Plus sérieusement, des signes héraldiques peuvent apparaître sur des sculptures de personnages, mais ils sont, à ma connaissance, peints plutôt que sculptés. Donc, je ne pense pas à une hermine ici. On en arrive (enfin ?) à l’hypothèse que me semble la plus pertinente. Elle est arrivée 27 min après l’envoi de mon infolettre. Sophie donnait pour réponse sainte Apolline. Identification confirmée par Jean-Marie, Bérénice, Dorothée, Marie-Christine de Belgique et approchée par Thierry du Gers. Marie-Christine, souvent de bons conseils, nous donne l’explication en citant un passage de la Légende dorée, ce célèbre recueil médiéval de vies de saints : « Lors donc que cette bienheureuse vierge [sainte Apolline] fut entre leurs mains, ils [les bourreaux] eurent la cruauté de lui briser d’abord les dents ; ensuite, ils amassèrent du bois pour en dresser un grand billot et la menacèrent de la brûler vive, si elle ne disait avec eux certaines paroles impies. Mais la sainte n’eut pas plutôt vu le bûcher en flammes, que, se recueillant un instant, tout d’un coup, elle s’échappe des mains des bourreaux, et se jette elle-même dans le brasier dont on la menaçait. » Quel courage chez Apolline ! Mais quel est le rapport avec notre photo ? Non, ce récit enflammé ne sert pas d’avertissement à nos deux suspects d’hérésie, Christian et Pierre-Yves. En vérité, sainte Apolline est traditionnellement représentée, munie de la tenaille avec laquelle on lui a arraché les dents. L’objet non identifié pourrait être cette tenaille. Contrairement à ce que certains pensaient, la brèche qui barre le bas de l’objet ne serait pas une cassure ou une dégradation, mais juste l’extrémité biseautée des pinces. Marie-Christine trouve un argument supplémentaire dans la base sculptée en forme de pomme de pin : ne pourrait-elle pas correspondre aux flammes du bûcher dans lequel Apolline se jeta ? Je suis séduit par cette identification tout en rappelant cette précaution. Rien ne nous garantit que cette sculpture désignât une sainte. Sa provenance étant inconnue, elle n’ornait peut-être pas une église. Qu’importe si l’identification est incertaine, l’important n’est pas la destination, mais le chemin. Or j’espère vous avoir appris quelques petites choses en chemin. En tout cas, vos réponses m’ont bien fait voyager. Merci d’avoir participé à cette enquête. Le vocabulaire de la semaine La semaine dernière, je vous annonçais la publication de mon livre numérique « Comment regarder les sculptures médiévales ». Un des lecteurs, David de Bourgogne, m’interrogeait sur la page 40 qui décrit le vocabulaire d’un portail. « Vous indiquez au-dessus du tympan quatre voussures. À cet emplacement de la façade, doit-on parler de voussures ou d’archivoltes ? Quelle est précisément la différence entre voussure et archivolte ? » David, vous soulevez ici un problème de vocabulaire qui partage les historiens de l’art. Le sens d’« archivolte » est débattu. Selon Jean-Marie Pérouse de Montclos, l’archivolte correspond à la moulure qui couvre un arc ou une voussure. Selon d’autres auteurs, elle recouvre l’ensemble des voussures.  Face à cette incertitude, j’ai préféré ignorer le mot dans mon infographie, mais votre question m’a pris en tenaille. 😊 Pour rappel, le guide « Comment regarder les sculptures médiévales » reste à son prix de lancement jusqu’à dimanche prochain inclus. Vous apprendrez à lire les portails, mais aussi les statues, les gisants, les chapiteaux… |