leurs priorités différaient :

AspectFranc-maçonnerieRosicrucianisme
CibleAmélioration morale de la sociétéTransmutation spirituelle de la personnalité
Méthode de baseRationalisme, projets éducatifsAlchimie, pratiques magiques
Attitude envers la religionNeutralité, déismeSyncrétisme actif, critique des dogmes
Rôle politiqueRéformes libéralesRetrait des affaires du monde

Les Rose-Croix critiquaient les Francs-Maçons pour leur matérialisme excessif, tandis que les Francs-Maçons voyaient le mysticisme de la confrérie comme une menace pour les fondements rationnels des Lumières. En Russie, ces contradictions sont apparues dans les années 1780, lorsque les Martinistes (un mouvement rosicrucien) dirigés par Novikov se sont affrontés aux Illuminati, qui se concentraient sur le changement social.

Dialogue symbolique : la rose, la croix et leurs interprétations

Dialogue symbolique : la rose, la croix et leurs interprétations

Le symbole central des Rose-Croix – une rose en fleur sur une croix – a été adapté par les Francs-Maçons en deux versions :

  1. Chrétien : la rose comme âme du Christ, née à travers la souffrance (allusion à la Résurrection).
  2. Hermétique : synthèse des principes féminin (rose) et masculin (croix), incarnation de la pierre philosophale.

John Dee, alchimiste et rosicrucien, a développé le concept de la monade hiéroglyphique , un signe qui combine des symboles astronomiques et kabbalistiques. Cet élément est entré dans les rituels des loges maçonniques et rosicruciennes, devenant la base des pratiques méditatives.

Situation actuelle : divergences et coopérations

Au XXe siècle, les chemins des organisations ont finalement divergé :

  • La franc-maçonnerie a conservé l’accent mis sur la charité et le dialogue interreligieux.
  • Le rosicrucianisme a évolué vers un christianisme ésotérique, prenant forme dans des structures telles que l’AMORC (Ancien Ordre Mystique de la Rose et de la Croix), qui nie toute activité politique.

Il existe néanmoins des points communs :

  • Dans le Martinisme , mouvement qui combine les rituels maçonniques avec la théurgie rosicrucienne.
  • Dans les loges de recherche qui étudient les manuscrits alchimiques (par exemple, la Grande Loge Unie d’Angleterre conserve les archives du SRIA).
  • Dans la symbolique des « francs-maçons », où le compas et l’équerre sont parfois représentés encadrés de roses.

Le lien entre la Franc-Maçonnerie et le Rosicrucianisme reste un exemple de l’interaction dynamique des traditions ésotériques, où la compétition des idées n’exclut pas la continuité des symboles et des pratiques.

17/02/1600 : Giordano Bruno, défenseur de la liberté, meurt sur le bûcher

Du site officiel du GOI grandeoriente.it

Le 17 février, le Grand Orient d’Italie se souvient de Giordano Bruno, champion de la liberté, qui ce jour-là en 1600 fut brûlé sur le bûcher pour hérésie à Rome, Piazza Campo dè Fiori. Une date qui célèbre également la conquête des droits civiques par les Vaudois – et par la suite par les Juifs – avec l’émission en 1848 des Regiae Patenti de Carlo Alberto. Des anniversaires qui ont toujours été chers à la Franc-Maçonnerie. Nos pensées vont aussi aux feux de joie de Val di Pellice qui, chaque année, ce jour-là, sont allumés avec joie en mémoire de la fin de siècles de persécution pour la communauté vaudoise. 

La statue du frère dominicain sur la célèbre Piazza di Roma, œuvre commandée par la franc-maçonnerie et réalisée par le sculpteur Ettore Ferrari qui fut Grand Maître du Grand Orient d’Italie, est là depuis 1889 pour nous indiquer comme un phare rayonnant dans la nuit le chemin à suivre. Bruno a cherché la Vérité et a écrit dans l’Espace de la Bête Trionfante : « C’est la chose la plus sincère de toutes… Même si elle est moquée et trahie, elle est ressuscitée, soutenue et augmentée ; sans défenseur et protecteur, elle se défend et se montre à ceux qui l’invoquent”. Des vers d’or qui n’ont pas besoin de commentaires.17 février 2025

La vie de Giordano Bruno : un penseur audacieux face à l’orthodoxie

Giordano Bruno, né Filippo Bruno en janvier 1548 à Nola, près de Naples, dans le Royaume de Naples sous domination espagnole, est l’une des figures les plus fascinantes et controversées de la Renaissance. Philosophe, théologien, mathématicien, astronome et occultiste, il est connu pour ses idées révolutionnaires sur l’infinité de l’univers et ses conflits avec l’Église catholique, qui le conduisirent à une fin tragique sur le bûcher en 1600. Sa vie illustre le choc entre la libre pensée et l’orthodoxie religieuse de son époque, faisant de lui un symbole de la quête de connaissance et de la résistance à l’autorité.

Jeunesse et formation

Statue en bronze de Giordano Bruno (1889) par Ettore Ferrari (1845-1929), Campo de’ Fiori, Rome.

Fils de Giovanni Bruno, un soldat au service de l’armée du vice-roi d’Espagne, et de Fraulissa Savolino, une modeste propriétaire terrienne, Filippo grandit dans un environnement marqué par la culture humaniste. À l’âge de 17 ans, en 1565, il entre au couvent dominicain de San Domenico Maggiore à Naples, un prestigieux centre d’enseignement, et adopte le nom de Giordano en l’honneur de Giordano Crispo, son professeur de métaphysique, ou peut-être du second maître de l’ordre dominicain, Jordan de Saxe. Là, il se distingue par son talent pour la mnémotechnique, une discipline qu’il perfectionnera toute sa vie.

Cependant, ses idées hétérodoxes commencent à se manifester dès cette période. En 1566-1567, il rejette la vénération mariale et se débarrasse des images de saints, ne conservant que le crucifix, un acte qui choque ses supérieurs mais est initialement toléré comme une « jeunesse écervelée ». Ordonné prêtre en 1572, il poursuit ses études, mais ses lectures d’auteurs comme Érasme et sa critique des pratiques religieuses traditionnelles le mettent en conflit avec l’Église. En 1576, accusé d’hérésie et d’un meurtre présumé (bien que non prouvé), il fuit Rome, abandonne l’habit dominicain et reprend son nom de naissance, Filippo.

Errance intellectuelle en Europe

Devenu un fugitif, Bruno voyage à travers l’Europe, cherchant refuge et débattant de ses idées. Il séjourne d’abord en Italie du Nord, puis en Suisse, en France et en Angleterre. À Genève, il se convertit brièvement au calvinisme, mais ses critiques acerbes lui valent une nouvelle expulsion. En 1581, il arrive à Paris sous la protection d’Henri III, qui lui offre une chaire de lecteur royal au Collège des lecteurs royaux, précurseur du Collège de France. C’est là qu’il publie ses premières œuvres majeures, comme De umbris idearum (Les Ombres des idées) et Candelaio (Le Chandelier), une comédie satirique.

Ses idées cosmologiques, influencées par Copernic, Lucretius et le néoplatonisme, commencent à prendre forme. Dans De innumerabilibus, immenso et infigurabili (Des choses innombrables, de l’immense et de ce qu’on ne peut représenter), il défend l’idée d’un univers infini, peuplé d’innombrables mondes et soleils, chacun potentiellement habité. Cette vision hérétique, qui nie la centralité de la Terre et l’intervention divine directe, choque les autorités religieuses et philosophiques.

En 1583, Bruno se rend en Angleterre, où il enseigne à Oxford. Mais ses discours, perçus comme provocateurs, lui valent l’hostilité des académiciens, et il est contraint de quitter le pays. Il poursuit son périple en Allemagne, séjournant à Wittenberg, Prague et Helmstedt, où il continue à développer ses théories sur l’infiniment grand et l’infiniment petit, anticipant certaines notions modernes de la physique et de l’astronomie.

Retour en Italie et arrestation

En 1591, Bruno accepte l’invitation du noble vénitien Giovanni Mocenigo, qui lui promet protection et soutien en échange de le former à l’art de la mémoire. Cependant, les deux hommes se brouillent rapidement. Mocenigo, déçu, accuse Bruno de ne pas tenir ses promesses et le dénonce à l’Inquisition vénitienne le 23 mai 1592 pour hérésie. Arrêté et emprisonné à Venise, Bruno est transféré à Rome sur ordre du Saint-Office, où il subit un procès de huit ans.

Les charges retenues contre lui sont multiples : il rejette la Trinité, nie la divinité du Christ, défend le panthéisme (identifiant Dieu à l’univers) et soutient des doctrines cosmologiques contraires aux enseignements catholiques. Malgré des pressions pour abjurer, Bruno refuse, déclarant avec défi : « Peut-être tremblez-vous plus en prononçant cette sentence que moi en l’entendant. » Sa résistance acharnée impressionne, mais n’émeut pas l’Inquisition.

Condamnation et exécution

Le 8 février 1600, sous le pontificat de Clément VIII, Giordano Bruno est déclaré hérétique par l’Inquisition romaine. Le 17 février 1600, il est conduit sur le Campo de’ Fiori à Rome et brûlé vif sur le bûcher. Avant sa mort, sa langue est censurée, probablement pour l’empêcher de proférer des paroles jugées sacrilèges. Son exécution marque un tournant symbolique dans l’histoire des relations entre science, philosophie et religion.

Héritage et postérité

Illustration d’un des livres de Giordano Bruno sur la mnémotechnique : on y distingue les quatre éléments classiques : la terre, l’air, l’eau et le feu.

Malgré sa fin tragique, l’héritage de Bruno est immense. Il est considéré comme un précurseur de la pensée scientifique moderne, influençant des figures comme Galilée et Spinoza. Sa vision d’un univers infini, bien que controversée à son époque, préfigure les découvertes astronomiques ultérieures. En 1889, une statue en bronze d’Ettore Ferrari est érigée sur le lieu de son exécution à Rome, accompagnée de l’inscription : « À Bruno – Le siècle par lui divinisé – Ici où le feu a brûlé. » Cette statue, soutenue par les francs-maçons et les libres-penseurs, devient un symbole de résistance à l’obscurantisme.

Cependant, certains historiens nuancent son statut de « martyr de la science ». Selon eux, ses idées mêlaient autant de science que d’ésotérisme et d’hermétisme, et son exécution fut motivée autant par ses positions théologiques que par ses cosmologies. Quoi qu’il en soit, Bruno reste une figure emblématique de la Renaissance, incarnant la tension entre innovation intellectuelle et autorité religieuse.

Sources et contexte

Les détails de sa vie sont tirés de documents historiques, notamment les minutes de son procès, découvertes en 1940 par le cardinal Angelo Mercati dans les archives de Pie IX, et publiées en 1942. Ses œuvres, écrites en latin et en italien, sont conservées et étudiées pour leur richesse philosophique. Des biographies modernes, comme celle de Frances A. Yates (Giordano Bruno and the Hermetic Tradition), explorent son influence et ses contradictions.

En conclusion, Giordano Bruno incarne l’esprit audacieux d’une époque en transition, où la curiosité intellectuelle côtoyait le danger. Sa vie et sa mort soulignent les limites de la liberté de pensée au XVIe siècle, mais aussi la persistance de l’idéal humaniste face à l’oppression.

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