De notre confrère italien expartibus.it – De Rosmunda Cristiano
La vigne est une plante aux significations profondes. D’elle nous tirons le vin, présent dans de nombreuses cultures et qui possède son propre appareil symbolique depuis l’Antiquité.
On pense par exemple aux Latins, qui proclamaient « In vino veritas ». Depuis cette période, les effets de cette boisson étaient connus, ce qui, comme on dit, fait chanter tout le monde et raconter tout ce qui passe par l’esprit.
La vérité, au-delà des coups de gueule de ceux qui ont trop levé le coude, est l’une des vertus les plus importantes. Dire la vérité et éviter les mensonges est une preuve de sagesse. Grâce à ces symboles puissants, la vigne en vient à représenter la vie elle-même. Ce n’est pas un hasard si elles partagent la même étymologie
Elle représente une existence abondante et la joie qui en découle. Elle reflète le désir de fertilité et de beauté. C’est un signe de dévotion aux fruits de l’esprit et de protection contre le mal.
Plénitude, sagesse, jeunesse, maturation, prospérité, sont autant d’images associées à cette plante et au merveilleux nectar qui en découle. Le sacrifice, la foi et la bonne volonté sont les qualités requises pour qu’elle porte les fruits.
Il n’y a pas de meilleure façon de raconter le symbolisme qu’à travers les mythes des cultures anciennes.
Le raisin et le vin sont des éléments indissociables. Les deux sont riches de significations archétypales profondes qui touchent à des sujets inhérents au cycle de la vie lui-même.
Ampelo devient la Vigne qui enivre les hommes, et le Vin inonde l’univers de joie. Le vin est un symbole de Vie, le moyen par lequel la nostalgie et la mort sont vaincues.
La tradition hellénique fait remonter l’origine de la vigne à la mort d’Ampelo, un jeune homme aimé de Dionysos.
Il était d’une beauté désarmante, des yeux lumineux et une voix de miel. Le dieu fût tellemet séduit au point qu’il en devient obsédé, même s’il ne connaît pas la souffrance il est submergé par la peur de perdre son amour.
En proie à l’appréhension, il commence à donner au garçon des astuces pour éviter les pires dangers.
Un jour, il lui dit de faire attention aux cornes du taureau. Et ici Ate, personnification divine de l’injustice et de l’erreur, le convainc d’en caresser un, de jouer avec lui et de le chevaucher. L’animal est pris par la fureur, désarçonne le garçon, qui est alors mortellement encorné.
Dionysos est détruit, car s’il ne savait pas pleurer, il le peut maintenant ; et apprend à souffrir. Eros essaie de le consoler, l’invitant à retomber amoureux et lui racontant des histoires de mort et de renaissance, mais il n’y a pas de solution.
Les larmes divines, mouillant le corps sans vie d’Ampelo, le métamorphosent en Vigne ; et mélées avec le sang de son bien-aimé, se transforment en vin, un nectar très doux capable de brouiller la mémoire, de la subvertir et de la remodeler.
Et voici la grande vérité initiatique : le vin est une boisson arcane, qui ne peut être utilisée qu’avec soin et discernement. Dionysos est un dieu de la végétation sauvage qui enseigne pourtant à maîtriser la nature : et la culture de la vigne est, au sens plein et profond de ce mot, une « culture ».
D’une part, le vin, surtout rouge, symbolise le sang et le sacrifice, d’autre part, la joie et l’extase divine, comparant l’homme à la jeunesse éternelle et à la béatitude.
Cela peut être interprété comme un signe de la libération de l’individu des préoccupations terrestres, ce n’est pas un hasard si Dionysos avait le don de prophétie et le pouvoir de remplir l’âme de vérité !
Cela indique la médiation entre le monde humain et le monde divin.
En ce qui nous concerne, les Francs-Maçons, le vin apparaît dans les banquets rituels, à l’Agapi, dans le but de consolider l’amitié et la solidarité entre les Frères de notre grande Famille ; comme l’amour qui nous unit et que chacun de nous ressent pour ceux qui sont assis à côté de lui.
Cette affection est scellée par la forte poudre rouge ou blanche, comme on appelle le vin, dans les sept toasts qui sont portés au cours de cette convivialité.
Cependant, on ne sait pas quand ils sont apparus, ni, précisément, quand ils sont devenus une partie des coutumes des toasts maçonniques, ni, encore moins, pourquoi chacune de ces acclamations accompagnées du mot “Ouzé”, prononcé avec “force et ivigueur” .
Ce que l’on peut en déduire, c’est que ce mot, même désémancipé, c’est à dire qui est utilisé indépendamment d’une signification originelle, s’est, au fil du temps, revêtu d’une valeur sacrée tenant au fait que la Tradition maçonnique l’a consacré, le retirant des milieux marins. dans lequel il est né, et l’a l’utilisé dans des moments si particuliers et significatifs de la vie communautaire de l’atelier mais pas seulement ceux-ci.
Ouzé est un terme devenu un symbole phonique, doté d’une expressivité particulière, d’une force évocatrice propre et indubitable : souhait, satisfaction, invocation jubilatoire de la Fraternité se mélangent et en font une acclamation bien déterminée et significative au-delà d’une interprétation univoque et certaine.
A la noirceur de l’origine répond la clarté psychologique de l’usage, et chacun perçoit le résultat que l’acclamation obtient, sur le plan émotionnel et spirituel, dans sa chair et dans ses os.
C’est une décharge d’énergie positive, dont la caractéristique principale n’est pas dans son extinction après l’étincelle, comme un courant électrique qui se “décharge” au sol, mais dans son retour immédiat en circulation, retraçant et électrisant les âmes de ceux qui ont participé à une Chaîne d’Union, à un toast porté dans une Agape.
Certes, l’insondable demeure, comme insondables sont les vibrations arcanes et subtiles d’un objet magique ou de certains mots qui « font se produire quelque chose », et dont la prononciation doit être calibrée par un emploi qui ne les gaspille pas, mais qui les optimise pour le bien de l’Humanité tout entière.
à travers l’image d’un gobelet rempli de vin rouge pourpre, tourné vers le haut, au GADLU et avec les vers de ‘The Tyler’s Toast’ , ‘The Toast of the Guardian’ , je porte un toast à vous tous mes frères.
Chers Frères de la Chaîne Mystique,
la nuit s’estompe rapidement :
Notre travail est terminé,
la fête est finie,
c’est le dernier toast.
Et maintenant, par ordre du Vénérable Maître,
je propose le Toast du Gardien :
A tous les Frères pauvres et affligés,
où qu’ils soient dispersés sur la surface de la terre et sur les mers, en
leur souhaitant un prompt rétablissement de leurs souffrances,
et un heureux retourner dans leur PAYS natal,
si c’est ce qu’ils veulent.
Bon feu, mes frères !
Si tel est votre désir, retrouvez la recension de l’ouvrage de Jean-François Blondel “La vigne et le vin, sacrés symboles” (Oxus, 2019) sur https://450.fm/2021/05/06/la-vigne-et-le-vin-sacres-symboles/