Laurel et Hardy étaient inséparables à l’écran, mais seul l’un d’eux était franc-maçon. A l’écran, ils n’hésitèrent pas à revêtir tabliers et sautoirs maçonniques pour tourner quelques comédies, aujourd’hui un rien désuètes, sur le sujet.
C’est Oliver Hardy (le plus enveloppé des deux), qui avait été initié à Jaksonville-Floride dans une loge sobrement intitulée Salomon n°20 et qui existe apparemment toujours.
Olivier, qui rêvait de devenir acteur, avait choisi la bonne ville. La Floride attira un temps les gens de cinéma et de nombreux studios de tournage de films muets se construisirent. Mais, une autre cité à l’ouest mettra fin à ses espoirs : Los Angeles.
Devenu célèbre à Hollywood, Hardy fréquentera également la Mount Olives Lodge 506 qui, elle aussi, existe toujours. Trois des quatre frères Warner, producteurs de cinéma sous le nom de Warner Bros, en faisaient également partie.
Toujours est-il que nos compères réalisèrent au moins deux films dans lesquels la franc-maçonnerie joue un rôle déterminant ; l’un des deux s’intitule C’est donc ton frère titre original : Our relations (1936).
Le pitch est assez simple : Laurel et Hardy sont deux bons bourgeois de San Francisco, mais ils ont deux frères jumeaux marins qui arrivent en escale à San Francisco avec comme intention de faire la tournée des bars. Quiproquos garantis d’autant que, si je me souviens, les deux épouses trouvent les marins beaucoup plus sympas et drôles que leurs maris… La scène de fin nous réserve un retournement de situation tout à fait étonnant. Alors que nos deux bourgeois sont en prison, le juge qui s’apprête à les condamner reconnaît les deux amis et déclare à tout le prétoire qu’il se porte garant pour eux, puisqu’il est le vénérable de leur loge maçonnique… Difficile transposable dans le cinéma français…
L’autre film maçonnico-comique du duo s’appelle « Les compagnons de la nouba », titre inventif qui traduit bien approximativement le titre original Sons of the desert, les Fils du Désert.
Je vous mets en lien une version française (et honteusement colorisée mais bon…) de la scène de début du film (durée 5 min) : dans une ambiance de conspiration, le vénérable déclare que la loge traitera ce soir d’une affaire de la haute plus importance, à savoir… qui va nous représenter au convent cette année.
Ce qui est intéressant dans cette affaire c’est que cette loge des « Fils du Désert » est une loge de Shriners. Les Shriners sont connus pour singer la maçonnerie, bien qu’ils soient eux-mêmes obligatoirement maçons, en imitant un ordre secret, mystérieux et orientaliste, symbolisé par le fez qu’ils portent sur la tête. On les voit régulièrement faire des attractions dans les nombreux défilés américains. Par exemple, en roulant dans des voitures minuscules ou autres clowneries.
Mais ces démonstrations visent à recueillir des fonds, avec lesquels les Shriners gèrent des hôpitaux pour enfants. Ils eurent parmi eux quelques membres célèbres voire très célèbres, comme le président Harry Truman qui posa également avec le fez rituel. Là encore, difficile à transposer dans le paysage français…
Laurel et Hardy appartiennent désormais à un cinéma du passé. La légende veut qu’ils soient morts ruinés ou en tout cas dans la gêne. En regardant leurs films, on voit pourtant à l’oeuvre le passage d’un comique de slapsticks (des gags brefs et rapides : on ferme la portière de la voiture, le toit s’ouvre, on ferme le toit, le coffre s’ouvre, etc.) à un comique plus sophistiqué qu’on appelle souvent slow burn dans les manuels de scénaristes : une combustion lente. Ce terme caractérise les situations qui peu à peu dégénèrent pour finir en mêlée générale ; un bel exemple sera cette bande courte de 20 min intitulée Les deux flemmards, traduction là encore douteuse de Me and my pal soit Moi et mon pote (1933). Hardy se marie avec une riche héritière et son témoin et meilleur ami Laurel lui offre… un puzzle. Un par un tous les invités de la noce vont succomber au charme du puzzle diabolique et délaisser la mariée qui attend à la mairie…
Mais revenons aux Shriners : qu’en est-il aujourd’hui ?
Si vous cliquez sur le lien ci-dessous, vous arriverez sur la page de l’institution « Shriner » dont le logo évoque le fameux fez.
https://fr.shrinershospitalsforchildren.org/-9z1i/hse
Cherchez la carte des établissements… Eh oui, vous avez bien compté, les Shriners gèrent actuellement plus d’une vingtaine d’hôpitaux pour enfants à travers les US et au Canada. Chapeau les clowns !
Mais est-ce transposable dans le paysage français ?…
Bel article
Nous sommes d’éternels apprentis de la connaissance