mer 08 mai 2024 - 23:05

Lieu symbolique : Saint-Merri est-elle l’église du Diable ?

Il ne vous a pas échappé que, vendredi dernier, notre « Lieu symbolique » était consacré à la fontaine Stravinski. Sur certaines photos, vous pouviez d’ailleurs apercevoir l’église Saint-Merri (ou Saint-Merry) est une église catholique située à proximité du centre Georges-Pompidou, dans le 4e arrondissement de Paris.

C’est bien d’elle dont nous allons vous parler en ce vendredi 8 décembre , fête de l’Immaculée Conception qui découle d’une croyance populaire qui remonte à Byzance et au haut Moyen Âge… Mais, chargée de symboles, Saint-Merri ne serait-elle pas l’église du Diable ?

Comme toujours, commençons par son histoire

Construite entre 1500 et 1550, l’Église Saint-Merri est un exemple remarquable de l’architecture gothique flamboyant en France. Elle est dédiée à Saint Médéric, Merri, un abbé du VIIIe siècle. L’église a été construite sur le site d’une chapelle plus ancienne dans Médéric et enterré. Elle est connue pour sa façade richement décorée, son portail sculpté et ses vitraux. L’intérieur de l’église abrite de nombreux éléments artistiques, notamment des peintures, des sculptures et des vitraux, certains remontant au XVIe siècle.

Cette église, en plus d’être un lieu de culte, sert de centre pour diverses activités culturelles et communautaires. Elle accueille des concerts, des expositions et d’autres événements, reflétant son emplacement dans l’un des quartiers les plus dynamiques et artistiques de Paris.

Saint-Merri est un exemple de la riche histoire religieuse et culturelle de Paris, et sa visite offre un aperçu de l’architecture gothique ainsi que de l’art et de la musique religieuse.

Son célèbre Baphomet

Le nom Baphomet apparaît pour la première fois en relation avec l’ordre des Templiers au XIVe siècle. Les Templiers, organisation de moines chevaliers, accusés, entre autres, d’hérésie, mais aussi de l’adoration d’une idole nommé Baphomet. En vérité, je vous le dis, il n’existe aucune preuve concrète de l’existence d’une telle idole au sein de l’ordre.

Son symbolisme ésotérique

Au XIXe siècle, Baphomet a été réinterprété par des occultistes comme Eliphas Lévi, un érudit et écrivain français. Lévi a décrit le Baphomet comme une figure androgyne, mi-homme, mi-femme, avec une tête de chèvre et des symboles alchimiques. Cette représentation symbolique est souvent liée à des concepts tels que l’équilibre des contraires, la dualité et la réconciliation des opposés.

Dans la culture contemporaine, le Baphomet est parfois associé au satanisme, bien que cette association soit largement un produit de la culture populaire et des médias plutôt que basée sur des pratiques satanistes historiques ou liturgiques. Certains groupes satanistes modernes ont adopté des images inspirées de Baphomet comme symbole, mais cela ne reflète pas nécessairement les croyances ou les pratiques de tous ceux qui s’identifient au satanisme.

Baphomet Eliphas Lévi – Source esoblogs.net

Cependant l’image du Baphomet a souvent été mal comprise et est devenue un point focal pour diverses théories du complot et des allégations d’occultisme. Ces interprétations sont souvent éloignées de ses origines historiques et de son symbolisme ésotérique.

Pour les occultistes, mais pas tous, et certains courants ésotériques, le Baphomet représente souvent la connaissance ésotérique, l’initiation spirituelle, ou l’union des opposés, plutôt qu’une entité littéralement adorée.

Mais, historiquement, le pentagramme a également été utilisé dans le christianisme, où il symbolisait les cinq plaies du Christ ou représentait les cinq vertus du chevalier chrétien.

Le pentagramme inversé

Mais avant intéressons-nous au pentagramme, tout court.

Il est un symbole ancien, depuis l’époque sumérienne et l’environnement dans l’Antiquité grecque et romaine. Chez les Pythagoriciens, il est vu comme un symbole de perfection mathématique et spirituelle, la santé et l’harmonie. Dans certaines traditions ésotériques, le pentagramme représente les cinq éléments : l’esprit, l’eau, l’air, le feu et la terre. La pointe supérieure représente souvent l’esprit, tandis que les autres pointes représentent les éléments matériels. Et dans de nombreuses cultures, le pentagramme est vu comme un puissant symbole de protection. Il est souvent utilisé dans les amulettes et talismans pour éloigner le mal et attirer des énergies positives. Pour certains, dont le Wicca et d’autres formes de néo-paganisme, le pentagramme est un symbole central souvent utilisé pour représenter la déesse, les aspects de la féminité et de la fertilité, et les forces de la nature.

Alors, lorsqu’il est inversé, avec deux pointes orientées vers le haut, le pentagramme peut prendre des significations différentes. Dans certains contextes, il est associé au satanisme, en particulier lorsqu’il est utilisé avec une tête de chèvre inscrite, connue sous le nom de Sigil de Baphomet. Cependant, il est important de noter que cette association est plus récente et n’est pas universelle.

Le pentagramme inversé est également un symbole important dans traditions diverses magiques et occultes. Il est souvent utilisé dans les rituels et pratiques les magiques comme un outil de concentration et de manifestation des intentions.

Il peut être interprété comme une inversion ou un renversement des valeurs traditionnellement associées au pentagramme droit. Cela peut symboliser un défi aux normes établies – opposition ou subversion des valeurs chrétiennes traditionnelle notamment – ou une exploration des aspects sombres ou non conventionnels de la spiritualité. C’est ainsi que dans certaines traditions ésotériques, il symbolise aussi la dominance de l’élément terre sur l’esprit, mettant l’accent sur le monde matériel et physique plutôt que sur le spirituel. Rappelons que dans certaines pratiques magiques ou occultes, le pentagramme inversé est utilisé dans des rituels spécifiques. Notamment dans la magie noire, il est utilisé dans des rituels destinés à invoquer des esprits ou des puissances maléfiques. Ces pratiques sont souvent destinées à obtenir un pouvoir personnel ou à nuire à d’autres.

L’église Saint-Merri a-t-elle une façade alchimique ?

L’église est un exemple de type gothique flamboyant. Elle une façade richement décorée avec des éléments sculpturaux qui sont caractéristiques de ce style. Ces éléments décoratifs sont interprétés de diverses manières, mais ils avaient avant tout les conventions stylistiques et religieuses de l’époque de sa construction.

Au fil des siècles, certains ont attribué des significations ésotériques ou alchimiques. Ces interprétations sont généralement basées sur des lectures symboliques (Fulcanelli surtout) des éléments architecturaux et ne sont pas nécessairement soutenues par des preuves historiques.

Alors, y a-t-il, même si l’alchimie, avec son riche symbolisme, a fasciné de nombreuses générations et a souvent été liée, parfois de manière spéculative, à des sites historiques, des preuves que Saint-Merri ait été conçue avec des intentions alchimiques ou qu’elle cache des symboles alchimiques.

450.fm reviendra, courant janvier, sur cette église si particulière en lui consacrant deux ou trois articles sur le portail principal, percé de trois portes ogivales surmontées de crossettes et de fleurons, et son caractère alchimique…

Quid de la gloire en bois doré de 1753, agrémentée de têtes de chérubins ?

La gloire, souvent représentée par les rayons lumineux ou un halo, est un motif artistique utilisé pour symboliser la présence divine, la sainteté ou l’illumination spirituelle. En bois doré, elle évoque non seulement la richesse et l’opulence de l’art religieux de l’époque mais aussi la lumière divine

Quant aux chérubins, ils sont des figures angéliques dans la tradition chrétienne, souvent représentés comme de petits enfants avec des ailes. Ils symbolisent l’innocence, la pureté et la proximité avec Dieu. Dans l’art chrétien, les chérubins servent souvent d’accompagnateurs ou de gardiens du divin. Enfin, l’art baroque, dominant en Europe aux XVIIe et XVIIIe siècles, se caractérise par son exubérance, sa richesse décorative et son utilisation dramatique de la lumière et de l’ombre. Les œuvres d’art baroques, comme cette gloire en bois doré, visaient à susciter l’émerveillement et à renforcer les thèmes spirituels par leur impact visuel.

À Saint-Merri, comme ailleurs, de tels éléments décoratifs avaient une fonction à la fois liturgique et symbolique. Ils étaient destinés à enrichir l’expérience de la prière et de la contemplation, à rappeler aux fidèles la grandeur de Dieu et à les aider à se concentrer sur les aspects spirituels de la foi. Cette œuvre d’art doit être vue dans le contexte de l’époque de sa création. En 1753, l’Église catholique utilisait l’art comme moyen de communication et d’enseignement religieux, surtout après le Concile de Trente qui a encouragé l’utilisation des arts pour la Réforme catholique.

L’ orgue, instrument remarquable et historique

L’orgue actuel de Saint-Merri a été construit par Aristide Cavaillé-Coll, un facteur d’orgues français célèbre du XIXe siècle, connu pour ses innovations et pour avoir construit certains des plus grands orgues en France. L’instrument possède des caractéristiques typiques des œuvres de Cavaillé-Coll, notamment en termes de sonorité et de mécanismes. Il est doté de plusieurs jeux et de tuyaux, offrant une large palette sonore adaptée à la fois à la musique liturgique et aux concerts. L’orgue est non seulement un instrument liturgique pour les services religieux, mais il est également utilisé pour des concerts et des événements musicaux. Il attire des organistes et des amateurs de musique du monde entier. L’orgue, placé dans un cadre aussi historique que celui de Saint-Merri, ajoute à l’atmosphère spirituelle et artistique de l’église.

Alors, selon vous, Saint-Merri, église du Diable ou pas ? Vous avez 12 heures, de midi à minuit !

Merci encore à notre frère Philippe pour sa visite ésotérique de Saint-Merri !

Photos © Yonnel Ghernaouti, YG

2 Commentaires

  1. On peut croire que les catholiques rendent un culte à dieu ou au diable…ou bien que cette sculpture indique que nous vivons dans un monde mauvais que nous quittons en pénétrant dans la pénombre du lieu….je n’ai jamais vu de pentacle inversé dans une église.Un pentagramme bien droit se trouve à Avignon dans une église sans Christ crucifié et sans croix. Cette ville porte la marque des jésuites…Très beau texte qu’il me faudra étudier minutieusement.

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Yonnel Ghernaouti
Yonnel Ghernaouti
Yonnel Ghernaouti est directeur de la rédaction de 450.fm. Il a fait l’essentiel de sa carrière dans une grande banque ancrée dans nos territoires. Petit-fils du Compagnon de l’Union Compagnonnique des Compagnons du Tour de France des Devoirs Unis (UC) Pierre Reynal, dit « Corrézien la Fraternité », il s’est engagé depuis fort longtemps sur le sentier des sciences traditionnelles et des sociétés initiatiques. Chroniqueur littéraire, membre du bureau de l'Institut Maçonnique de France (IMF) et médiateur culturel au musée de la franc-maçonnerie (Musée de France), il collabore à de nombreux ouvrages liés à l’Art Royal et rédige des notes de lecture pour plusieurs revues obédientielles dont « La Chaîne d’Union » du Grand Orient de France et « Perspectives » de la Fédération française de l’Ordre Mixte International Le Droit Humain ou encore « Le Compagnonnage » de l’UC. Initiateur des Estivales Maçonniques en Pays de Luchon, il en a été le commissaire général. En 2023, il est fait membre d'honneur des Imaginales Maçonniques & Ésotériques d'Épinal (IM&EE).

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