dim 21 décembre 2025 - 13:12

Les « sociétés secrètes » à l’épreuve de la Seconde Guerre mondiale

Quand un régime confisque des archives, il ne saisit pas seulement des cartons. Il tente de rompre une continuité, d’interrompre une mémoire, de fabriquer de l’oubli à coups de listes. C’est à cette violence administrative, et à ses héritages, que s’attaque le séminaire de recherche du projet STACEI – Mémoire(s) confisquée(s), mémoire(s) retrouvée(s) 2026 – pour une troisième année consécutive.

Quand l’archive devient butin, puis instrument

Dès l’occupation du territoire français, des archives maçonniques sont captées comme un butin de guerre. Le 13 août 1940, l’État français vote une loi interdisant les « associations secrètes » et imposant aux fonctionnaires et agents de l’État une déclaration. Le texte ouvre un double chantier, la gestion des biens saisis et surtout le fichage des membres, afin de contrôler la véracité des déclarations de non-appartenance. Un dispositif administratif complexe se met alors en place, dont le Service des sociétés secrètes – le SSS – devient l’emblème. Connu, certes, mais longtemps difficile à étudier faute de fonds aisément accessibles.

STACEI, rouvrir les dossiers, combler les lacunes

Démarré en avril 2022 dans le prolongement de ProMéTEUS, le projet STACEI travaille au plus près de la saisie des archives des « ennemis idéologiques » entre 1940 et 1944, avec un focus particulier sur les « sociétés secrètes ». L’ambition est large, reconstituer les processus de spoliation, éclairer les parcours personnels et professionnels des acteurs de l’antimaçonnisme pendant l’Occupation, comprendre la gestion de leur héritage, et poser la question qui demeure, celle de l’éthique de la transmission patrimoniale dans le temps long. Les premiers résultats, marqués notamment par la mise au jour d’importants fonds, ont naturellement conduit à installer ce séminaire dans la durée.

Cette année, la focale la plus humaine

Après une première année consacrée à la cartographie des archives disponibles et aux modalités de spoliation, puis une seconde attentive aux usages des biens saisis, le troisième cycle change de plan. Il se rapproche des vies. Les individus. Les trajectoires. Les noms. Les silences. Entre 1940 et 1944, la répression antimaçonnique n’a pas été une abstraction, elle a eu des visages, des dommages concrets, des existences déplacées au rythme des dossiers. En replaçant au centre acteurs et victimes, rouages et effets, ce séminaire ne “réveille” pas une mémoire par nostalgie. Il la remet à sa juste place, dans l’histoire, dans le droit, dans l’éthique de la transmission. Et il rappelle qu’après la spoliation vient un temps plus exigeant encore, celui de la restitution, du classement, de l’accès, autrement dit de la vérité travaillée, jusqu’à devenir connaissance, puis vigilance.

Remerciements

Un merci fraternel à Fédération française de l’Ordre Maçonnique Mixte LE DROIT HUMAIN, puissance maçonnique qui accueille le projet cette nouvelle saison et en rend possible la tenue, séance après séance, dans ses locaux.


Et un salut tout aussi appuyé au Grand Orient de France, dont la bibliothèque a porté l’élan des débuts du cycle, lorsque le séminaire se tenait au « 16 Cadet » – une impulsion fondatrice qui a permis d’ancrer cette recherche dans un lieu de travail, de sources, et de transmission.

Informations pratiques

Le séminaire a lieu une fois par mois, le mardi, de 18h à 20h, dans les locaux de la Fédération française du Droit Humain, 9 rue Pinel, 75013 Paris. Une participation en visioconférence est prévue sur inscription. Une inscription avant le 15 janvier 2025, formulation à lire comme une consigne d’inscription en amont de la première séance.

« Mémoire(s) confisquée(s), mémoire(s) retrouvée(s) : les « sociétés secrètes » à l’épreuve de la Seconde Guerre mondiale »
« Mémoire(s) confisquée(s), mémoire(s) retrouvée(s) : les « sociétés secrètes » à l’épreuve de la Seconde Guerre mondiale »

Programme 2026

Emmanuel Kreis
  • Mardi 20 janvier – Les personnels du service des sociétés secrètes – Emmanuel Kreis
  • Mardi 17 février – Réfugiés, francs-maçons, trajectoires individuelles — Aurore Duvoisin
  • Mardi 24 mars – Ficher les opposants idéologiques – Élodie Cointement, Anne Leblay-Kinoshita
  • Mardi 19 mai – Intersectionnalité, juifs et francs-maçons – Sarah Gensburger
  • Mardi 23 juin – Jean Marquès-Rivière et les “occultistes” du SSS – Jean-Pierre Brach, Emmanuel Kreis

Liens d’inscription : Présentiel / Visio

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Charles-Albert Delatour
Charles-Albert Delatour
Ancien consultant dans le domaine de la santé, Charles-Albert Delatour, reconnu pour sa bienveillance et son dévouement envers les autres, exerce aujourd’hui en tant que cadre de santé au sein d'un grand hôpital régional. Passionné par l'histoire des organisations secrètes, il est juriste de formation et titulaire d’un Master en droit de l'Université de Bordeaux. Il a été initié dans une grande obédience il y a plus de trente ans et maçonne aujourd'hui au Rite Français philosophique, dernier Rite Français né au Grand Orient de France.
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