L’ouvrage Fables Égyptiennes et Grecques Dévoilées & Réduites au Même Principe, avec une Explication des Hiéroglyphes, et de la Guerre de Troie est publié en 1786 par Dom Antoine-Joseph Pernety, un religieux bénédictin de la Congrégation de Saint-Maur, connu pour ses travaux érudits et son intérêt pour l’hermétisme. Pernety (1716-1796) est une figure singulière du XVIIIe siècle, à la croisée de la théologie, de l’érudition historique et de l’alchimie. Il est également l’auteur du Dictionnaire Mytho-Hermétique, publié en parallèle, qui complète cet ouvrage. Son travail s’inscrit dans une période où l’alchimie, bien que discréditée par les avancées scientifiques des Lumières, continue d’attirer des esprits curieux, notamment dans des cercles ésotériques.
Pernety se propose de décrypter les fables égyptiennes et grecques à travers le prisme de la philosophie hermétique, une tradition alchimique qui prétend révéler les secrets de la nature et de l’univers à travers des symboles et des allégories. Il s’appuie sur une longue lignée de penseurs hermétiques, d’Hermès Trismégiste à des figures médiévales comme Raymond Lulle ou Nicolas Flamel, pour soutenir que ces récits mythologiques ne sont pas de simples histoires, mais des codages complexes des principes alchimiques.
Structure de l’Ouvrage

L’ouvrage, dont le premier volume est ici analysé, est structuré en plusieurs parties distinctes, comme le montre la table des matières (pages 2 à 4) :
- Préface et Discours Préliminaire (pages 5-30) : Pernety expose sa démarche et défend la validité de la philosophie hermétique face aux préjugés de son époque. Il pose les bases de son interprétation allégorique des fables.
- Principes Généraux de Physique Hermétique (pages 31-121) : Cette section est une introduction théorique à l’alchimie, abordant des concepts fondamentaux comme la première matière, les éléments (terre, eau, air, feu), la lumière, l’humide radical, ou encore l’harmonie de l’univers. Pernety y détaille également les étapes de l’œuvre alchimique (calcination, solution, putréfaction, etc.) et les concepts clés comme l’élixir, la quintessence, ou la pierre philosophale.
- Les Fables et les Hiéroglyphes des Égyptiens (pages 122-227) : Pernety analyse les symboles égyptiens, les dieux (Osiris, Isis, Horus, Typhon, etc.), et les animaux sacrés (bœuf Apis, ibis, crocodile), en les interprétant comme des métaphores alchimiques. Il explore également les colonies égyptiennes et leur influence sur d’autres cultures.
- Allégories en Rapport avec l’Art Hermétique (pages 228-302) : Cette partie se concentre sur des récits mythologiques spécifiques, comme la quête de la Toison d’Or, les pommes des Hespérides, ou la fable de Midas, que Pernety interprète comme des descriptions codées des processus alchimiques. Il aborde aussi des concepts abstraits comme l’âge d’or et les pluies d’or, toujours dans une perspective hermétique.
Thèmes Principaux

- L’Interprétation Hermétique des Mythes
Le cœur de l’ouvrage réside dans l’idée que les fables égyptiennes et grecques ne sont pas des récits historiques ou moraux, mais des allégories codées de l’alchimie. Pernety soutient que les anciens philosophes, comme Hermès Trismégiste, ont utilisé ces récits pour transmettre des connaissances secrètes sur la transformation de la matière et la quête de la pierre philosophale. Par exemple, dans le chapitre sur Midas (pages 288-294), il explique que la capacité de Midas à transformer tout en or symbolise la transmutation des métaux imparfaits en or par l’élixir alchimique. De même, les « pluies d’or » (pages 298-302) sont interprétées comme des métaphores de la circulation de la matière mercurielle dans le vase alchimique, un processus clé de l’œuvre. - Défense de la Philosophie Hermétique
Pernety consacre une large partie de son discours préliminaire (pages 9-30) à défendre la philosophie hermétique contre les critiques des Lumières. Il déplore l’ignorance et les préjugés qui, selon lui, ont discrédité cette science. Il oppose la « chymie vulgaire » (la chimie moderne de son époque, axée sur la destruction des composés naturels) à la « chymie hermétique », qui vise à perfectionner la nature en imitant ses procédés (pages 18-19). Il cite de nombreux auteurs anciens et médiévaux (Hermès, Geber, Raymond Lulle, etc.) pour prouver l’ancienneté et la cohérence des principes hermétiques, arguant que leur universalité à travers les cultures et les époques est une preuve de leur vérité. - Critique des Interprétations Traditionnelles
Pernety rejette les interprétations historiques ou morales des fables proposées par les mythologues de son temps, comme l’abbé Banier. Il argue que ces lectures échouent à saisir le sens profond des récits, qui réside dans leur dimension alchimique. Par exemple, il conteste l’idée que l’âge d’or (pages 294-298) soit une période historique réelle sous le règne de Saturne, et propose qu’il symbolise une phase de l’œuvre alchimique, la « noirceur » (associée à Saturne), qui marque le début de la transmutation. - Symbolisme et Allégorie
L’ouvrage est saturé de symbolisme alchimique. Les dieux, héros, et éléments naturels des fables sont systématiquement associés à des concepts alchimiques : Osiris et Bacchus représentent le soufre philosophique, Silène symbolise la matière première de l’œuvre, et les « pluies d’or » figurent la condensation et la circulation des vapeurs mercurielles. Pernety insiste sur la nécessité d’une lecture attentive et initiatique pour décoder ces allégories, un processus qu’il compare à une quête spirituelle.
Méthodologie et Style

Pernety adopte une approche systématique, combinant érudition classique et exégèse alchimique. Il cite abondamment des sources anciennes (Homère, Ovide, Hésiode) et médiévales (Geber, d’Espagnet, Philalèthe), ainsi que des textes hermétiques comme la Turba Philosophorum. Son style est dense et didactique, parfois aride, comme il le reconnaît lui-même (page 7), en raison de la nature technique de son sujet. Il s’adresse à un lectorat averti, prêt à s’immerger dans les énigmes de l’alchimie, et recommande la lecture de son Dictionnaire Mytho-Hermétique pour approfondir les explications.
Cependant, son ton est également polémique : il critique vivement les savants de son époque qui rejettent l’alchimie sans la comprendre, les accusant d’ignorance et de préjugés (pages 9-11). Il se positionne comme un défenseur d’une tradition ancienne et sacrée, qu’il juge malmenée par la modernité.
Forces et Limites
Forces :

- L’érudition de Pernety est impressionnante. Il maîtrise les textes classiques et hermétiques, et son interprétation des fables offre une perspective originale qui enrichit la compréhension de ces récits.
- Sa défense de la philosophie hermétique est passionnée et bien argumentée, offrant un contrepoint intéressant aux idées dominantes des Lumières.
- L’ouvrage est une mine d’informations sur les symboles alchimiques et leur lien avec la mythologie, ce qui en fait une ressource précieuse pour les chercheurs intéressés par l’histoire de l’ésotérisme.
Limites :
- La thèse centrale de Pernety, qui réduit toutes les fables à des allégories alchimiques, peut sembler réductrice. Elle ignore d’autres dimensions possibles (historiques, culturelles, religieuses) des récits mythologiques.
- Son style, bien que rigoureux, manque parfois de clarté et peut rebuter un lectorat non initié à l’alchimie.
- Certaines de ses interprétations paraissent arbitraires ou forcées, comme lorsqu’il associe le nom de Persée à un processus alchimique sans justification étymologique convaincante (page 302).
- L’absence de preuves empiriques pour étayer ses affirmations sur la pierre philosophale ou la transmutation des métaux affaiblit son argumentation face à un lectorat sceptique.
Recension de l’Ouvrage
L’ouvrage Fables Égyptiennes et Grecques de Dom Antoine-Joseph Pernety, publié en 1786, est une œuvre ambitieuse et singulière qui cherche à réinterpréter les mythologies égyptienne et grecque à travers le prisme de la philosophie hermétique, une tradition alchimique visant à dévoiler les secrets de la nature et de la transmutation. Écrit par un religieux bénédictin érudit, cet ouvrage s’inscrit dans une période de transition intellectuelle, où les idées des Lumières commencent à marginaliser les sciences occultes comme l’alchimie, tout en suscitant un regain d’intérêt pour les traditions ésotériques dans certains cercles. Pernety, connu pour son érudition et son intérêt pour l’hermétisme, propose une lecture radicalement nouvelle des fables anciennes, affirmant qu’elles ne sont ni des récits historiques ni des leçons morales, mais des codages allégoriques des processus alchimiques.
Structure et Contenu
Le premier volume de l’ouvrage, qui nous est ici présenté, est divisé en plusieurs sections, chacune abordant un aspect spécifique de la thèse de Pernety. La préface (pages 5-8) et le discours préliminaire (pages 9-30) posent les bases de son projet. Pernety y défend la philosophie hermétique contre les critiques de son temps, qu’il juge ignorantes et biaisées. Il déplore le discrédit jeté sur l’alchimie, qu’il considère comme une science ancienne et universelle, pratiquée par des figures comme Hermès Trismégiste, Pythagore, ou Raymond Lulle. Il oppose la « chymie vulgaire », qui détruit les composés naturels, à la « chymie hermétique », qui imite la nature pour les perfectionner (pages 18-19).
La première partie technique (pages 31-121) est une introduction aux principes de la physique hermétique. Pernety y expose des concepts fondamentaux de l’alchimie : la première matière, les éléments (terre, eau, air, feu), la lumière, l’humide radical, ou encore les étapes de l’œuvre alchimique (calcination, solution, putréfaction, fermentation, etc.). Il décrit également des notions clés comme l’élixir, la quintessence, ou la pierre philosophale, qu’il présente comme des réalités tangibles, bien que codées sous des symboles. Cette section est dense et technique, mais elle est essentielle pour comprendre les interprétations qui suivent, car elle fournit le cadre conceptuel nécessaire pour décoder les fables.
La deuxième partie (pages 122-227) se concentre sur les hiéroglyphes et les fables égyptiennes. Pernety analyse les figures mythologiques comme Osiris, Isis, Horus, ou Typhon, ainsi que les animaux sacrés (bœuf Apis, ibis, crocodile), en les interprétant comme des métaphores alchimiques. Par exemple, Osiris est associé au soufre philosophique, tandis que les animaux sacrés symbolisent différentes étapes ou propriétés de la matière alchimique. Il explore également l’influence des colonies égyptiennes sur d’autres cultures, renforçant son idée que l’hermétisme est une tradition universelle.
La dernière partie (pages 228-302) traite de récits mythologiques spécifiques, comme la quête de la Toison d’Or, les pommes des Hespérides, ou la fable de Midas, que Pernety lit comme des allégories de l’œuvre alchimique. Le chapitre sur Midas (pages 288-294) est particulièrement révélateur de sa méthode : il interprète la capacité de Midas à transformer tout en or comme une métaphore de la transmutation des métaux imparfaits en or par l’élixir. De même, les « pluies d’or » (pages 298-302) sont vues comme une représentation de la circulation de la matière mercurielle dans le vase alchimique, un processus où les vapeurs se condensent et retombent sous forme de « pluie » pour nourrir la matière fixe.
Méthodologie et Approche
Pernety adopte une approche érudite et systématique, s’appuyant sur une vaste connaissance des textes classiques (Homère, Ovide, Hésiode) et hermétiques (Geber, d’Espagnet, Philalèthe, la Turba Philosophorum). Il cite également des auteurs plus récents, comme l’abbé Banier, pour critiquer les interprétations traditionnelles des fables, qu’il juge superficielles. Sa méthode consiste à associer chaque élément des récits mythologiques (dieux, héros, objets, phénomènes naturels) à un concept alchimique, en s’appuyant sur des correspondances symboliques et étymologiques, parfois audacieuses. Par exemple, il relie le nom de Silène à Séléné (la Lune) pour en faire un symbole de la matière première de l’alchimie (page 293), bien que cette étymologie soit discutable.
Son style est rigoureux mais aride, comme il le reconnaît lui-même (page 7), en raison de la nature technique et ésotérique de son sujet. Il s’adresse à un lectorat initié, prêt à s’immerger dans les énigmes de l’alchimie, et recommande la lecture de son Dictionnaire Mytho-Hermétique pour approfondir les explications. Cependant, son ton est également polémique : il critique vivement les savants de son époque qui rejettent l’alchimie sans la comprendre, les accusant d’ignorance et de préjugés (pages 9-11). Il se positionne comme un défenseur d’une tradition ancienne et sacrée, qu’il juge malmenée par la modernité.
Points Forts
L’érudition de Pernety est indéniable. Il maîtrise les textes classiques et hermétiques, et son interprétation des fables offre une perspective originale qui enrichit la compréhension de ces récits. Son ouvrage est une mine d’informations sur les symboles alchimiques et leur lien avec la mythologie, ce qui en fait une ressource précieuse pour les chercheurs intéressés par l’histoire de l’ésotérisme. De plus, sa défense passionnée de la philosophie hermétique offre un contrepoint intéressant aux idées dominantes des Lumières, montrant que l’alchimie, bien que marginalisée, continuait d’exercer une fascination au XVIIIe siècle.
Points Faibles
Cependant, l’ouvrage présente plusieurs limites. La thèse centrale de Pernety, qui réduit toutes les fables à des allégories alchimiques, peut sembler réductrice. Elle ignore d’autres dimensions possibles des récits mythologiques, comme leur contexte historique, culturel, ou religieux. Par exemple, sa lecture de l’âge d’or (pages 294-298) comme une métaphore de la « noirceur » alchimique néglige les interprétations littérales ou philosophiques qui voient dans ce mythe une réflexion sur un âge idéal de l’humanité. De plus, certaines de ses interprétations paraissent arbitraires ou forcées, comme lorsqu’il associe le nom de Persée à un processus alchimique sans justification étymologique convaincante (page 302).
Le style de Pernety, bien que rigoureux, manque parfois de clarté et peut rebuter un lectorat non initié à l’alchimie. Les concepts alchimiques qu’il emploie (soufre philosophique, mercure des sages, etc.) sont complexes et nécessitent une familiarité préalable avec l’hermétisme pour être pleinement compris. Enfin, l’absence de preuves empiriques pour étayer ses affirmations sur la pierre philosophale ou la transmutation des métaux affaiblit son argumentation face à un lectorat sceptique, en particulier à une époque où la chimie moderne, fondée sur l’expérimentation, commence à s’imposer.
Importance Historique et Réception
Fables Égyptiennes et Grecques s’inscrit dans une longue tradition d’interprétations ésotériques des mythes, qui remonte à l’Antiquité tardive et au Moyen Âge. Cependant, publié à la fin du XVIIIe siècle, l’ouvrage apparaît quelque peu anachronique face aux avancées scientifiques de l’époque, comme la chimie de Lavoisier, qui rejette les théories alchimiques. Il est probable que l’ouvrage ait été accueilli avec scepticisme par les savants des Lumières, qui voyaient dans l’alchimie une pseudo-science. Toutefois, il a dû trouver un écho auprès des cercles ésotériques et des amateurs d’hermétisme, qui continuaient à explorer ces traditions à l’écart des courants scientifiques dominants.
Aujourd’hui, l’ouvrage est principalement étudié pour sa valeur historique. Il offre un aperçu fascinant de la persistance des idées alchimiques à l’aube de la modernité, ainsi qu’une illustration de la manière dont les mythes antiques ont été réinterprétés à travers des cadres philosophiques alternatifs. Il est également une source précieuse pour les historiens de l’ésotérisme, car il documente les correspondances symboliques entre la mythologie et l’alchimie, un sujet qui continue d’intéresser les chercheurs.
Pour terminer…
Fables Égyptiennes et Grecques de Dom Antoine-Joseph Pernety est une œuvre érudite et ambitieuse, qui propose une lecture originale des mythologies égyptienne et grecque à travers le prisme de la philosophie hermétique. En interprétant les fables comme des allégories alchimiques, Pernety offre une perspective fascinante, bien que parfois réductrice, sur ces récits anciens. Malgré ses limites, notamment son style dense et ses interprétations parfois arbitraires, l’ouvrage reste une ressource précieuse pour comprendre la persistance des traditions ésotériques au XVIIIe siècle. Il témoigne de la tension entre les anciennes sciences occultes et les nouvelles sciences expérimentales, ainsi que de la fascination durable pour les mystères de l’alchimie et de la mythologie. Pour les lecteurs modernes, il constitue un voyage captivant dans un univers intellectuel où la frontière entre science, philosophie et spiritualité est encore floue.
Que du Bla bla, dommage c’est un sujet intéressant !
Mon Frère Guy,
Je n’osais te le demander, mais la perche tendue est trop belle… tu sais donc ce qui te reste à faire.
Je suis absolument certain que tu sauras rendre ton récit captivant.
J’ai hâte de te lire.
Très Fraternellement
Franck Fouqueray