ven 29 mars 2024 - 00:03

Le Mystère du Trésor des Templiers – Avec André Douzet

Un film produit par Rosaceae Films

André Douzet explique comment a pris fin l’Ordre du Temple en France, et quelles sont les différentes hypothèses de survie du légendaire trésor des Templiers.

https://youtu.be/leb6I7JnvKY

La franc-maçonnerie templière au xviiie siècle

Les premières loges maçonniques apparaissent tout à la fin du xvie siècle en Écosse puis en Angleterre (voir les Statuts Schaw), et se répandent en Europe dans la première moitié du xviiie siècle. Elles se réclament d’une origine ancienne, remontant aux origines supposées des « loges opératives » (c’est-à-dire de véritables artisans maçons), ainsi qu’aux origines de l’art de bâtir lui-même et donc, dans un environnement profondément marqué par le christianisme, au mythe biblique de la construction du Temple de Salomon.

Vers 1725, apparaît à Londres le troisième grade de la franc-maçonnerie. Sa légende fait de l’artisan bronzier Hiram, mentionné dans la Bible, l’architecte de ce chantier. En 1736, dans son fameux discours, le chevalier de Ramsay (1686-1743) rattache la franc-maçonnerie aux croisés, et plus spécifiquement aux chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, mais pas aux templiers1.

Dans les années 1740 apparaissent en France de très nombreux nouveaux grades maçonniques, nommés hauts grades maçonniques. L’un des plus anciens d’entre eux, dénommé « Chevalier d’Orient et de l’Épée », développe sa légende symbolique propre sur le thème de la reconstruction du Temple de Jérusalem au retour de la captivité de Babylone. Il fait des chefs hébreux de cette époque des chevaliers-maçons, qui arborent dans l’iconographie symbolique du grade la truelle du maçon dans une main et l’épée du chevalier dans l’autre en référence au passage de la Bible Ne 4:13-23. Ce grade connut un grand succès en France puisqu’il y eut dans les années 1750 plusieurs loges de « Chevaliers d’Orient » dans la seule ville de Paris et qu’il devint le grade terminal de plusieurs systèmes maçonniques dans les années 1760. La légende de ce grade n’évoque cependant pas les chevaliers de l’ordre du Temple, mais seulement des chevaliers-maçons qui reconstruisent le Temple de Jérusalem.

Dans cette première moitié du xviiie siècle, apparaissent par ailleurs en Allemagne des cercles alchimistes, sous le nom générique de Rose-Croix d’Or, et reliés entre eux par une doctrine assez floue, plus ou moins inspirée des mystérieux manifestes Rose-Croix du siècle précédent (1614 et 1615)4. Sans être à proprement parler maçonniques, ces conventicules sont en relation avec les loges.

C’est probablement dans ces milieux qu’apparaît l’idée de l’origine templière de la franc-maçonnerie, reliant la chevalerie de Ramsay à la légende du Temple d’Hiram. C’est là aussi qu’apparaît la légende d’un conseil suprême de Supérieurs Inconnus des Rose-Croix, ne comprenant que 9 membres, idée qui sera reprise dans la légende templière. Elle s’est propagée dans les milieux maçonniques allemands et protestants, alors que le pape Clément XII8 s’était élevé contre la franc-maçonnerie dans la bulle In eminenti apostolatus specula (1738).

En 1750, le premier grade initiatique templier attesté apparaît dans des loges de Poitiers et Quimper, sous le nom de Sublime Chevalier Élu9. Il s’inscrit dans la famille des grades de vengeance, dit aussi d’Élu (Élu des IX et Élu des XV, voir l’article REAA), qui révèlent au frère initié qu’Hiram a été vengé par les autres maîtres du chantier du Temple de Salomon. Dans la légende des cahiers de Quimper et de Poitiers, Molay est associé à Hiram, sa mort étant aussi injuste que celle de l’architecte de Salomon. Les templiers ayant survécu au massacre se seraient réfugiés dans les montagnes d’Écosse, et se seraient cachés sous les insignes de la franc-maçonnerie ; c’est la première version connue d’une association entre Templiers et francs-maçons.

Un manuscrit des environs de 1760 trouvé à Strasbourg, intitulé Deuxième Section, de la Maçonnerie parmi les Chrétiens, relie templiers, Rose-Croix et francs-maçons dans une tradition immémoriale d’une société secrète, hermétiste et occultiste. Ce texte complète la retraite templière en Écosse où Beaujeu, neveu de Jacques de Molay, aurait restitué l’Ordre du Temple. Les Grands Maîtres secrets, Supérieurs Inconnus, se seraient succédé depuis ce temps-là. Un autre manuscrit, hongrois, les associe en 1761 aux Argonautes de l’antiquité.

Mais c’est surtout la Stricte Observance Templière du baron von Hund (1722-1776) qui, à partir de 1750, va populariser l’idée au sein de la franc-maçonnerie, ainsi que dans les hauts grades maçonniques. Une nouvelle légende prend forme, en partie basée sur la Deuxième Section, en partie remodelée :

« Après la catastrophe, le Grand Maître provincial d’Auvergne, Pierre d’Aumont, s’enfuit avec deux commandeurs et cinq chevaliers. Pour n’être pas reconnuS, ils se déguisèrent en ouvriers maçons et se réfugièrent dans une île écossaise où ils trouvèrent le grand commandeur Georges de Harris et plusieurs autres frères, avec lesquels ils résolurent de continuer l’Ordre. Le jour de la Saint-Jean 1313, ils tinrent un chapitre dans lequel Aumont, premier du nom, fut nommé Grand Maître. Pour se soustraire aux persécutions, ils empruntèrent des symboles pris dans l’art de la maçonnerie et se dénommèrent Francs-Maçons. […] En 1631, le Grand Maître du Temple transporta son siège à Aberdeen et par la suite l’Ordre se répandit, sous le voile de la franc-maçonnerie, en Italie, en Allemagne, en Espagne et ailleurs»

Cette légende permet de relier les Templiers avec les origines écossaises de la franc-maçonnerie. La branche française, le Rite Ecossais Rectifié, est fondée en 1778 à Lyon par Jean-Baptiste Willermoz, qui reprend la légende dans le discours inaugural des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte :

« Trois de nos ancêtres, possédant le grand secret, trouvèrent le moyen d’échapper aux recherches générales et particulières que l’on fit contre eux. Ils errèrent dans les bois et les montagnes, de royaume en royaume ; enfin ils se retirèrent dans des cavernes proches de Herdown en Écosse où ils vécurent, servis et secourus par les chev.•. de Saint-André du Chardon, les anciens amis et alliés des Templiers. Ces trois templiers firent une nouvelle alliance avec les chev.•. de Saint-André…»

Le caractère historique de la filiation templière fut cependant rejeté lors du convent maçonnique de Wilhelmsbad en 1782, pour devenir « symbolique » et « spirituel » au sein du Rite écossais rectifié :

« Après plusieurs recherches curieuses sur l’histoire de l’ordre des Templiers, dont on dérive celui des maçons, qui ont été produites, examinées et comparées dans nos conférences, nous nous sommes convaincus qu’elles ne présentaient que des traditions et des probabilités sans titre authentique, qui puisse mériter toute notre confiance, et que nous n’étions pas autorisés suffisamment à nous dire les vrais et légitimes successeurs des T[empliers], que d’ailleurs la prudence voulait que nous quittions un nom qui ferait soupçonner le projet de vouloir restaurer un ordre proscrit par le concours de deux puissances, et que nous abandonnions une forme qui ne cadrerait plus aux mœurs et aux besoins du siècle. »

Dès lors, les groupes « néo-templiers » se développeront en marge de la franc-maçonnerie.

2 Commentaires

  1. Sauf que le « trésor des templiers » n’existe pas, si ce n’est dans l’imaginaire – à visée lucrative – de certains. Toutes les « liquidités » ont été saisies sur ordre de Philippe le Bel et le peu de biens matériels qu’ils possédaient a été transféré à Malte. La « survie du légendaire trésor des Templiers » relève du fantasme. Mais cela peut faire un très bon film, pourquoi pas, à condition de ne pas y croire.

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