sam 14 juin 2025 - 09:06

La part d’ombre du chercheur de Lumière : un voyage vers la complétude

L’être humain, lorsqu’il arrive sur Terre, incarne une essence pure et originelle, un langage universel : l’amour.

Cette vibration première, inscrite dans son être, le guide dès ses premiers instants à tisser des liens, à expérimenter des relations, qu’elles soient lumineuses ou douloureuses. À l’image de la pomme attirée par la gravité terrestre, l’humain attire à lui les expériences et les rencontres qui jalonnent son existence. Mais, comme le souligne la loi de la gravité, cette attraction est bidirectionnelle : l’humain influence son environnement autant qu’il en est façonné. Ainsi, il évolue dans un univers qu’il co-crée, où sa perception mentale joue un rôle central, modelant son monde intérieur et extérieur tout au long de sa vie.

Une mère et son enfant

Dès l’enfance, l’être humain entreprend un travail de construction de soi, cherchant à donner du sens à son existence. Mais à quel moment peut-on affirmer qu’il est véritablement lui-même ? Qui est-il, parmi les multiples facettes de sa personnalité qui émergent au fil des étapes de la vie ? Doit-il attendre la fin de son voyage terrestre pour découvrir son essence véritable ? Ces questions, universelles et intemporelles, nous invitent à plonger dans la quête de la complétude, une quête qui ne vise pas la perfection – car nous sommes déjà parfaits dans notre essence – mais l’intégration de toutes les parts de notre être.

L’Origine de l’Être : Le Troisième Désir

Françoise Dolto (Crédit Babelio)

Pour Françoise Dolto, l’enfant est le fruit d’un « troisième désir », une âme qui s’incarne au moment de la conception. Cette entité ne choisit pas ses parents par hasard : ils représentent le terreau idéal pour son évolution terrestre. Dès sa conception, l’enfant en devenir manifeste une volonté farouche, triomphant de millions d’autres spermatozoïdes dans une course vitale pour rejoindre l’ovule. Cette première victoire symbolise une détermination originelle, une force intérieure qui l’accompagnera tout au long de son chemin.

Ce troisième désir, une fois incarné, entame un voyage semé d’embûches et de moments de grâce. La vie terrestre n’est pas une quête de perfection, mais une exploration continue pour devenir complet. L’enfant, confronté au monde, apprend à nommer, à étiqueter, à donner du sens à ce qu’il découvre. Son mental, tel un architecte, construit un cadre de référence, excluant l’inconnu jusqu’à ce qu’il soit apprivoisé. Mais lorsque l’enfant fait face à l’insupportable – des situations contraires à sa nature profonde ou à ses idéaux –

son mental active des mécanismes de défense : l’auto-culpabilisation, la honte, la tristesse, parfois la colère, et dans les cas extrêmes, l’oubli. Ces mécanismes, bien que protecteurs, posent les bases de déséquilibres relationnels.

Un exemple poignant illustre l’importance vitale du lien d’amour dans les premiers instants de la vie. Dans les orphelinats roumains décrits par Boris Cyrulnik, pionnier de la résilience, les bébés privés de contact humain dépérissaient et mouraient, malgré les soins matériels. Jusqu’à ce qu’une infirmière, bravant les interdictions, crée un lien affectif avec un nouveau-né, lui permettant de survivre. Cette histoire révèle une vérité fondamentale :

sans amour, la vie d’un enfant ne peut s’épanouir. L’amour est aussi essentiel que la nourriture.

Le Château Intérieur : Une Métaphore de l’Être

Le Château Arribas
Le Château Arribas

Imaginez-vous naître tel un château magnifique, un espace lumineux doté d’un corps central et de deux ailes, à l’image des anges. Ce château, c’est vous, explorant chaque pièce avec émerveillement, fier de cette demeure intérieure qui constitue votre univers. Mais au fil du temps, sous l’influence de l’éducation et des attentes extérieures, certaines pièces de ce château sont jugées inadéquates. Trop ceci, pas assez cela.

Pour répondre aux exigences des autres – ceux que vous aimez ou ceux que vous craignez – vous fermez les volets de ces pièces, réduisant peu à peu votre espace habitable. Vous sacrifiez des parts de vous-même pour devenir « aimable », non pas au sens de sympathique, mais dans celui de quelqu’un que l’on peut aimer.

Les années passent, et ce château autrefois vaste se réduit à une poignée de pièces, parfois à peine 50 mètres carrés. Vous vous habituez à cette existence restreinte, tout comme certains se contentent d’un banc à l’extérieur. Mais une question, inspirée par Carl Jung, surgit :

« Préférez-vous être entier
ou être bon ? »

couple avec enfant sous le soleil couchant
couple avec enfant sous le soleil couchant

Cette interrogation met en lumière un paradoxe : en cherchant l’amour des autres, vous avez multiplié les ténèbres dans votre château, occultant des parts de vous-même par peur de la honte ou par besoin de reconnaissance.

Pourtant, la lumière continue de briller à l’extérieur, patiente, attendant le moment de votre éveil. Les lois de l’univers, ni justes ni injustes selon les critères humains, orchestrent des événements porteurs de sens.

« avoir l’espoir ne signifie pas croire que tout ira bien, mais que tout aura un sens ».

Václav Havel

Chaque expérience, qu’elle soit belle ou cruelle, est une invitation à découvrir ce sens caché, à éclairer les zones d’ombre de notre être.

La Part d’Ombre : Une Clé pour la Complétude

Un jour, une rencontre fortuite peut changer le cours d’une vie. Pour l’auteur de ce récit, ce fut une femme, une « profane éclairée », qui lui parla de la part d’ombre. Elle lui expliqua que chacun porte en soi un monde du dehors et un monde du dedans, et que l’ombre n’est pas synonyme de négativité, mais de tout ce qui échappe à la conscience. En devenant conscient de ces parts refoulées, l’individu devient plus entier.

Notre culture, centrée sur l’ego et les idéaux, nous pousse à rejeter ce qui ne correspond pas à l’image parfaite que nous projetons. Mais plus nous cherchons la lumière, plus notre ombre s’épaissit. La solution ? Éclairer ces zones d’ombre, non pas pour les juger, mais pour les intégrer.

Cette révélation fut un choc. L’auteur réalisa que les personnes qui l’agaçaient – les « perdants », les « lâches », les « malhonnêtes » – étaient des miroirs de ses propres zones d’ombre. Ces jugements reflétaient des parts de lui-même qu’il avait refoulées, des blessures anciennes, comme les mots d’un père qui le traitaient de « bon à rien ». En explorant ces souvenirs, il comprit que son besoin de prouver sa valeur, de devenir « le plus fort », l’avait conduit à fermer des pièces entières de son château, à rejeter des aspects de lui-même par peur de l’échec ou de la faiblesse.

Ce travail d’introspection, bien que douloureux, fut libérateur. L’auteur entreprit de rouvrir une à une les pièces de son château, de laisser la lumière pénétrer là où l’obscurité avait régné trop longtemps.

Ce processus ne vise pas à devenir parfait, mais à embrasser toutes les facettes de son être, à devenir complet.

La Maçonnerie : Un Athanor pour Éclairer l’Ombre

Dans ce voyage intérieur, la Franc-maçonnerie joue un rôle particulier. La loge, avec ses membres aux parcours et personnalités variés, est un microcosme où se reflètent nos ombres. Le frère ou la sœur qui nous irrite – par son attitude, son discours, ou sa simple présence – est précisément celui ou celle qui nous offre l’opportunité de travailler sur nous-mêmes. En loge, cet « autre » devient un miroir, renvoyant nos parts d’ombre que nous refusons de voir. Ce travail introspectif, au cœur de l’athanor qu’est la loge, permet de rediffuser la lumière en nous, de progresser vers la complétude.

Certains maçons, malgré des années de pratique, restent prisonniers de leurs ombres, laissant leur ego dominer leur cœur. Mais il n’y a pas de jugement à porter : chacun avance à son rythme. L’apprenti, avec son humilité et sa soif de connaissance, incarne souvent l’état d’esprit le plus propice à ce travail. Les conflits, plus fréquents dans les ateliers supérieurs où les egos s’affirment, rappellent que la lumière ne s’acquiert pas par l’accumulation de rituels, mais par un effort constant d’introspection.

Le véritable ennemi du maçon n’est pas l’agacement ou la nuisance, mais l’absence de recherche de sens. Comme dans la tradition hawaïenne du ho’oponopono, illustrée par l’histoire du Dr Len, le changement extérieur passe par un travail intérieur. En se concentrant sur l’amour et le pardon – non pas pour culpabiliser, mais pour se reconnecter à son essence lumineuse –

le Dr Len transforma l’atmosphère d’un centre de détention sans jamais rencontrer ses patients. Ce principe s’applique à la maçonnerie : en éclairant nos ombres, nous influençons notre environnement.

Devenir ce que nous sommes

La quête de la lumière, au cœur de la Franc-maçonnerie comme de la vie, ne consiste pas à chercher une perfection extérieure, mais à révéler ce que nous sommes déjà. Comme le souligne la pensée nietzschéenne, il ne s’agit pas de « faire » pour « être », mais de devenir. La loi universelle de l’attraction nous attire des expériences qui nous invitent à grandir, à nous aligner avec notre essence. Le mot « impeccable », loin des connotations morales, signifie « sans péché », c’est-à-dire viser juste au centre de la cible, être en cohérence avec soi. C’est justement le symbole du fil à plomb.

Notre mental, précieux allié, peut devenir un obstacle lorsqu’il nous coupe de nos émotions et de notre ressenti. Chaque agacement, chaque jugement, est une opportunité d’explorer une zone d’ombre, de rouvrir une pièce fermée de notre château intérieur. Imaginons un instant qu’il ne nous reste que quelques secondes à vivre : regretterions-nous de ne jamais nous être pleinement rencontrés ? Ou embrasserions-nous, dans un moment de plénitude, l’être d’amour que nous sommes au fond de nous ?

Le voyage terrestre est une invitation à devenir complet, à éclairer nos ombres pour laisser rayonner notre lumière.

Comme le maçon polissant sa pierre, chacun d’entre nous est appelé à entreprendre ce travail, non pas pour devenir autre, mais pour révéler, avec courage et humilité, l’être lumineux qu’il a toujours été.

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Pierre d’Allergida
Pierre d’Allergida
Pierre d'Allergida, dont l'adhésion à la Franc-Maçonnerie remonte au début des années 1970, a occupé toutes les fonctions au sein de sa Respectable Loge Initialement attiré par les idéaux de fraternité, de liberté et d'égalité, il est aussi reconnu pour avoir modernisé les pratiques rituelles et encouragé le dialogue interconfessionnel. Il pratique le Rite Écossais Ancien et Accepté et en a gravi tous les degrés.

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