mar 30 avril 2024 - 10:04

EPREUVE

« Vous êtes admis à passer les épreuves de l’initiation »

Même si les langues diverses en ont largement diversifié le fonds commun indo-européen, l’idée première est celle de la croissance, du développement. Ce qui autorise des rapprochements, sans aucun doute étonnants, nés du grec *phusis, *phullon, du latin *folium, *flos-floris, *fuo, du gaulois *blad. Ainsi s’avance le cortège sémantique de la physique, de la chlorophylle, du néophyte, de la feuille et de la fleur, du trèfle et du cerfeuil, de la marguerite qu’on effeuille pour fleureter ou flirter, des livres en folio ou florilège. Ainsi les idées effleurent-elles la conscience et le fleuron de la jeunesse s’en trouve-t-il nourri. Les parlers germaniques et le gaulois, par le *blad, ont semé le blé dans les champs qu’ils avaient déblayés ou remblayés…

Le latin a perçu dans cette idée de croissance vitale le futur et, en préfixant le radical *pro-bhos, a nommé « ce qui pousse droit » et les moyens de le rendre tangible. D’où *proba, la preuve, ce qui rend croyable, probable, qui en justifie l’approbation, en toute probité et sans réprobation.

L’épreuve de l’initiation est un exercice probatoire. On y éprouve et renouvelle des sensations oubliées, une relation inédite au monde, on y met à l’épreuve ses présupposés ordinaires. Une relativisation nécessaire de ses certitudes, qui ouvre le champ à un autre probable, à une liberté neuve entrevue.

Puisons chez Oscar Wilde ce conseil d’apparente légèreté « On devrait toujours être légèrement improbable »… Annick Drogou

Les mots de Jean

Du premier mot, “épreuve“, on pourrait ne retenir que la difficulté de l’obstacle à franchir, douloureuses épreuves que toute vie réserve et qu’il faudra bien surmonter pour ne pas mourir, ou bien épreuves sportives dont on sort victorieux après l’effort récompensé et, là, l’obstacle n’est plus qu’un jeu qui associe la difficulté à la joie. Il y a toujours un après à l’épreuve, une espérance et un accomplissement à condition de franchir l’épreuve : « ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort ».

Quel contraste avec le deuxième mot, “éprouver“, si proche, si loin ! Tant de sentiments que nous éprouvons, et que nous éprouvons par rapport à une circonstance ou à un autre être vivant qui ne nous laisse pas indifférent. Quand on affirme éprouver, ce qui est ressenti est généralement très fort : amour, haine, peur, joie, plénitude…

Toute épreuve ne peut être réellement vécue que dans la mesure où elle s’éprouve. On ne peut lui rester extérieur. L’épreuve initiatique n’est pas qu’un ressenti, c’est un franchissement qui transforme. Éprouvette ou athanor ? Et dans cette éprouvette, quelle expérience alchimique ? L’épreuve peut-elle produire sa preuve ? Seulement la preuve que la vie est plus grande que ses apparences et que nos conditionnements.

Jean DUMONTEIL

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Annick Drogou
Annick Drogou
- études de Langues Anciennes, agrégation de Grammaire incluse. - professeur, surtout de Grec. - goût immodéré pour les mots. - curiosité inassouvie pour tous les savoirs. - écritures variées, Grammaire, sectes, Croqueurs de pommes, ateliers d’écriture, théâtre, poésie en lien avec la peinture et la sculpture. - beaucoup d’articles et quelques livres publiés. - vingt-trois années de Maçonnerie au Droit Humain. - une inaptitude incurable pour le conformisme.

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