sam 20 avril 2024 - 05:04

L’anti-judéo-maçonnisme institutionnalisé sous l’Occupation

Volet 3/3 – Suite et fin de notre série sur le mythe judéo-maçonnique qui nous est offert par Conspiracy Watch l’Observatoire du conspirationnisime. Si vous avez manqué le premier volet, retrouvez-le à cette adresse et le deuxième volet à cette adresse.

Comme Alfred Naquet l’avait été dans les années 1880 et 1890, Bernard Lecache, fondateur (en 1929) et président très actif de la Lica, devenu maçon en 1937, est traité comme l’homme à abattre par les polémistes antijuifs et antimaçons à la fin des années 1930 et sous l’Occupation. Dans la brochure de propagande antijuive intitulée Je vous hais ! confectionnée par Coston et publiée en avril 1944 grâce à l’aide du PPF, Robert Jullien-Courtine (1910-1998) lui consacre un article virulent, « Une organisation juive de combat : la L.I.C.A. », qui commence ainsi : « Une organisation juive… et maçonnique, devrait-on dire ! Car la “Ligue Internationale contre l’Antisémitisme” du Juif franc-maçon Bernard Lecache offrait un magnifique exemple de l’activité de ce que Mgr Jouin, un des premiers, nomma la judéo-maçonnerie : l’alliance des loges et du ghetto. »

Affiches propagande antimaçonnique
Affiches propagande antimaçonnique

Sous l’Occupation, après avoir adhéré au PPF, Coston devient notamment directeur du Centre d’Action et de Documentation (C.A.D.), dont l’objectif déclaré est « la lutte contre la Judéo-Maçonnerie, ses agents, ses filiales, et leurs complices », et collabore, comme Léon de Poncins, aux Documents maçonniques (octobre 1941-juin 1944), revue mensuelle dirigée par Bernard Faÿ (1893-1978), avec pour rédacteurs en chef Robert Vallery-Radot (1885-1970) et Jean Marquès-Rivière (1903-2000), scénariste du film de propagande antimaçonnique et antisémite Forces occultes, sorti à Paris le 9 mars 1943. Jumelant l’antisémitisme et l’antimaçonnisme, Coston publie au C.A.D., en 1941, une compilation malveillante intitulée Les Juifs en France et un libelle titré Quand la Franc-Maçonnerie gouvernait la France, puis, en 1942, L’Amérique, bastion d’Israël, et La Franc-Maçonnerie sous la IIIe République, mise en accusation de la « judéo-maçonnerie ». Ce qui ne l’empêche pas de publier en 1942 aux éditions Jean-Renaud un pamphlet anti-ploutocratique dont il confectionnera par la suite de nombreuses versions augmentées et mises à jour : La Haute Finance juive et les trusts. Outre Les Cahiers de la France nouvelle, le C.A.D. publiait un Bulletin d’information antimaçonnique, bénéficiant des services d’un réseau d’informateurs couvrant toute la France. Il s’agissait de « démasquer les Juifs camouflés et leurs complices francs-maçons ». Les rapports du C.A.D. sont transmis notamment au Service des Sociétés secrètes, au PPF, à l’inspecteur Georges Moerschell (directeur du Service spécial des associations dissoutes, et agent de la Gestapo), à l’ambassade d’Allemagne et à la Gestapo. Coston est également membre de la Commission d’études judéo-maçonniques, créée à l’initiative du lieutenant SS Moritz, chef de l’action antimaçonnique allemande en zone occupée, et présidée par le juriste raciste William Gueydan de Roussel (1908-1996), chargé de mission au Service des Sociétés secrètes. En 1943, Coston devient membre du Cercle aryen (présidé par Paul Chack (1876-1945), déjà président du Comité d’action antibolchevique), où il préside la commission des admissions. Dans les activités anti-judéo-maçonniques de Coston, soutenues par les Allemands et financées sur les fonds secrets de Vichy, il faut également inclure sa collaboration, sous son nom ou sous son pseudonyme « Georges Virebeau », à de nombreux journaux de la Collaboration (Le Cri du peupleLa France au travailAu piloriParis-Soir, etc.) (Sabah, 1996, p. 182-186 ; Lenoire, 1999, p. 375-379 ; Combes, 2001, p. 141-144).

En novembre 1941, Evola publie dans La Vita Italiana un article intitulé « La France a-t-elle surmonté le danger maçonnique ? », à l’occasion d’un pamphlet de Poncins qui venait de paraître : La Franc-Maçonnerie contre la France. Il commence par souligner la spécificité de l’anti-judéo-maçonnisme à la française, tenant à sa radicalité :

« Il y a en France une vieille tradition de lutte contre le judaïsme et la Maçonnerie. C’est précisément parce que la France a été la première, parmi les grandes nations européennes, à subir l’action la plus délétère de ces forces subversives, que devaient venir, de ce pays et de ceux qui “tenaient bon” encore, les réactions les plus énergiques. Souvent, l’antisémitisme et l’antimaçonnisme français ont donc présenté un caractère plus radical que dans d’autres nations, ainsi qu’une orientation traditionaliste et conservatrice, donc fréquemment aristocratique, à la différence de certaines formes plus récentes d’antisémitisme et d’antimaçonnisme, dans lesquelles le point de référence principal a été l’idée moderne de nation et de communauté nationale. »

Puis Evola, réaffirmant la thèse conspirationniste canonique sur la marche de l’Histoire (considérée dans sa « dimension souterraine »), repose la question d’une direction secrète, par des « chefs occultes », de la franc-maçonnerie elle-même, sans écarter l’hypothèse d’une direction juive, mais sans la considérer comme entièrement satisfaisante : « Le point de vue de L. de Poncins – auquel nous-même adhérons –, c’est que l’ensemble de la subversion mondiale qui s’est produite au cours des derniers siècles ne saurait être fortuite, due simplement aux erreurs, aux déviations et à l’aveuglement des hommes, donc que cela amène à penser à l’existence d’un centre inspirateur, occulte et international. » Poncins, pour sa part, ne concluait pas : « Ce que l’on peut dire toutefois, c’est que s’il existe, ce centre est au-dessus de la Franc-Maçonnerie elle-même et celle-ci est une arme entre ses mains. » La réponse classique des barruéliens consistait à supposer l’existence ultra-secrète d’arrières-loges, masquées par les loges visibles. Mais qui donc pouvaient occuper les arrières-loges, sinon les « Princes de Juda » ? À moins que les « Supérieurs inconnus » soient voués à rester à jamais inconnus, parce que, pour des raisons mystérieuses, leur identité ou leur nature serait inconnaissable.

En 1942, André Chaumet, vice-président de l’Association des journalistes antijuifs et directeur du Cahier jaune (lancé en novembre 1941) publié sous l’égide de l’Institut d’étude des Questions juives, réédite le Petit Catéchisme antijuif d’André de Boisandré, dont il s’efforce de monter l’actualité dans une postface qui se termine ainsi : « Les exploiteurs et les parasites n’ont plus place dans la maison péniblement reconstruite. Il n’y a plus de place pour l’usurier et d’abris pour l’usure. Plus de place pour Israël. Plus d’abris pour ses complots et ses machinations. » Le dernier mot du conspirationnisme de Collaboration est dû à Coston qui conclut son article intitulé « Du Talmud aux Protocoles », paru en avril 1944 dans la brochure antijuive Je vous hais ! – article reproduit dans Taguieff (dir.), 1999, p. 521-524 –, par cet avertissement en forme de menace : « Cette guerre constitue l’ultime phase de la lutte millénaire que le Judaïsme mène contre les peuples non juifs. Le triomphe des Juifs et de leurs “alliés” signifierait l’asservissement total de notre planète aux “Sages de Sion”. Français, veux-tu devenir l’esclave du Juif ? »

Avatars contemporains du mythe anti-judéo-maçonnique : courants de l’antimondialisme apocalyptique

Dans l’après-guerre, sur le modèle de la diabolisation de la SDN, le schème du « complot judéo-maçonnique » a été appliqué, sous diverses variantes, à la dénonciation de certaines organisations internationales – à commencer par l’ONU – censées agir en vue d’établir un « Gouvernement mondial » impliquant la destruction des nations, tout en tissant des liens constituant dès à présent un « Gouvernement invisible ». Tel est le leitmotiv de la littérature de combat « antimondialiste » qui fleurit à partir des années 1950 et dont on trouve des variantes dans toutes les sensibilités de ce qu’il est convenu d’appeler « l’extrême droite », des néo-nazis aux traditionalistes catholiques, en passant par les milieux nationalistes. Le conférencier catholique contre-révolutionnaire Pierre Virion (1899-1988), ancien collaborateur de la Revue internationale des sociétés secrètes, reprend du service en dénonçant dans un essai « les forces occultes dans le monde moderne » (1966), texte d’une conférence prononcée à Rome le 25 octobre 1965. Détailler les individus et les groupes faisant partie des « forces occultes » ou de ce que le même Virion appelle « le complot », titre de l’un de ses libelles (1969), c’est là cependant une tâche quasi infinie : ce monde souterrain, celui des « mouvements occultes », est peuplé de très nombreuses familles et tribus. Virion s’impose comme l’un des principaux propagandistes « antimondialistes » de langue française, dans la ligne de Mgr Jouin, auquel il emprunte sa rhétorique, par exemple en publiant un court essai intitulé Bientôt un Gouvernement mondial ? Une super et Contre-Église (1966).

Cependant, pour la plupart des auteurs conspirationnistes, le fondement de la puissance est désormais principalement d’ordre financier : le modèle répulsif de la famille Rothschild tend à détrôner celui de l’Alliance israélite universelle, incarné par Crémieux. Les « banquiers internationaux » ou les « grands banquiers cosmopolites », censés faire partie d’une oligarchie internationale, tendent à remplacer les francs-maçons, ils sont perçus comme une sorte de franc-maçonnerie de la finance cosmopolite. Mais le postulat demeure : toutes les « internationales » sont liées, elles sont toutes de même nature et ont toutes le même objectif final, la création d’un « Gouvernement mondial », dénoncée comme « le vieux rêve du messianisme juif », le rêve d’un « empire universel sous l’autorité d’une oligarchie apatride », selon la formule de Jacques Bordiot (1900-1984), dans son pamphlet intitulé Une main cachée dirige… (1974). S’il y a un « messianisme de la finance internationale », c’est que celle-ci n’est qu’une émanation de la super-puissance occulte, qu’on la dise « juive » ou « judéo-maçonnique ».

À peine sorti d’un long séjour en prison, Henry Coston entame une nouvelle carrière de publiciste conspirationniste, publiant en 1955 un premier ouvrage de compilation, Les Financiers qui mènent le monde, qui comporte un chapitre intitulé « Rothschild, roi de l’époque » et un autre consacré à un Américain célèbre, autant pour sa richesse que pour son antisémitisme : « Un milliardaire anticapitaliste : Ford ». L’ouvrage a une suite, parue en 1958, sous le titre La Haute Banque et les trusts. Entretemps, Coston lance le mensuel Lectures françaises, qu’il dirige de 1957 à 1977. Le n° 53-54 de Lectures françaises, daté d’août-septembre 1961, consacre son dossier central à « l’éternelle question », titre allusif qu’explicite le sous-titre : « Coup d’œil sur les sociétés secrètes ». Le n° 61-62 du mensuel, daté d’avril-mai 1962, comportant un dossier sur le gouvernement de Georges Pompidou, titre à la une : « La République des Rothschild ». Le dossier est présenté en termes conspirationnistes et populistes, dénonçant la « trahison » des élites au profit du système ploutocratique dont le « roi » se nomme Rothschild :

« Pour mieux faire comprendre entre quelles mains la France est tombée, nous présentons l’Empire rothschildien d’aujourd’hui, cette immense toile d’araignée qui couvre la France entière et retient prisonniers tout un peuple d’ouvriers, de bourgeois, de boutiquiers, de laboureurs et de soldats trompés par leurs guides naturels et trahis par leurs chefs politiques. Nous expliquons enfin comment, par un ingénieux système (…), l’avoir, les biens, les économies de M. Dupont, Français moyen, servent à renforcer la puissance des hommes d’argent, en général, et du banquier de Rothschild, en particulier. »

La même vision complotiste, antimondialiste et antiploutocratique se rencontre dans un n° spécial de Lectures françaises publié en 1968 : Le Secret des dieux, ainsi que dans l’un des derniers ouvrages de Coston, La Fortune anonyme et vagabonde, publié en 1984. La formule dont Coston a fait le titre de son livre est extraite d’un célèbre discours du Duc d’Orléans à San Remo, le 16 février 1899. Elle constitue, chez ce publiciste qui fut un professionnel de la judéophobie de 1929/1930 à sa mort (2001) et un défenseur inébranlable de l’authenticité des Protocoles, une métaphore du pouvoir juif international. Persistance du mythe répulsif du « Juif Rothschild », dont la judéophobie anticapitaliste ne cessera de se nourrir. Mais Coston n’oublie pas pour autant la légende du « complot maçonnique » : en 1979, il publie La Conjuration des Illuminés (rééd., 1992). En 1983, il patronne la publication d’un pamphlet conspirationniste de son ami Jacques Bordiot, Le Gouvernement invisible, recueil de tous les clichés « antimondialistes » de l’époque. Le même Bordiot, collaborateur du mensuel d’extrême droite Lectures françaises (dirigé par Coston), avait publié en 1974 un autre essai conspirationniste et « antimondialiste » sous le titre Une main cachée dirige… (2e éd., 1976). En novembre 1976, il publie dans Lectures françaises (n° 235) un article intitulé « L’O.N.U. et le Gouvernement mondial », où il dénonce ceux que Coston appelle les « véritables maîtres du monde » : « Quand on sait (…) que (…) l’influence d’Israël est déterminante dans le choix du président des États-Unis (…), on devine qui tirera les ficelles de ce Gouvernement mondial. » Au même genre de pamphlets appartiennent les ouvrages de Yann Moncomble (1953-1990) : La Trilatérale et les secrets du mondialisme (1980), L’Irrésistible expansion du mondialisme (1981), ou Du viol des foules à la Synarchie ou le complot permanent (1983). Moncomble résume sa vision du monde en février 1984 dans Lectures françaises, où il signe un article intitulé « Franc-Maçonnerie, Trilatérale, Bilderberg, Club Le Siècle… même combat ». L’effondrement du communisme soviétique est perçu comme la victoire du « mondialisme ». En octobre 1991, Lectures françaises (n° 414) titre à la une : « Une internationale chasse l’autre. Du communisme au mondialisme ». Mais la vision paranoïaque de la franc-maçonnerie et son « pouvoir invisible » n’a pas disparu du paysage antimondialiste. En avril 1994, Lectures françaises (n° 444) titre à la une: « La puissance de l’Internationale maçonnique ». Dans l’article qui est consacré à cette sur-puissance occulte, on apprend que « l’Internationale maçonnique est un super-État », « un véritable État supra-national », et qu’en conséquence « le combat contre les sociétés secrètes continue ».

Illuminé qui voit une pyramide en hollograme
Illuminé qui voit une pyramide en hologramme

Ces prétendues « sociétés secrètes » à visée « mondialiste » sont censées rassembler les puissants de ce monde, tel le groupe de Bilderberg, désigné comme l’un des principaux lieux de rencontre, de coordination et de décision de l’oligarchie mondiale ou de « l’élite financière internationale ». Dans la littérature conspirationniste d’extrême droite « classique » (Henry Coston, Gary Allen), le groupe de Bilderberg est inclus dans une série noire d’organisations « mondialistes » supposées omnipotentes et maléfiques : la Commission Trilatérale, le Council on Foreign Relations (CFR), le B’nai B’rith, les Skull and Bones, etc. (Taguieff, 2005, p. 117, et 2006, p. 15-19, 74-79). Pour les dénoncer, Coston publie dans les années 1980 une série de brochures « antimondialistes » rééditées dans les années 1990, telles que : Une nouvelle Synarchie. La Trilatérale domine les nations et asservit les peuples. Voici ses agents secrets dans le monde, Le monde secret de BilderbergComment la Haute finance et les technocrates dominent les nations. Mais, parallèlement, l’interprétation satanisante et apocalyptique du « complot judéo-maçonnique » était recyclée par un auteur conspirationniste comme William Guy Carr (1895-1959), fondamentaliste protestant canadien qui, après avoir publié en 1955 son maître livre, Pions sur l’échiquier, a travaillé jusqu’à la veille de sa mort (octobre 1959) à un pamphlet dénonçant la « conspiration luciférienne », moteur du « Mouvement révolutionnaire mondial », conspiration « dirigée contre Dieu et l’homme par ceux qui font partie ici-bas de la Synagogue de Satan » (Satan, prince de ce monde, ouvrage posthume publié en 1966) (Taguieff, 2005, pp. 431-436). Carr a rédigé en 1958 un résumé de sa vision du monde : La Conspiration mondiale dont le but est de détruire tous les gouvernements et toutes les religions en place. Il y précise avec le plus grand sérieux que « la Synagogue de Satan se compose (…) d’hommes et de femmes d’un grand nombre de nationalités qui remontent jusqu’à Caïn, le fils d’Ève ». En France, l’homologue catholique de Carr est le marquis de la Franquerie, auteur de Lucifer & le pouvoir occulte, sous-titré : « La Judéo-Maçonnerie, les Sectes, le Marxisme, la Démocratie : Synagogue de Lucifer & Contre-Église » (1984 ; rééd., 2006). L’ouvrage commence par l’énoncé de la conviction conspirationniste fondamentale de l’auteur, héritier de Mgr Jouin : « Une étude approfondie de la situation actuelle du monde prouve que le Pouvoir occulte, la Franc-Maçonnerie, les sectes, la démocratie, le marxisme et la révolution ne sont que les bras de la pieuvre incarnant la Synagogue de Satan, c’est-à-dire la Contre-Église, et que tous aboutissent très réellement au culte luciférien et en dépendent. »

Auteur de La Face cachée de l’histoire moderne, somme publiée en quatre tomes en langue espagnole (trad. fr., t. 1, 1984 ; rééd., 2008), Jean Lombard (qui signe aussi Jean Lombard Coeurderoy) peut être considéré comme un héritier spirituel de Carr. Dénonciateur du « mondialisme » dans les années 1970 et 1980, Lombard se présente comme un spécialiste de « l’histoire secrète » et de l’action des « forces occultes » ou des sociétés secrètes dans l’histoire universelle depuis la chute de Constantinople (29 mai 1453). Dans Lectures françaises, en octobre 1984 (n° 330), les mérites de l’ouvrage de Lombard sont ainsi vantés : « M. Lombard (…) se meut avec une aisance étonnante dans le dédale des sociétés secrètes, des complots, des doctrines hermétiques ou des combinaisons financières (…). Il explique comment la Haute Banque, la Franc-Maçonnerie et l’Internationale marxiste dominent le monde, établissant leurs conquêtes grâce au binôme guerre-révolution. » Le bulletin « contre-révolutionnaire » Lecture et Tradition (n° 108, juillet-août 1984), dirigé par Jean Auguy, n’est pas moins élogieux : « Félicitons l’auteur que la postérité mettra sûrement au rang des grands maîtres de l’Histoire anti-subversive, les Barruel, Crétineau-Joly, Nicolas Deschamps et Mgr Delassus. »

La Russie soviétique, notamment sous le deuxième règne de Leonid Brejnev (1977-1982), n’a pas été épargnée par la paranoïa anti-judéo-maçonnique, agrémentée de motifs « antisionistes » de style démonologique empruntés à la propagande officielle (Spier, 1979 ; Wistrich, 1991, pp. 181-184 ; Korey, 1978, et 1995, pp. 46-73). En URSS, le « sionologue » (« zionologist ») Valeri Emelianov ou, en langue anglaise, Valery Yemelyanov (1929-1999) est l’un des intellectuels soviétiques qui, à la fin des années 1970 et au début des années 1980, ont acquis une certaine célébrité en partant en guerre publiquement contre les Juifs (et/ou les « sionistes ») et les francs-maçons. Cet orientaliste de formation, réputé être aussi historien et économiste, intellectuel communiste et néo-païen militant, qui fut directeur du département d’arabe à l’Institut Maurice-Thorez de langues étrangères (Moscou), était un écrivain antisémite connu dès les années 1960-1970 (Korey, 1978, p. 66, et 1995, p. 24-26). Il rejoignit « Pamiat » en 1987 pour en être exclu trois ans plus tard en raison de son extrémisme et surtout de son antichristianisme radical. Le 10 janvier 1977, à Moscou (section internationale du PCUS), paraît le Rapport d’Emelianov sur le « complot mondial », dans lequel est dénoncée la « pyramide internationale judéo-maçonnique », point d’appui des « sionistes ». C’est ainsi qu’ils contrôleraient 80% de l’économie dans les pays capitalistes et 90-95% des médias. Emelianov pose la question conspirationniste par excellence : « Qui se tient derrière Jimmy Carter et les eurocommunistes ? », et y répond en dressant la liste de tous les Juifs ou francs-maçons appartenant au gouvernement Carter (Korey, 1995, p. 25-26). Sa thèse est que les « sionistes s’introduisent parmi les goyim grâce aux maçons » et que chaque maçon est « un informateur actif des sionistes » (Emelianov, cité par Wistrich, 2010, p. 144-145). Il s’agit donc pour lui de dénoncer les membres du gouvernement « sionisto-maçonnique » américain ainsi que ceux de la « mafia sionisto-maçonnique du Congrès », initiateurs et acteurs d’un vaste complot visant à étrangler l’Union soviétique. Pour assurer la défense de cette dernière, Emelianov propose la création d’un « Front mondial antisioniste et antimaçonnique (VASAMF), semblable au front antifasciste des années 1930-1940 », car, précise-t-il, « la menace d’une domination mondiale du sionisme, fixée pour l’an 2000, pèse sur tous les goyim du monde ». Emelianov est aussi l’auteur d’un pamphlet intitulé Desionizatsiia (« Désionisation », Paris, 1978 et 1980 ; Korey, 1995, p. 26), traduit en arabe et publié à Damas. On y apprend notamment qu’une vaste « conspiration de sionistes et de maçons » a été organisée il y a 3 000 ans par le roi Salomon, que l’Église chrétienne était une « secte sioniste » et que Jésus-Christ avait été franc-maçon (Laqueur, 1996, p. 233). La christianisation de la Russie aurait été selon lui le résultat d’un « complot sioniste international » (cité par Wistrich, 2010, p. 145). Ce pamphlet a été réédité à Moscou en 1995 (Rossman, 2002, p. 276, 293).

Marionnette et main de marionnettiste
Marionnette et main de marionnettiste

Les déclarations publiques d’Emelianov sur le « complot judéo-maçonnique » mondial sont parmi les plus délirantes qu’on a pu recueillir au cours des trois dernières décennies du XXe siècle. Quelques extraits suffisent à en donner une idée :

« En soixante-treize ans de communisme, les Juifs ont liquidé ici cent millions de personnes […]. Les Protocoles des Sages de Sion, écrits en 1905 [sic], sont très exactement le programme des Juifs pour le xxe siècle. Tout coïncide. […] Les Juifs écrasent les autres nationalités, jouissent de privilèges considérables. […] Les Juifs ont pris le pouvoir en Russie en 1917. Toute la tête de la Révolution était composée de Juifs, de sionistes [sic], de nazis juifs [re-sic]. Le plus important, c’est l’idéologie qui les unit. […] Les Juifs sont le peuple élu de Dieu. Qu’est-ce que cela signifie ? Qu’ils sont la race supérieure, que les autres sont des inférieurs et doivent les servir ! […] Chez vous, comme chez nous, ce sont les Juifs et les francs-maçons qui ont fait la Révolution. […] Le complot juif mondial fonctionne sur la notion de “peuple élu”. […] Tout est écrit dans la Bible où le Christ apparaît comme un nazi juif. Quand cette idéologie s’est éteinte, Marx, autre nazi juif, est apparu pour la réactualiser. » (Emelianov, interview, 1990 ; cité in Moati & Raspiengeas, 1991, pp. 126-127).

Avec les écrits et les interventions d’Emelianov, la vison apocalyptique du « péril judéo-maçonnique » a connu une renaissance dans les milieux nationalistes russes les plus extrémistes.

L’Amérique du Nord reste cependant l’une des principales terres d’accueil des auteurs conspirationnistes (Berlet, 2004 et 2012). L’un des pamphlets « antimondialistes » d’extrême droite, Descent into Slavery ? (1980 ; édition revue, 1994) de l’éditeur et essayiste américain Des Griffin (né en 1934), centré sur la dénonciation du Nouvel Ordre mondial (New World Order), est ainsi présenté en 2005 sur un site Web l’offrant à la vente : « Dans un livre qui a été décrit comme “dévastateur”, “magnifique” et “superbement documenté” par des lecteurs des trois continents, Des Griffin se dirige droit sur les banquiers internationaux et présente, avec force détails sur la base d’une documentation approfondie, l’histoire de leur participation au complot des Illuminati en vue de créer un gouvernement mondial unique, de type totalitaire. » L’essayiste canadien Henry Makow (né en 1949), l’un des plus prolixes auteurs conspirationnistes contemporains, ne cesse d’affirmer que les Protocoles sont « le schéma directeur du Nouvel Ordre mondial ». Il conçoit l’histoire comme « le produit d’un plan occulte à long terme des banquiers kabbaliste (satanistes) pour subjuguer la race humaine en utilisant la guerre (le génocide), la révolution et l’effondrement financier comme leurs instruments principaux » (« La conspiration juive – le dernier moment de lucidité », 5 juillet 2012). Dans l’avant-propos de son livre traduit en français en 2009, Illuminati. Le culte qui a détourné le monde, il résume ainsi sa vision du mégacomplot : « Le cartel des banques centrales est le seul groupe ayant à la fois le motif et les moyens de conquérir le monde. Constitué principalement de Juifs kabbalistes et de francs-maçons, il est la tête de la pieuvre. Le Sionisme, la Franc-Maçonnerie, la communauté juive organisée, l’impérialisme, les Jésuites, le Vatican les agences de renseignement, les médias, etc., sont parmi les bras innombrables de la pieuvre. » Dans son livre publié en 2012, Illuminati. Le Culte qui a détourné le monde, Makow affirme que les Protocoles des Sages de Sion sont « authentiques » et qu’ils sont « des instructions adressées à une conférence de Juifs lucifériens (Illuminés, Francs-Maçons) détaillant un plan incroyable pour renverser la civilisation occidentale, subjuguer l’humanité, et concentrer “toutes les richesses du monde (…) dans nos mains”. Ils ont été donnés comme une série régulière d’ateliers pour ces francs-maçons juifs à Paris ». Postulant le caractère juif de la franc-maçonnerie, Makow a publié sur son site un article du conspirationniste délirant Fritz Springmeier (né en 1955), « The Jewish Character of the Early Masonic Lodge » (20 octobre 2009), dans lequel, outre Johann Christian Ehrmann (1816) et Eduard Emil Eckert, l’antisataniste Springmeier cite, parmi les pionniers de la dénonciation en Allemagne du « pouvoir des Juifs dans les loges », le jésuite allemand Georg Michael Pachtler (1825-1889) – connu pour son engagement dans la propagande antimaçonnique et antijuive, antilibérale et antisocialiste (Katz, 1995, p. 246-247 ; Gugenberger et al., 1998, p. 81-82, 110 ; Rogalla von Bieberstein, 2002, p. 5, 171-173, et 2008, p. 221, 231 ; Reinalter, 2010, p. 121). Springmeier a la réputation, dans les milieux chrétiens-nationalistes et suprématistes américains, d’être un « expert des Illuminati ».

Transferts politiques et culturels du mythe conspirationniste

Anti maçonnisme

La mythologie conspirationniste des « sociétés secrètes » est aujourd’hui en train de passer des milieux d’extrême droite à certaines mouvances d’extrême gauche, où elle bénéficie d’une structure d’accueil : la croyance que tous les malheurs du monde s’expliquent par les actions criminelles des « nouveaux maîtres du monde » ou des membres du cercle sans frontières des élites dirigeantes, dont le noyau dur constituerait une sorte de gouvernement secret d’extension planétaire, organisant le « Nouvel Ordre mondial ». Pour certains polémistes « antimondialistes », le « New World Order » ne serait qu’un « Jew World Order ». Le mythe des « Juifs maîtres du monde » s’est ainsi recyclé à l’âge de la globalisation. C’est autour de l’opposition manichéenne entre « l’Empire » et les « nations » ou les « peuples » que, depuis le début du XXIe siècle, sont confectionnés la plupart des pamphlets conspirationnistes. On y reconnaît les principaux éléments constitutifs de l’imaginaire des « sociétés secrètes » censées mener le monde vers le pire. La nouvelle entité diabolisée, « l’Empire », remplace la « Dictature judéo-maçonnique » ou la « République judéo-maçonnique universelle » dénoncée en 1924 par le préfacier du pamphlet du Dr Ansonneau (Les Puissances occultes contre la France), une « dictature » mise en place par « la haute finance cosmopolite » et dont l’objectif était « la mise en esclavage de tous les peuples ». Le polémiste français Alain Soral, ancien communiste devenu nationaliste mais resté anticapitaliste, a exposé en 2011 sa vision antimondialiste dans Comprendre l’Empire, sous-titré « Demain la gouvernance globale ou la révolte des nations ? ». On y trouve tous les poncifs de la littérature conspirationniste produite depuis le début des années 1950 :

« Articulés autour du noyau onusien (…), le CFR, la commission Trilatérale et le groupe Bilderberg, mais encore le FMI (…), l’OMC (…), l’OCDE, les lobbies militaro-industriels, énergétiques, agro-alimentaires et pharmaco-chimiques (servis par l’OMS), ainsi que des clubs plus ésotériques tels que Skull and Bones et Bohemian Club, auxquels il faut encore ajouter d’autres relais français tels que Le Siècle et le Club des Cordelières…Tous ces réseaux de pouvoir, travaillant la main dans la main pour des raisons d’intérêts financiers et de solidarité de caste, constituent ce réseau des réseaux qui est, de fait, la structure combattante de l’Empire. Un Empire travaillant au Nouvel ordre mondial. »

Si l’habillage lexical est nouveau, la rhétorique de la dénonciation du grand complot est la même que celle qu’on trouvait dans les écrits de Mgr Jouin ou d’Urbain Gohier dans les années 1920. Soral et ses semblables se proposent toujours, comme le dénonciateur des « puissances occultes » en 1924, « d’éclairer les peuples, en leur montrant l’œuvre des Sociétés secrètes », qui portent de nouveaux noms.

Parallèlement, de nombreuses prêches du vendredi, dans le monde musulman, dénoncent le « complot judéo-maçonnique » fomenté par l’Occident « impérialiste » contre les pays musulmans. L’accusation n’est pas nouvelle dans les pays arabo-musulmans, qui l’inscrivent dans leur propagande « antisioniste ». En 1950, un pamphlet s’inspirant des Protocoles des Sages de Sion, signé par ‘Abd al-Rahman Sami ‘Ismat et publié à Alexandrie sous le titre Sionisme et franc-maçonnerie (Harkabi, 1974, p. 240 ; Lewis, 1987, p. 13), exposait avec virulence cette vision globalisante et intrinsèquement négative des Judéo-maçons–sionistes, où le thème du complot mondial s’articule avec celui des tendances criminelles : « Le peuple juif et le sionisme ressemblent à un arbre maléfique dont les racines plongent à New York, dont les branches recouvrent le monde entier et dont les feuilles sont les Juifs. Tous sans exception, jeunes et vieux, hommes et femmes, sont autant de feuilles et d’épines distillant un poison violent et mortel. » Les idéologues islamistes contemporains, récusant le projet de « moderniser l’islam », se proposent d’« islamiser la modernité. » Ce qui revient non seulement à la déchristianiser, mais encore à la déjudaïser et à la « démaçonniser ». Car, postulent-ils, la modernité est inséparablement occidentale-chrétienne et « judéo-maçonnique ». Dans un article intitulé « Un coup de massue porté au dogme démocratique » (El-Mounquid, n° 23, septembre 1990), le prédicateur islamiste algérien Ali Belhadj a ainsi résumé sa vision de la démocratie comme un « poison mortel » fabriqué et diffusé par l’Occident :

« L’idée démocratique est au nombre des innovations intellectuelles néfastes qui obsèdent la conscience des gens. […] Il s’agit d’un poison mortel dont le fondement est impie. […] Frères d’islam, sachez que nous refusons tous le dogme démocratique impie, sans la moindre faiblesse. […] Le mot liberté est au nombre des poisons maçonniques et juifs, destinés à corrompre le monde sur une grande échelle. » (Cité dans Al-Ahnaf, Botiveau & Frégosi, 1991, p. 87-90).

Le complot dénoncé prend parfois la forme d’un satanique « complot « judéo-croisé » ou « sionisto-croisé », postulant l’existence d’une super-puissance occulte appelée le « sionisme mondial », dont l’objectif serait de combattre l’islam et les musulmans par tous les moyens. D’autres « savants » musulmans pensent, selon un manichéisme de combat, qu’il n’y a plus rien entre l’islam et la judéo-maçonnerie, l’Occident étant dirigé plus ou moins secrètement par les Juifs dont les francs-maçons sont les instruments.

Dans le discours complotiste de style « antisioniste » diffusé massivement, depuis les années 1990, par des sites islamistes sur le Web, on rencontre de plus en plus souvent la dénonciation du « complot maçonnique » ou « judéo-maçonnique », voire celle des activités sataniques des Illuminati. L’article vingt-deux de la « Charte d’Allah », la Charte du mouvement islamiste palestinien Hamas (« Mouvement de la résistance islamique »), rendue publique le 18 août 1988, fournit une frappante illustration de cette sombre vision de l’histoire moderne (Taguieff, 2006, p. 35-37), empruntée à la mythologie occidentale du grand complot :

« Depuis longtemps les ennemis complotent, habilement et avec précision, pour réaliser leurs objectifs. (…) Avec leur argent, ils ont pris le contrôle des médias du monde entier : presse, maisons d’édition, stations de radio, etc. Avec leur argent, ils ont suscité des révolutions à travers le monde afin de servir leurs intérêts et de réaliser leurs objectifs. Ils étaient derrière la Révolution française, la Révolution communiste et toutes les révolutions dont nous avons entendu parler. Avec leur argent, ils ont créé des organisations secrètes à travers le monde pour saboter les sociétés et servir les intérêts sionistes. Ces organisations sont : les francs-maçons, le Rotary Club, les Lions Club, le B’nai B’rith, etc. (…) Ils ont été derrière la Première Guerre mondiale quand ils ont aboli le Califat islamique, réalisant des gains financiers et contrôlant les ressources. Ils ont obtenu la Déclaration de Balfour, créé la Société des Nations pour diriger le monde. Ils ont été derrière la Seconde Guerre mondiale, dont ils ont tiré d’énormes profits en spéculant sur le matériel de guerre, et ont ouvert la voie à la création de leur État. Ils ont été les instigateurs de l’abolition de la Société des Nations pour la remplacer par les Nations Unies et le Conseil de Sécurité afin de gouverner le monde à travers ces deux organisations. Il n’existe aucune guerre dans n’importe quelle partie du monde dont ils ne soient les instigateurs. »

On trouve une autre illustration involontairement caricaturale de ce complotisme emprunté dans l’article mis en ligne le 18 avril 2004 sur le site islamiste « La Voix des Opprimés » : « La franc-maçonnerie : la pègre sioniste mondiale…» (texte reproduit et commenté dans Taguieff, 2005, p. 518-522). Cet article se présente comme le résumé d’une « leçon du Sheikh Mamdouh Al Haribi sur les origines, les buts et l’organisation de la franc-maconnerie dans le monde et spécifiquement dans le monde arabo-musulman ». La thèse d’un complot « sionisto-maçonnique » mondial y est clairement affirmée, exposée selon les clichés et les poncifs de la littérature « anti-illuministe » occidentale (référence à Weishaupt, Albert Pike, etc.), telle qu’elle a fait tradition à l’extrême droite : les deux auteurs conspirationnistes cités sont Jean Lombard et William Guy Carr. La thèse du grand complot s’avère ainsi transférable dans la culture arabo-musulmane :

« Voici une leçon à écouter du Sheikh Mamdouh Al Haribi sur les véritables buts inavoués de la franc-maconnerie dans le monde, son histoire et sa guerre contre l’Islam depuis le début de sa révélation. (…) De nos jours, des groupes satanistes ou lucifériens gouvernent le monde : Théosophes, Rose-Croix, Illuminés, francs-maçons de hauts grades et autres sectes et clubs avec leurs énormes pouvoir financier et industriel (…). Une secte peu connue, l’ordre des Skull and Bones, surnommée aussi “Fraternité de la mort”, est l’une des plus puissantes d’Amérique… et du monde. Issue de l’ordre des Illuminés de Bavière – Adam Weishaupt – , cette secte, dont la loge mère, ou “loge noire”, se trouve à l’université de Yale, “sélectionne” des fils de la haute société protestante et israélite américaine (WASP). Les membres sont recrutés au sein des plus grandes universités américaines, et définitivement sélectionnés au cours de rituels sataniques dans la loge mère, (…) à Yale, portant le numéro 322. Les “élus” sont ensuite “recrutés” par le Council on Foreign Relations (…), le Bilderberg et la Trilatérale, organismes créés par la secte des Skull and Bones, et tout-puissants de nos jours. Ils influent directement sur la politique des pays, dont la FRANCE. (…) Leur ambition est d’imposer un gouvernement mondial, un “Nouvel ordre mondial”. Aujourd’hui, plus qu’hier, les “chefs” d’État ou de gouvernements, les patrons des grandes institutions financières ou industrielles mondiales sont directement influencés par la puissance et le POUVOIR des Skull and Bones, qui n’hésitent pas à détruire ou abattre tout individu, institution ou pays refusant d’entrer dans leur marche forcée vers leur république universelle… La franc-maçonnerie française, et presque tous ses “frères” politiciens républicains, sont directement liés à cette secte mortelle… la forme est différente, la finalité du programme est identique. C’est vraiment la fraternité de la mort. »

Le 18 juillet 2011, sur la chaîne égyptienne Al-Faraeen, était diffusé un débat sur la franc-maçonnerie et le judaïsme qui illustre l’état de l’imprégnation antijuive et antimaçonnique des milieux de la culture dans ce grand pays arabo-musulman. Au cours du débat, le « savant égyptien » Omar Mahmoud Mutawa déclare ainsi : « [La franc-maçonnerie] est une organisation internationale qui œuvre pour restaurer la domination juive dans le monde entier, au moyen de complots à court et long termes. » Un autre « savant égyptien », Abir Abdel Salam Ibrahim, opine dans le même sens : « Son but ultime est de prendre le contrôle du monde pour le remettre aux mains des Juifs. » Mutawa ajoute : « Avec l’avènement de l’islam, [l’islam] est devenu le seul et unique ennemi de la franc-maçonnerie, parce que l’islam est le seul et unique ennemi des Juifs. Les Juifs contrôlent plus ou moins l’intégralité du monde chrétien occidental : son économie, son commerce, ses médias… Ils contrôlent toutes les principaux [secteurs d’] activités. » Le principal vecteur du mythe est encore le faux antijuif européen le plus exporté dans le monde : les Protocoles des Sages de Sion, régulièrement et massivement réédités dans le monde musulman, en particulier au Proche-Orient. Dans le débat télévisé du 18 juillet 2011, Ibrahim précise que les Protocoles constituent la « Constitution des francs-maçons », voire « le fondement de la franc-maçonnerie ». La leçon conspirationniste d’origine chrétienne a été bien apprise par ces « érudits » de l’islam. Mais elle a été retournée contre le monde occidental/chrétien, supposé « judaïsé » ou « enjuivé », certains disent « sionisés ».

Le mythe de la puissance « judéo-maçonnique » occulte, ou plus exactement son ombre, a orienté vers la « théorie du complot » l’imaginaire anti-mondialisation, devenu une composante majeure de la nouvelle culture populaire mondialisée. Depuis le début des années 1990, cette dernière fait l’objet d’une imprégnation conspirationniste, qui déborde largement le public spécialisé ou le cercle des addictés aux « théories du complot » explicites. Une vaste communauté virtuelle de croyants, hors des religions instituées, s’est formée autour de l’adhésion au mythe des « maîtres secrets du monde », baptisés « Illuminati » (avec un Weishaupt judaïsé pour l’occasion), dont on trouve d’innombrables variantes dans la nouvelle culture ésotéro-complotiste dont le principal vecteur est Internet. Telle est la nouvelle figure répulsive du monde moderne diabolisée par les nouveaux antimodernes : celle d’une « mondialisation » orchestrée par une oligarchie financière prédatrice, conspirant contre « les peuples » dans des réseaux invisibles. Le mythe du « complot judéo-maçonnique » s’est ainsi largement déchristianisé, en même temps qu’il s’est exporté dans des cultures non occidentales. Il a néanmoins conservé sa forte dimension apocalyptique et sa visée radicalement antimoderne. Satan et l’Antéchrist entament ainsi une nouvelle carrière, au seuil du XXIe siècle. Ils n’ont point cessé de mener le bal, mais ils en ont modifié les règles. De l’intransigeantisme catholique au fondamentalisme islamique, en passant par les visionnaires antisatanistes orthodoxes et protestants du grand complot, l’anti-judéo-maçonnisme aura constitué une critique aussi radicale que fantasmatique de la modernité.

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 Source : Pierre-André Taguieff (dir.), Dictionnaire historique et critique du racisme, Paris, PUF, 2013, pp. 345-375.

 (Ce texte a été revu et corrigé par Pierre-André Taguieff début octobre 2021 pour la présente publication en ligne).

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