Ce titre évoquant à la fois le mystère de la fraternité et la révélation des clés essentielles que l’ouvrage explore. Il invite le lecteur à découvrir les origines et les enjeux de cette notion fondamentale. Entrons donc, pour notre plus grand profit et plaisir dans Le droit de choisir ses frères ?-Une histoire de la fraternité (Gallimard, coll. « Bibliothèque des Idées », 2023) d’Alexandre de Vitry.
Dans cet ouvrage, l’auteur entreprend une exploration approfondie de la notion de fraternité, troisième pilier de la devise républicaine française. Constatant le manque de connaissances approfondies sur ce concept, comparativement aux notions de liberté et d’égalité, Alexandre de Vitry vise à combler cette lacune. Il offre une analyse historique et littéraire de l’évolution de la métaphore fraternelle dans la culture française, depuis la Révolution jusqu’à l’époque contemporaine.
Un livre structuré en deux parties principales, dédié à l’exploration de la notion de fraternité dans le contexte historique et littéraire français. Et l’avant-propos de commencer avec la désormais célèbre apostrophe de Ségolène Royal « Fra-ter-ni-té ! Fra-ter-ni-té ! » qui reste pour beaucoup comme un appel puissant à l’action et à la cohésion sociale. Cela montre aussi comment la fraternité, bien qu’étant un principe plus difficile à définir et à mettre en œuvre que la liberté ou l’égalité, est une composante cruciale de l’idéal républicain et démocratique.
Alexandre de Vitry introduit ses objectifs, sa méthodologie et l’importance de l’étude de la fraternité à travers les âges.
Dans un premier temps, avec « Histoire conceptuelle de la fraternité », l’auteur aborde l’étymologie du terme et examine comment la fraternité a été représentée métaphoriquement au fil du temps, en suivant son évolution conceptuelle depuis ses origines. Il traite bien évidemment de la période révolutionnaire française, où la fraternité était une revendication politique majeure, en tension entre l’idéal de solidarité et les violences de l’époque. Puis déroule comme dans une frise avec « La vie c’est la fraternité (1830-1848) » les développements de la fraternité pendant la monarchie de Juillet et les événements révolutionnaires de 1848, où les valeurs fraternelles étaient peut-être perçues comme un remède aux troubles sociaux.
Dans seconde partie, intitulée « Après la fraternité, la littérature », la thématique est analysée à travers le prisme de nos grands auteurs. Avec « Hugo ou Baudelaire : la fraternité scindée », Alexandre de Vitry examine comment Victor Hugo et Charles Baudelaire ont représenté la fraternité, possiblement en contraste, reflétant les divisions au sein de la société et des perspectives individuelles sur la solidarité et l’isolement. Il se concentre sur l’écrivain Charles Péguy, en utilisant “borderline” dans son « Frère seul : Péguy borderline », signalant les approches marginales ou les conflits intérieurs relatifs à la notion de fraternité dans son œuvre.
Enfin, le « Le XXe siècle a-t-il aboli la fraternité ? » questionne la pertinence de la fraternité au siècle dernier, période marquée par des conflits majeurs et des transformations sociales qui pourraient avoir remis en question ou redéfini ce concept. Finalement,
Il propose donc un beau parcours qui tisse à la fois l’histoire et la littérature, en mettant en lumière comment des figures comme les socialistes utopiques, Charles Baudelaire, Victor Hugo, Charles Péguy, Romain Gary, et d’autres, ont contribué à façonner et à réinterpréter la notion de fraternité. En choisissant un titre emprunté à Baudelaire, Alexandre de Vitry souligne l’importance des contradictions et des ambiguïtés qui entourent cette notion, reflétant la complexité des relations humaines et des idéaux sociétaux.
Cette référence symbolise la manière dont les concepts de fraternité ont évolué dans notre culture, passant de la fraternité révolutionnaire, imprégnée d’idéaux politiques et sociaux, à une conception plus large et plus nuancée de la fraternité… comme celle que l’on peut trouver dans les œuvres du poète. Ce dernier, à travers ses poèmes, explore souvent les thèmes de l’isolement, de l’amour, de l’ennui, et de la quête de beauté, offrant ainsi un terrain fertile pour réfléchir aux différentes façons dont les individus peuvent se choisir mutuellement comme “frères” dans un sens spirituel ou émotionnel.
La démarche de l’auteur n’est pas seulement de retracer l’histoire de la fraternité mais aussi de questionner son application et sa pertinence dans le cadre des sensibilités actuelles. L’auteur invite donc à une réflexion sur les implications pratiques de cet idéal dans la société contemporaine. Sans doute aussi, l’occasion d’ouvrir un débat public sur les valeurs républicaines…
Alexandre de Vitry pose donc les bases pour un dialogue enrichi sur les moyens de vivre ensemble dans notre société de plus en plus diversifiée.
Rappelons que l’auteur, normalien et agrégé de lettres modernes, enseigne à l’université Paris-Sorbonne. Son parcours académique et professionnel le positionne avantageusement pour aborder une étude aussi vaste et complexe. Alexandre de Vitry, ayant déjà exploré les contours de la pensée contemporaine dans son essai sur « L’invention de Philippe Muray (Carnets Nord, 2011) apporte une perspective critique et éclairée sur la fraternité, en se fondant sur une solide connaissance de la littérature française.
Avec ce dernier opus, Alexandre de Vitry réalise une étude magistrale qui enrichit la compréhension de la fraternité. Cet ouvrage s’impose comme une lecture essentielle pour quiconque s’intéresse à la littérature, à l’histoire, et aux idéaux qui façonnent notre société.
Le droit de choisir ses frères ?-Une histoire de la fraternité
Alexandre de Vitry – Gallimard, col. « Bibliothèque des Idées », 2023, 448 pages, 24 €/EAN : 9782073008084 – Disponible chez DETRAD.
Mais aussi dans toutes les bonnes librairies de France et de Navarre.
Achetez dans votre zone, chez votre libraire préféré, pour qu’il continue à vous conseiller, vous inspirer, vous faire rêver et, surtout, à animer votre quartier !
Le droit de choisir ces frères ? Curieuse revendication : on choisit ses amis, pas ces frères !!! La fraternité résulte d’un “vivre ensemble” qui se tisse, se solidifie , s’amplifie mais parfois aussi malheureusement qui peut s’étioler ; du vivre ensemble on passe au vivre cote à cote , voire pire encore ; mais je paraphrase peut être ce livre que je n’ai pas encore lu.