La Franc-maçonnerie française, jadis pilier de la République et vecteur d’influence sociétale, traverse depuis plusieurs décennies une crise profonde. Avec environ 170 000 membres en 2025, répartis sur 8 grandes Obédiences et une multitude de petites, elle peine à renouveler ses effectifs et à maintenir son rayonnement.

Ce déclin n’est pas uniforme : certaines loges traditionnelles ou ésotériques résistent mieux, tandis que les obédiences « adogmatiques » ou engagées socialement s’essoufflent. Pour comprendre ce phénomène, le principe d’attribution causale, issu de la psychologie sociale, offre un éclairage puissant. Il révèle comment les maçons et les observateurs attribuent les causes du déclin – internes (dispositions personnelles, erreurs des obédiences) ou externes (évolutions sociétales) – souvent biaisées par des mécanismes cognitifs.
Le principe d’attribution causale : un outil psychologique pour décrypter les explications

Développé par Fritz Heider dès 1958, le principe d’attribution causale désigne le processus par lequel les individus expliquent les événements ou comportements en identifiant des causes internes (liées à la personnalité, aux efforts ou aux traits) ou externes (situées dans l’environnement, les circonstances ou la société).

Harold Kelley, en 1967, raffine cette théorie avec le modèle de la covariation : une cause est attribuée en fonction du consensus (tout le monde réagit-il ainsi ?), de la consistance (le comportement est-il stable dans le temps ?) et de la différenciation (est-il spécifique à cette situation ?).
Ce mécanisme n’est pas neutre : il est truffé de biais. L’erreur fondamentale d’attribution (ou biais de correspondance) pousse à surestimer les facteurs internes chez autrui tout en minimisant les externes pour soi-même. Le biais acteur-observateur renforce cela : l’observateur blâme la victime, l’acteur invoque le contexte. Enfin, le biais de complaisance protège l’ego en attribuant les succès à soi et les échecs aux autres. Appliqué à la Franc-maçonnerie, ce principe explique pourquoi le déclin est souvent perçu comme la faute « des autres » plutôt que comme un phénomène multifactoriel.
Un déclin chiffré et incontestable
Les statistiques parlent d’elles-mêmes. En France, seconde puissance maçonnique mondiale après les États-Unis, les effectifs stagnent ou baissent : environ 160 000 membres en 2020, contre plus de 175 000 en 2014. Le Grand Orient de France (GODF), obédience phare, compte environ 52 000 membres actuellement, mais avec un vieillissement marqué (âge moyen supérieur à 60 ans). La crise Covid a accéléré la tendance : -1,8 % au GODF en 2020, perte de 600 membres à la GLDF.

À l’international, le déclin anglo-saxon est plus marqué : 1,1 million de membres aux USA (contre des pics historiques bien supérieurs), et un effondrement depuis les années 1960. En Europe, les obédiences libérales peinent face à la « régularité » anglo-saxonne. Ce n’est pas une disparition, mais un lent effritement : moins d’initiations, plus de démissions, fragmentation en micro-obédiences.
Les causes externes : une société qui délaisse les fraternités traditionnelles
Selon le modèle de Kelley, si le déclin touche consensus (toutes obédiences), consistance (depuis décennies) et différenciation faible (similaire à d’autres clubs philanthropiques), les causes sont externes. La sécularisation frappe dur : la Franc-maçonnerie, née des Lumières, perd son monopole sur la quête de sens dans une société athée ou spirituelle « à la carte ». Le vieillissement démographique (pyramide des âges >50 ans) et le manque de renouvellement générationnel aggravent cela : les jeunes préfèrent les réseaux sociaux aux tenues rituelles.

Crises économiques, précarité des classes moyennes (cœur historique des loges) et addiction au divertissement numérique fragmentent l’attention : pourquoi des débats philosophiques longs quand TikTok offre l’instantané ? Enfin, la perte d’influence politique : moins de 10 % des députés maçons, réseaux informels plutôt que pouvoir occulte.
Les causes internes : dérives et rigidités des obédiences
Si la différenciation est forte (certaines loges prospèrent, comme au RER), les causes internes dominent pour les obédiences en crise. Querelles internes, scissions (crise GLNF 2008-2012, perte d’un tiers des membres) et affairisme ternissent l’image. Certaines loges se « peopleisent » ou politiciennes, oubliant l’ésotérisme au profit d’actions stériles. Le refus de la mixité (GODF jusqu’en 2010) ou rigidité rituelle repousse les jeunes et femmes.
Les biais d’attribution en action dans les discours maçonniques
L’erreur fondamentale d’attribution est flagrante : les maçons des obédiences déclinantes blâment les « jeunes matérialistes » (externe pour soi, interne pour autrui), tandis que les critiques externes accusent l’élitisme maçonnique. Biais de complaisance : « Nos succès passés venaient de notre vertu, le déclin vient de la société décadente.«
Le biais acteur-observateur divise : les « internes » voient leurs échecs comme contextuels (sécularisation), ceux des autres comme dispositionnels (paresse spirituelle). Cela bloque les réformes : au lieu d’adapter rites et communication, on invoque un complot externe ou une trahison interne.
Vers une renaissance ? Au-delà des biais
Le principe d’attribution causale invite à l’équilibre : reconnaître les causes multiples pour agir. Des loges comme Emanescence (RER mixte, récente) montrent la voie : retour aux sources, ouverture, rigueur. Recentrer sur l’initiatique, digitaliser sans superficialité, attirer par le sens plutôt que le réseau : voilà des pistes.
La Franc-maçonnerie n’est pas condamnée. En évitant les biais attributionnels, elle peut transformer son déclin en renouveau. Car, comme le rappelait Heider, comprendre les causes vraies est le premier pas vers le changement.

une attribution factuelle : en quittant la FM j’ai augmenté mon « pouvoir d’achat » de 100 € par mois, soit 6% de mes revenus de smicard. Cotisations qui en 15 ans représente une somme qui m’auraient permis de changer de ma voiture…agée de quinze ans !
A l’heure des choix, il faudra aborder le « conflit de matérialité » dans la réflexion des « causalités ».
C’est curieux ce phénomène de créer des grands pontes qui n’ont fait que mettre en écriture des banalités… Cette attribution causale est connue depuis toujours : sagesse poipulaire « on voit midi à sa porte », et biblique « on voit la paille dans l’oeil de l’autre et pas la poutre dans le sien ».
« C’était mieux avant … »
Si le présent manque parfois de force, c’est peut-être aussi parce que nous n’avons pas pleinement réussi à transmettre tout ce qui nous a été légué…..
En effet la transmission est importante, si en plus on oublie ses serments et la recherche de la Vérité qui tient sa Lumière en elle même pas aux boiteux qui la disent et pour parachever le tout quand l’exemplarité est « oubliée », que des bons a rien nous imposent des moins que rien pour réseauter qui doivent encore faire preuve d’une extrait de casier vierge . . . . pourquoi s’étonner ???
L’alignement de la FM sur la politique d’extrême droite, dupremaciste d’Israël et le silence approbateur de ce qui s’apparente claire à une tentative genocidaire, est en contradiction flagrante avec les valeurs prônées.
Ce qui se passe à Gaza et en Cisjordanie auraient dû faire réagir la FM sans parti pris religieux mais sur la base de l’humain.
La FM va subir une très grave hémorragie car elle est maintenant cataloguée.
A propos des loges RER qui semblent tenir le choc devant l’érosion des effectifs peut-on m’expliquer pourquoi la loge historique du RER à Strasbourg « la Candeur » s’est vue imposer de passer au REAA par les autorités du GOF il y a plus de 5 ans ?
Comment pourrait-on imaginer passionner une loge avec le « principe d’attribution causale « ? J’ignore si Heider et Kelley sont FFMM mais je pense profondément que nous avons besoin en Maçonnerie vécue, quotidienne, vivant dans le Monde, de vrais soignants et pas de médecins légistes.
Ou comment afficher ses certitudes comme une vérité ! Oui les f.m. vieillissent pour une raison évidente : le renouvellement est d’environ 5 % donc 95% prennent un an de plus d’une année sur l’autre.
Oui les jeunes ne sont pour la plupart pas intéressés et ce n’est pas nouveau : initié il y a 35 ans à l’âge de 45 ans j’ ai rarement vu entrer des nouveaux initiés de moins de 30 ans. Enfin à propos des loges du RER au GODF elles essaiment beaucoup avec des effectifs faibles.
Un peu de logique ne nuit pas.
J’ ai dit