mer 24 avril 2024 - 20:04

La responsabilité cachée derrière le voile d’Isis

De notre confrère expartibus.it – Rosmunda Cristiano

Chaque franc-maçon que j’ai connu au cours de mes trente années de militantisme maçonnique s’est retrouvé à un moment donné à faire le bilan de son appartenance à l’Institution. Moi aussi je me suis souvent interrogé là-dessus, j’ai eu des crises d’identité, des remords, des doutes, des moments d’emphase et de découragement.

Mais je suis toujours là, parlant et écrivant d’une “foi” qui est devenue un style de vie, une façon d’être, de penser, d’être envers moi-même, mais surtout envers les autres.

Si je devais résumer la philosophie maçonnique vécue par un franc-maçon, je ne pourrais que la comparer au mythe du Voile d’Isis :

Je suis tout ce qui était, ce qui est et ce qui sera et aucun mortel n’a encore osé soulever mon voile.

Souvent, dans mes articles, j’ai écrit des mots visant à rappeler la “conscience” de nous “francs-maçons”, essayant de les secouer là où il le fallait, de les réveiller, là où ils somnolaient profondément, de les piquer au vif, au cas où ils étaient trop imbus d’eux-mêmes.

N’oublions pas que nous avons juré d’être fidèles aux idéaux, de les défendre jusqu’à la mort.

Le voile d’Isis représente l’instrument qui sert à réveiller le sens des responsabilités inhérent à chaque franc-maçon, qui est appelé à répondre à un appel aux générations maçonniques, présentes et futures, et à la construction d’une société respectueuse de la dignité, de la justice et solidarité.

Héraclite a dit que rien ne reste le même et statique, tout coule, la même réalité que nous vivons quotidiennement est marquée par le changement. Sans parler de celle d’un franc-maçon qui vit sur le seuil de la porte du Temple, un pied dans le monde profane et un pied dans l’ésotérisme.

Dans cet équilibre difficile même le plus expert des Maîtres peut s’embrouiller et oublier, de fait, ses responsabilités, qui sont parmi les plus belles manières dont le Maçon expose son être dans l’Obéissance et dans le monde et qui font de lui le moteur qui génère la parole et l’action.

Voila d’Isis

Être responsable, c’est répondre à un appel personnel indéniable, mais aussi s’exposer à ce que ce voile cache avec sa liberté d’évasion et qui, en même temps, attire l’identité humaine comme un aimant. Voulant paraphraser Rousseau, les francs-maçons sont des êtres humains libres et rebelles mais, “partout enchaînés“… de responsabilité !

La responsabilité qui se rallume devant ce voile mystérieux investit chaque Frère d’engagement et de conscience ; l’incarner, c’est lever le voile, sans crainte, conscient que vous avez choisi d’écouter son appel et décider de le lever pour découvrir ce qu’il y a derrière, comprendre que vous pouvez l’utiliser d’une manière différente pour ce qu’il contient et pour sa pouvoir immense à gérer de manière responsable, éthique et humaine.

La franc-maçonnerie est comme un troisième élément à la fois tremendum et fascinans : tremendum parce qu’il représente le risque pour l’individu de s’aliéner et de se perdre et fascinans parce qu’il peut représenter un moyen de se ressaisir, de retrouver sa propre valeur.

La franc-maçonnerie est ce voile de la déesse qui, soulevé par ceux qui, mus par la passion ou par une question existentielle, veulent s’approcher pour trouver la vérité, ne montre que l’image d’eux-mêmes.

Regarder en tremblant dans ce miroir vient la responsabilité : un sentiment désespéré qui plane, perturbe et montre la fragile nudité humaine et sa façon de se donner dans cette société.

Comment être franc-maçon de manière éthique, particulièrement dans le monde profane, lieu où l’on s’étouffe pour faire, où l’on se cache derrière une activité en perpétuel changement ?

En revenant réfléchir sur sa propre action, en l’universalisant, en la fondant personnellement, tout en l’ouvrant sur l’avenir de la vie de toute l’humanité, on dépasse soi-même et la réalité et instaure une nouvelle action ouvrière et sociale à partir de l’au-delà et du chaos.

Dans le mythe grec, le chaos était l’immensité et le vide et c’est précisément de ce dernier sens qu’il faut repartir. Le vide cosmique est un lieu de perdition où, paradoxalement, l’énergie et le mouvement sont générés et, par conséquent, la vie, et revendique justement la responsabilité.

Au travail, dans la vie privée et dans tous les domaines, l’être humain a besoin d’« être », d’être rempli de bruits et non de silence, d’un « maintenant » et non d’un « au-delà ». Pouquoi?

Car le vide fait peur car il secoue les consciences.

La responsabilité nous restitue l’image de la personne : un vide cosmique de plis d’existence qui a peur de sa faiblesse et cherche à « aller au-delà ».

« Le voile qui cache la beauté de la vérité » est un idéogramme que l’on retrouve dans toutes les traditions ; comme ce voile de “chair” couvre les yeux de l’enfant à naître au début de la vie et les yeux de l’ancien à l’approche de la fin, ainsi, le voile de l’illusion cache la vue de l’adulte jusqu’à la fin de sa vie profane, mais il tombe à l’occasion de sa renaissance initiatique.

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