sam 27 juillet 2024 - 02:07

Toujours mieux se connaître?

SE CONNAÎTRE TOUJOURS MIEUX

Enrichissons- nous grâce à la méthode du  dialogue intérieur entre les Sœurs, et les Frères

Au début de notre quête, « connais-toi toi-même ».

L’introspection ? Oui, nous pouvons désormais être plus pénétrants !  Grâce à une méthode qui se répand comme une trainée de poudre, le Dialogue Intérieur ; j’en ai mesuré, en trois week-ends, toute la puissance sur ma connaissance de moi-même et la déconcertante facilité apparente. Elle est née aux États-Unis, dans les années 80, de la recherche d’un couple de psychologues, Hal et Sidra Stone. Voici comment ils présentent leur enfant : « outil de communication à la simplicité trompeuse mais au pouvoir puissant »  Plusieurs livres ont déjà paru sur cette pratique, traduits en français. Ce qui est pour nous, Maçons, extraordinaire, c’est l’aisance avec laquelle elle dévoile notre approche initiatique. Elle nous fait passer de notre conscience ordinaire, fonctionnelle à la vision lucide de celui, celle que nous sommes vraiment.. C’est notre chance, à nous, Francs-maçons qui honorons le « connais-toi toi-même » comme première, permanente et fondamentale étape de notre voyage spirituel. Impossible de la passer sous silence. D’où cet article.

Serions-nous emprisonné-e-s dans nos rôles ?

Pour que tu saisisses le mieux possible, je vais te résumer les étapes du Dialogue intérieur en quelques lignes. Ce n’est pas bien compliqué ! Ensuite, je passerai à son adaptation à notre belle Voie.
Les Stone posent que nous sommes tous composés de plusieurs personnages qui forment plus ou moins harmonieusement notre personnalité : le protecteur, l’activiste, le perfectionniste, le critique, le téméraire et d’autres, une dizaine environ, plus spécifiques à chacun(e). Or ces personnages ses sont développés dès la naissance pour protéger notre Enfant vulnérable. Il s’agit de le retrouver absolument. Car si nous ne parvenons pas à notre Enfant vulnérable, tous nos efforts pour mieux nous connaître donc mieux accepter les autres resteront vains. La finalité ? Libérons-nous progressivement des rôles que nous jouons souvent à notre insu. Ils sont apparus, au cours des ans pour protéger notre Enfant vulnérable L’idée de base c’est qu’un « facilité » apprend à être plus lucide sur lui-même, grâce à un « faciliteur »  qui l’écoute et le relance Dans le langage des symboles, débarrassons-nous des chaînes qui nous entravent.

Voici un exemple résumé des étapes d’une séance de Dialogue intérieur qui peut durer plus d’une heure. Il y faut plusieurs séances pour parvenir à la libération progressive des rôles qui nous enferment. Dans notre langage, plusieurs tenues sur deux, trois ans pour chaque degré.

Le faciliteur et le facilité(e) sont assis face à face, à quelques mètres l’un de l’autre. Le facilité(e) commence là où il(elle) veut et le sent Le faciliteur le-la relance sur un personnage, un rôle qui apparaît dans le discours du facilité(e). Par exemple, une dizaine de minutes permettent d’ identifier le personnage de la victime. Alors le facilité(e), spontanément ou aidé le plus discrètement possible par le faciliteur, évoque le personnage opposé qui finit toujours par se révéler : « Ah ! si je n’étais pas si souvent la cible… » Ce serait, dans l’exemple, le conquérant, approfondi à son tour. Et ainsi de suite pour les autres personnages qui apparaissent dans les propos du facilité(e).À chaque fois le facilité(e) change de chaise, à chaque nouveau personnage. Puis au bout d’une heure au moins, le facilité(e) vient à côté du faciliteur écouter le résumé neutre que celui-ci présente. Alors peu à peu, le facilité(e) identifie ses personnages dominants, opposés, reniés…et son Enfant vulnérable. Moment souvent émouvant et qui demande quelques séances. C’est en écoutant son faciliteur que le facilité prend du recul, se positionne en pleine conscience pour chaque personnage. Ainsi se développe la « vision lucide ». Il pense : « Je ne suis plus dupe des jeux de mes personnages. Je sais désormais exprimer mon Enfant vulnérable quand il le faut. » Voilà j’ai résumé tout le processus En taisant les qualités qu’un faciliteur doit avoir : plus que de l’empathie, de la « résonance affective ». Ce sera également un point d’accroche pour la Voie maçonnique.

Sept personnages qui décrivent le Maçon idéal.

Dans un entretien de Dialogue intérieur, les personnages sont issus du facilité ; ce sont les siens. Dans la Voie maçonnique, ces personnages qui constituent la personnalité d’un Maçon idéal sourdent, sans cesse, de nos arcanes, les mythes, ritèmes et symboles. Ils incarnent notre idéal.
 Mon expérience m’amène à en compter 7. Mais sans doute en sens-tu moins ou plus, au fond de toi
Voici les 7 personnages que j’ai trouvés et qui sont inlassablement présentés dans nos cérémonies et nos tenues. Au bout de 7 ans, sois sûr qu’ils sont en nous, composant notre personnalité maçonnique. Les voici, avec, pour chacun d’eux, les références à nos pratiques pédagogiques:

• Le Frère, la Sœur Amour. La fraternité est exigée dès le serment. Ce qui invite à travailler sur sa réserve et ses reculs à l’égard de certains membres de la loge. C’est très difficile parce que cela ne se décrète pas. Il y faut le temps ! C’est aussi l’estime de soi dont certain(e)s sont cruellement dépourvu(e)s
• La Sœur le Frère, Bâtisseur. L’allégorie de la construction du temple de Salomon nous est servie à toute occasion. Ce qui nous est soufflé : nous nous construisons, nous nous sculptons, pour tendre vers le Maçon idéal.
• Le Frère, la Sœur Silence. Nous nous y entraînons sans cesse : un seul, en tenue, parle à la fois et pour que les élans soient mesurés, chacun(e) demande la parole dans les formes requises. Attention ! Ce n’est pas simplement pour bien écouter ; c’est aussi une invitation à faire taire la conscience ordinaire en soi.
• La Sœur, le Frère, Obéissant. Ne faut-il pas apprendre, dans un parcours initiatique tel que le nôtre, que nous devons accepter notre nature profonde parce qu’elle est plus puissante que ce que notre volonté le voudrait ? Le serment à l’initiation nous le rappelle
•Le Frère, la Sœur, Membre du groupe-loge. C’est ce personnage qui donne à la fraternité sa plus grande résonance. Dès l’initiation, sur les parvis, chacun(e) vient embrasser le nouvel Apprenti(e). Encore un point pour la fraternité. Et je suis émerveillé quand je sens la très bonne entente qui règne dans la bonne majorité des loges que je visite.
• La Sœur, le Frère Transmetteur. Les Maîtres s’entendent dire sans cesse qu’ ils doivent (c’est, en effet, un devoir) transmettre dans le monde profane, par l’exemple de leurs actes, les valeurs qu’ils ont acquises. Cette transmission s’effectue aussi à l’intérieur de la loge, par les plus anciens aux génération qui les suivent.

Quand je rencontre mon Enfant vulnérable

Peu à peu de tenue en tenue, année après année, ces six premiers personnages m’imprègnent. J’arrive à la pleine conscience. Je sais à présent de quoi ma personnalité est composée. Et je comprends la grande leçon du Dialogue intérieur : ces personnages, quels qu’ils soient, je les ai forgés, pour protéger le petit être que je fus, fragile et soumis aux désirs comme aux peurs. 
 Alors je parviens enfin à mon Enfant vulnérable. Cette rencontre est un grand moment. Je me retrouve en mon centre, éperdu de manque et de demande d’amour.
Tous les parcours initiatiques, des Dogons aux chrétiens, des Aborigènes d’Australie aux Inuits des vastes plaines gelées du Canada… remontent ainsi à la naissance. Pour renaître, libéré du poids des personnages et disponibles pour une nouvelle vie. Le génie maçonnique a magnifié cet événement d’une manière admirable. Tu auras reconnu la cérémonie d’initiation. Tout commence là. L’initiation est bien, selon les sensibilités, un accouchement dans la loge-mère ou une remontée dans le ventre maternel. Ni nu ni vêtu évidemment pour rappeler la nudité du nouveau-né.
Dès la fin de la cérémonie, le néophyte a appris les premiers pas hésitants, les premiers baisers et son âge sera de trois ans. Alors le chemin des tenues et celui des degrés amènent le déploiement de la fraternité et la croissance jusqu’à sept ans. Ne sait-on pas que « tout se joue avant six ans » comme l’assène, dans un livre essentiel, F. Dodson. Je reste ébahi par cette intuition superbe et pénétrante, des ancêtres de notre chaîne d’union.
Continuons notre introspection.
Se libérer en chaleureuse fraternité.

Comme nous l’avons vu plus haut, nous apprenons à identifier nos personnages. Mais ce n’est pas suffisant pour en avoir une vraie vision lucide. On sait qu’au fur et à mesure que se construit, dans notre esprit, un personnage, son opposé est évoqué,, par nous-même, comme un repoussoir. Par exemple, celui qui a un personnage d’activiste considèrera de facto que le personnage du paresseux (comme il le perçoit) est à fuir à tout prix. Tandis que celui qui est décontracté et prend son temps se méfiera comme de la peste de celui, celle qui est agité(e). En bref chacun(e) est prisonnier de ses représentations et tombe dans le gouffre sans fond du dualisme qui induit le désespoir et l’isolement. La méthode du Dialogue intérieur prend ce danger en charge : le faciliteur aide le facilité à reconnaître ses opposés, voire ses personnages reniés..
Et là, encore un coup de génie de notre Voie maçonnique, qui, décidément, a tout compris : En effet, le rite avec ses arcanes met en évidence les opposés, parfois reniés, des six personnages. Mais que l’on reconnaît vite chez les autres, puisque nous les taxons de faiblesses voire de défauts. Il s’agit des personnages Haine, Démolisseur, Bavardage, Rébellion, Isolement et Égocentrisme. En les reconnaissant, nous apprenons à situer chaque rôle à sa juste place. Par exemple : Où est-ce que je me situe réellement entre la haine et l’amour ? Faut-il encore que le faciliteur m’y amène. Chez nous, c’est le rituel qui joue ce rôle :il nous présente les si au cours de nos cérémonies. À nous de les mettre en rapport avec nos personnages qui les mettent, de près ou de loi, en scène dans notre vie.

Le Haineux (Amour) est évoquée de loin à l’initiation avec les épreuves. Le Démolisseur (Bâtisseur)Un peu aussi au degré de Maître et plus au-dessus. Le Bavard (Silence) quand des Frères, des Sœurs prennent la parole et refont une planche, dans l’impatience générale. Rebelle (Obéissant) à l’élévation à la Maîtrise bien sûr. L’Isolé quand, sur les parvis, personne ne lui adresse la parole et qu’il-elle fait de même. L’Égocentrique quand les anciens ne transmettent plus….
Mais cette découpe à la hache des qualités et des défauts humains nous fait tituber dans l’illusion Personne n’est totalement ceci ou cela. Deux parades : d’abord chaque personnage dont nous avons pris conscience se situe, dans notre réalité entre les deux pôles. Et ce sont les autres qui nous en font prendre conscience. Ensuite chaque pôle a ses forces et ses faiblesses, tout en nuances. Voyons cela plus précisément en deux temps.

Quand Jacques et Marie-Paule se découvrent mutuellement

Progressivement, le Frère, la Sœur va voir de plus en plus clairement en lui ses personnages et leur opposé positivé. Les uns et les autres forment des continuum sur les quels la Sœur, le Frère se positionnent désormais avec plus de réalisme que le sinistre dualisme des qualités et des défauts, si prisé naguère chez les Francs-maçons
Un exemple : Le Frère Jacques, compagnon, jusqu’à peu, se glorifiait d’être attaché à la qualité de ses productions .Il ne laisse rien en plan. Il trouve, sans grande conscience de son jugement à la hache, que la Sœur Marie-Paule ne finit jamais rien, ne se prépare pas beaucoup, d’ailleurs, pour y arriver. Vraiment pour lui, c’est du laisser-aller. Et puis, il commence à assimiler son degré de Compagnon fait de rencontres, de partage et de fraternité. Le Premier Surveillant lui a expliqué qu’il avait intérêt, et sa Sœur Marie-Paule aussi, à chercher et à trouver, les bons aspects de ce « laisser-aller ». Au cours d’une tenue, la réponse lui est venue soudain : Sa Sœur est à l’aise, calme et détendue et lui, souvent sous tension.
 Du coup il est revenu du jugement qu’il porte sur le personnage qu’il croit être soi., le Perfectionniste. En fait il est mu par ce personnage et les rôles qui en dépendent. Lui aussi, comme sa Sœur, se situe quelque part entre la lune et le soleil. Il voit désormais clair dans sa position. Entre le Perfectionniste et le Détendu. Grâce à cette vision lucide, il devient moins exigent vis-à-vis des personnes très détendues. Il a bougé. Conséquence : sa fraternité s’est accrue.
 On peut faire la démonstration à partir des yeux de Marie-Paule. Et cela pourrait donner ceci en miroir. Le Frère Jacques est « pointilleux, il n’est jamais satisfait… ». Elle s’efforce de positiver : elle trouve que ce Frère est, en fait, soigné, attentif à ce qu’il fait. Elle comprend que son jugement était faussé par son propre côté détendu. C’est la vision lucide qui l’enjoint de revoir sa position : il y a à prendre des deux côtés. Désormais cette Sœur non seulement ne sera plus agacée par le perfectionnisme du Frère Jacques mais, en plus, elle s’en inspirera pour faire bouger une détente qui, parfois, confine au laisser-aller.

Les opposés ne le sont pas tant que ça…

Reprenons les opposés que nous avons découverts. Par la raison ou, mieux, par l’imagination et grâce à cette fraternité qui est l’alpha et l’oméga de la Voie , traduisons-les en attitudes positives. Nous obtenons alors les conversions suivantes : La Haine devient le combat pacifique pour la paix, le refus de la soumission ; le Démolisseur devient la capacité de se remettre en cause ; le Bavardage devient l’enthousiasme à partager ses points de vue ; la Rébellion nous aide à marquer les limites de la tolérance ; l’Isolement nous rappelle qu’in fine, on ne s’initie que par soi-même ; l’Égocentrisme débouche sur cette estime de soi, défaillante chez plusieurs…Tu auras remarqué que ces opposés positifs sont favorisés par le rituel et notre morale.. Nous sommes arrivés à cette constatation : il n’y a pas de mauvais et de bons côtés mais une continuité entre deux pôles qui ne sont que des repères. Pour aller plus loin.

Œuvrons pour demain

La démarche maçonnique est prodigieuse : elle est lisible avec les outils de compréhension de l’Homme les plus récents et qui annoncent déjà demain. Cette Voie initiatique est un des plus beaux présents que l’Homme s’est forgé pour s’approfondir, grandir et aimer.
Je te propose, pour terminer, une belle phrase annonciatrice de Philippe, Orateur d’une de mes loges, qui chante la labilité de nos personnages : Chacun de nous sera prêtre et fidèle en même temps ; il sera, en même temps citoyen et métèque, croyant et athée. Il sera le premier, il sera le dernier. Ici même il sera la Terre, il sera le Ciel, il sera l’Eau, il sera le Feu. Il sera la houle, il sera le rivage.

Il sera la Mort, il sera la Vie. Mais qui ou quoi qu’il soit, quoi qu’il fasse, il devra garder les yeux grand ouverts sur lui-même, pour voir tel qu’en lui-même l’initiation le change.

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Jacques Fontaine
Jacques Fontaine
Jacques Fontaine est né au Grand Orient de France en 1969.Il se consacre à diffuser, par ses conférences, par un séminaire, l’Atelier des Trois Maillets et par une trentaine d’ouvrages, une Franc-maçonnerie de style français qui devient de plus en plus, chaque jour, « une spiritualité pour agir ». Il s’appuie sur les récentes découvertes en psychologie pour caractériser la voie maçonnique et pour proposer les moyens concrets de sa mise en œuvre. Son message : "Salut à toi ! Tu pourrais bien prendre du plaisir à lire ces Cahiers maçonniques. Et aussi connaître quelques surprises. Notre quête, notre engagement seraient donc un voyage ? Et nous, qui portons le sac à dos, des bagagistes ? Mais il faut des bagagistes pour porter le trésor. Quel est-il ? Ici, je t’engage à aller plus loin, vers cette fabuleuse richesse. J’ai cette audace et cette admiration car je suis un ancien maintenant. Je me présente : c’est en 1969 que je fus initié dans la loge La Bonne Foi, à Saint Germain en Laye, au Rite Français. Je travaille aussi au Rite Opératif de Salomon. J’ai beaucoup voyagé et peu à peu me suis forgé une conviction : nous, Maçons latins, sommes en train d’accoucher d’une Voie maçonnique superbe : une spiritualité pour agir. Annoncée dès le début du XXème siècle. Elle est en train de se déployer et nous en sommes les acteurs plus ou moins conscients mais riches de loyauté.
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