Un remarquable ouvrage sous jaquette qui, tout en étant destinée à protéger un livre, nous offre aussi, dans un rabat d’un contre-plat de la couverture, six reproductions, sous des angles différents, de ce magnifique et extraordinaire chef-d’œuvre que nous devons à François Roux-François le Champagne, Compagnon menuisier du Devoir.
Une pièce exceptionnelle toujours exposée au sein de la Maison de l’Outil et de la Pensée Ouvrière, à Troyes, préfecture de l’Aube, en région Grand Est.
Commençons par remercier, ici et maintenant, auteurs et éditeur. Nous devons ce très beau livre aux Compagnons menuisiers du Devoir Patrice Boulenger, Patrice l’Île-de-France, Meilleur ouvrier de France (MOF),
Jean Droucheau, Jean L’Angevin et Emmanuel Kohn, Emmanuel le Parisien. Quant à la Librairie du Compagnonnage, qui répertorie plus de 10 000 titres, elle contribue, depuis 1951, au rayonnement des métiers du bâtiment, de l’industrie, du goût, des matériaux souples, de l’aménagement et de la finition.
C’est aussi une maison d’édition spécialisée qui produit des ouvrages sur les techniques, les métiers et le Compagnonnage. Nous lui devons déjà la seconde édition de la plaquette de 80 pages intitulée Le chef-d’œuvre de Roux François le Champagne-Compagnon Menuisier du Devoir, imprimée par les Assises Nationales du Compagnonnage du Devoir à Tours, Pentecôte 2005, dont la première édition date de 1958, imprimée, elle, par les presses de l’Imprimerie du Compagnonnage à Paris.
Dans sa préface, Christophe Cheutin, Christophe le Champagne, Compagnon menuisier du Devoir lui aussi, directeur et archiviste du Centre de la mémoire des Compagnons du Devoir à Angers, mais aussi directeur de la Maison de l’outil et de la pensée ouvrière à Troyes, en quelques lignes, confie que le livre est comme un hommage rendu au travail exceptionnel de François le Champagne et contextualise l’époque dans laquelle vit François le Champagne. Entre révolution de juillet 1830, dite des « Trois Glorieuses », et Second Empire, en 1852 lorsque Charles Louis Napoléon Bonaparte, dit Louis-Napoléon Bonaparte (1808-1873), premier président de la République française, devient le souverain Napoléon III, empereur des Français…
L’introduction nous rapporte comment François Roux, né en 1809 à Troyes, est sollicité pour relever ce défi. La construction d’un chef-d’œuvre, celui de toute une vie, faisant appel à des savoirs et des savoir-faire dans les domaines les plus variés. Ne doutons pas que ce grand professionnel qu’est François le Champagne devait être habile et apte à maîtriser toutes les bases de la géométrie.
L’introduction nous donne, en quelque sorte, la table des matières. Une première partie consacrée à l’histoire du chef-d’œuvre qui retrace le contexte du travail – pourquoi ce fit ce chef-d’œuvre – et apporte quelques éléments biographiques sur François Roux, sa vie et sa belle histoire qui ne fut cependant pas un long fleuve tranquille.
Les auteurs, afin de bien nous faire comprendre le contexte dans lequel le chef d’œuvre a été conçu s’attache à retracer les débuts du Compagnonnage : des condamnations royales prononcées contre les groupements d’ouvriers au XVIe siècle aux deux sociétés de Compagnon attestées dès 1677. Les Compagnons du Devoir ou devoirant, de confession catholique, et les gavots, d’autres sensibilités qui, à la fin du XVIIIe siècle, furent appelées du Devoir de Liberté. Toutes deux étaient cependant réglées par les us et coutumes du Tour de France.
En 1836, des Compagnons du Devoir de Marseille sollicite François Roux, âgé de 27 ans, pour réaliser un chef-d’œuvre. François Roux avait déjà, si jeune, une grande renommée et était connu sur le Tour de France pour ses grandes compétences et pour étudier le projet. Ce dernier accepta.
Puis une deuxième partie présentant une description technique du chef-d’œuvre abondamment enrichi de magnifiques illustrations ne peut que nous amener à un total émerveillement. Cet édifice centrée, une rotonde de plan hexagonal, mesure 1m70 de haut et s’inscrit dans un cercle de 90 cm de diamètre. Composé de 17 600 pièces, il est entièrement démontable par des assemblages souvent complexes. Aujourd’hui, nous dirions en paraphrasant une enseigne commerciale « Ni clou Ni vis » ! Presque toutes les essences exotiques employées à l’époque ont été utilisées pour sa réalisation. Pour bien comprendre ce chef d’œuvre, il est possible de distinguer, du bas vers le haut, cinq grandes parties constitutives, le socle, le corp bas, le corp beau, le dôme et le campanile.
Des photos réalisées par le Studio OG, agence de communication audiovisuelle basée à Troyes spécialisée dans la communication haut de gamme par l’image, à la suite de la seconde restauration en 2019. En vérité trois jours et l’aide de quatre Compagnons du Devoir ont été nécessaire pour réaliser près de 170 photos dédiées à la réalisation d’un ouvrage d’art sur cette œuvre », confie le photographe Olivier Gobert.
Le tout sous fond de réflexion sur la notion de chef-d’œuvre, sur le sens qu’a bien voulu lui donner François Roux. Un magnifique témoignage de transmission constituent la troisième et dernière partie. Les auteurs espèrent que la lecture nous enthousiasmera… Pari gagné, tel est le cas ! Une belle leçon de savoir-vivre et de savoir être. Une façon, nous aussi, d’aller à la rencontrer des valeurs fortes transmises depuis des générations de Compagnons : confiance, générosité, fraternité, dépassement de soi, mais aussi patience et exigence.
La dernière partie intitulée « Perspective historique et enjeux d’avenir » nous permet de mieux comprendre les usages et les techniques en vigueur. Une manière d’être au cœur même de tous ces chefs-d ‘œuvres. De ce travail de la main et de l’outil, mais n’en doutons pas guidé par l’esprit, les auteurs nous conduisent à mieux comprendre l’évolution technique du métier – est-elle vraiment un progrès humain ? Des histoires de chefs-d ’œuvres au chef-d’œuvre, devoir du Compagnon où matériel et spirituel s’assemblent, cette ultime partie nous invite à nous familiariser avec ce patrimoine culturel et immatériel de l’humanité qu’est le Compagnonnage. Les annexes nous transcrivent différentes lettres de François Roux.
Une lecture pour tous curieux de nature. De la belle ouvrage !
450.fm avait déjà consacré un article à François Roux intitulé “01/10/22 : Rencontre avec les Compagnons du Devoir et du Tour de France“
Le chef-d’œuvre de François Roux-François le Champagne, Compagnon menuisier du Devoir-Un manifeste et une encyclopédie en trois dimensions
par les Compagnons menuisiers et ébénistes du Devoir – Librairie du Compagnonnage, 2023, 220 pages, 56 €
Pour acquérir la plaquette “Le Chef d’œuvre De François Roux-Compagnons du Devoir” de 2005, à 8 €
Pour acquérir le beau livre de 2023
Visionner le film sur le chef d’œuvre de François Roux à la Maison de l’Outil et de la Pensée Ouvrière (MOPO) de Troyes (Prod : Studio OG/Réalisation : Olivier GOBERT/Images : Olivier GOBERT, Yoann LAFFOND)
Sources : Maison de l’Outil et de la Pensée Ouvrière (MOPO) ; Librairie du Compagnonnage, Studio OG