Le Maçon entrant dans le temple contemple face à lui le lieu où se lève le Soleil, où la lumière apparaît, le lieu où se lèvent la Lune et les étoiles ainsi que les autres planètes. Mais en Maçonnerie tout est symbole : Ce qu’il voit sont essentiellement trois symboles placés sur le mur, derrière et au-dessus du « Vénérable Maître », le Président de la loge :
Au centre, symbole majeur du temple maçonnique, un triangle rayonnant, équilatéral, « Le Delta lumineux » qui est appelé ainsi parce que cette forme de triangle est celle de la lettre grecque Delta. On l’allume lors des travaux.
Il est encadré du Soleil et de la Lune : Du Soleil à droite soit du côté sud, donc sur le point de se lever. De la Lune à gauche, soit du côté nord, ses cornes tournées vers l’arrière, soit le Nouveau croissant, la Lune de trois jours qui suit le Soleil dans son lever
La plupart du temps un œil unique et sans paupières marque son centre.
De plus le Delta avec ses rayons est parfois entouré d’un cercle de nuages ce qui fait référence à l’Ancien Testament, la Gloire de Yahvé se manifestant dans la nuée (Exode XVI,10 : « Et voici la Gloire ( dwbk Kavod ) de Yahvé apparut dans la nuée »)
Par ailleurs on peut voir à la place de l’œil le Tétragramme soit les quatre lettres du nom imprononçable hwhy de l’Eternel dans la Bible, Yod y Hé h Vav w Hé h
Ou encore à la place du Tétragramme un Yod, première lettre du Tétragramme (l’Hébreu se lit de droite à gauche) à la fois nombre Dix et Un.
Il est le Dix, l’Unité de rang supérieur.
Il est le point, un germe, il symbolise le Un, ce qui est logique car le Tétragramme qu’il peut remplacer est la source le Un. YHVH, l’Eternel qui est UN.
Enfin le Tétragramme peut être remplacé dans le Delta par trois points ou trois Yodim ( pluriel de Yod)
Ces trois points symbolisés par les trois yodim remplacent en fait les trois lettres différentes du Tétragramme donnant le nombre clef du triangle le Trois.
Au premier abord la première approche, l’image du Delta maçonnique semble provenir du Delta lumineux présent dans le chœur de nombreuses églises chrétiennes.
Ces triangles rayonnants, exécutés par les peintres et les sculpteurs représentations symboliques de la manifestation de la Puissance divine ou bien de sa Présence (la shekina en hébreu) étaient nommées « gloires ». Pour le chrétien de base ils symbolisaient la Trinité. On les trouve surtout au XVII° et XVIII° siècles.
Ils portaient en leur centre :
- Soit un œil comme celui d’Aix La Chapelle (Figure ci-dessous)
- Soit le nom de l’Éternel en hébreu.
L’œil dans le Delta
L’œil représente alors en première lecture celui de Dieu qui voit tout, l’œil de la providence.
Mais sa puissance va bien au-delà comme il est écrit dans le Zohar : « Si cet œil se fermait un instant, un instant seulement, plus rien n’existerait. C’est pourquoi on l’appelle l’œil ouvert, l’œil d’en haut, l’œil saint, l’œil qui voit tout…l’œil qui ne dort ni ne somnole, l’œil qui monte la garde sur toute chose, l’œil dont toute chose tient l’existence »
D’ailleurs l’œil en hébreu se dit Ayn }yu (qui s’écrit Ayin Yod Noun) mot qui signifie également « éclat » « lumière » « source ».
De plus Ayin est en homophonie avec le mot Ein }ua (qui s’écrit Alèf Yod Noun) qui signifie « rien, néant ». Or Ein représente l’état du Néant absolu totalement inconnaissable qui a précédé l’Ein Sof ou l’Infini issu du Néant absolu. Il est au-dessus de l’arbre des séfiroth. Il est le plus haut nom que les kabbalistes donnent à Dieu.
En fait l’œil est un symbole que l’on trouve partout. Il est symbole de feu, de lumière et de connaissance.
Chez les anciens Egyptiens « œil » se disait iret de même racine que ir, façonner, faire, créer. Aussi écrivaient-ils que tous les êtres sont sortis de l’œil du créateur.
Chez les Grecs, Zeus, Dios (Jupiter en latin soit Dieu le père) dont le nom signifie Lumière était représenté par un cône à trois yeux (Le cône, qui contient tous les éléments géométriques est engendré par un triangle tournant sur lui-même).
Le nom de l’Éternel YHVH (Yahvé) en caractère hébraïques dans le Delta
Ainsi celui de l’église de St Germain des Prés représenté sur un vitrail.
Ou celui de la chapelle du château de Versailles, plus complexe : le Delta se superpose à un soleil. Le Soleil, cet « Œil du monde » (Ovide), par sa présence sous le Delta, intensifie l’idée de lumière.
On peut donc penser que les maçons, qui lors de la création des rituels étaient majoritairement chrétiens, s’emparèrent du Delta des églises.
Le Delta qui se trouve à l’église St Pierre à St Saires près de Loudun apposé au sommet de la voûte or sur fond bleu entouré de douze étoiles, témoigne de cette alliance : Il fut placé là au 20ième siècle lors d’une restauration grâce à des dons de Francs-Maçons (Nouvelle République 24 août 2018).
Toutefois Delta est un nom grec : il désigne la quatrième lettre de l’alphabet grec qui a la forme d’un triangle équilatéral.
Il est donc temps de se tourner vers les origines grecques de ce Delta. C’est là notre héritage le plus proche.
Le Delta une lettre grecque en forme de triangle équilatéral
Le delta est l’équivalent grec du « d » latin. Si, en minuscule « d », il ressemble au « d » latin, en majuscule, D, il est un triangle pratiquement équilatéral (l’angle au sommet est un peu plus aigu) et symboliquement considéré comme tel[1].
Il est pour commencer l’initiale du grand Dieu grec, Zeus, Dios (DioV) au génitif
Aussi écrivait l’astronome Hyginus (67 av – 17 ap. J.C.° dans son Traité d’astronomie, « le Delta est sacré parce que c’est la lettre du mot Dieu ».
Un triangle équilatéral et nombre quatre
Tout comme le « d » latin, et le daleth hébraïque, le delta est la quatrième lettre de l’alphabet et représente le nombre quatre.
Ce nombre quatre (téttares en grec) associé au triangle nous donne la Tétractys (du grec tétrakis quatre fois) pythagoricienne.
Le triangle de rang quatre, soit le nombre dix, soit, selon les pythagoriciens, l’unité exaltée, le chiffre de la perfection représentant symboliquement la divinité suprême.
Le triangle équilatéral un symbole cosmogonique
Le triangle étant pour commencer évidemment le symbole de la manifestation divine qui commence avec le dédoublement du point, formant un triangle, première surface. Le noyau d’énergie primordial, le point, prend un rayon, deux points supplémentaires émergent pour former une triade de points.
Ainsi pour les pythagoriciens, le Delta symbolisait la naissance cosmique en raison de sa forme triangulaire. C’est ainsi que, logiquement, Zeus, grand Dieu créateur, donna naissance à un triangle : Athéna, déesse de la Sa gesse.
Athéna Tritogénie, le triangle équilatéral sorti de la tête de Zeus
Ainsi Plutarque (46 – 125) dans son traité Isis et Osiris écrivait :
« Les Pythagoriciens ont gratifié les nombres et les figures géométriques de dénominations de Dieux. Ils ont donné au triangle équilatéral le nom d’Athéna, née du cerveau de Zeus, et appelée Tritogénie (Née du Ternaire) parce que les perpendiculaires abaissées des trois angles sur les bases les divisent en parties égales. »
Ainsi les pythagoriciens avaient symbolisé la Sagesse par le triangle. La Sagesse au sens où l’entendaient les Grecs : Qualité supérieure de l’intelligence assez haute pour diriger toute la vie et toute la science.
La signification de ce mythe se trouve dans le ciel.
Tout d’abord les Grecs y ont mis le Delta sous la forme d’une constellation de sorte qu’il manifeste sa force créative sur le zodiaque : la constellation du Delta, Deltwton Deltoton, qui se trouve au-dessus de la tête de la constellation du Bélier.
Eratosthène (275 – 193 av J.C.), à propos du Delta, écrit[2] :
« Il s’agit de la constellation qui se trouve au-dessus de la tête du Bélier et c’est dit-on, une lettre en forme de triangle, facile à reconnaître, placée là par Hermès, qui organisa la disposition des constellations entre elles… Le Delta a trois étoiles, une sur chacun de ses angles, brillantes toutes trois. ».
Dans les livres d’astronomie du monde gréco-latin, il est « Le triangle céleste ou divin », « la Porte des dieux ».
Or curieusement, dans l’alphabet hébraïque, le Daleth qui originellement était représenté par un triangle, (l’ancienne forme de l’ouverture de la tente des nomades) signifie « porte » ou « battant de porte ».
Mais pourquoi est-il la Porte des dieux ? et qui sont ces dieux ?
Ce sont les planètes, les astres qui courent, « ceux qui courent » car le mot dieu Théos vient du verbe « courir » Théô Qew je cours Et où courent-ils ? sur le zodiaque le cercle des vivants (de Zôè la vie). Mot à double sens les Vivants sont d’une part les figures d’animaux du zodiaque mais aussi les planètes comme la Terre sur lesquelles peut se trouver la vie.
La constellation du Bélier marque le début du zodiaque
Pourquoi ? « Il est le chef des signes célestes parce qu’il avait surmonté les flots »[3]
En effet par rapport au plan galactique qui coupe la sphère céleste en deux une moitié au nord (donc au-dessus pour nous habitants de l’hémisphère nord, comme on l’a vu avec Dante) et une moitié au sud (donc en dessous), nous voyons que les deux constellations d’eau le Verseau et les Poissons se trouvent au fond de la partie inférieure tandis que celle du Bélier est déjà au milieu du quart montant vers le nord.
La partie inférieure étant considérée comme l’eau et la partie supérieure côté nord comme émergée hors de l’eau sur terre à l’air.
Ainsi la Vierge la Reine du ciel pointant son épi vers le Nord au-dessus du plan galactique, triomphe -t-elle au sommet du ciel, brandissant son épi à côté du Lion.
Le Delta placé dans le ciel par Mercure/ Hermès
Quant à Hermès, c’est l’autre nom de Mercure, dieu de la planète du même nom, comme le dit le même auteur :
« La cinquième[4] (planète) est celle d’Hermès (Mercure nom latin d’Hermès), Stilbôn (la Resplendissante). Elle est brillante, mais petite. Elle a été attribuée à Hermès, Mercure, parce qu’il fut le premier à définir l’organisation du ciel et la place des étoiles, à régler les saisons et à offrir des indications sur les moments favorables de l’année. On l’appelle Stilbôn en raison de cette inventivité dont fit preuve Hermès »
Et qui nous montre, chaque année dans le ciel, les trois angles d’un triangle, si ce n’est Hermès-Mercure ?
Chaque année, en effet, Mercure trace dans le ciel, sur le zodiaque, les trois sommets d’un triangle équilatéral.
Vues de la Terre, Mercure trace, en mouvement apparent, trois boucles sur le zodiaque.[5]
(Toutefois les trois sommets du triangle, indiqués chaque année par les trois boucles de la planète, ne sont pas fixes : ils se déplacent dans le zodiaque en se décalant d’un demi-signe par an dans le sens contraire des signes. De la sorte il n’a un de ses angles sur la tête du Bélier que tous les sept ans.)
D’où le qualificatif d’Hermès « Trismégiste » : tris « trois » (fois) megistos « très grand ».
On comprend alors pourquoi on a fait de cette planète, non seulement le messager des dieux (Elle est la planète la plus proche du Soleil), mais aussi le gardien de la science sacrée.
Et surtout pourquoi Hermès Mercure a-t-il reproduit ce grand triangle céleste, tracé sur le zodiaque, sous la forme du Delta divin et pourquoi l’a-t-il placé sur la tête du Bélier ? Est-ce parce que comme l’écrit Hyginus[6] (67 av J.C. – 17 apr. J.C.), on l’a placé là « en souvenir du partage du monde en trois ».
Y aurait-il un triangle -fixe cette fois- partageant le zodiaque en trois ?
Soit un triangle équilatéral symbole de la manifestation, s’inscrivant dans un cercle, symbole du monde ?
Et enfin quel rapport peut-il y avoir entre Jupiter (Zeus le Père, le Delta de Dios), le signe constellation du Bélier et la constellation du Delta d’un côté et de l’autre le partage du monde (du zodiaque) en trois ? Si ce n’est Athéna, le triangle sorti de son cerveau ? Serait-il lui aussi sur le zodiaque ?
Le point initial ou le cerveau de Zeus sur le zodiaque
C’est Hyginus à nouveau, qui va nous mettre sur la voie : On a placé le Bélier au ciel en souvenir de Jupiter Hammon, le dieu du Sagittaire (ou de l’Archer, ou de l’Arc).
Ou si l’on préfère le Deltoton D de Dios est placé sur la tête du Bélier parce que le Bélier était consacré à Zeus, Jupiter Hammon (Amon en Égypte ancienne) à tête de Bélier, en Egypte ancienne.
En clair la tête du Bélier est celle de Jupiter, Zeus Père, DioV, le Père des dieux. Elle se projette à 120° à partir de celle de l’Archer divin (la tête de l’archer suivant la figure ci-contre).
Ainsi le triangle surgi de sa tête se projette à 120° au-dessus de la constellation du Bélier. C’est Pallas Athéna la divinité de la constellation du Bélier qui se trouve là au-dessus de sa tête.
Voyons maintenant comment on passe du triangle sorti du cerveau de Jupiter Amon (à tête de Bélier) au partage du zodiaque en trois.
« Le partage du monde en trois »
Nous avons vu plus haut que si l’on a placé là un triangle c’est à cause du partage du monde en trois par les Anciens. Reprenons ce que disait Hyginus :
« Deltoton D cette constellation a la forme triangulaire de la lettre grecque et lui doit son nom. Mercure l’a placé au-dessus de la tête du Bélier dans le but pense-t-on de signaler par son éclat l’emplacement du Bélier obscur et de représenter par sa première lettre le nom de Jupiter en grec DioV (Dios), pour d’autres, à cause du partage du monde en trois par les Anciens, on a dessiné trois angles »[7]
Le partage du monde c’est-à-dire celui du zodiaque, comme nous l’a suggéré Mercure.
Il nous faut donc comprendre pourquoi ce partage du zodiaque en trois doit avoir un angle sur la tête du bélier c’est-à-dire au tout début du signe repéré par cette constellation.
Jupiter est le père des dieux (des étoiles) et des hommes. C’est le dieu du Sagittaire. Aux pieds du Sagittaire se trouve « une couronne abandonnée comme par jeu »[8]. Il s’agit d’une petite constellation mais on peut y voir le symbole de la « Couronne du ciel » la Voie lactée. Et il était logique de donner comme couronne au Père des dieux, celle du Ciel.
C’est pourquoi on peut faire commencer le point de départ du zodiaque sidéral par ce que nous indique la flèche du Sagittaire : l’un des deux points de croisement entre le plan galactique et le plan de l’écliptique autrement dit l’un des deux Nœuds galactiques.[9]
La Voie lactée que les Anciens appelaient « La couronne du ciel » passe en effet au Sud entre la constellation du Sagittaire et celle du Scorpion et au Nord entre la constellation des Gémeaux et celle du Taureau.
D’ailleurs Manilius dans son livre Les Astrologiques place le Temple du monde symbolisée par la constellation de l’Autel en plein sur le Nœud Galactique sud, marqué par la constellation de l’Autel à zéro degré du signe marqué par le signe du Sagittaire étoilé.
Toutefois le zodiaque commence avec le Bélier autre signe de feu (on trouve trois fois les quatre éléments Feu Terre Air Eau).
À cent vingt degrés du Nœud galactique Sud, indiqué par la pointe de la flèche du Sagittaire et dans le sens des signes, se trouve le tout début du Bélier étoilé marqué par l’étoile alpha du lien qui relie les deux poissons des Poissons, et qu’aujourd’hui on nomme « Noeud des Poissons », mais qui se nommait autrefois Célestis nodus « Nœud céleste ». Cette étoile marque d’après Aratos[10] le lieu exact où se relie la tête et la queue de l’Ouroboros zodiacal, soit la limite entre les Poissons et le Bélier à 120° du Nœud Galactique sud.
La constellation du Delta, placée là, tout près, symbolise cette projection géométrique. Elle rappelle par son nom « Porte des dieux », que c’est par elle que les dieux (les astres), projetés par la semence de Zeus, arrivent sur la tête du « Serpent ouroboros (qui se mord la queue) », autre nom du zodiaque.
Cent vingt degrés plus loin se trouve Régulus l’étoile du Lion marquée par un triangle avec un œil au centre dans les monomères[11] qui marque le début du signe sidéral du Lion.
C’est l’éclair de Zeus qui trace un triangle de feu à partir du centre du monde, du centre galactique, indiqué par l’étoile de l’arc qui va se projeter à 120° d’un côté et 120° de l’autre.
Quoiqu’il en soit, nous avons là un triangle équilatéral révélant, pour ceux qui savent décrypter les symboles, l’architecture sacrée du zodiaque sidéral.
Le triangle équilatéral dans toutes les traditions : un symbole cosmogonique
En clair le symbole de la création de l’univers à partir du point primordial
Et semble se rattacher au berceau de l’humanité
Le triangle est la première forme géométrique possible
Traditionnellement il rend compte à la fois de l’essence du divin et de la matière dans sa plus grande pureté.
En Inde ce triangle a une importance particulière. Les yantras
Il apparaît dans ce que l’on appelle les yantras, des diagrammes cosmogoniques, qui racontent la création de l’univers.
À l’origine le Bindu « goutte » « point ». Sans position ni magnitude où se trouve concentré toute la dynamique créatrice, il représente l’univers dans sa forme non manifestée. À partir de lui se produit l’expansion du monde, qui y revient lorsqu’il a achevé son cycle cosmique.
Ce point devient Nada Bindu « point vibrant » (nada « son » « vibration ») se compose de deux pôles magnétiques auxquels ont été attribués par nécessité dialectique des noms et des couleurs
Shiva (bienfaisant) bindu blanc qui représente la conscience transcendantale statique ou encore la lumière. Shakti bindu rouge (Pouvoir, Force, Énergie), le feu.
En fait deux en un ou plutôt composé de deux pôles magnétiques : un rouge à l’intérieur d’un blanc. Il se dédouble.
Le premier qui se manifeste est le rouge féminin : Il sort mais fait retour l’énergie entre les deux se manifeste. Un troisième bindu alors apparaît, venu des deux issus du dédoublement. Il forme le premier triangle, le triangle primordial ou Mulatrikona (triangle racine) figure de base de tous les yantras.
En résumé :
- Un seul bindu exprimant l’état d’existence pure soit de non-manifestation
- Deux bindus signifient la dissociation du Maha (Grand, Primordial) bindu, l’état de distanciation, de création
- trois bindus forment le triangle, la « première figure rectiligne qui définit la dimension », ils annoncent la durée et les limites de l’expérience qui doit être mesurée.
Ces trois points sont en rapport avec les trois syllabes du son A U M .
À partir de là, l’univers entre en expansion. Ainsi ce premier yantra, composé de trois triangles symbolise l’univers émergeant des eaux cosmiques[12] pour aboutir au déploiement de l’univers manifesté, symbolisé par le Shri yantra.
Le Shri Yantra
Le Shri (Illustre, vénéré, Seigneur) Yantra symbolise tout le processus de la création du déploiement de l’univers manifesté. Une illustration du champ cosmique dans lequel s’inscrit la création Il se distingue des autres en tant qu’il projette la totalité. C’est le plus célèbre.
Du point original qui s’inscrit dans ce premier triangle
se créent quatre triangles dressés statiques (Shiva) et quatre inversés symbolisant l’énergie de la Shakti. Shiva pointe en haut représente l’aspect statique de lq réalité supérieure Shakti l’énergie cinétique de l’univers sensible. Les triangles entrecroisés, symbolisant la transformation des principes masculin et féminin à partir du chaos primordial des éléments. Le yantra est placé dans des cercles symboles des révolutions des planètes et donc du ciel et dans un carré symbole de la qualité matérielle de la nature.
Gopala yantra
Vishnu l’aspect du soleil radieux, celui qui maintient la création, L’Immanent.
Gopala (Bouvier) yantra celui de Vishnu adolescent, lorsque bouvier charmait les gopis (les bergères, en fait les âmes) en jouant de la flûte.
Ce yantra est fait de deux triangles entrecroisé sous la forme d’un hexagone.
Le triangle pointe en haut est identifié au principe masculin statique.
Pointe en bas au principe féminin shakti dynamique. Les deux triangles égaux symbolisent la maintenance de l’univers entre stabilité et énergie.
C’est l’union de Shiva et de Shakti se manifestant dans la création de l’univers objectif.
Le yantra est entouré des huit pétales en rapport avec les huit voyelles, les sons primordiaux, et de la guirlande formée des cinquante lettres de l’alphabet sanskrit qui participèrent à la création par leurs vibrations sonores.
Les yantras dans l’espace
En réalité ces triangles se déploient comme l’univers dans un espace à trois dimensions et non dans un plan
On peut donc représenter le triangle graphiquement sur une sphère
Ou comme en Inde les graver sur des pierres comme du cristal de roche
Comme ceux dessinés en relief sur des pendentifs
Sur le pendentif en coupole on voit le triangle initial pointe en haut au centre de deux triangles entrecroisés le tout dans deux carrés qui se croisent formant des triangles. Autour le serpent symbole d’énergie et de renouvellement. Au dos de ce pendentif est inscrit le son primordial qui a créé le monde.
Ou comme cet autre pendentif entouré des cinq serpents symboles des cinq tattvas les cinq énergies du monde
Au centre le triangle primordial pointe en haut entouré de trois triangles pointes en haut entrecroisés de trois triangles pointe en bas.
Là encore le son créateur le Verbe le Vak le son au trois syllabes A O M est inscrit en sanskrit par son symbole.
En Egypte le Benben « le triangle divin construit »
Le benben, pierre sacrée d’Héliopolis aux quatre pans triangulaires évoquant le rayonnement du soleil à son zénith vers les quatre direction de l’espace.
S’y posait le Phénix, une des formes du Soleil se renouvelant dans les eaux primordiales[13]
On y voyait aussi la pétrification du premier rayon solaire qui engendra le monde. Pierre de fondation, il rappelait le premier matin de la création.
Ici le pyramidion de la pyramide d’Amenemhat III (1842- 1794 av J.C.)
En pierre dure et sombre il se détachait par contraste avec le reste de la pyramide
On y voit un disque solaire ailé flanqué de deux uraeus. Entre les ailes deux yeux sont disposés au-dessus de grands signes hiéroglyphiques se référant à la beauté du dieu soleil Rê qui expliquent les hiéroglyphes illumine chaque jour de ses rayons le pyramidion. Dont cette face était orientée dans la direction du soleil levant.
Le pyramidion dans le Compagnonnage et en Franc-Maçonnerie
Dans le compagnonnage on y voit « le triangle divin construit » présentant ainsi quatre triangles équilatéraux.
Puis on va le retrouver en Franc-Maçonnerie au grade de Compagnon avec la pierre cubique à pointe, que nous avons vu sur le tableau de loge du Compagnon.
Or cette pierre cubique, dite « à pointe », en fait un cube surmonté d’un pyramidion, est aussi parfois représentée surmontée d’une hache.
Une hache sur un pyramidion de pierre ?
Mais n’est-il pas vrai que l’on peut y voir une forme architecturale bien souvent représentée dans l’art roman ? En particulier dans les clochers :
Elle nous montre un élément cubique en pierre, surmonté d’un pyramidion présentant quatre faces de tuiles ou d’ardoises ou de minces dalles de pierres (de lauzes), comme ici ce clocher dans la vallée du Vaucluse[14], ces dernières évidemment posées sur les quatre faces d’un pyramidion en bois ?
De la sorte le pyramidion ou ce « Delta construit » des Compagnons constructeurs surplombe le temple cubique tel celui de la Jérusalem céleste, dans lequel résonne la voix du Grand Architecte.
Chez les kabbalistes
Les diverses représentations du Delta sont issues de ce que l’on appelait l’étoile ou bouclier Magen David de David ou plus tard le sceau de Salomon, probablement inspirée des yantras indiens et dont la première apparition eut lieu sur un sceau hébraïque à Sidon (septième siècle avant notre ère).
Mais la plupart du temps les kabbalistes utilisèrent le triangle seul ou entouré de cercles.
Sur ce diagramme provenant du Séfer Yetsirah, Livre de la formation (provenant de Babylone vers le VI° siècle), on voit la Tétractys pythagoricienne (1+2+3+4=10) transposée avec les lettres du Tétragramme donnant un nombre de 72.
Le Tétragramme YHVH, l’hébreu s’écrivant de droite à gauche on lit hwhy soit : Yod y 10, Hé h 5 Vav w 6 Hé h 5
Soit à partir du sommet du Delta :
10 + 15 + 21 + 26 = 72
Les lettres aux trois angles du triangle sont en rapport avec les trois éléments :
Le Alef au sommet a Air ; à la base à droite le Mem m Eau ; à la base à gauche le Shin c Feu.
Les sept lettres dans le premier cercle les sept planètes
Elle se suivent dans le sens contraire des aiguilles d’une montre :
En commençant par le Beith b la Lune (en haut au-dessus du aleph a), Guimel Mars, Daleth le Soleil, Kaph Vénus, Pé Mercure, Reish Saturne et Tav Jupiter
Et enfin douze autres lettres en rapport avec les signes du zodiaque. En commençant à gauche par le Hé h en correspondance avec le Bélier.
Toutes ces correspondances se trouvant dans le Sefer Yetsirah
Comme en Inde les cinquante lettres de l’alphabet sanskrit, les vingt-deux lettres de l’alphabet hébraïque participent à la création du monde et à son organisation.
Retournons dans le temple maçonnique
Il est présent dans les loges bleues, soit dans les trois premiers degrés des différents rites.
Puis à différents degrés.
Au RER il est le bijou du quatrième grade
Au REAA, dans plus de la moitié des trente-trois degrés. Présents d’une manière ou d’une autre, dans le décor de la loge, en bijou, sur le cordon.
Ainsi par exemple :
Au 4ième Maître secret, i l est présent dans un cercle dans le cartouche à l’Orient avec l’Etoile à cinq branches en son centre.
Au Royal Arche 13ième Il est doublement présent, d’abord dans le décor affiché au mur à l’Orient puis retrouvé dans les souterrains du temple détruit : c’est le bijou d’Hiram un triangle d’or marqué du Tétragramme.
Il est doublement représenté au 27ième Souverain Commandeur du Temple : Deux Deltas rayonnant encadrent une étoile à cinq branches : L’un porte le Tétragramme hébraïque, l’autre la lettre J, mis pour le I première lettre de INRI.
Quant aux trois derniers degrés leur numéro 31, 32 ou 33 s’inscrit sur un Delta placé sur le cordon du grade.
De plus sur le cordon le symbole présente le Delta avec les symboles du grade
Deux poignards pour le 31ième deux épées pour les 33ième
les rayons sont d’or et les épées d’argent.
[1] Il est donc formé de trois angles de 120°
[2] Eratosthène, Le Ciel Mythes et histoire des constellations Nil éditions
[3] Marcus Manilius, Les astrologiques
[4] Eratosthène compte à partir de la planète la plus haute Saturne
[5] A cause de la composition du mouvement réel de la Terre autour du soleil ainsi que celui des autres planètes celles-ci paraissent décrire des courbes sinueuses compliquées dans le ciel tout en restant proches de l’écliptique.
Ainsi Jupiter fait onze boucles en onze ans faisant la douzième sur la première Saturne 28 en 29 ans. La figure est tirée de l’Astronomie populaire de Camille Flammarion, 1880.
[6] Hyginus Bibliothécaire d’Auguste De Astronomia Les Belles Lettres
[7] Hyginus d°
[8] Hyginus d°
[9] L’autre se trouvant au nord entre les Gémeaux et le Taureau.
[10] Aratos les Phénomènes
[11] Les trois-cent-soixante monomères sont des images représentant chacune n degré du zodiaque.
[12]. In La voie du Tantra Ajit Mookerjee et Madhu Khanna. Seuil
[13] En fait un héron cendré oiseau migrateur regagnant l’Egypte lors de l’inondation
[14] Clocher de l’abbaye de Sénanque (XII°/XIII° siècle). Gordes, Vaucluse.