La présentation de l’éditeur
Un extrait de la préface de Yasmina Khadra : « Les voies de la nature humaine sont aussi impénétrables que celles du Seigneur. Le cheminement que nous trace Sarah Oling, dans ce livre, s’inscrit dans cette quête récurrente jalonnée de prophéties tantôt éclairantes, tantôt enténébrées, mais inéluctablement nécessaires à l’équilibre des êtres et des choses.
Zoltan est l’histoire des mémoires outragées lorsque, ne sachant distinguer la damnation de la Révélation, l’humanité perd de vue ses cailloux blancs tandis que l’ange et le démon, qui officient en nous, se livrent un combat qui remonte à la nuit des temps dont l’aube est constamment remise à plus tard. »
La biographie de l’auteur
Sarah Oling est née de parents exilés, à l’histoire fracturée. Ses grands-parents maternels étant les seuls survivants d’un chaos qui détruisit non seulement des vies, mais des pans entiers d’une culture. Il lui fallut très tôt grandir en tout en étant privée de repères conventionnels. Autrice, dramaturge, comédienne de théâtre, conférencière, journaliste de radio et de presse écrite, Sarah Oling a multiplié nombre d’expériences où la transmission, toujours, a tenu une place centrale. Autant d’engagements qui rendent sa parole forte et vibrante. Zoltan a été qualifié de roman “riche et puissant” et marque une rupture dans le parcours d’écriture de Sarah Oling. Ce récit est peut-être son livre le plus abouti, le plus personnel.
[NDLR : Quel bonheur de présenter un ouvrage le jour de sa sortie nationale en librairie. Et qui plus est le dernier opus de Sarah Oling. Un roman. Mais pas n’importe lequel ! Après déjà trois romans et un ouvrage d’entretiens, pour son cinquième et dernier opus, Sarah Oling nous offre un roman initiatique. Où deux jeunes héros, Mathias Léna, jumeaux, évoluent à travers une série d’épreuves et de découvertes qui les conduisent finalement à une meilleure connaissance de soi et du monde. Un beau voyage ou une quête au cours de laquelle les personnages vivent des aventures qui le mettent au défi, le confrontent à de nouvelles réalités et le forcent à surmonter des obstacles. À travers ces expériences, les personnages acquièrent une nouvelle maturité, une nouvelle philosophie de vie ou atteint un nouvel état de sagesse…
Pour la petite histoire, Sarah et moi nous nous étions rencontrés grâce à Évelyne Penisson des éditions du Cosmogone que nos lecteurs connaissent bien avec sa magnifique et magique revue MATIÈRES à penser (MAP), à l’occasion d’une journée du livre dans un joli petit village de la région lyonnaise. Il y a vingt déjà !
Et comme le monde est petit, nous nous sommes retrouvés aux Rencontres Culturelles Maçonniques de Lyon 2023, 14e Salon Lyonnais du Livre Maçonnique.
Disons-le tout de suite, Zoltan est sans doute aussi un roman maçonnique. Pourquoi ?
Si le roman maçonnique est une œuvre de fiction qui incorpore des thèmes, des symboles et des philosophies associés à l’art royal, avec des personnages vivant des aventures ou résolvant des mystères en utilisant leur connaissance des enseignements maçonniques, exploitant également différentes théories du complot ou faisant allusion à des mystères autour de l’influence supposée des maçons dans divers événements historiques, reconnaissons que Zoltan, comporte nombre d’ingrédients figurant ce type de roman…
Revenons sur le parcours de Sarah Oling
Sarah Oling est une auteure, dramaturge, comédienne et journaliste. Zoltan décrit notamment une quête récurrente jalonnée de prophéties, parfois éclairantes, parfois obscures, mais toujours indispensables à l’équilibre des êtres et des choses.
D’autre part, nous devons à la talentueuse Sarah Oling une pièce intitulée « Dieu riait ? » et mise en voix pour la première fois au Festival National de théâtre Contemporain Amateur de Châtillon-sur-Chalaronne en octobre 2020 par le metteur en scène Alain Bourbon, en présence de Jean-Paul Alègre et de Catherine Terzieff, mais aussi une autre œuvre théâtrale intitulée « Partie d’échecs contre Stephan Zweig ».
Son roman Pour un peuple d’oiseaux a été salué pour avoir donné une nouvelle signification à la métaphore de la liberté, soulignant son talent pour l’écriture fiévreuse depuis le début de sa carrière.En tant que comédienne et metteur en scène, elle est décrite comme une porteuse de mémoire, un thème récurrent dans ses œuvres qui suggère un engagement profond dans la préservation et la transmission de l’histoire et des récits personnels.
En plus de son travail littéraire et théâtral, Sarah Oling est cocréatrice de « Consciences en Convergences », un acte artistique centré sur la transmission des mémoires des génocides par l’écrit, ce qui indique un engagement dans des sujets de portée historique et sociale.
Nous lui devons aussi Tes absents tu nommeras… (L’Harmattan, Coll. Écritures, 2013) et, préfacé par Gérard Collomb, Entre Orient et Occident-De la complexité du monde – Entretiens avec Paul Amar, Raymond Barre, André Chouraqui, Alain Jakubowicz (L’Harmattan, 2013), un ouvrage regroupant une douzaine d’entretiens de l’auteur avec des hommes, journalistes, politiques ou artistes, qui se sont exprimés sur des sujets majeurs, tels que la problématique du Proche-Orient ou le pouvoir de l’image et dont les paroles ont traversé le temps sans l’altérer. Ils laissent entrevoir des facettes peu ou pas connues de leur personnalité ou de leur histoire personnelle. Lire un extrait.
Enfin, Zoltan, qui évoque ce prénom masculin hongrois avec comme origine le turc ancien sultan « dirigeant, prince », se voit préfacé par une figure emblématique. L’écrivain algérien de renom Yasmina Khadra, de son vrai nom Mohammed Moulessehoul. Le prolifique écrivain algérien, qui a choisi un pseudonyme féminin pour éviter la censure de l’armée algérienne, où il a servi jusqu’en 2000, vient d’ailleurs de voir, à un mois d’intervalle, adapter deux de ses romans Les sirènes de Bagdad et Ce que le jour doit à la nuit en bande dessinée, tous les deux aux Éditions Philéas.
Dans cette préface, Yasmina Khadra décrit le livre comme une quête jalonnée de prophéties, alternant entre éclaircissement et obscurité, mais toujours essentielles à l’équilibre du monde. Il évoque le récit comme étant celui de mémoires indignées, où l’humanité, perdue entre damnation et révélation, oublie ses repères tandis qu’un combat éternel se joue en elle, entre l’ange et le démon. Yasmina Khadra est reconnu pour ses romans qui explorent souvent la condition humaine face à des circonstances historiques et sociales difficiles, et sa participation à la préface de Zoltan indique son appréciation pour les thèmes profonds abordés par Sarah Oling dans son œuvre.
Dans sa préface, Yasmina Khadra emploie les termes de « damnation de la Révélation ». Des mots qui pourraient être interprétés comme un paradoxe ou une antithèse, où damnation représente une condamnation éternelle ou une punition sévère et Révélation fait référence à une prise de conscience profonde ou à une vérité divine mise au jour.
Le nom Zoltan évoque ce prénom masculin hongrois avec comme origine le turc ancien sultan « dirigeant, prince ».
Ce qui, d’entrée dans le prologue, nous a immédiatement séduit, c’est que l’action débute sous le tympan de l’abbatiale Sainte-Foy de Conques, à l’architecture remarquable pour son style roman, particulièrement exemplifié par son tympan du Jugement dernier. Conques, célèbre pour son trésor, qui est l’un des plus riches de France, est un important site de pèlerinage sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle (la Via Podiensis).
Des rencontres ? Mathias en fait une en croisant notamment Madeleine. Où l’on parle grimoire et Tarot de Marseille, un des standards de jeu de cartes utilisés pour la divination, connu pour ses images symboliques et ses archétypes riches en signification. Avec, parmi les 78 cartes, ses arcanes majeurs (22 cartes) comprenant des cartes telles que Le Bateleur, La Papesse, L’Impératrice, et L’Hermite, chacune portant un numéro et une image symbolique…
D’un autre côté, Léna, sa sœur jumelle, qui elle se trouve à Cracovie, située en Pologne et souvent perçue comme une ville enveloppée de mystère et d’histoire, ayant une forte identité culturelle.
Cracovie, la mystique, a une longue histoire associée à la spiritualité.
Cracovie, l’ésotérique, avec ses légendes et ses contes parlant de magie et d’alchimie où Nicolas Flamel y est parfois associée, bien que sa présence ne soit pas historiquement prouvée.
Cracovie, l’historique, car elle est l’une des plus anciennes et des plus importantes villes de Pologne. Cracovie, la mystérieuse, car ses histoires sont souvent empreintes de mystère et de légendes…
Mais comme lieu mythique, il nous faut citer aussi ce Vieux Lyon, bien connu de l’auteure, où l’action se déroule. En paraphrasant « Ainsi soit-il » de Louis Chedid – il emploie les termes de « L’action se déroule dans ta ville » – , la capitale des Gaules n’est que légendes et mystères résultant de son long passé qui remonte au Moyen Âge (traboules, arrêtes de poisson, La Maison du Chamarier hanté par cet officier d’église, fantômes et esprits, alchimie, la Tour Rose et son lot d’histoires d’amour tragiques et de mystères non résolus, la cathédrale Saint-Jean, où se trouvent des légendes liées aux vitraux et aux gargouilles, etc.).
« Ainsi soit-il » est d’ailleurs le titre d’un chapitre de Zoltan ; clin d’œil de l’auteure ? Qui sait…
Mais c’est aussi sur le personnage central, titre du roman, Zoltan, qu’il nous faut s’arrêter. Un personnage pervers et manipulateur est marqué par un manque d’empathie et de remords, incapable de se connecter avec les autres sur le plan émotionnel. Un impulsif, sans culpabilité ni remords pour ses actes et méprisant de leur bien-être. Et se croyant supérieur aux autres tout en tirant du plaisir à causer de la douleur ou de l’inconfort chez autrui, adoptant aussi des comportements sadiques.
Zoltan est, qui plus est, un grand manipulateur, influençant les autres, ses marionnettes, à son avantage, dépens de ceux qu’il manipule. Maître dans l’art de la duplicité, capables de tisser des réseaux de tromperie, orchestrant les événements en coulisse, tirant les ficelles sans que son implication ne soit évidente. Tel est Zoltan qui utilise tous les stratagèmes : un être charismatique utilisant son charme pour attirer et gagner la confiance des autres ; éprouvant une compréhension aiguisée des émotions d’autrui qu’il utilise pour déterminer comment les influencer ou les contrôler, etc.
Ce roman est une véritable quête initiatique offrant une série d’épreuves et d’expériences qui mènent à un type de révélation ou de transformation personnelle. Il s’articule autour de l’évolution de Mathias et Léna, qui acquièrent de nouvelles connaissances, compétences ou une nouvelle compréhension du monde et d’eux-mêmes. Nous y trouvons voyage, épreuves, transformation, enseignements, révélations,
Sans compter sur la forte symbolique des mots et noms choisis par Sarah Oling.
À commencer par Némesis – le nom du chien – qui, dans la mythologie grecque, est la déesse de la rétribution et de la vengeance. Son nom signifie “celle qui distribue ou qui fait payer”, et elle est souvent décrite comme apportant le juste châtiment à ceux qui succombent à l’hybris (l’orgueil ou l’arrogance devant les dieux). Elle est parfois considérée comme une force d’équilibrage dans l’univers, s’assurant que ni les humains ni les dieux ne gagnent trop en pouvoir ou en chance.
Le choix des termes « Le voile d’Isis », souvent utilisée pour décrire un voile métaphorique qui cache une sorte de vérité ou de connaissance, particulièrement dans un contexte mystique ou ésotérique. L’expression trouve ses racines dans la mythologie égyptienne ancienne où Isis était une déesse possédant un savoir secret et était souvent représentée voilant son visage pour signifier le mystère et la sagesse cachée. Gardons à l’esprit que dans nos traditions ésotériques occidentales, « lever le voile d’Isis » peut symboliser la quête de la connaissance cachée ou la révélation de vérités qui sont au-delà du domaine matériel. L’auteure nous parle aussi de Grand Œuvre, d’Or, d’Argent et de Mercure.
La référence ensuite à Oswald Wirth (1860-1943), occultiste et écrivain suisse connu pour ses contributions à la franc-maçonnerie et à l’étude des tarots. Il a été un élève de Stanislas de Guaita et est souvent reconnu pour sa création du Tarot de Wirth, qui est une adaptation des cartes de tarot utilisées pour la divination. Wirth a été un des premiers à suggérer que les Tarots contiennent une sorte de sagesse primordiale et a développé un jeu de tarot qui reflète sa compréhension de la symbolique ésotérique et Le Tarot des Imagiers du Moyen Âge reste un ouvrage majeur avec ceux écrits sur l’ésotérisme et la symbolique maçonnique.
Et l’emploi du prénom Madeleine ne fait-il pas référence à celui de Marie-Madeleine, figure importante dans le Nouveau Testament ? Mentionnée dans les quatre évangiles canoniques comme une disciple fidèle de Jésus-Christ, Marie-Madeleine est souvent considérée comme la première à témoigner de sa résurrection. Dans l’Évangile selon Jean (20:1-18), c’est à Marie-Madeleine que Jésus apparaît en premier après sa résurrection. Elle ne le reconnaît pas tout de suite ; pensant qu’il est le jardinier, elle lui demande où le corps a été emmené. Cependant, quand il l’appelle par son nom, elle le reconnaît et s’exclame en hébreu « Rabbouni ! », qui signifie « Maître »… en réalité un diminutif de « Rabbi », mot hébreu signifiant le « docteur ».
Et puis, quelles est cette société mystérieuse nommée « Confrérie des fils d’Hiram » ? Quels sont ces vestiges du Temple de Salomon ? Qui sont ces personnages comme le bâtisseur déchu Joseph Capelette, Irina et d’Aurélien de Veuveselle ?
Avec des allusions aux volatiles quand « trois corbeaux survolent le corps de ferme » ou « deux coqs du refuge » ou encore au phoenix, oiseau qui se consume par le feu et renaît de ses cendres. Il est un symbole de renaissance, d’immortalité et de renouvellement éternel.
Si l’ouvrage s’ouvre sur, dans l’Aveyron, sur le village de Conques, enchâssé dans un site admirable, en forme de ‘’conque’’, du latin concha, coquille – village qu’avait choisi l’ermite Dadon pour se retirer du monde au VIIIᵉ siècle – c’est avec lui que s’achève el roman. La boucle – cercle fermé tout comme l’ouroboros – est bouclée.
Par ailleurs, Guylian Dai, directeur des Éditions Fables Fertiles et Sarah Oling étaient présents au salon des éditeurs indépendants l’autre LIVRE du 10 au 12 novembre derniers .
Sarah Oling y présentait et dédicaçait, en avant-première, son nouveau roman Zoltan,à paraître le 16 novembre prochain. L’auteure y a donné également, samedi 11 à 17h, une conférence-débat qui a rencontré un vif succès.
Les éditions Fables fertiles
Il d’usage lors d’une première chronique d’un éditeur de le présenter. Nous ne pouvons donc déroger à cette tradition…
« Les éditions Fables fertiles sont nées en 2022, dans un contexte de crise sanitaire, sociale et politique durable, avec cette conviction, chevillée, que le récit ; le conte ; la fable ; l’anticipation ; l’utopie, irréductibles à des fictions narratives distrayantes si elles savent l’être, se doivent de donner forme.s, et réfuter tout à la fois, en toute sédition, la seule idéologie d’un temps présent voulu figé par quelques-uns.
Bercées par un refus d’être sur la défensive, les voix vers des lendemains meilleurs doivent se porter et nous porter vers le voyage, vers les détours et les détournements, vers les dévoilements, rêvés, s’offrir en partage afin de co-créer un monde d’aujourd’hui aujourd’hui ; un monde recélant demain, un demain changé. » Pour découvrir leur ligne éditoriale.]
Zoltan
Sarah Oling – Préface Yasmina Khadra
Éditions Fables fertiles, 2023, 192 pages, 18,90 €
Avec Lyon Éco & Culture, découvrez le YouTube de Sarah Oling et de son éditeur Guylian Dai nous parlant de Zoltan.