Réformes ou centralisation ? Les transformations de la GLNF sous Jean-Pierre Rollet et approuvées par Yves Pennes.
Depuis son arrivée à la tête de la Grande Loge Nationale Française (GLNF) en 2019, Jean-Pierre Rollet, Grand Maître de l’Obédience, a introduit une série de réformes et de décisions marquantes. Si, prises individuellement, ces mesures semblent parfois anodines ou purement pratiques, un examen plus approfondi révèle un modèle d’action centralisé, concentrant les décisions autour d’un leadership fort. Ce modèle, que Jean-Pierre Rollet semble vouloir transmettre à son successeur désigné, Yves Pennes, mérite analyse et réflexion critique.
Lors du traditionnel séminaire des Grands Maîtres Provinciaux organisé durant le week-end de l’ascension cette année à Aix en Provence, sa ville natale, Jean-Pierre Rollet a publiquement présenté Yves Pennes comme son successeur durant l’agape. Les jeux seraient-ils faits d’avance ou est-ce un moyen d’influencer les votes ? La rédaction de 450.fm a décidé d’en savoir plus.
Les réformes entreprises par l’actuel Grand Maître et validée par son successeur « désigné », méritent donc un passage en revue :
1. Unification et appauvrissement des rituels d’installation
Sous le mandat de Jean-Pierre Rollet, les six rites de l’Obédience ont vu leurs rituels d’installation harmonisés pour ne pas dire stérilisés. Une véritable standardisation à marche forcée de la cérémonie secrète de Maître Installé (exemple : réduction considérable de la cérémonie secrète de Maître Installé sans tous les signes, mots de passe et attouchements…).
Bien que cette décision puisse sembler purement administrative, elle reflète un désir d’uniformité et de contrôle accru. En appauvrissant les pratiques, cette mesure retire également une certaine autonomie aux rites, qui disposaient historiquement de leur propre liberté rituelle. Cette tendance à l’uniformisation va au-delà de l’efficacité et pourrait être perçue comme une standardisation excessive, menaçant la diversité des traditions auxquelles les membres sont profondément attachés. Une orientation qu’Yves Pennes a soutenue.
Jean-Pierre Rollet avait pourtant déclaré dans sa profession de foi en 2021 : « …réinstaurer la rigueur là où elle peut faire défaut : dans les pratiques rituelles, dans le respect de la Règle, des us et coutumes maçonniques, dans l’apprentissage de la démarche maçonnique… ». Il semblerait au contraire que la pratique se soit appauvrie ! La pratique de la cérémonie dite “étendue” (extended) est désormais refusée à la quasi-totalité des Loges qui désirent la pratiquer. Il en résulte une cérémonie sans odeur, sans saveur et sans repère symbolique ni spirituel (suppression des psaumes, de l’explication historique). Au point qu’un Vénérable Maître à la GLNF installé en septembre est incapable de répondre au tuilage nécessaire pour participer une semaine après, à une installation dans le monde anglo-saxon. Un comble !!!
2. Aménagement des articles du Règlement Général… pour des raisons inconnues
Auparavant, un candidat à la Grand-Maîtrise devait justifier de 20 ans continus de présence dans l’Obédience. On ne sait pour quelle obscure raison, cet article a été transformé pour permettre à n’importe quel candidat ayant quitté la GLNF quelques mois de se présenter. Par le plus grand des hasards (ou Divine Providence), Yves Pennes peut en bénéficier, puisqu’il avait démissionné en 2011 pour réintégrer plus tard la maison.
Par ailleurs, il faut aussi tenir compte de la modification de l’article 10 du Règlement Général de la GLNF. Ce changement passé inaperçu pour beaucoup lors de son adoption en 2022 est loin d’être anodin. Auparavant, en cas d’empêchement du Grand Maître, pour quelque raison que ce soit (décès, démission de ses fonctions, radiation, etc.), le Député Grand Maître assurait la Grande Maîtrise jusqu’à la fin du mandat de trois ans en cours. Désormais, une procédure d’élection d’un nouveau Grand Maître est instantanément enclenchée. Ainsi, un précédent Grand Maître pourrait contourner la règle intangible de limitation à 2 mandats consécutifs si le cas se présentait après sa descente de charge. Car trois ans à attendre, c’est long pour certains, d’autant qu’en 3 ans, on est vite oublié, que les hommes changent… Verra-t-on grâce à cette pirouette, dans quelques mois, un scénario à la Poutine – Medvedev à la tête de l’Obédience ?…
3. Optimisation de la gestion financière de la Librairie Scribe
Durant le mandat de l’actuel Grand Maître, la librairie s’est transformée en machine à cash. En effet, de moins 73 786 € de pertes financières en 2021, la société a bondi à 177 345 € de bénéfice en 2022. Chacun pourra apprécier cette bonne nouvelle, si les moyens pour y parvenir n’étaient pas discutables : fortes pressions (fraternelle, il va de soi) sur les Grands Maîtres Provinciaux pour acheter les produits maison (incitation à l’acquisition des ouvrages de l’éditeur maison, produits dérivés – dessous de plat ; mug ; gilet matelassé de luxe -, cravates dont celle du Souverain Grand Comité, médaille du Grand Maître, rituels réimprimés…).
Ne cherchez pas à vérifier les chiffres de la SAS Scribe, depuis 2023, ils ne sont plus consultables au greffe. Quid de la transparence ? La question que les Frères de la GLNF sont en droit de se poser est : « Est-ce que le futur Grand Maître envisage de transformer l’Obédience en start-up ? »
4. Centralisation des décisions financières et matérielles
Le statut de la GLNF est atypique en comparaison du GODF ou du Droit Humain. En effet, chez ces deux dernières, les Loges sont financièrement indépendantes et assurent leur propre gestion. Dans le système GLNF, il n’existe qu’un seul compte général, celui de l’Obédience. Durant les mandatures précédentes, les Loges bénéficiaient toutefois d’une autonomie pour le Tronc de la Veuve et le compte de la Loge. Depuis deux ans, suppression des chéquiers et centralisation financière à Paris. Ainsi, tant les Loges que les provinces ont perdu leur indépendance financière.
Selon nos informations, cette décision devait permettre, si on en croit les justifications avancées à l’époque, à l’Obédience de dégager une économie au total de près de 400 000 €. Les Loges et les Frères attendent toujours d’en voir les retombées pour leur compte… Par ailleurs, quel que soit le futur Grand Maître, ce fonctionnement risque de perdurer.
5. Yves Pennes est-il devenu amnésique sur son passé maçonnique ?
Yves Pennes suscite des interrogations en dissimulant des informations concernant son passé maçonnique, notamment son obédience d’origine, son rite et la date de son initiation. Il a été régularisé en 1987 à la GLNF, mais où était-il auparavant ? Dans un contexte où la transparence est valorisée, particulièrement en franc-maçonnerie, cette opacité contraste avec les pratiques établies, telles qu’au sein de la Grande Loge Unie d’Angleterre. Ce manque d’information alimente des rumeurs et des spéculations, notamment sur la désignation de son futur numéro deux, dont le nom serait déjà connu malgré l’absence de communication officielle. Habituellement, ce poste est défini bien à l’avance.
La question semble anodine, pourtant le nom du numéro deux est plus important qu’il n’y paraît car en cas de défaillance (maladie, décès ou incapacité…) c’est traditionnellement celui-ci qui assure l’intérim. Il serait donc fâcheux que ce maçon mystère ne fasse pas l’unanimité !
6. La concentration du pouvoir au sein des juridictions maçonniques
Jean-Pierre Rollet avait émis le souhait que pour être Grand Maître d’une juridiction en amitié avec la Grande Loge, il fallait avoir occupé auparavant la fonction de Grand Maître Provincial. Ces derniers ayant prêté allégeance au Grand Maître en exercice, comment pourraient-ils ultérieurement prendre des décisions libres, sachant qu’il existe indirectement un lien de subordination (ou du moins de gratitude) entre les deux.
Conclusion
Les réformes entreprises par Jean-Pierre Rollet depuis 2019 s’inscrivent sans doute dans une certaine dynamique, la sienne : strictement managériale et administrative ! Où est l’enchantement impulsé jadis par son prédécesseur ?…
Bien que ces décisions visent à renforcer l’organisation et la centralisation des pouvoirs, le manque évident de transparence suscite des inquiétudes quant à une gouvernance de plus en plus autoritaire. La question qui se pose aujourd’hui est de savoir si la GLNF continuera dans cette voie avec Yves Pennes son successeur désigné, héritier de ce système, ou si les membres de l’obédience choisiront de rompre avec ce modèle. L’avenir de la GLNF dépendra largement des réponses apportées à ces questions ce vendredi 13 septembre lors de la désignation du candidat proposé par le Souverain Grand Comité à la ratification du mois de décembre prochain lors de l’Assemblée de Grande Loge, qui touchent au cœur des valeurs maçonniques.
Commentaire de la rédaction : Dans le cadre de cet article, nous avons interrogé Yves Pennes. Sa réponse intégrale figure ci-dessous.
Mon TCF,
Je te remercie pour cette prise de contact. Cependant conformément au Règlement Général, je me suis engagé, durant cette période électorale, à ne pas faire campagne et par conséquent je ne peux m’exprimer sur ces sujets.
Fraternellement.
Yves PENNES
Je suis né au RER dans une loge parisienne du GPDG où j’ai côtoyé les grands mamamouchis de l’ordre et notamment l’actuel grand maître. J’y ai pratiqué une maçonnerie fidèle et respectueuse du rituel presque parfois ayatollesque tant certains des frères étaient arqueboutés sur la virgule du rituel, avec pour effet pervers de rester sur l’écorce et de manquer le noyau, Mais surtout dans une forme de dogmatisme insupportable et de constant ego boursouflé de certains frères ayant dans l’idée qu’il n’y avait qu’au GPDG que se pratiquait un Rectifié fidèle et de qualité. Et puis surtout quel manque de fraternité…même aux agapes on se serait cru dans un réfectoire de moines cisterciens hésitants à esquisser un sourire… alors j’ai démissionné et j’ai rejoint sur les conseils d’un frère et ami la GLNF toujours au RER.
J’y ai trouvé je le reconnais un peu moins de rectitude en matière de respect du rituel avec parfois quelques aménagements mais j’y ai aussi trouvé une vraie fraternité et des moments chaleureux avec les frères alors je me dis que le petit sacrifice de la pureté rituelique vaut largement le bonheur que j’ai désormais à retrouver mes frères. Je suis content.🙂
Récemment, un de nos Frères qui a la chance de côtoyer le Grand Maître. Stifani ainsi que le GM JP Rollet, a répondu à ma question de savoir s’il y avait une grande différence entre les deux. Sa réponse : Si ! François Stifani était gentil…
La prise de conscience des changements des articles 10 et 42 du Règlement Générale devrait interpeler un peu plus les Frères membres du Souverain Grand Comité (SGC) qui vont décider demain du futur de notre Obédience. Serions-nous confrontés au risque d’une prise de pouvoir absolu, dictatorial, encore plus élaboré et dangereux que celui que nous a conduit à la crise ?
Concernant l’article 42, il ne s’agit pas d’imaginer que le Frère Yves Pennes pourrait être un faux nez de l’actuel GM Jean-Pierre Rollet. En effet, Yves Pennes est dans le système depuis la période Stifani. Et, s’il ne veut même pas dévoiler ni la date de son initiation, ni le nom de la GL d’où il nous est arrivé, ne comptez pas sur lui pour nous clarifier à propos du rôle qu’il aurait joué dans « l’affaire » du fameux appartement de la avenue Wagram .
Notre Chef « Suprême » de l’Ordre déclare souvent : « Nous allons organiser la direction de la GLNF pour les 20 prochaines années. » Et « Les grands commandeurs de nos juridictions doivent être choisis parmi les Grands Maîtres Provinciaux de la GLNF ». Le Frère Y. Pennes, déjà membre du Grand Prieuré du RER, a été parachuté 33ème, membre actif du SCNF et, d’après témoignage, il aurait, d’emblée, demandé à être nommé Lieutenant Grand Commandeur. Plus récemment, le GM a essayé de pousser un de ses fidèles GMP à prendre la grande maîtrise de la GL de Marque. Compte tenu des résistances rencontrées, il a suspendu les relations avec cette juridiction.
Si nous observons notre histoire depuis la période Yves Trestournel – surnommé Yves l’Africain ! -, jusqu’à François Stifani, les ruptures périodiques tous les 6 ans ont été salutaires pour notre Obédience car elles ont empêché l’instauration de systèmes de pouvoir comme celui que l’actuel Grand Maître persiste à nous imposer.
Mes Frères, membres du SGC, pensez-y. Notre avenir en dépend.
Dans ses commentaires, la rédaction du journal nous informe que le Frère Yves Pennes a refusé de répondre à des questions, en invoquant des articles du Règlement et son engagement de ne pas mener de campagne électorale.
Mais quelle campagne ?
Il s’agit d’un vote départageant deux Frères afin que l’un d’entre eux soit précisément le candidat à la grande maîtrise. Son refus de répondre à des questions les plus simples, telles que la date de son initiation et le nom de l’Obédience dans laquelle il a été initié. Ce n’est pas battre campagne que de dire la date de son initiation !
Et ce refus de le dire nourrit des spéculations quant à la réalité même de son initiation.
Si j’ai bien compris, cet article est lié à l’élection du nouveau Grand Maître. Donc, c’est un peu comme en politique, les candidats n’ont pas à faire campagne. Cela englobe également répondre à certains… J’espère qu’il en est de même pour l’autre candidat ? Qui, curieusement, n’est pas interrogé ici. La neutralité des débats fait que nous espérons que l’un ou l’autre candidat ne s’amuse pas de faire appeler les votants par ses petits « copains », car là, cela serait d’une malhonnêteté, mais je ne peux le croire. Que chacun prenne ses responsabilités et surtout reste honnête avec lui-même… Les débats internes resteront internes, Yves Penne et Emmanuel Stene, pourront éventuellement s’ils le souhaitent développer ensuite, ils sont suffisamment connus à la GNLF.
Votre paragraphe à propos de l’aménagement des articles du Règlement Général nous a alertés sur la méthode employée discrètement par le Grand Maître pour faire supprimer de l’article 42 la condition suivante : « Le candidat à la Grande Maîtrise doit appartenir à la GLNF depuis au moins vingt (20) ans, sans interruption » (cf. RG 2014). Bien évidemment, sans cette surprenante modification, le Frère Yves Pennes ne serait pas éligible. En revanche, un GMP ayant à peine osé évoquer son intention de présenter sa candidature a été écarté à la manière de Poutine…
Conclusion : En votant les modifications du RG proposées par le Grand Maître, les membres du Souverain Grand Comité ont été manipulés.
Par pitié 450FM, cessez de recourir à l’IA pour illustrer vos articles ! Cette “assemblée de maçons GLNF” est grotesque ! En 30 ans dans cette obédience, je n’ai jamis assisté à un tel spectacle, ni jamais vu quelqu’un porter ce ridicule couvre-chef ! (comme l’IA va chercher ses images dans le monde anglo-saxon, peut-être ce bonnet grotesque est celui des Shriners, mais reteinté en bleu !). Et pourquoi le grand temple de Pisan arborerait-il les bannières étoileés…
Bonjour René,
Je comprends que l’IA puisse parfois susciter des interrogations.
Les intelligences artificielles sont des outils très polyvalents et utiles, surtout lorsqu’il s’agit de respecter des règles comme celles du droit d’auteur. En effet, les IA permettent de créer du contenu original sans enfreindre les droits sur les œuvres protégées par le copyright. Cela évite les problèmes juridiques tout en permettant de générer des idées ou des créations adaptées à des besoins spécifiques.
L’IA peut être un excellent soutien dans de nombreux domaines, notamment celui de trouver des solutions créatives avec des illustrations.
Si tu disposes de photos de la GLNF avec une autorisation appropriée pour les utiliser, je pense que ce journal sera prêt à les intégrer ou les mettre en avant. En effet, il est essentiel de respecter les droits d’utilisation des images.
TAF.
Effectivement certaines applications dites fraternelles sont à revoir…Le Rectifié Yves Penne pourrait y procéder…
Jeune officier provincial, je me sens bien à la G:.L:.N:.F:.J’ai travaillé avec le G:.M:.actuel et avec le T:.R:.F:. Yves Penne.. Je suis d’accord sur le fait que les cérémonies se soient appauvries, mais beaucoup de transmissions se sont faites à l’ancienne. On s’interroge plus sur l’indépendance financière des R:.L:.
L’Obédience regroupe plusieurs dizaines de milliers de FF, une gestion rigoureuse est nécessaire, tout comme le maintien du concept de travail sur soi dans une voie initiatique, spirituelle et chevaleresque, ce qui exclut toute déviance affairiste, qui n’existe que dans une infime minorité de personnes ou de R:.L:., et doit être combattue ! En conclusion le travail sur la pierre brute continue et nous n’atteindrons jamais la perfection, sauf après le passage à l’O:.E:.
En attendant, travaillons dans la Joie !
Merci infiniment mon BAF pour cet article qui dénote une fois encore le caractère “……..” de la GLNF, raison de la cission de 2012 avec la création de la GL-AMF. Comme toujours les têtes changent mais le système demeure. GLNF = Club ou Fraternité des affairistes, très éloigné des Landmark de la Franc-maçonnerie.
Ce type de remarque vague et sans fondement est à la limite de la diffamation. Apporte des preuves et cesse de généraliser.
Fidèle lecteur de Libération, j’ai conservé l’édition du 3 décembre 2011, qui affirmait : “Les potentats africains (Sassou ou Bongo, grands maîtres locaux estampillés GLNF) oseront-ils s’y rendre ? … La GLNF, deuxième obédience française après le Grand Orient, estampillée de droite et déiste (le GO étant catalogué de gauche et laïque), joue son avenir. Gangrenée depuis un quart de siècle par les dérives affairistes, elle en a vu d’autres…”
Pour toute accusation de diffamation, veuillez vous adresser au journaliste Renaud Lecadre.