lun 29 avril 2024 - 14:04

II – Symbolisons-nous toutes les couleurs en Franc-maçonnerie ?

Les couleurs visibles à l’œil, ou représentées en esprit, peuvent avoir un effet sur le spirituel, quoique les couleurs elles-mêmes soient physiques. Noir, rouge et blanc, retenues en Franc-maçonnerie dans les trois premiers degrés, sont l’exemple même d’une attention portée à la coloration comme faisant sens. Déjà les initiés du culte de Mithra se vêtaient de couleurs différentes pour indiquer leur degré d’initiation 

En Franc-maçonnerie, on aurait tendance à ne retenir que le noir et le blanc.

Bien sûr le pavé mosaïque en est le symbole le plus visible. Cette apparente opposition apparaît également avec la  houppe dentelée, souvent symbolisée par une bordure de petits triangles alternativement noir et blanc qui entourent le tapis de Loge. On peut interpréter cette juxtaposition à la fois comme l’opposition entre lumière et ténèbres et comme leur réintégration dans l’unité de leur alternance, comme la dyade métaphysique du yin et du yang (voir l’article Ladyboy ou l’androgynie ?).

La vêture en noir et blanc, que certaines Loges exigent, correspondrait davantage à une tenue correcte, obéissant à des impératifs d’humilité et de respect que l’on doit à soi-même et surtout aux autres. « Les Maçons ne doivent jamais se présenter en loge que vêtus convenablement, et s’y comporter avec la plus rigoureuse décence[1]. » Ainsi, certains ateliers choisissent une tenue sombre qui est un bon moyen pour se confondre dans l’égalité. Le dress code relève plus d’une pratique d’obédience – voire d’atelier – que de rituel mais, toujours, révèle leur identité collective en tant qu’êtres de la Loge..

Les couleurs de Yakin et de Bo’az, le rouge et le blanc, participent également du principe spirituel de dualité.

Les deux colonnes de bronze sont, dans nos temples, coloriées. Par tradition, Jakin, mâle en rouge et Bo’az, féminine, en blanc (ou inversement selon le Rite), bien que le texte biblique soit précis sur ce point : il n’y a pas d’autre couleur que celle du métal coulé !

Alors d’où viendrait ce choix ?

Le temple maçonnique aurait-il retenu pour ses colonnes les couleurs de leur correspondance avec les piliers de l’Arbre des séphiroth, le rouge et le blanc ?

Sur l’arbre des séphiroth, Jakin est le symbole de la sagesse (Hokhmah), la seconde séphira, et Boaz, celui de l’intelligence (Binah). Le Zohar assigne une couleur spécifique à chacune des Séphiroth : le blanc à Hokhmah ; le rouge à Binah[2] ; le vert à Tiphereth et le noir à Malkhuth. Ce système de couleur est mis en parallèle avec celui des 4 Mondes qui se voient également attribués une couleur ; en particulier, le monde d’Atziluth est associé au blanc,  le monde de Briah au rouge ; toutefois, ces attributions varient selon les kabbalistes et les systèmes. Traitant du “Grand Visage” et du “Petit Visage”, les symboles du Macrocosme et du Microcosme, le Zohar parle du Feu Blanc caché irradiant de ceux-ci, nuit et jour, et qui cependant n’est jamais vu. L’organisme ardent de la Thora qui brûlait en feu noir sur feu blanc devant D. est à comprendre ainsi : le feu blanc est la Thora dans laquelle la forme des lettres n’est pas encore visible, mais qui ne reçoit cette forme des consonnes ou des points-voyelles que grâce à la puissance du feu noir, qui est la Thora écrite.      

Comme leur nom dans l’Arbre des séphiroth, dans certains rituels anglo-saxons, on retrouve les colonnes sous les noms de mishpat (la Loi, celle des tables éponymes)  et de tsédeq (la Justice, l’équité en son application). Les deux colonnes B\ et J\ sont, avant tout, le rappel de deux des trois fonctions cosmologiques : royale (mishpat) et sacerdotale (tsedeq), la troisième étant la prophétique (shalom) ; royale pour Boaz (aïeul de David et de Salomon), sacerdotale pour Jakin (prêtre assistant lors de la consécration du Temple). Connaissant les deux colonnes, le cadre juridique et normatif est ainsi largement dépassé par le compagnon au profit de notions plus englobantes, faisant intervenir la dimension éthique. En ces sens, Jakin et Bo’az pourraient naturellement être entendues comme rigueur et miséricorde, Le jugement rouge et la miséricorde blanche, car le blanc et l’argent sont les couleurs traditionnellement associées à la gentillesse, le rouge et l’or associés au jugement.

Une remarque : en alchimie Yakin, parce que c’est l’énergie créatrice masculine, la force expansive qui part du centre de tout être, le souffre qui représente le Coagula, le Fixe, c’est-à-dire l’état condensé et corpusculaire de la matière, sa couleur est le rouge. Cependant, Bo’az, quant à elle, c’est la réceptivité féminine, c’est l’énergie qui venant de l’extérieur pénètre toute chose : c’est le mercure, la « mère cure », le Solve, le Volatil, c’est-à-dire l’aspect vibratoire et ondulatoire de la matière, sa couleur est le bleu.

Les couleurs des décors (tabliers et cordons)

Le blanc s’impose d’abord pour le tablier

RÉR, Le Vénérable revêt l’Apprenti du tablier de peau blanche, en lui disant : sa blancheur vous indique la pureté qui est le but de nos travaux, et que nous cherchons à recouvrer ; l’on ne peut y parvenir que par la droiture du cœur et l’innocence des mœurs, ne paraissez donc jamais en Loge sans être décoré de ce tablier blanc.

On retrouve ce thème dans le catéchisme de la divulgation Le sceau rompu : «La lumière est le premier vêtement de l’âme, l’habit qu’on vous a donné n’en est que la figure et sa blancheur en désigne la pureté.»

La Grande Loge du Massachusetts a adopté une loi qui impose que « le tablier d’un Maître maçon sera une simple peau d’agneau blanc, de quatorze pouces de large par douze pouces de profondeur »[3].

Le 27 juin 1726, la Grande Loge d’Angleterre avait ordonné que les maîtres de Loge et les surveillants porteraient les bijoux de la maçonnerie pendus à un ruban blanc passé autour du cou : les maîtres l’équerre, les surveillants le niveau et le fil à plomb. Le 17 mars 1731 ces bijoux devaient être en or ou dorés et le ruban bleu. Cette décision ne fut pas toujours respectée, en 1739 la Loge Antiquity conservait le «cordon vert selon les anciennes coutumes». Pour d’autres il était jaune, et le tablier blanc mais bordé de rouge. Le compas-bijou est signalé dans le Dunfries en 1710 et le frontispice des Constitutions d’Anderson 1723 montrent le Duc de Montagu, Grand Maître de la Grande Loge le passant au Duc de Wharton, son successeur. La couleur des pointes en cuivre du compas et celle du corps en acier détermineront que désormais le collier sera jaune et bleu, ce que le Trahi de 1745 confirme également. Il deviendra bleu par la suite et celui du maître des banquets continuera d’être rouge ainsi que son tablier.

La première vêture maçonnique spéculative est blanche, rubans compris. La couleur bleu ne vint qu’en 1731, soit une quinzaine d’années plus tard à une époque où la maçonnerie anglaise était à son apogée. Les Constitutions de la Grande Loge Unie d’Angleterre de 1815 définissent le format du tablier : pour l’apprenti une peau d’agneau de 35,6cm à 40,6cm de large pour 30,5cm à 35,6cm de haut, coupée à l’équerre et sans aucun ornement. Deux lanières blanches servant d’attaches se lient par un crochet en forme de serpent.

Dans la maçonnerie américaine, Albert G. Mackey dans son Encyclopaedia , au mot “apron”, précise que le tablier est le même pour les trois degrés de la maçonnerie bleue, il est fait de peau d’agneau et porte une étroite bordure de ruban bleu. En peau d’agneau, il indiquerait que celui qui le porte est la brebis égarée qui appelle le berger et doit devenir l’agneau de Dieu.

Puis la couleur apporte une distinction honorifique

À l’origine, simple pièce de peau d’agneau blanche bordée, pour les dignitaires, d’un galon de couleur, le tablier s’est progressivement enrichi, aux XVIIIe et XIXe siècles, de symboles peints ou brodés de fils d’or ou d’argent. L’évolution a également porté sur sa forme (rectangulaire, arrondie ou en écusson), ainsi que sur la matière employée (peau, soie, satin, tissu ou même papier).

Pour le compagnon des rites anglo-saxons, le même format que celui des Constitutions de la Grande Loge Unie d’Angleterre de 1815 avec 2 rosettes à fond bleu ciel, 2 lanières blanches terminées par des houppes d’argent. Pour le maitre, toujours le même format que précédemment (ce format est important !) mais avec une doublure bleu ciel, une bordure de 3,8cm de la même couleur et 1 rosette supplémentaire sur une bavette ou un rabat. La couleur bleue ciel des bords du tablier et des rosettes du tablier est le bleu Cambridge. Il est étroitement lié à la couleur du voile de la vierge Marie, lui-même dérivé de la couleur du bleu de la déesse Isis. Ce bleu est la couleur de la bienveillance universelle qui doit rappeler au franc-maçon cette vertu car, comme l’écrivait Albert C. Mackey dans son Encyclopédie de 1884 : «comme c’est la couleur de la voûte du ciel qui embrasse et couvre le monde entier, le bleu rappelle donc que, dans la poitrine de chaque frère, ces vertus devraient être tout aussi étendues» (au mot “blue”, à la page 299/2132).

Puisant dans le corpus maçonnique, les artisans et les brodeurs ont utilisé des éléments historiques, sociaux ou symboliques, différents selon les époques et les pays. En France, la fin du XVIIIe siècle voit le recours à la symbolique du Temple, le Directoire à celui de la vogue de l’égyptomanie (sphinx, pyramides,…), l’Empire à celui de l’apparition des abeilles ou de la ruche et la suite du XIXe à celui de la thématique de l’équerre et du compas. Dans les pays anglo-saxons, d’autres symboles ont été utilisés telles l’ancre, l’Arche, les vertus théologales (à partir de l’image 65)

Par ailleurs, la couleur du galon de bordure a changé au fur et à mesure de la création des rites maçonniques : d’un certain bleu pour le Rite Émulation (couleur de l’Ordre de la Jarretière) ; au Rite de Salomon, il est bleu profond ; bleu clair pour le Rite Français et Écossais Rectifié (couleur de l’Ordre du Saint-Esprit) ; rouge pour le Rite Écossais Ancien et Accepté qui, à partir de 1803, préfère la couleur de la Légion d’honneur à celui de l’Ordre du Saint-Esprit.

Le rouge couleur de feu pour ce rite est adopté par le décret du 15 décembre 1808, mais il ne fera son apparition dans les rituels qu’après la reprise en main des degrés symboliques par le Suprême Conseil de France en 1821.

Au xxe siècle, une harmonisation du tablier s’est imposée, avec des décors uniques, dont les seules variations portent sur la couleur du galon qui entoure le tablier, selon le rite, le degré (Apprenti, Compagnon, Maître), ou la fonction du frère qui le porte : Vénérable Maître, Grand Officier provincial ou national… Au grade de Maître, le tablier – en peau ou en satin – est bordé de bleu au Rite Émulation, au Rite Français, Rite Écossais Rectifié ; il est bordé de rouge au Rite Écossais Ancien et Accepté (celui de la Légion d’honneur) et de vert dans la Franc-Maçonnerie du bois.

Au RER, la bordure et la doublure des tabliers de Maître sont bleu pâle, les glands d’argent, montrant que le bleu du ciel commence à apparaître dans la blancheur, que l’innocence cède le pas à la connaissance et que l’obtention de degrés est marquée par plus de couleur et plus de beauté.

D’autres rites indiquent que la bordure doit être rouge, de même que les rosettes. Le tablier standard – tel qu’il a été défini en accord avec les autorités de la GLNF – est orné uniquement du tartan Royal Stuart[4].

Selon Roger Dachez, d’abord le bleu du Grand Maître est le bleu de l’ordre de la Jarretière, mais c’est alors un bleu clair, puis il devient  un bleu foncé quand l’Ordre de la Jarretière est modifié par le roi Hanovrien en 1740… et alors l’ancien bleu de la Jarretière – celui qui est clair – devient le bleu des loges symboliques. Pourtant les premiers textes maçonniques indiquent : «je vous décore de l’insigne du maçon, plus ancien et plus honorable que les Chevaliers de la jarretière» (Rituel Simon et Philippe)

Le blanc des gants

Dans le Rituel du marquis de Gages (p.56/72), on instruit le maître : «Je vous donne ces gants qui par leur blancheur dénotent la candeur des maîtres et que vous n’êtes du nombre de ceux qui ont trempé les mains dans le sang de l’innocent.» L’examen des gants et du tablier viendra renforcer cette idée de suspicion, de trahison des engagements et même de meurtre. C’est en souvenir de cela que les maçons portent des gants blancs malgré leur chagrin, afin de proclamer qu’ils sont innocents de la  mort du Maître Hiram.

Les gants blancs lissent l’identité commune des francs-maçons. Mettre des gants blancs, c’est glisser sa main dans un athanor qui alchimise l’homme en être fraternel et fait de lui un être de la Loge. Parce que ganté de blanc, le Franc-maçon n’est ni pouvoir ni violence mais fraternité; parce qu’il n’est pas fusion mais relation ; il se dégage d’une assemblée de francs-maçons une impression d’apaisement, de sérénité et d’unité.

Mon article du 27 décembre évoquera davantage le thème des gants portés ou pas en Franc-maçonnerie.

Les couleurs des étoiles

Si le blanc est d’usage le plus courant pour les bougies, il est à remarquer que des bougies de couleurs sont également utilisées. Par exemple au Rite Français Philosophique. Le Jaune, le Rouge et le Bleu sont représentées par les trois bougies disposées rituellement sur le chandelier du Vénérable Maître. La bougie jaune au Nord‐Est ; la rouge, au Sud‐Ouest ; la bleue, au Sud‐Est. Elles correspondent symboliquement aux trois moments qui marquaient la journée d’ouvrage du Maçon opératif d’autrefois ; le jaune au levant, le rouge au couchant et le bleu pour l’entière journée d’ouvrage comprise entre le levant et le couchant (se reporter à l’article Que les lumières soient en loge).

Les couleurs des chambres

Ces couleurs sont à apprécier au regard des consignes pour le décor des tenues surtout dans les Hauts Grades. Sans aborder ici leurs détails, on se reportera, par exemple, aux illustrations de l’ouvrage Manuscrit Complet des 33 D.rs du Rit Ecc∴ Ancet∴ Ac∴, écrit anonyme, non daté, certainement du début de la IIIe République.

Les couleurs dans le catéchisme du Rite forestier des charbonniers

En 1803, le Recueil précieux de la Charbonnerie des premiers tems … (p. 32) évoque les couleurs des rubans des bons cousins. «Qu’est-ce que l’habillement qu’on vous a donné ? Réponse – Il est commun à tous les fr. B. C. [frères bons cousins] ; c’est la livrée de l’Ordre qui est composée de trois rubans, longs chacun de trois piés neuf pouces (à peu près une aune). Les couleurs particulières les distinguent : l’un est bleu de ciel [on trouve aussi blanc dans les sources du Rite], l’autre pouceau ou rouge couleur de feu et le troisième noir («le bleu du ciel désigne la fumée d’un fourneau à charbon. Il est le symbole du brouillard épais qui m’a caché les mystères de notre Ordre jusqu’au moment de la réception. Le rouge pouceau désigne le feu du fourneau; il est le symbole du désir ardent que j’avais de me faire recevoir dans la société des francs Charb. Le noir désigne le charbon. Il est le symbole des ténèbres où j’étais sur tout ce qui concerne la Charbonnerie avant d’être admis dans l’Ordre).» Dans le Catéchisme des bons cousins charbonniers de Naples, on trouve une autre explication : Q – De quelles couleurs sont ces rubans ? R – Bleu, Rouge et Noir. Q – Que signifie le bleu ? R – Le feu du Fourneau. Q – Que signifie le rouge ? R – La flamme du fourneau. Q – Que signifie le Noir ? R – Le charbon du fourneau. Q – Quelle est la signification mystique de chacune de ces couleurs ? R – Le bleu signifie l’Espérance, le Rouge la Charité et le noir la Foi.

On appelle Maçonnerie Bleue  la Franc-maçonnerie des trois premiers grades.

On dit aussi les Loges Bleues ou les Loges Symboliques. Les anglo-saxons utilisent surtout les expressions «Craft degrees» et «Craft lodges», c’est-à-dire «les loges et les grades du métier», les Américains ont souvent adopté l’expression «Blue Lodges». L’expression «Maçonnerie bleue» reste essentiellement française.

L’écosse, dont la couleur nationale est le bleu, aurait-elle inspiré l’expression «loge bleue», d’autant qu’elle serait à l’origine de la Franc-maçonnerie spéculative ?

Roger Dachez fait observer que les deux nuances de bleu utilisées sont celles des couleurs emblématiques des deux Universités les plus prestigieuses du pays : l’Oxford-blue – qui est foncé – et le Cambridge-blue qui est clair. Il est certain que vers 1730-1750, il y avait dans les loges anglaises une foule d’universitaires et de savants de renom, tous issus des ce deux Vénérables institutions et très attachés à leurs traditions. Il n’exclut pas l’hypothèse que dans l’Exode 28,31 on décrit le vêtement du Grand Prêtre du Temple de Jérusalem, la robe de l’éphod, qui est «tout entière de bleu profond». Il n’est pas exclu que l’on ait voulu, avec le bleu comparable des décors maçonniques, évoquer la vocation sacerdotale de la maçonnerie. 

Outre dans les trois degrés de l’ancienne Maçonnerie, cette teinture se trouve aussi à plusieurs autres degrés, notamment au Rite écossais où il porte divers symboles : les significations, cependant, sont toutes plus ou moins liées à un caractère original, évoquant amitié universelle et bienveillance.

Pour indication, au REAA, les degrés de 4 à 18 sont dits rouges, de 19 à 30 noirs et de 31 à 33 blancs.

Quelques mots sur les Couleurs compagnonniques.

Les couleurs sont avec la canne les emblèmes du compagnonnage. Ces couleurs ne sont pas dans le sens commun des couleurs, ce sont des rubans aux formes, tailles et couleurs particulières où sont frappés rite, métier, grade et fonction du compagnon ; elles varient selon les sociétés compagnonniques. Elles sont portées chaque jour sur le chantier par le nouveau reçu durant trois mois, puis encore trois autres mois les dimanches et fêtes.

Aujourd’hui, chaque type de métier correspond à une couleur et il y en a cinq. Rouge métiers des métaux, bleu pour les métiers du bois. Et blanc métiers de la Pierre. Elles ont été portées au chapeau, au cou, aux boutonnières, à la ceinture. Chez les anciens dans la corporation du Devoir (Enfants de Maître Jacques) on portait de 3 à 7 couleurs : blanche, bleue, rouge, verte, noire, jaune-orange, violette. Le port des Couleurs et la longueur de la canne du compagnon donnent lieu à d’incessantes contestations provoquant de nombreuses rixes. Ainsi, les forgerons avaient reçu les charrons mais à la condition qu’ils portassent les couleurs à une boutonnière plus basse ; les charrons avaient accepté mais n’avaient pas tenu promesse, portant les couleurs aussi haut que les forgerons. Il en a été de même pour les tanneurs qui voulurent arborer leurs couleurs au chapeau comme les charpentiers… Ceci suffisait à provoquer inimitiés et querelles interminables.

Il y a des couleurs de ville, de corporation, de deuil. «Que l’on m’apporte à l’instant mes couleurs. Je veux les voir avant de rendre l’âme. Chers Compagnons placez les sur mon cœur afin qu’elles me  servent d’oriflamme», (E. Colomb). L’écharpe, c’est-à-dire de la «couleur» en velours que l’Aspirant reçoit lors de son «adoption» est ensuite, à la seule Association ouvrière des Compagnons du Devoir, frappée à chaud de symboles complémentaires.

Dans son livre  le Compagnonnage, son histoire, ses coutumes, ses règlements et ses rites (p.260 : <archive.org/details/lecompagnonnages00martuoft/page/260/ >),  Martin Saint-Léon explique les cinq couleurs associées au Maître Jacques, le chef des compagnons Tailleurs de pierre  : «Que signifie la blanche ? – Les larmes que Maître Jacques a versées pour nous. – Que signifie la rouge ? – Le sang qu’il a versé pour nous. – Que signifie la bleu ? – Les coups qu’il a reçus pour nous. – Que signifie la jaune ? – La Persévérance. Que signifie la verte ? L’Espérance.»


[1]. Jacques-Étienne Marconis de Nègre, Le Rameau d’Or d’Éleusis, 1863.

[2] Sur le symbolisme de la couleur, nous retenons : Le blanc est la substance de Hokhmah, qui est Miséricorde. Par contre, au sujet de Binah, sa substance est rouge qui est Rigueur.

En fait, les couleurs retenues pour les séphiroth sont : Kether (Couronne) – blanc invisible ; Hokhmah (Sagesse) – une couleur qui inclut toutes couleurs; Binah (Compréhension) – jaune et vert; Hessed (Bonté) – blanc et argent ; Guebourah (Force) – rouge et or ; Tifereth (Beauté) – jaune et violette ; Netzach (Victoire) – rose clair; Hod (Splendeur) – rose sombre; Yessod (Fondation) – orange ; Malkhut (Royaume) – Bleu.

[3].On pourra compléter l’histoire du tablier sur : <pmbordeaux.over-blog.com/2015/02/le-tablier-et-son-symbolisme.html>.

[4]. Tissu écossais de couleur rouge, bleu, blanc et jaune, dominé par le rouge.

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Solange Sudarskis
Solange Sudarskis
Maître de conférences honoraire, chevalier des Palmes académiques. Initiée au Droit Humain en 1977. Auteur de plusieurs livres maçonniques dont le "Dictionnaire vagabond de la pensée maçonnique", prix littéraire de l'Institut Maçonnique de France 2017, catégorie « Essais et Symbolisme ».

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