Dans La Russie de demain à la lumière de son histoire littéraire, Gilles Cosson, auteur prolifique passionné par l’histoire intellectuelle et spirituelle de notre monde, explore comment l’héritage littéraire russe peut éclairer les perspectives dans un contexte mondial marqué par des tensions croissantes et une perte de repères spirituels en Occident.
En se détachant des préjugés politiques, l’auteur propose une réflexion sur la manière dont les grandes figures littéraires de la Russie peuvent offrir des clés de compréhension et des pistes d’espérance pour aborder les défis contemporains. Le livre tente de dépasser la dichotomie simpliste entre la Russie de Vladimir Poutine et un Occident désorienté, en invitant à une réconciliation des visions pour faire face ensemble à un monde en mutation.
Gilles Cosson utilise son expertise en histoire intellectuelle et spirituelle pour dresser un panorama riche et nuancé de la littérature russe, en suggérant que les œuvres de ses écrivains et poètes ne sont pas seulement des récits nationaux, mais aussi des miroirs de solutions universelles. L’auteur s’appuie sur une analyse approfondie de textes littéraires pour argumenter que la compréhension de ces œuvres pourrait être essentielle dans la recherche d’une coexistence harmonieuse et productive.
Dans son avant-propos, l’auteur pose le cadre de son étude, mettant l’accent sur une approche objective et équilibrée pour examiner le rôle de l’histoire littéraire dans la compréhension de la Russie contemporaine. Dans sa mie en contexte, dans le climat politique et social actuel, il rappelle que littérature et pouvoir politique ont toujours hésité entre libéralisme démocratique et le panslavisme, fondé sur l’idée que les peuples slaves partagent une origine ethnique et linguistique commune qui devrait être la base d’une coopération plus étroite entre eux, soit « l’âme slave ».
Le livre est structuré de manière à mettre en lumière les différents auteurs et œuvres qui ont marqué l’histoire littéraire russe, en liant chaque discussion à des problématiques contemporaines, telles que la crise identitaire, les conflits internationaux, et la quête de sens. Ce faisant, Gilles Cosson n’offre pas seulement un cours d’histoire littéraire, mais aussi un essai sur la capacité de la littérature à influencer et à transformer les sociétés.
Dans le chapitre « Une question préliminaire » Gilles Cosson jette les bases de l’enquête, en se concentrant sur le rôle de la langue russe comme élément d’unification et d’expression culturelle, à travers divers contextes géographiques et politiques en Russie.
Comme pour aider le lecteur à mieux naviguer, l’auteur aborde, géographiquement parlant, tous les points cardinaux. Telle une boussole, il nous emmène « Vers le sud et l’ouest » avec des focus spécifiques sur l’Ukraine et la Crimée, puis « Au sud-est : Le Caucase » et à « À l’est : La Sibérie orientale ». La langue russe qui, d‘administrative, est devenue langue de culture dans ces pays sous administration russe.
Gilles Cosson examine ensuite les différents courants de la littérature russe, peut-être pour en extraire des principes intemporels et des leçons applicables à la Russie contemporaine. De l’époque tsariste jusqu’après la chute du communisme.
Dans « L’influence de la littérature sur la politique russe d’aujourd’hui », chapitre III de l’ouvrage, l’auteur analyse comment la littérature russe historique résonne avec la politique actuelle de la Russie, et comment elle pourrait influencer ou refléter les directions futures du pays. Rappelant que depuis toujours, la littérature russe a plutôt été « docile et habitué à céder à l’adversité : résignation, compassion, courage, patience, amour de la nature, humilité… »
Le dernier chapitre, véritable « Réflexions sur l’avenir », est consacré à l’examen des rôles que les intellectuels et les écrivains russes peuvent jouer dans l’avenir de leur pays, en tenant compte des réalités sociopolitiques actuelles.
Dans son épilogue Gilles Cosson résume ses idées principales et laisse le lecteur avec une réflexion finale sur l’importance de la littérature dans la société russe. L’appendice relate Tourmente et Passion (Les Éditions de Paris Max Chaleil, 2001) écrit par Gilles Cosson. Un ouvrage qui reprend « un formidable périple du XXe siècle » – couvrant une période historique fascinante, allant de Saint-Pétersbourg à Berlin –, illustrant déjà les thèmes discutés dans le corps principal du texte.
Revenons sur la première de couverture
Évocatrice, l’illustration de la première de couverture de La Russie de demain à la lumière de son histoire littéraire qui met en avant les portraits de cinq écrivains russes emblématiques est riche de signification. Chacun de ces auteurs a marqué de manière indélébile la littérature russe et mondiale, et ensemble, ils symbolisent la diversité et la profondeur de la pensée et de l’expression littéraire russe. De gauche à droite :
-Alexandre Soljenitsyne est connu pour son œuvre critique envers le régime soviétique, notamment dans son célèbre Archipel du Goulag. Sa présence sur la couverture, pour nous, représente le courage intellectuel et la résilience face à l’oppression politique.
-Alexandre Pouchkine est souvent considéré comme le fondateur de la littérature russe moderne et est célèbre pour son utilisation maîtrisée du langage russe. Son portrait souligne l’importance de l’identité culturelle et linguistique russe et son œuvre Eugène Onéguine est un classique de la littérature russe.
-Boris Pasternak, l’auteur de Docteur Jivago, illustre les complexités de la vie en URSS et la puissance de la littérature qui transcende la politique. Son inclusion peut signifier la persévérance de l’esprit humain et la lutte pour l’intégrité artistique. Même si peu ont lu le livre publié pour la première fois en 1957 en Italie – en raison de la position indépendante de l’auteur par rapport à la révolution d’Octobre, la publication du roman ayant été refusée en URSS), qui n’a pas vu le film éponyme réalisé par David Lean sorti en 1965.
–Fiodor Dostoïevski offre un aperçu profond de la psychologie humaine et des questions morales et philosophiques universelles. Sa figure sur la couverture suggère l’exploration des dilemmes moraux et existentiels. Dostoïevski a créé des personnages complexes et exploré les profondeurs de l’âme humaine. Des œuvres telles que Crime et Châtiment et Les Frères Karamazov sont des incontournables.
-Marina Tsvetaïeva, poétesse majeure, représente la poésie russe et les tragédies personnelles et professionnelles qu’ont vécues les intellectuels russes au cours du tumulte du XXe siècle – son œuvre est imprégnée de passion et de mélancolie. Sa présence symbolise la force expressive et émotionnelle de la littérature russe.
Ces cinq écrivains ensemble témoigne d’une chronologie littéraire et d’un spectre d’expériences humaines que l’ouvrage, au fil de ses quatre chapitres, explore. Elle présage un contenu qui plongera dans les racines littéraires de la Russie pour mieux comprendre ses perspectives. Cette couverture établit donc une promesse que le livre abordera des thèmes de liberté, d’identité, de résistance et d’expression artistique qui ont été essentiels à ces auteurs et qui restent pertinents pour la Russie contemporaine et future.
La Russie de demain à la lumière de son histoire littéraire est une lecture stimulante pour quiconque s’intéresse à l’impact des arts sur la compréhension des crises contemporaines et à la manière dont l’héritage culturel peut servir de pont entre des mondes apparemment irréconciliables. Gilles Cosson parvient à démontrer que les réponses à nos crises actuelles peuvent être trouvées dans les leçons du passé, notamment à travers le prisme de la riche tradition littéraire russe.
De plus, il est rare de trouver une qualité de papier aussi supérieure dans un livre de 80 pages au format 21×17,5 cm, ce qui en fait un véritable plaisir tactile. Un ouvrage qui ne se distingue pas seulement par son contenu…
Les Éditions de Paris
Gardois protestant cévenol, Max Chaleil, est une figure notable du monde littéraire français, reconnu à la fois comme éditeur et écrivain. Sa carrière couvre plusieurs décennies pendant lesquelles il a contribué de manière significative à la culture et à la littérature françaises.
En 1977, il crée les éditions des Presses du Languedoc, puis, en 1985, les Éditions de Paris qui se sont attachées à ressusciter l’histoire et la vie de Paris. Une collection d’Histoire a ensuite vu le jour. Depuis 1994, la maison d’édition s’est enrichie de nouvelles collections, avec un rythme de parution d’une quinzaine de titres par an. En savoir plus sur leur site.
La Russie de demain à la lumière de son histoire littéraire
Gilles Cosson – Les Éditions de Paris, 2024, 80 pages, 10 €