mer 04 juin 2025 - 08:06

Le Golem et la liberté

Le mythe du Golem, loin d’être une simple fable hébraïque pour effrayer les enfants, est une tragi-comédie philosophique. Imaginez une créature d’argile, née des mains d’un rabbin facétieux, qui s’interroge sur la liberté tout en renversant les étals du marché par mégarde. Ce pantin de boue soulève des questions graves, mais avec une maladresse qui prêterait à rire dans un salon du XXIe siècle.

Ce tas de boue animé, c’est un peu comme si Frankenstein avait un cousin en terre cuite qui se pose des questions sur la liberté tout en cassant des murs par mégarde.

I. D’où sort ce Golem, au fait ?

Le Golem : Une Création des plus singulières

Le terme « golem » apparaît dans le Psaume 139:16, désignant un brouillon divin, une matière encore informe. Mais c’est à Prague, dans le ghetto juif, que notre héros d’argile prend vie sous les doigts du rabbin Judah Loew, dit le Maharal, un érudit qui, ayant trop feuilleté le Sefer Yetsirah, s’improvise démiurge. À une époque où les Juifs, accablés par les persécutions, vivaient dans l’angoisse des pogroms, le Maharal se dit : « Pourquoi ne pas façonner un colosse de terre pour protéger mes ouailles ? »

Ne montez pas le son, c’est un film muet !

Comment donne-t-on vie à un golem ? Rien de plus aisé, à condition d’avoir l’âme d’un alchimiste, la connaissance d’un kabbaliste et la patience d’un horloger :

Le modelage : On pétrit l’argile au bord d’une rivière, car l’eau, dit-on, confère une certaine poésie à l’affaire. Le résultat ? Une silhouette humaine, disgracieuse mais robuste. Les incantations : On récite des formules kabbalistiques, jouant avec les lettres hébraïques comme un typographe en transe. C’est un peu comme composer une symphonie, mais avec des noms divins. L’activation : On glisse un parchemin orné d’un nom sacré dans la bouche du golem, ou l’on grave emet (vérité) sur son front. Et voilà, la statue s’anime ! Le souffle vital : On tourne autour de la créature en psalmodiant, tel un maître de ballet mystique. Les grimoires parlent de « 231 portes » à ouvrir, mais nul n’a jamais compris ce charabia.

Ce golem, prénommé Yossef (ou Yossel pour les intimes), est un gaillard d’argile aussi fort qu’un bœuf, mais dénué d’esprit et de conversation. Sa mission ? Patrouiller dans le ghetto, déjouer les complots et donner une bonne frayeur aux malandrins.

On raconte qu’il surprit des scélérats cachant des corps pour accuser les Juifs de crimes odieux.

Mais voilà, Yossel commence à péter les plombs. Certaines légendes disent qu’il se met à jouer les rebelles, genre ado en crise qui casse tout. D’autres racontent que le Maharal flippe et décide de le mettre hors service. À la fin, le Maharal démonte Yossel, pas parce qu’il a la trouille, mais parce qu’il est sage. C’est comme débrancher une console avant qu’elle ne grille tout. Marek Halter nous glisse un message : la liberté, ce n’est pas avoir le plus gros jouet, c’est savoir quand appuyer sur « off ».

 Comment ? En virant le Post-it magique ou en effaçant une lettre sur son front pour transformer emet (vérité) en met (mort). Et pouf, Yossel redevient un tas d’argile. On dit que ses restes traînent encore dans le grenier de la synagogue Vieille-Nouvelle de Josefov à Prague, avec un panneau « Ne pas toucher, sinon ça va barder ».

Le Golem, c’est un peu nous : super forts, mais un peu paumés, coincés entre obéir aux ordres et rêver de faire nos propres bêtises. Sa « destruction » ? Une leçon kabbalistique : jouer à Dieu, c’est cool, mais faut pas pousser mémé dans les orties.

Signification (ou pas)

Le Golem, ce n’est pas juste un videur de ghetto. C’est : L’espoir des opprimés : « On va tous se faire sauver par un géant d’argile ! » Un warning cosmique : Créer des trucs puissants sans mode d’emploi, c’est la porte ouverte à toutes les fenêtres. Un miroir de l’humain : On veut être des dieux, mais on oublie souvent où on a garé notre âme.

    La Kabbale adore le Golem, parce que les lettres hébraïques, c’est la Wi-Fi de l’univers. Et puis, il a inspiré plein de trucs : Frankenstein, les robots de SF, et même ton aspirateur qui fait n’importe quoi. Bon, l’histoire du Golem de Prague, c’est peut-être un peu du pipeau inventé au XIXe siècle par Judah Rosenberg, mais chuuut, ça gâche le fun.

    Dans le roman Le Kabbaliste de Prague de Marek Halter, le Golem, c’est un héros tragique qui veut juste être un grand garçon, mais qui finit par tout casser comme un éléphant dans un magasin de porcelaine.

    II. Le Golem et la Liberté

    Prague, le Bronx du XVIe siècle

    Imaginez le ghetto de Prague, des tensions partout, des Juifs qui vivent comme dans un escape game permanent. Le Maharal crée le Golem pour jouer les super-héros, mais il se demande : « Et si mon joujou devient un Terminator ? » C’est le dilemme : déléguer le pouvoir, c’est bien, mais si le Golem décide de faire du moonwalk au lieu de protéger le ghetto, on fait quoi ?

    Yossel veut sa carte d’identité

    Dans le bouquin de Halter, Yossel commence à avoir des feelings. Il mate les oiseaux, il fronce les sourcils, il désobéit un peu, mais surtout il est la risée d’enfants. On dirait Pinocchio qui veut devenir un vrai garçon, mais en version bodybuildée. Ce Golem, c’est le symbole des Juifs opprimés qui rêvent de liberté, mais qui galèrent à comprendre comment ça marche. Problème : Yossel, avec sa cervelle d’huître, casse tout sans faire exprès. Morale ? La liberté sans GPS éthique, c’est comme donner les clés d’une Ferrari à un hamster.

    III. Philosophie et Kabbale : On rigole, mais pas que

    Liberté, Responsabilité

    Créer un Golem, c’est un peu comme pirater le code source de l’univers. Le Maharal, en jouant les démiurges, sait qu’il marche sur des œufs. Sartre dirait : « T’es libre, mec, mais assume si tout part en vrille. » Le Golem, lui, est libre comme un aspirateur : il fait ce qu’on lui dit, mais s’il déraille, c’est le chaos. La vraie liberté, ce n’est pas juste faire ce qu’on veut, c’est savoir pourquoi on le fait.

    Le Golem, c’est nous (mais en moins mignon)

    Le Golem, c’est l’humanité qui bricole des IA, des fusées et des applis de rencontre. On veut jouer les dieux, mais nos créations finissent souvent par nous faire des doigts d’honneur. Halter nous fait cogiter : comment rester libres face à nos propres jouets ?

    IV. Le Golem, toujours d’actu

    Le Golem, c’est l’ancêtre de Siri, Alexa et de tous ces algos qui décident à notre place. Ils sont censés nous aider, mais parfois, on dirait qu’ils complotent pour nous faire acheter des chaussettes fluo. La liberté, aujourd’hui, c’est se battre pour ne pas devenir les marionnettes de nos propres gadgets.

    Bibliographie (pour frimer)

    • Sartre, Jean-Paul. L’Existentialisme est un humanisme. Paris : Gallimard, 1946. (Parce que la liberté, c’est compliqué.)
    • Halter, Marek. Le Kabbaliste de Prague. Paris : Robert Laffont, 2010. (Un page-turner avec de l’argile et du drame.)
    • Scholem, Gershom. La Kabbale et sa symbolique. Paris : Payot, 1966. (Pour les fans de mysticisme sérieux.)

    2 Commentaires

    1. il y a eu aussi un téléfilm sur ce thème, bien réalisé.
      Le sens donné était plus universel : le Golem souffrait de na pas être un vrai humain, mais un sous-homme. Alors il cassait tout !
      La philosophie finale était que nous sommes nous-même des golems …

    2. J’ai lu il y a fort longtemps le roman de Gustav Meyrink, mais j’avoue ne pas me souvenir de l’intrigue. Ca me donne l’envie de le relire…

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    Solange Sudarskis
    Solange Sudarskis
    Maître de conférences honoraire, chevalier des Palmes académiques. Initiée au Droit Humain en 1977. Auteur de plusieurs livres maçonniques dont le "Dictionnaire vagabond de la pensée maçonnique", prix littéraire de l'Institut Maçonnique de France 2017, catégorie « Essais et Symbolisme ».

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