jeu 25 avril 2024 - 12:04

Des plénitudes au sacré maçonnique

La plénitude ! Voici ce qu’est capable de fournir la Voie maçonnique à celui qui parvient à se hisser, grâce à notre Voie, au sacré. La plénitude est l’intuition, la sensation intérieure. Elle vibre dans tous les esprits qui veulent y parvenir. Car tous les humanimaux (Daniel Béresniak) de notre meute pourraient l’atteindre, à force de travail et de nettoyage de leur petit moi. Oui, c’est proche de ce que Jung appelait l’inconscient collectif : Un vécu brumeux et vaporeux partagé par tous les humanimaux.

Il nous relie, dans nos chairs en fraternité de meute. Rien à voir avec les bien-être de nos façades, ignorantes, voire hypocrites, sans grande conscience de leur peinturlure. Une plénitude est cet état d’esprit, bien au-dessus de ces gags, appelés « conscience, raison, pensée » dont on sait depuis plus d’un siècle, qu’ils ne sont que valises creuses quand on les ouvre, dans des références humanistes obligées et dépassées.

 En fonction de la profonde croyance en ce que je résume en « Une spiritualité pour agir »., des Frères et des Sœurs, considèrent que ce ne sont que billevesées de bavardages et d’éruditions. Et pourtant, le sacré maçonnique se profile bien à l’horizon de la révélation spirituelle. Mais n’allons pas trop vite : Notre Voie fraie le chemin à quelques-unes de ce que les chercheurs patentés appellent effectivement les sept plénitudes. N’empêche, pour nous, Maçons, cela vaut vraiment le coup de se poser la question : Et si, effectivement, certaines conditions, sont en litanie, quelques plénitudes pourraient être matricées dans notre Voie. Je le crois. Mais avec un socle inébranlable, la fraternité, la vraie : celle qui relie les cœurs, certes mais, bien au-dessus et, au-delà, les esprits inconscients. Ce sont eux qui exhaussent certains humains les plus soucieux de vivre en silence leur condition enchâssée dans le grand vivant de la Nature. Dans l’accueil des « enfants de la Veuve » ? Pourquoi pas ? Mais qui est alors la Veuve. Une plénitude révèle.

 Les plénitudes humaines ne se déclinent pas toutes dans le rituel ; leur nombre laisse libre le choix du maçon. Les deux-trois plénitudes retenues par un initié sont aperçues émotionnellement mais restent vagues, intuitives, pour la plupart d’entre nous. Elles alimentent le désir sacré de la béatitude sans que nous y prenions une part consciente. . Elles sont peu vécues, ce sera pour plus tard peut être avec l’avènement de la Voie. Elles vêtent l’Un/Tout inaccessible dans la Voie, la béatitude fœtale, la toute réceptivité.

Gros plan sur les sept plénitudes humaines : La sécurité totale symbolisée par le Couvreur, la régression intra-utérine, la conjonction des opposés (l’androgynie est motivée par les deux colonnes, le soleil et la lune) ; le repos absolu assez proche de l’Orient –ou la Loge- éternel(le)., l’idéal du Moi, ou la légende personnelle ; les paradis perdus et l’ordre dans l’univers (La vision du monde), relatée dans la devise Ordo ab chao. (Voir article « méthodes, plénitudes, croyances ».) Voir Canaux, plénitudes, croyances

Prise de conscience, trames et scénarios.

Donc prise de conscience des émotions plus profondes associée à des comportements mis en scénarios. Les trames montent éventuellement à la conscience, uniquement par les sensations et l’affect, sans qu’il soit nécessaire de les identifier, les nommer comme on le fait dans les TCC, la psychanalyse…Demeurer au niveau de l’émotionnel traduit dans les scénarios. : ressentir et dire ce que l’on ressent, sans essayer de rationaliser. La rationalisation est le principal ennemi qui a envahi la conscience (le chapeau et le parapluie, avec Freud) Ce qui aurait pour effet de « geler » l’émotionnel… La Voie, avec une « spiritualité pour agir », débusque les bonnes raisons pour faire place aux vraies raisons : je déclare en tenue qu’il est insupportable que des enfants meurent de faim et je me trouve de bonnes raisons pour ne rien faire : c’est une goutte d’eau, cela ne sert à rien c’est le système capitaliste…

Ne pas dévoiler nos mystères

 C’est tout à fait ce que les Anciens appelaient, avec une grande justesse, nos « mystères ». Le travail maçonnique pourrait bien être « prends conscience de tes émotions, sensations…et ne te raconte pas d’histoires » car le rituel, particulièrement aux passages, amène à éprouver des sensations, émotions dans les scénarios rituels proposés. Il faut donc, à la fois, respecter le rituel pour les sensations-émotions qu’il procure et, en même temps le considérer comme un jeu, voire avec humour. C’est un des paradoxes de fond.

Qu’est-ce qu’un mystère (religieux, maçonnique) ? Un arcane dont on perçoit confusément les sensations-émotions que des scénarios et les trames qui leur servent de terreau génèrent. Et que l’on partage muettement avec les autres. L’initié-silence fait barrage, sur le mode : « tais-toi, ne cherche pas les mots, car la Parole est perdue et il ne s’agit surtout pas de la retrouver » … Or Freud nous amène à nommer le nom, les mots pour le dire. Alors le mystère est désacralisé. La réalité psychique est dépouillée de ses sensations-émotions. Point n’est besoin de constater, de lever l’écran des sensations-émotions. Parce qu’alors, je me prive d’une double jouissance fascinante, celle du

1) sacré

2)vécu ensemble (initié(e)-

La lucidité sur les émotions générées par les scénarios, mis en évidence dans le rituel et que je fais miennes à force de répétition du rituel, est requise. Puisque la conscience des bien-être est source de bonheur. La lucidité (des trames et des empreintes) peut tuer le sacré qui navigue dans l’émotionnel, par sa fascination, le désiré et l’interdit.

 Le sacré doit le rester

Le secret des mystères est bien celui que je suppose dans mon ouvrage Hiram et Freud. Je ne te le conseille pas parce que la dénonciation des tabous apporte le désenchantement ce qui fait l’atmosphère exceptionnelle d’une tenue réussie. La levée des tabous est dangereuse. « La lucidité est froide, les mystères sont chauds…le bonheur c’est chaleureux ». Il n’est même pas sûr que la lucidité entraîne une meilleure maîtrise de soi en tendue comme capacité à changer les trames, voire même les scénarios. Irais-je jusqu’à dire que parfois la lucidité est un boulet ; Ne déclenche-t-elle pas, selon les cas, le découragement plutôt que la toute-puissance, la culpabilité plutôt que la réparation, la sécheresse du constat plutôt que l’amour ?

            Le sacré est indicible ; il cache ce que l’on ne doit ni ne peut dire. Le sacré est lié au secret que l’initié-silence impose à celui qui s’auto-observe. Ce secret, c’est celui des trames sous-jacentes : l’inceste, l’homosexualité, l’homicide. Quel est le lien causal entre les trames et les personnages ? Les personnages laissent à chacun la possibilité de jouer son ou ses scénarios. C’est fondamentalement la liberté de conscience

En-haut, ce serait surtout les plaisirs extrêmes : la sécurité totale, la toute-puissance, le narcissisme, les soins accordés, la loi protectrice ; et en bas, les peurs terribles soi- l’agressivité, la culpabilité, l’angoisse, la dépression, l’ennui… Pour autant les plaisirs extrêmes s’ils sont trop accentués risquent l’addiction et par là, l’enfermement ; c’est leur aspect négatif du « trop » tandis que les peurs terribles, qui ont un aspect positif, peuvent si elles sont dépouillées de cet aspect (la restriction), rendre malade, les névroses. C’est le trop peu. Au milieu, c’est bien la fraternité, qui est facilement conscientisée et qui joue sur les deux registres : je l’aime et je le hais. Le chemin de l’Amour, omniprésent dans le voyage maçonnique croise le chemin de l’Œuvre. Soit les deux mythes recteurs de la fratrie bienheureuse- frérocité et des constructions-démolitions du temple. Ils sont l’expression de la spiritualité et de l’agir dans la devise « Une spiritualité pour agir ». La fraternité, elle, qui est la fondation de l’émergence des gratitudes envers autrui est le passage obligé pour aller plus haut. Les chercheurs ont bien mis cela en évidence De fait, nous pouvons tous améliorer l’égrégore de notre Loge, en cultivant avec désirs et applications, ces gratitudes. Essentielles dans la Voie maçonnique. Elles feront l’objet d’un autre article car, elles, sont à la portée de tout initié éveillé. Les gratitudes vont au-delà des théories du rituel, mâchonnées à chaque tenue, dans l’éveil morne de l’attention fugace…

En trois mots, pour moi, nous restons, pour la grande majorité des initiés, dans les méandres d’un Moi exploré à la va-vite. Au grand mieux dans la catharsis et la réalisation du Moi. Là quand enfin les plénitudes, chuchotent dans le silence bruyant des esprits avec les gratitudes comme de l’avancée spirituelle. Mais les maçons montent rarement dans le monde spirituel délétère ; en termes psychologiques, dans l’intégration du Soi. Il n’est pas sûr que la Voie y mène un jour. À cause du coude vers l’agir, dans la devise fondamentale de l’Ordre : « Une spiritualité pour agir ». Dans le grand projet partagé de la levée sagace des joies humaines.

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Jacques Fontaine
Jacques Fontaine
Jacques Fontaine est né au Grand Orient de France en 1969.Il se consacre à diffuser, par ses conférences, par un séminaire, l’Atelier des Trois Maillets et par une trentaine d’ouvrages, une Franc-maçonnerie de style français qui devient de plus en plus, chaque jour, « une spiritualité pour agir ». Il s’appuie sur les récentes découvertes en psychologie pour caractériser la voie maçonnique et pour proposer les moyens concrets de sa mise en œuvre. Son message : "Salut à toi ! Tu pourrais bien prendre du plaisir à lire ces Cahiers maçonniques. Et aussi connaître quelques surprises. Notre quête, notre engagement seraient donc un voyage ? Et nous, qui portons le sac à dos, des bagagistes ? Mais il faut des bagagistes pour porter le trésor. Quel est-il ? Ici, je t’engage à aller plus loin, vers cette fabuleuse richesse. J’ai cette audace et cette admiration car je suis un ancien maintenant. Je me présente : c’est en 1969 que je fus initié dans la loge La Bonne Foi, à Saint Germain en Laye, au Rite Français. Je travaille aussi au Rite Opératif de Salomon. J’ai beaucoup voyagé et peu à peu me suis forgé une conviction : nous, Maçons latins, sommes en train d’accoucher d’une Voie maçonnique superbe : une spiritualité pour agir. Annoncée dès le début du XXème siècle. Elle est en train de se déployer et nous en sommes les acteurs plus ou moins conscients mais riches de loyauté.

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