Cette remarquable exposition portée par l’association Marianne de France et accueillie à la Maison de Ma Région à Nîmes, s’inscrit pleinement dans le cycle de commémoration des 120 ans de la loi de 1905, en faisant dialoguer art, histoire et pédagogie républicaine. Elle offre un terrain privilégié de réflexion pour un lectorat maçonnique sur la façon dont le visage de Marianne continue de condenser, de questionner et de mettre à l’épreuve l’idéal laïque français.

Un écrin républicain pour une icône
Installée du 8 au 31 décembre 2025 dans les Maisons de Ma Région à Nîmes et Alès, l’exposition s’affirme comme un événement culturel gratuit, ouvert à tous, inscrit dans la politique mémorielle de la Région Occitanie autour du 120e anniversaire de la séparation des Églises et de l’État. Le choix de la Maison de Ma Région, au cœur de l’espace public, souligne que la laïcité n’est pas un thème de musée, mais un enjeu vivant de citoyenneté quotidienne.
Au-delà de la simple commémoration, le partenariat avec l’association Marianne de France inscrit l’exposition dans un réseau d’initiatives qui, à Millau comme ailleurs, utilisent la figure de Marianne pour interroger le lien entre République, laïcité et pédagogie civique, notamment via des « parcours citoyens » destinés aux scolaires. Le soutien explicite de la Région Occitanie / Pyrénées-Méditerranée rappelle combien la laïcité est aujourd’hui pensée comme un axe structurant des politiques publiques territoriales.
Marianne, un visage pluriel de la République
Le cœur de l’exposition repose sur une sélection de bustes de Marianne issus de mairies du Gard et d’une collection particulière, couvrant les XIXe et XXe siècles. Cette diversité de visages – classiques, réalistes, stylisés, voire inspirés de figures médiatiques – offre une traversée sensible de l’histoire politique et culturelle de la République, comme l’ont montré d’autres manifestations consacrées aux « visages de la République » dans les musées ou sur les timbres.

Chaque buste raconte une époque, une tonalité, un rapport au peuple et à l’État : tantôt la Marianne guerrière et cuirassée, tantôt la Marianne apaisée, maternelle, ou résolument moderne. À travers ces variations, c’est le destin même de l’allégorie républicaine qui se donne à voir : capable d’incarner la souveraineté populaire, les combats laïques, mais aussi les fractures et recompositions successives du corps social français.
La laïcité en filigrane des bustes

En sous‑titre de l’exposition, la mention « miroir de la République laïque française » rappelle que Marianne n’est pas en soi un symbole de la laïcité, mais bien de la République qui en est le cadre politique. Les organisateurs choisissent de faire de son visage un miroir dans lequel se reflètent les avancées et les tensions de la laïcité à la française, comme le montrent de multiples initiatives locales qui associent bustes, conférences et journées de la laïcité.
Ce « miroir » renvoie aussi à l’idée de vigilance : la laïcité n’est ni acquise ni figée, elle se lit dans le regard que la République porte sur elle‑même, et dans la manière dont ses symboles sont appropriés, détournés ou contestés. En invitant le visiteur à confronter ces images au texte de la loi de 1905 et à son actualité, l’exposition propose une forme de pédagogie par l’allégorie, accessible et exigeante à la fois.
Objets du quotidien et imaginaire citoyen
En complément des bustes, l’exposition présente des objets du quotidien et des documents graphiques illustrant l’attachement des Français à leurs symboles républicains depuis la Révolution. Affiches, reproductions d’iconographie civique ou objets usuels marqués de l’effigie de Marianne montrent comment la République ne se limite pas aux institutions, mais infuse les gestes ordinaires et les paysages urbains.

Cette mise en scène des « petites patries républicaines » – mairies, écoles, bureaux de poste, places publiques – permet de saisir comment se construit un imaginaire partagé, parfois plus efficace que de longs discours. Pour un public maçonnique, cette dimension de symbolisme diffus et d’intériorisation progressive des valeurs résonne avec la fonction pédagogique des rites et des emblèmes au sein des loges.
La parole laïque : conférence et débats

L’exposition est prolongée par une conférence sur « l’évolution de la République française laïque », programmée le 11 décembre 2025, avec l’intervention de Philippe Pecout, président de l’association Marianne de France, et de Philippe Foussier, journaliste, ancien Grand Maître du Grand Orient de France et vice‑président d’Unité Laïque. La présence de ce dernier inscrit explicitement l’événement dans le sillage d’un engagement maçonnique historique en faveur de la laïcité, depuis les combats pour l’école publique jusqu’aux débats contemporains.
À travers ce dialogue entre un acteur associatif et un militant laïque issu de la tradition maçonnique, la conférence propose de replacer les bustes de Marianne dans une généalogie intellectuelle et militante. Elle offre aussi au public l’occasion de mesurer l’actualité de la loi de 1905, au croisement des enjeux de liberté de conscience, d’égalité des droits et de neutralité de l’État, thèmes familiers aux lecteurs de 450.fm.

© Musée de la Franc‑maçonnerie
Résonances maçonniques de Marianne
Pour la franc‑maçonnerie, Marianne se situe dans le même horizon de construction d’un citoyen libre, éclairé et responsable. En tant qu’allégorie de la souveraineté populaire, elle traduit dans l’espace profane ce que le temple maçonnique cherche à élaborer dans l’espace initiatique : un être humain affranchi des tutelles dogmatiques, capable de penser et de choisir par lui‑même.

Les loges, en particulier celles engagées dans la défense de la laïcité scolaire et institutionnelle, trouvent dans ce type d’exposition un outil précieux de médiation culturelle et civique, à proposer aux profanes comme aux néophytes. En articulant symboles républicains et réflexion critique, l’événement de Nîmes prolonge une longue tradition de coopération entre milieux laïques, élus, associations et acteurs maçonniques.
Une pédagogie laïque pour aujourd’hui
L’un des enjeux majeurs de cette exposition est de montrer que la laïcité n’est pas un « patrimoine poussiéreux » mais un cadre vivant permettant de concilier pluralisme des convictions et unité politique. En réinvestissant la figure de Marianne à l’occasion des 120 ans de la loi de 1905, l’association Marianne de France et la Région Occitanie répondent à la nécessité d’une pédagogie renouvelée, en particulier auprès de la jeunesse.

l’exposition « Marianne, miroir de la République laïque française » apparaît ainsi comme une invitation à faire vivre la laïcité non seulement dans les discours, mais dans les lieux, les œuvres et les regards qui composent notre cité commune.
Cette démarche rejoint d’autres programmes, nationaux ou locaux, qui cherchent à soutenir les défenseurs des droits humains et à promouvoir les valeurs démocratiques, dans la continuité de l’engagement de la France pour les libertés fondamentales.

