sam 27 avril 2024 - 23:04

L’extrême droite et ses symboles, “pour conquérir le territoire de la pensée”

De notre confrère actualitte.com – Par Antoine Oury

La montée internationale des mouvements d’extrême droite s’accorde avec une légitimation des discours racistes et fascistes, du « Grand remplacement » à la stigmatisation de certaines populations, qui s’entend dans les médias, auprès des responsables politiques et même au Parlement. Elle s’entend et elle s’observe : des symboles ou gestes symboliques se multiplient aussi dans l’espace public. Le site Indextreme recense, analyse et explique ces manifestations graphiques, pour mieux les identifier.

ActuaLitté : Comment est né ce projet ? Combien de temps avez-vous travaillé dessus avant sa mise en ligne ? A-t-il vocation à évoluer, à s’enrichir ?

Geoffrey Dorne et Ricardo Parreira : Bonjour et tout d’abord un grand merci de prendre le temps d’échanger, de nous lire et de comprendre ce projet d’importance graphique et politique ! Ce projet est né très simplement d’une rencontre entre le designer Geoffrey Dorne et le photojournaliste Ricardo Parreira. Depuis quelques années, Geoffrey avait pour ambition de répertorier, sous la forme d’un outil numérique, les symboles liés au fascisme, à l’extrême droite, notamment sur les affiches, les tatouages, dans l’espace public.

De son côté, Ricardo travaille depuis longtemps en tant que journaliste et publie du contenu sur ce sujet au travers de différents médias. Geoffrey a donc tout naturellement contacté Ricardo pour lui présenter les maquettes de son projet et Ricardo, quant à lui, a répertorié, rédigé, sourcé le contenu. Tous les deux ont ainsi vu naître, de plusieurs mois de travail, ce projet : indextreme.fr

Le site s’enrichit chaque semaine de nouveaux symboles qui sont analysés, répertoriés, sourcés, redessinés et enfin intégrés sur le site Internet.

Les symboles de l’extrême droite datent-ils tous de l’époque moderne ? Sont-ils aussi vieux que l’extrême droite elle-même ?

Geoffrey Dorne et Ricardo Parreira : Ce que l’on explique sur le site Internet, c’est que l’extrême droite n’a « inventé » que très peu de symboles à proprement parler. Cependant, elle est une véritable machine qui instrumentalise l’image et sa symbolique… et donc l’imaginaire des gens. 

Nous avons créé plusieurs infographies, précisément pour expliquer l’origine historique de certains symboles qui se trouvent sur le site et leur récupération par des mouvements d’extrême droite à partir de 1945. Lorsque nous étudions ces symboles, nous pouvons facilement conclure que l’extrême droite les récupère puisque ceux-ci portent en eux-mêmes une très forte charge identitaire et nationaliste.

Avez-vous observé des points communs dans l’expression graphique de l’extrême droite ? À l’inverse, des « tendances » de l’imagerie d’extrême droite existent-elles selon les époques, les « courants » ?

Geoffrey Dorne et Ricardo Parreira : Graphiquement, l’extrême droite réemploie et détourne avant tout des symboles dont la charge émotionnelle est forte : la tête de mort, l’aigle, l’engrenage, le feu, etc. Elle le fait également sur des symboles historiques puissants comme la croix de Lorraine, la fleur de lys, ou bien des symboles catholiques. Il n’y a donc pas de tendance esthétique à proprement parler, mais bel et bien un ensemble d’expressions graphiques variées qui permet à l’extrême droite d’essayer de servir idéologiquement son discours auprès de la sensibilité de chacun : que ce soit sur ses origines, son patrimoine historique, sa religion, son discours politique originel, etc.

L’extrême droite française s’inspire aussi des symboles de son époque avec, par exemple, des personnages de comics (le Punisher, Captain America, etc.), des logos venant de la musique (Run-D.M.C.) ou encore de la mode (the North Face, etc.). Avec cette stratégie, son objectif est de faire plus facilement partie du paysage visuel et intellectuel contemporain.

Le crâne du Punisher, personnage des comics Marvel, sur la voiture d’un soutien de Donald Trump, en 2021 (illustration, Gilbert Mercier, CC BY-NC-ND 2.0)

Les symboles de l’extrême droite sont-ils interchangeables selon les pays ? L’idéologie d’extrême droite semble en effet la même d’un pays à l’autre, qu’en est-il de ses expressions graphiques ?

Geoffrey Dorne et Ricardo Parreira : Aujourd’hui, l’extrême droite dispose d’un énorme réseau, et ses membres communiquent et organisent des rencontres entre eux. Comme nous l’expliquons sur le site indextreme.fr, de nombreux symboles utilisés en France proviennent des États-Unis, d’Angleterre, d’Allemagne, d’Espagne, d’Italie, etc. D’autres éléments comme le « grand remplacement », théorie créée par le fasciste Renaud Camus, parcourent le monde, et servent à justifier certains attentats terroristes.

Quand on parle de sémiotique et de graphisme, il est important de comprendre qu’avant le symbole, il y a l’idée et sa charge émotionnelle. On retrouve ainsi dans chaque symbole, des valeurs et dans ce contexte, des anti-valeurs. C’est pourquoi aujourd’hui encore, un large éventail de symboles nazis sont utilisés sans vergogne par l’extrême droite et cela inclut divers partis politiques en Europe.

L’idéologie d’extrême droite s’appuie sur un retournement du discours, la manipulation et le mensonge : diriez-vous que son expression graphique actionne les mêmes leviers ?

Geoffrey Dorne et Ricardo Parreira : Le problème réside dans le fait que la symbolique choisie par l’extrême droite pour composer leurs logos, drapeaux, autocollants, etc., est, si on peut le dire ainsi, critiquable d’un point de vue historique. Puisque pour la plupart, des symboles, avant d’être récupérés, représentent déjà des valeurs religieuses, conservatrices, issues de l’idéologie impérialiste, colonialiste, raciste, etc. Il n’y a pas besoin « d’actionner les mêmes leviers », car ce qui est recherché dans ces symboles est généralement déjà présent. 

(illustration, Pierre-Selim, CC BY-SA 2.0)

L’expression graphique de l’extrême droite donne l’impression de s’appuyer sur deux mouvements : rendre visible, d’un côté, et, de l’autre, dissimuler, à l’aide d’un système de code connu seulement par les initiés. Est-ce l’intention que vous avez mis au jour par vos recherches ? Quelles sont les finalités de ces symboles, pour faire simple ?

Geoffrey Dorne et Ricardo Parreira : Ces groupes d’extrême droite, néo-nazis, néo-fascistes, identitaires, etc., cherchent à banaliser leur idéologie et augmenter leurs rangs. Quoi de mieux, que de réutiliser les symboles historiques, qui touchent directement notre identité, donc une partie du « récit national », touchant les idéaux nationalistes, pour réveiller l’empathie de la population. 

Concernant le graphisme de certains de ces symboles, ils sont en effet parfois dissimulés, discrets ou réservés aux initiés, à ceux qui savent les identifier  (le symbole lambda, l’odal, le geste OK ou le kuhnen par exemple). Cela renforce la cohésion, le groupe et la sensation de « faire partie de ceux qui savent » afin de commettre des actions illégales et violentes.

Pour faire simple, ces symboles sont là pour conquérir le territoire de la pensée, des imaginaires et créer aussi de la confusion au sein des citoyens. Si un symbole vous est précieux et que vous découvrez qu’il est en train d’être détourné et réapproprié par l’extrême, qu’allez-vous faire ? Ne plus l’utiliser ? Adhérer à la pensée fasciste que l’extrême droite tente d’imposer ? Ignorer que tout cela existe ? Vous battre pour reconquérir votre symbole ? 

C’est aussi pour que chacun puisse se poser ces questions que nous avons créé indextreme.fr

Voire également leur Infographie des symboles nazis : 

Photographie : manifestation de militants de l’extrême droite russe à Moscou, le 4 novembre 2017 (Matthias Berg, CC BY-NC-ND 2.0)

6 Commentaires

  1. Bonjour,
    Vous écrivez que “l’extrême droite dispose d’un énorme réseau”. Sur quoi vous basez-vous pour l’affirmer ? Quelles études ? Quelles sources ?
    J’habite dans un département où MLP est arrivée 4ème aux dernières élections présidentielles, bien en deçà de sa moyenne à l’échelon national. Pourtant les habitants sont très attachés à leur langue, leurs coutumes, leur récit “local”, leur histoire, leur gastronomie. Comment et pourquoi faites-vous le lien entre cette façon d’être et l’extrême droite ? A partir de quels indicateurs ? Quels sont les éléments qui vous permettent de l’affirmer ?
    Au plaisir de vous lire.

  2. La démarche aurait pu être louable si elle ne partait pas dans tous les sens…
    Je relève que :
    – n’importe quel symbole est d’extrême droite, du moment qu’il est associé à un discours considéré comme d’extrême droite. On y arrive à se retrouver avec tout et n’importe quoi…
    – le « grand remplacement » est une théorie fasciste (sic) et d’extrême droite… et à gauche, où il est employé le terme de « créolisation » qui veut dire strictement la même chose, est ce donc également un terme d’extrême droite ?
    À moins d’avoir une poutre dans l’oeil, la population est bien en train de changer par le biais d’une immigration massive, et le constater, voir même le déplorer n’a rien « d’extrême droite » ou de « fasciste ».. selon le sens historique – et non progressiste – du terme du moins.

  3. Il a raison Gloubi Boulga, impossible de faire un pas à l’extérieur sans avoir un migrant devant, derrière, à gauche et à droite ! En tout cas, c’est ce que prétend l’extrême droite et c’est cru par des gens qui n’ont jamais croisé un migrant. MANIPULATION !

  4. Je croyais que la politique n’avait pas droit de cité dans la Franc Maçonnerie. Que vient faire cet article ici ?
    Je croyais que la Franc Maçonnerie avait pour objectif le développement de l’être humain dans ce qu’il a de plus noble : sa conscience. Les auteurs de cet article sont ils membres de la branche gauchiste du G.O ?

  5. Effectivement, cet article pourrait être écrit par Mélenchon ”frère” d’extrême gauche et islamogauchiste par nature, le plus grand péril pour les maçons est l’islamisme ! il ‘y a qu’a voir ce qui se passe aujourd’hui, comme disait le grand Jacques ”nous ne sommes pas du même bord, mais nous partageons le même port”, j’en arrive à me demander si nous partageons toujours le même port avec certains du G.O infiltré par cette gauche bien pensante et collaborationniste avec les les ”frères musulmans” ( sans majuscule) ?

  6. Ce genre d’article racoleur est grotesque.
    Il n’y a pas de référence à des études ou des chiffres sérieux.
    Des incantations de Jean Moulin de sous-préfecture.
    Quand j’entends parler du danger de l’extrême droite en France, je sais que j’ai affaire à un imbécile ou à un manipulateur.

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