lun 25 novembre 2024 - 15:11

Sur la nef des fous

Atterré. Je suis atterré. On est reparti pour au moins un mois de confinement, et sûrement plus. Il paraîtrait que nos gouvernants auraient appris du précédent confinement et qu’ils étaient prêts. A en juger par la fermeture des lits d’hôpitaux (2566 lits fermés depuis la fin du confinement), je me permets d’en douter. Les instructions contradictoires ne sont pas mal non plus, dignes d’un texte de Courteline. Donc on peut, voire on doit travailler, mais on peut voir son lieu de travail fermé. Donc quelqu’un qui travaille dans un cinéma doit aller travailler mais son lieu de travail est fermé. Mathématiques Shadok.
Là où la situation devient gênante, c’est que le discours des dirigeants est double. Il faut se reconfiner parce que l’épidémie repart, mais il faut aussi aller travailler…
D’aucuns argueront qu’il faut télétravailler. Argument recevable, mais le télétravail ne concerne qu’une partie de la population active, sans compter la mauvaise volonté des employeurs (dont certains ne se sont toujours pas équipés du matériel ad hoc, on applaudit leur prévoyance). Gloire au travail ? Mon œil ! Il faut donc qu’on soit à la fois dehors et dedans, ce qui est impossible, sauf en physique quantique, mais sous certaines conditions, à rendre fou tout logicien occidental. Et pourtant, le Grand Architecte de l’Univers sait combien j’apprécie la physique quantique et encore plus la pensée non aristotélicienne ! Du coup, nous sommes de nouveau confinés, mais en fin de compte, ça ne se voit pas. Les transports sont bien remplis, les rocades et boulevards périphériques aussi. Il y a encore du monde dans les bureaux, et bien évidemment des scolaires. C’est peut-être ça, le « en même temps » cher à la jeune génération qui nous dirige. Sauf que le modèle quantique appliqué à l’échelle d’une société, ça ne marche pas. L’équation de Schrödinger H(Psi)=E.dPsi /dt n’est tout simplement pas faite pour.

Par contre, ce qui me met en colère, c’est le traitement réservé à la vie en général et à la vie culturelle en particulier. Malgré les efforts des bars, restaurants, lieux de vie, clubs divers, théâtres, musées et cinémas pour garantir des conditions prophylactiques hygiéniques satisfaisantes, ceux-ci doivent fermer, et tant pis pour leurs employés. On en arrive à cet « état de superposition » : il faut travailler mais rester chez soi. Il faut sortir mais rester à domicile. Bien sûr, on va ouvrir les écoles pour que les parents puissent aller travailler. Evidemment, on va éviter les « contacts inutiles ». Tradition oblige, on va devoir refaire des attestations dérogatoires pour sortir, avoir une attestation d’employeur pour aller à son emploi, ne pas s’éloigner à plus d’un kilomètre de chez soi. Renoncer à voir ses proches. Seulement travailler. Et drame suprême, ne plus aller en Loge. Métro, boulot (pour ceux qui en ont un, mais ça ne va pas durer, soyez rassurés) et dodo pour ceux qui ont encore un toit (ça ne va pas durer non plus, j’en ai peur).

Pour ceux qui imaginent naïvement pouvoir se promener en forêt, pensez à vous armer ! Ben oui, aux dernières nouvelles, on n’a pas le droit de se promener, mais on a une dérogation pour aller quand même chasser… Euh, est-ce une bonne idée que de laisser traîner des types armés, surtout dans le contexte que nous vivons ?

Je ne crois pas utile de revenir sur la polémique récente de l’ouverture et fermeture de rayons livres et disques. Il y a un degré de bêtise et de bassesse auquel ma hernie ne me permet pas de m’abaisser. Par contre, on sait maintenant quelle vision de la culture, de la civilisation et plus généralement de l’humain ont les sinistres clowns qui nous dirigent : la destruction de tout ce qui peut élever l’homme ou à défaut, lui apporter de la joie. Un puritanisme d’un autre temps. Mais un puritanisme aux effets dévastateurs pour les commerces (sauf pour les grandes plates-formes de vente en ligne, celles qui ne paient pas leurs impôts chez nous, occasionnant directement le manque de lits d’hôpitaux…). Par contre, je ne suis pas sûr qu’il soit judicieux de balayer la culture d’un revers de la main à une époque où l’obscurantisme est fort et dangereux.

Enfin, il paraît qu’on pourra peut-être être autorisé à sortir si on revient en dessous d’un certain seuil de contamination, très théorique. Hum, les fausses promesses et bonus en fonction de résultats impossibles à atteindre, ne sont-ce pas justement des méthodes employées par les dirigeants des start-ups pour motiver leurs ouailles?

Et nous, Francs-maçons, que pouvons-nous faire face à cette érosion de nos libertés les plus élémentaires ? Malheureusement, pas grand-chose politiquement parlant. La politique n’est plus à notre portée depuis un moment déjà, n’en déplaise à nos détracteurs. Par contre, faire de notre mieux pour un peu plus de fraternité ou de solidarité par des gestes parfois simples, transmettre la culture, vivre dans l’honneur, ça, c’est à notre portée. Je me souviens d’une formule prononcée par le Très Puissant Souverain Grand Commandeur du REAA, il y a une dizaine d’années, formule qui nous exhortait tous, quelque soit notre degré, à être chacun à notre manière des hospitaliers. Ce n’est que par la culture et la bienveillance que nous pourrons sortir et faire sortir notre pays de ce marasme par le haut.

Sinon, petite information amusante : on sait que la pollution de l’air tue directement 8 millions de personnes dans le monde et près de 50 000 personnes en France chaque année. Du coup, je me demande ce que nos chers autocrates cratophiles, si prompts à nous détruire nos libertés les plus élémentaires, comptent faire de ce problème là.

J’ai dit.

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Josselin
Josselin
Josselin Morand est ingénieur de formation et titulaire d’un diplôme de 3e cycle en sciences physiques, disciplines auxquelles il a contribué par des publications académiques. Il est également pratiquant avancé d’arts martiaux. Après une reprise d’études en 2016-2017, il obtient le diplôme d’éthique d’une université parisienne. Dans la vie profane, il occupe une place de fonctionnaire dans une collectivité territoriale. Très impliqué dans les initiatives à vocations culturelle et sociale, il a participé à différentes actions (think tank, universités populaires) et contribué à différents médias maçonniques (Critica Masonica, Franc-maçonnerie Magazine). Enfin, il est l’auteur de deux essais : L’éthique en Franc-maçonnerie (Numérilivre-Editions des Bords de Seine) et Ethique et Athéisme - Construction d'une morale sans dieux (Editions Numérilivre).

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